0213 Une soirée très riche en émotions (partie 2).
Récit érotique écrit par Fab75du31 [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 18-09-2019 dans la catégorie Entre-nous, les hommes
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0213 Une soirée très riche en émotions (partie 2).
Ce récit et ses dialogues sont de la pure fiction. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé, ou avec des faits réels, est à considérer comme purement fortuite.
« Allez, assez déconné ! » fait Daniel « il est temps de passer aux choses sérieuses… ».
Et là, ni un ni deux, le bonhomme attrape la guitare appuyée au mur derrière lui et commence à gratter sur ses cordes. Lola s’active aussi, elle sort de son sac plusieurs classeurs avec de dizaines de textes de chansons.
Daniel continue à gratter sur la guitare en alignant des notes au hasard. Puis, soudain, les accords s’accordent pour dessiner une mélodie, sur laquelle notre musicien aux cheveux d’argent va poser les couplets bien connus :
Je m'baladais sur l'avenue le cœur ouvert à l'inconnu…
« Allez, vous êtes prêts ? Vous suivez ? Are you ready ? » il nous nargue, alors que nous cherchons toujours le texte dans les épais cahiers.
Je m'baladais sur l'avenue le cœur ouvert à l'inconnu…J'avais envie de dire bonjour à n'importe quiN'importe qui et ce fut toi, je t'ai dit n'importe quoiIl suffisait de te parler, pour t'apprivoiser
La voix puissante de Daniel et la vibration sonore de la guitare m’enveloppent, la musique prend vie. Nous chantons ensemble, sans nous préoccuper de chanter juste. C’est la première fois que je vois et j’entends jouer de la guitare de si près. C’est la première fois que je vis un moment de partage aussi incroyable. Et j’en ai des frissons.
Les couplets défilent, ponctués parfois par des mots drôles, des regards marrants, des attitudes hilarantes de notre joyeux luron musicien dont la spécialité est d’apporter de la légèreté et de la bonne humeur.
Les chansons s’enchaînent, « Le sud », « Siffler sur la colline », « Le petit âne gris », « Stewball », « L’été indien », « Santiago », « La montagne », « Mon amant de Saint Jean », « La complainte de la butte ». Des grands classiques de la chanson française, entrecoupés par la répétition régulière d’un « tube maison » appelé « Il me faut du carburant ». Formule par laquelle, toujours en grattant sur sa guitare, Daniel réclame à boire régulièrement.
Le répertoire de notre musicien n’est pas composé de chansons d’aujourd’hui, et pas forcément des chansons les plus gaies qui soit. Mais ce sont toutes de belles chansons, des chansons des années ’70, des textes et des musiques empreints d’une double nostalgie. Il y a la nostalgie inscrite dans le texte par l’auteur. Et puis, il y a la nostalgie de Daniel, et de la plupart des cavaliers de l’ABCR, la nostalgie d’une époque, époque que ces chansons ont le pouvoir magique de faire ressurgir.
Après une énième pause à la bière, Daniel annonce « le dernier rappel avant le baisser de rideau… qui sera suivi d’une pipe et d’un bon dodo, hein, Minou ??? ».
« Tu peux toujours courir ! Ce soir si tu as des envies, c’est « libre-service sans assistance »… » balance Lola, du tac-au-tac.
J’adore l’humour abrasif de ce couple hétérogène par l’âge (Lola doit avoir tout juste la quarantaine, alors que Daniel me semble avoir la soixantaine révolue) et pourtant soudés et complices comme peu d’autres couples. Daniel est un joyeux luron. Lola a du répondant et de l’humour. Ensemble, ils forment presque un duo comique.
« Je vais branler la guitare, alors, Minou ».
« Branle ce que tu peux ».
« Je vais t’en jouer une pour te faire hérisser les poils… ».
« Allez, vas-y, fais hérisser les poils » fait-elle, l’air blasé.
« Une chanson qui parle de sexe ! ».
« Soudain, j’ai peur » elle se moque.
Et là, Daniel entonne les premiers couplets de celle que je considère l’une des plus belles chansons françaises de tous les temps :
Il venait d’avoir 18 ansIl était beau comme un enfantFort comme un homme…
Une chanson que j’ai entendue pour la première fois lorsque j’avais 14 ans, à la radio, une chanson que j’avais trouvée incroyablement culottée au fur et à mesure que les couplets étaient parvenus à mes oreilles pour la toute première fois.
Et aujourd’hui, l’entendre jouer, chanter, et de la chanter moi-même avec les autres cavaliers, me la fait redécouvrir et l’apprécier davantage encore. Ainsi, lorsque le dernier couplet résonne :
J’avais oublié simplementQue j’avais deux fois 18 ans…
j’ai envie de la rechanter dès le début.
« C’est vraiment une belle chanson » fait Charlène.
« Une chanson très vraie » relance Martine.
« C’est vrai, quelle femme de quarante ans n’a pas un jour eu envie de coucher avec un jeune qui lui ferait retrouver sa vingtaine ? » s’accorde Satine.
« Il paraît que cette chanson est autobiographique, il paraît que Dalida avait eu une aventure avec un jeune fan italien qui s’était pointé chez elle au culot un soir de Noël » raconte Carine.
« Eh, les nénettes, je vais vous calmer vite fait bien fait » fait Daniel « au cas où vous ne le saviez pas, cette chanson a été écrite par Pascal Sevran ».
« Et alors ? » fait Satine, interloquée.
« Et alors, Sevran aimait les mecs. Alors, ce n’est peut-être pas Dalida qui a couché avec le minet dont il est question dans cette chanson… ».
« Ah ! » fait-elle, surprise, alors que Martine et Charlène se moquent d’elle et que Nadine part dans l’un de ses fous rires incontrôlables.
« Il n’y a pas que les nanas qui ont envie de coucher avec des bogoss de 18 ans » fait Sylvain, le regard rivé sur Jérém. Celui-là commence vraiment à m’énerver.
« Les homos ne se reproduisent pas, et pourtant, ils sont de plus en plus nombreux ! » fait Daniel en citant une réplique de Coluche.
« Vous avez entendu que depuis quelques mois le mariage entre personnes du même sexe a été voté au Pays Bas ? » lance JP.
« Je pense que c’est une bonne chose » fait Charlène « je ne vois pas pourquoi deux mecs ou deux nanas ne pourraient pas s’unir civilement, et même adopter un gosse ».
« Vous en pensez quoi, vous, les garçons ? » lance Martine à l’attention de Loïc et Sylvain.
« Moi je voudrais que ça arrive chez nous » réagit Loïc « je voudrais pouvoir me marier comme tout le monde. Je voudrais pouvoir adopter un enfant comme tout le monde. J’en ai marre de me sentir un citoyen de seconde catégorie ».
« Nous ne pouvons même pas donner notre sang à cause du fait qu’on est gay ! Même si on est en couple ! ».
« Je pense qu’en France le mariage n’est pas près d’arriver. Les mentalités ont encore besoin de beaucoup évoluer » fait Carine.
« Dans 10-12 ans, peut-être » fait JP, le visionnaire.
« Quand tu penses qu’il y a tous les jours des mecs qui se font tabasser juste parce qu’ils sont gays » s’indigne Nadine.
« Et qu’il y a des pays où les gays sont rejetés par leurs familles, persécutés par la religion, par le pouvoir, où ils sont torturés, tués par la police » abonde Loïc.
« Ma mère avait un frère » raconte Ginette « apparemment, c’était quelqu’un de bien. Et puis, un jour, il est parti. Il a mis fin à ses jours.
Je n’étais qu’une gamine quand c’est arrivé. Par la suite, maman ne parlait jamais de son frère. Alors, un jour je lui ai demandé de me parler de lui, de me raconter quel genre de personne il était.
Elle m’a dit que c’était un garçon sensible et gentil, peut-être trop sensible et gentil. Elle m’a dit que c’était le seul de la famille sur lequel on pouvait toujours compter.
Alors, je lui ai demandé si elle savait pourquoi il avait fait ça.
Elle m’a dit qu’elle pensait qu’il ne supportait plus le regard que les gens portaient sur lui. Qu’il ne supportait plus les bruits, la honte, la solitude. Parce qu’il aimait les hommes. Il semblerait qu’à un moment cela soit devenu trop dur à porter pour lui.
C’était une autre époque. C’était très dur d’être gays dans les années ‘50. Heureusement, les temps ont changé. Enfin, un peu, mais pas encore assez ».
Le récit de Ginette, venant du fond du cœur, son regard ému, m’ont profondément touché.
« Moi je n’arrive pas à comprendre pourquoi il y a tant de haine, de mépris et de violence autour des gays » fait Charlène et posant un regard bienveillant sur Jérém « vraiment, je ne vois pas en quoi le fait que deux mecs s’aiment puisse déranger qui que ce soit. Il y a bien d’autres choses autrement plus dérangeantes que cela, il y a bien d’autres raisons de s’indigner… ».
« C’est vrai » abonde JP « chaque jour on assiste sans ciller à des guerres, des famines, à la pauvreté, à l’injustice sociale, à la corruption, au pillage de la planète, à des catastrophes naturelles et écologiques. Mais deux gars qui s’aiment, ça choque. Franchement, qu’est-ce qu’on en a à foutre de ce que les gens font dans leur lit et avec qui ! La liberté ne s’arrête que lorsqu’elle entrave celle d’autrui. Et les gays n’entravent en rien les libertés des hétéros, alors que certains hétéros, et ils sont nombreux à le faire, ne serait-ce que par le mépris, essayent trop souvent d’entraver les libertés des gays ! ».
« C’est pour ça qu’il y encore tant de gays qui n’osent pas sortir du placard » fait Loïc en me regardant droit dans les yeux.
Mais il cherche quoi, lui aussi ?
« Le pire c’est que lorsqu’on regarde l’histoire, ça ne fait pas longtemps que l’homosexualité est devenue un « problème », qu’elle attire tant de haine » relance JP l’érudit.
« C'est-à-dire ? » l’interroge Satine.
« Dans bon nombre de sociétés anciennes, l’homosexualité ne posait pas de problème ».
« On dit bien « va te faire voir chez les grecs » ! » plaisante Daniel.
« La distinction entre homo et hétéro était inconnue dans le monde antique. En Grèce, les mecs étaient spontanément bisexuels. D’ailleurs, même les dieux donnaient l’exemple : Zeus, le dieu des dieux himself, trompait sa femme Héra aussi bien avec des nénettes qu’avec des éphèbes.
A Rome c’était un peu pareil, d’ailleurs Jules César était surnommé « le mari de toutes les femmes et la femme de tous les maris ». A Rome les pratiques sexuelles devaient correspondre à certains usages sociaux. Il était considéré normal qu’un jeune se donne à un aîné, mais pas l’inverse. Pour un esclave, satisfaire les besoins de son maître était une obligation. Chez l’affranchi, c’était un service qu’il devait à vie à son ancien maître ».
« Pour les Iroquoiens, les indiens du Canada, il existait non pas deux, mais cinq sexes, ou cinq sexualités différentes : les hommes, les femmes, les hommes qui se sentent femmes, les femmes qui se sentent hommes et ceux qui se sentent hommes et femmes à la fois. Et il était considéré que chacun des cinq sexes avait son rôle à jouer dans la communauté. Pour ces peuples, le fait d’être « moitié homme, moitié femme », permettait une meilleure compréhension de la dimension sacrée du monde. Ainsi, les gays occupaient souvent la fonction de chaman ».
« Alors ils étaient bien acceptés » considère Satine.
« Oui, mais avec quelques réserves quand-même. Si d’un côté on leur reconnaissait des qualités, de l’autre on sommait les hommes de se méfier d’eux. On pensait que s’ils les fréquentaient trop, les chasseurs risqueraient d’être séduits. A bon entendeur, salut !
Bref, tout ça pour dire que par le passé, et dans d’autres civilisations dites « moins évoluées », les homosexuels étaient bien mieux acceptés que dans nos sociétés occidentales. Quand on regarde d’un peu plus prês, l’homosexualité, et sa stigmatisation, ressemble à une invention récente. D’ailleurs, les trois grandes religions modernes, Judaïsme, Christianisme et Islam, qui n’ont cessé de se faire la guerre depuis des siècles, s’accordent sur la condamnation des rapports homosexuels ».
Jérém avait raison, JP est un véritable puit de science. JP est le genre d’homme qui t’apprend quelque chose d’intéressant à chaque fois qu’il l’ouvre. Oui, ce type est vraiment un type bien. Et sa simple présence, son regard, donnent direct l’envie, l’inspiration et l’énergie pour chercher à devenir quelqu’un de meilleur.
« L’Eglise catholique est aussi contre l’utilisation de la capote, ce qui est criminel à une époque marquée par le Sida » lance Loïc.
« L’Eglise propose de remplacer la capote par l’abstinence » fait JP, taquin.
« C’est aussi pour ça que l’Eglise a de moins en moins de fans » conclut Daniel.
JP se marre sous la moustache.
« Pour les religions, le seul but du sexe c’est la procréation. Et baiser sans but de procréation est un péché » précise Charlène« Quelle connerie » commente Nadine.
« L’homosexualité ne crée préjudice à personne et les homosexuels ne demandent rien de plus que d’être respectés en tant qu’êtres humains comme tous les autres » fait Charlène sous les regards approbateurs de Loïc et Sylvain.
Depuis plusieurs minutes, j’écoute attentivement les échanges entre les cavaliers au sujet de l’homosexualité et j’en suis profondément ému. Jamais de ma vie je me suis retrouvé dans un environnement aussi accueillant, aussi rassurant, aussi gay friendly. Vraiment, ça fait un bien de fou. Charlène avait raison, à l’ABCR, le fait que deux mecs s’aiment ne pose problème à personne. J’en ai les larmes aux yeux. Et si ça ne tenait qu’à moi, si ça ne concernait que moi, je crois que je ferais mon coming out sur le champ.
Définitivement, dans ce relais, au sein de cette petite « communauté », je découvre un autre monde, un monde tellement différent de celui du lycée, de ma famille, de ma ville, un monde à part. J’ai de plus en plus l’impression d’avoir enfin trouvé de vrais potes, même s’ils sont tous bien plus âgés que moi. Mais qu’importe l’âge au fond ? Car je suis conquis. C’est magique, et je suis heureux comme jamais.
Après cette parenthèse un plus grave, l’adorable Daniel nous joue et nous chante une chanson paillarde au vocabulaire bien salace pour remettre le rire au centre de la soirée.
A un moment, quelque chose me surprend. Jérém est en train de me faire du pied sous la table. Nos regards se croisent. Et dans le sien, je découvre une étincelle lubrique qui embrase illico mon désir. Car son regard de braise est une promesse de baise sauvage et torride. Notre complicité est géniale. Et putain, qu’est-ce qu’il est sexy dans son maillot Wilkinson !
Les cavaliers commencent à sortir de table et des petits groupes se forment à la cuisine (pour les fées et magiciens du logis) autour de la machine à café (pour les amateurs de boissons chaudes), et à proximité de la cheminée (pour les fumeurs).
Jérém est bien évidemment dans ce dernier groupe. Tout comme Sylvain. Sylvain qui, très vite, semble se familiariser et discuter de façon plutôt complice avec mon bobrun.
Et alors que je me retrouve coincé entre Martine et Ginette me questionnant sur mes études à venir, je trouve que Sylvain a une attitude qui ne me plaît pas du tout. Déjà, il a l’air trop intime avec mon bobrun, alors qu’il ne le connaît ni d’Eve, et surtout pas d’Adam.
Mais ce qui m’intrigue le plus, et qui me rend jaloux et inquiet, c’est le regard que Sylvain pose sur mon bobrun. Certes, son regard trahit avant tout l’ivresse de la boisson. Mais ce que je vois avant tout, c’est un regard aimanté.
A quoi joue-t-il mon Jérém ? Est-ce qu’il ne se rend pas compte que Sylvain le drague ?
J’ignore de quoi ils causent, car je suis trop loin pour tendre l’oreille, mais leur conversation a l’air amusante : mon bobrun lâche à plusieurs reprises son sourire incendiaire qui fait instantanément augmenter la température dans la pièce de plusieurs degrés. Quant à Sylvain, il semble complètement sous le charme. Il ne quitte pas Jérém des yeux, et un petit sourire niais, et hébété ne quitte pas son visage.
Ce qui m’inquiète le plus c’est que le sourire de Jérém est un sourire flatté, signe que Sylvain doit lui dire des choses qui touchent des cordes sensibles. Quelles cordes Sylvain est-il en train de faire vibrer chez mon bobrun ? Que cherche-t-il ?
Oui, leur conversation se prolonge beaucoup trop. Elle me perturbe un peu plus à chaque seconde. Au bout d’un petit moment, je me surprends à être carrément jaloux. Je me surprends à m’imaginer que Sylvain soit en train de dire à Jérém qu’il le trouve canon, qu’il soit en train de lui faire des propositions, ou du moins lui faire comprendre qu’il le kiffe et qu’il serait partant pour coucher avec lui. Certes, Sylvain n’est pas vraiment ce qu’on appelle un canon, et il a bien dix ans de plus que Jérém, et pourtant je ne peux m’empêcher de bouillir intérieurement.
Jusqu’à ce que ce mon bobrun me rassure par lui-même. Ainsi, alors que je ne cesse de le fixer, j’ai l’impression à un moment que sur son visage l’amusement laisse la place à une sorte d’agacement. Et lorsque je croise son regard, il lève les yeux au ciel, geste doublé d’un haussement de sourcils et d’une « mise en chapeau » comme il sait si bien le faire. Le sien, c’est un regard complice, suivi d’un clin d’œil à me faire tomber à la renverse. J’ai l’impression que le bogoss cherche à me rassurer, à me dire qu’il n’en peut plus de se faire tenir la jambe, que ça le saoule.
Ça me rassure, mais en même temps ça me donne un aperçu grandeur nature des tentations qui l’attendent à Paris, dans des soirées, dans les troisièmes mi-temps, dans le métro, dans la rue, partout. Le regard complice de Jérém me rassure et m’inquiète à la fois.
Mais très vite, je vais réaliser que cette conversation qui se prolonge n’alarme pas que moi. Et alors que je réfléchis à toute vitesse pour trouver un prétexte et sortir mon bobrun de ce piège, quelqu’un d’autre s’en charge à ma place.
« Tu fiches quoi, là ? » fait Loïc, en haussant la voix, le ton agressif et accusateur.
« De quoi tu parles ? » lui retorque Sylvain sur un ton vexé.
Loïc aussi a bu. Et lui aussi il a vu ce que j’ai cru voir.
« Arrête de le draguer ou ça va mal finir ».
« Mais ta gueule ».
« Tu arrêtes ça tout de suite ».
« Sinon ? ».
Jérém a l’air amusé et on dirait qu’il compte les points. Soudain, le silence s’est fait autour de cette scène de ménage. Je crois que tout le monde compte les points.
« Sinon tu vas rentrer tout seul ! ».
« Chiche ! » fait Sylvain sur un ton très provocateur.
« T’arrêtes un peu de te donner en spectacle ? ».
« Je fais ce que je veux… ».
« Va te faire voir… ».
« Si vraiment tu insistes… ».
Loïc part alors en claquant la porte.
« Et bien, sympa cette petite impro… moi, je bois… santé ! » rigole Daniel en mettant fin au froid qui vient d’envahir la salle.
C’est à cet instant que Sylvain semble enfin réaliser ce qui vient de se produire. Il jette sa cigarette dans le feu, il pose lourdement son verre sur la table et il emboîte le pas à Loïc.
« J’aime pas assister à des scènes de ménage, ça me met toujours mal à l’aise » fait Charlène.
« Moi j’ai pas compris ce qui vient de se passer » fait Daniel, l’air perdu.
« Il vient de se passe que Loïc est jaloux » fait Satine.
« Jaloux ? Mais de qui, de quoi ? ».
« Il est jaloux parce que Sylvain a fait du gringue à Jérémie ».
« Il t’a dragué ? » fait Daniel.
« Je ne sais pas trop » bafouille Jérém.
« Oh, que oui » fait Satine, très sûre d’elle « c’est simple, quand il te regardait, il avait des étoiles dans les yeux ».
« Ah bon ? » fait Daniel, l’air (faussement) outré « il est culotté de s’attaquer à un mec comme Jérémie, un mec qui n’est pas de son bord ».
« Et aussi un mec qui ne joue pas vraiment dans sa catégorie. C’est vrai, Jérémie est un vrai bogoss » considère Satine.
Le bobrun sourit sous la moustache. Il aime vraiment qu’on le flatte.
« Il avait bu » fait JP.
« Oui, mais enfin, je comprends que Loïc soit jaloux » conclut Satine « et si c’était pour voir ça, c’était bien la peine de quitter Florian. Avec tous ses défauts, c’est un bon gars. On se demande ce que Loïc a dans la tête, parfois… ».
« On ne commande pas aux sentiments » fait Martine.
« Certes, mais enfin, c’est l’arroseur arrosé » persiste Satine « il a voulu se mettre avec un mec beaucoup plus jeune que lui, et maintenant c’est Sylvain qui s’intéresse aux mecs plus jeunes que lui ».
« Après » elle continue, sur une note plus légère « on ne peut pas lui reprocher d’être sensible au charme d’un gars comme Jérémie. Qui ne mate pas Jérémie ? ».
« Moi je ne le mate pas » se marre Daniel.
« Je parle des femmes et des gars qui sont sensibles à ça » fait elle en tâtant ses biceps « putain, ça c’est du bras de mec ! ».
« Pas touche ! » fait Martine en rigolant « il est bien trop jeune pour toi ! ».
« C’est ça mon malheur, avoir un corps de 50 piges et aimer les mecs de 20 ! »« En plus il doit déjà avoir une copine » fait Martine « ou plein de copines… ».
Jérém me lance un petit regard en biais, un regard amusé.
« Eh, Nico, raconte-nous, il avait combien de copines au lycée ? » me prend à parti Martine.
« Beaucoup, beaucoup de copines ! » je plaisante.
« Tu rends dingue tout le monde ! » lance Nadine.
« Mais je n’ai rien fait, moi » lâche mon bobrun, en mode parfait petit con, en simulant un air innocent et surpris, alors que son petit sourire est coquin et malicieux. Quant à son maillot, avec ses trois boutons désormais ouverts et qui laissent dépasser quelques petits poils et sa chaînette de mec, avec sa façon de souligner ses pecs et le V de son torse, avec les manchettes moulant ses biceps, est vraiment à hurler. Quelque part, je me dis que c’est tout simplement naturel qu’un mec aussi sexy attise les convoitises d’autres gays. Comment ça pourrait en être autrement ? J’ai vraiment du souci à me faire.
« Je t’ai vu faire » se moque Nadine « tu lui as balancé un sourire, t’as bandé un peu tes biceps. Et lui, il a bandé ailleurs… ».
« J’ai été victime de harcèlement » lance Jérém, l’air angélique.
« Ah, bah, si tu ne veux pas te faire harceler, t’as qu’à pas être si sexy ! » lâche Satine.
« Mais je n’ai rien fait, moi » il répète, d’un air coquin, en joignant à la parole un geste d’une sexytude inouïe, un geste faisant preuve de son goût prononcé pour le danger. Ce geste est celui d’attraper son maillot par le bas, de le soulever, en dévoilant au passage le bas-relief spectaculaire de ses abdos, tout un baissant la tête, comme s’il voulait s’essuyer le front.
Paf ! Une nouvelle claque.
Les sifflements féminins fusent dans la grande salle.
« Mais mate-moi un peu ces abdos ! » fait Nadine.
« J’ai les mêmes » plaisante Daniel.
« Tu avais les mêmes, à son âge, si on en croit les photos… » fait Lola.
« Moi, même à son âge, je n’avais pas les mêmes… » commente JP, réaliste.
Le maillot retombe vite sur cette vision de bonheur et de désir. J’ai envie de lui…« Allez, finie la récré, on va peut-être ranger un peu tout ce bordel ! » lance Martine.
Et pendant que Daniel recommence à jouer sur sa guitare et à débiter les couplets de Santiago, tous les autres cavaliers sans exception s’activent pour débarrasser la table, nettoyer, balayer.
Soudain, ça sent la fin de la soirée, ça sent le départ, la fin de ce moment heureux. Au fond de moi, je me sens triste. Comme au dernier jour des vacances. J’ai envie que cette soirée dure encore.
Hélas, en quelques minutes tout est rangé, et l’un après l’autre les cavaliers commencent à prendre congé. Des bises sont échangées lors d’aurevoirs prometteurs de joyeuses retrouvailles à cheval et/ou à table.
« Merci à vous tous, qui avez fait de cette soirée, une fois encore, un moment heureux » lance JP à la petite assemblée.
J’ai moi aussi envie de remercier tout le monde pour cette belle soirée, tellement riche en émotions ! Une envie que je n’ose pas assouvir.
« Alors, tu restes dans notre région combien de temps ? » me demande Ginette après m’avoir fait la double bise d’au revoir.
« Je ne sais pas encore, un jour ou deux ».
« Si vous avez le temps, passez prendre un café à la maison ».
« On essaiera de venir, oui » fait Jérém.
« Vous avez prévu quoi pour demain ? » demande Charlène.
« Rien de spécial » fait Jérém.
« Si ça vous dit, on se refait une petite balade, histoire de bien remettre Nico en selle et de lui donner quelques astuces supplémentaires ».
« Je ne sais pas trop »« On ne serait que tous les trois ».
« T’en dis quoi, Nico ? ».
« Moi ça me va » je lance, tout heureux de cette prolongation du bonheur ressenti pendant cette journée. Aussi, j’ai hâte de retrouver Charlène après la petite mise au point de la soirée, et j’ai hâte de voir comment Jérém a intégré son « sermon », hâte de voir comment il va se comporter avec elle, avec moi devant elle, hâte de savoir si Charlène va remettre ça sur la table, si elle va avoir envie d’en savoir un peu plus sur notre relation, de savoir comment son Jérémie est devenu « mon Jérém ».
« Ok, c’est bon ».
« Neuf heures chez moi ? ».
« Ok, s’il ne pleut pas ».
« Mais non, il va faire beau ! Venez même un peu plus tôt, on déjeunera ensemble ».
« On viendra vers huit heures et on te donnera un coup de main aux chevaux ».
« Ah, qu’il est bien ce petit ! ».
« Tu en doutais encore ? ».
« Non, parce que c’est moi qui t’ai bien dressé ».
« Vieille peau ! ».
« Petit con ! ».
Leur complicité retrouvée me fait vraiment chaud au cœur.
Nous faisons la bise de la bonne nuit à Satine, Marie-Line, Bernard et Carla qui sont les heureux squatteurs des niches en bois du relais.
Charlène, Martine, Jérém et moi redescendons vers la pension, éclairés par la lampe frontale « troisième œil » de Charlène elle-même. Pendant le court trajet, les échanges portent sur la soirée, sur le bonheur simple et pourtant intense de ce moment de partage et d’amitié. Nous aurons le temps demain de revenir sur les sujets brûlants. Du moins, je l’espère.
En arrivant à la voiture, Jérém sort les clefs de sa poche et les fait tomber par terre. Et alors qu’il se baisse, avec lenteur et hésitation, pour les ramasser, j’entends Charlène lui balancer :« Tu vas pas conduire, j’espère ? ».
« Et pourquoi pas ? ».
« Parce que t’as pas mal bu ».
« T’as compté mes verres ? ».
« Non, mais t’as pas l’air d’être en état de conduire ».
En effet, mon Jérém a l’air un tantinet éméché.
« C’est pas loin, t’inquiète ».
« Je m’inquiète si je veux ! Nico, tu conduis, ok ? ».
« Oui, je peux conduire ».
« Je vais conduire » insiste Jérém.
« Tu ne vas pas gagner » rigole Martine.
« Donne lui les clefs ! » insiste Charlène.
« Non ! ».
« Donne lui les clefs ou je te mets une fessée ! ».
« Ne lui donne pas les clefs… c’est moi qui vais lui mettre une fessée ! Je rêve de mettre une fessée sur ce cul d’enfer » fait Martine, morte de rire.
« Allez, prends les clef, sinon elle va nous faire un scandale » me lance Jérém, sur un ton faussement agacé, la voix un brin pâteuse, le regard un peu ahuri, témoin d’un début d’ivresse qui le rend à la fois touchant et sexy en diable.
« Mais tu fais attention à ma voiture, elle est presque neuve » il ajoute sur un ton d’autodérision.
« Elle est presque bonne pour la casse tu veux dire ! » lui balance Martine.
Un instant plus tard, nous échangeons avec Charlène et Martine les dernières bises de la soirée.
« Bonne nuit ! » lance cette dernière en démarrant sa voiture.
« A demain, les mecs ! » fait Charlène en prenant la direction de sa maison.
Elle n’a pas fait vingt pas que mon bobrun essaie à nouveau de n’en faire qu’à sa tête.
« Allez, file-moi les clefs ».
« Non, je conduis ».
« Tu connais pas la route ».
« Si. Laisse-moi faire, s’il te plaît ».
« Vous me fatiguez » fait-il, tout en prenant place côté passager.
J’ouvre la porte et je prends place côté conducteur. Je viens de claquer la porte, et immédiatement je réalise à quel point ça me fait bizarre de m’installer au volant de cette voiture, la 205 rouge de mon Jérém, cette voiture mythique dans laquelle je suis monté un certain nombre de fois, de retour de boîte, direction l’appartement de la rue de la Colombette.
Soudain, je repense à ce lieu, cet appart, cette adresse magique dans laquelle j’ai connu l’amour avec mon Jérém. Je réalise que je ne reverrai certainement plus jamais cet endroit. Est-ce qu’il a déjà été reloué ? Qui a pris la place de mon Jérém ?
Ce qui est certain, c’est que le nouveau locataire est loin d’imaginer ce qui s’est passé entre ces murs, le plaisir qu’on s’est donné, Jérém et moi, le nombre d’orgasmes qu’on s’est offerts. Il ignore qu’entre ces quatre murs j’ai été heureux, triste, jaloux, blessé, frustré, désespéré.
Oui, je réalise que je ne reverrai plus jamais cet appart. Et cette idée me remplit de désolation. Ce lieu, c’était L’adresse de Jérém. C’était le lieu où je pouvais espérer le retrouver. Son ancrage dans l’espace. Et c’était un ancrage que je pouvais atteindre en quelques minutes de marche à pied. Désormais, quel sera l’encrage de mon Jérém ? Où est-ce que je vais pourvoir le retrouver ? Combien d’heures de voiture, de train, d’avion, pour rejoindre mon bobrun ?
« Qu’est-ce qu’il y a, t’as pas trouvé la clef ? » fait Jérém, en me tirant de mes réflexions.
Jérém parle fort, et sa voix est raillée. Son haleine est clairement alcoolisée. Charlène a eu bien raison d’insister pour que je conduise à sa place.
« Si, si… ».
J’ai envie de conduire, et c’est mon devoir de le faire, car Jérém est vraiment éméché. Mais une partie de moi appréhende l’idée de conduire devant mon bobrun. Je viens d’avoir le permis, il l’a depuis plus d’un an. De plus, ce n’est pas ma voiture. J’ai peur de perdre mes moyens, de me mélanger les pinceaux, de conduire comme un pied. J’ai peur de ne pas être à la hauteur. Non pas que je cherche à l’impressionner, mais je n’ai pas envie non plus de passer pour un nul devant le mec que j’aime.
En m’installant dans le siège de Jérém, j’ai l’impression de me glisser dans sa peau, de voir le monde avec ses yeux. Je le regarde, enfoncé dans le siège côté passager, le regard dans le vide, et j’ai l’impression de ressentir ce qu’il ressentait lorsqu’il me prenait en voiture avec lui, lorsqu’il conduisait. Le simple fait d’être au poste de conduite donne de l’assurance, comme une illusion de « pouvoir ».
« Allez, on y va ou quoi ? Tu veux que je conduise ? » il me taquine.
« Non, c’est juste que ça me fait bizarre de me retrouver sur ce siège ».
« Allez, roule ! » il lâche, sans essayer de comprendre ma remarque.
Et je démarre enfin. Après un petit différend avec le levier de vitesse pour trouver la marche arrière qui n’est pas positionné de la même façon que sur ma voiture, je roule. Jérém descend la vitre à moitié, il allume une cigarette et s’enfonce un peu plus encore dans le siège.
Ah, putain, qu’est-ce qu’il est sexy dans son maillot Wilkinson et avec sa cigarette !
« Ça va ? » il me demande, après un petit moment de silence. Et là, je sens sa main gauche se poser doucement sur ma cuisse. Son pouce fait de petits va et vient appuyés, comme une petite caresse tendre et complice. J’ai envie de lui faire plein de câlins. J’ai envie de pleurer de bonheur.
« Oui, très bien, et toi ? » je finis par répondre.
« Oui » il lâche.
« C’était une super soirée ».
« C’est toujours des super soirées avec eux ».
Soudain, je repense à cette conversation sur l’homosexualité, à cette ouverture d’esprit dont tous les cavaliers ont fait preuve ce soir. Vraiment, j’étais loin d’imaginer que des gens aussi géniaux puissent exister. Ce soir, ces gens m’ont aidé à m’accepter un peu plus, à m’aimer un peu plus, ils m’ont convaincu un peu plus de la légitimité de mon orientation sexuelle. Ils m’ont donné envie de me battre pour ce que je suis. J’espère que ça en est de même pour Jérém. J’ai envie de mettre le sujet sur le tapis, mais je me dis que ce n’est pas le bon moment. Il y aura d’autres occasions.
Jérém est en pleine phase décuve-cigarette. Le silence s’installe. Je conduis lentement, il fume lentement. A un moment, je sens son regard insistant sur moi.
« Qu’est-ce qu’il y a ? » je finis par lui demander.
« C’est la première fois que tu conduis ma bagnole ».
« Merci de me faire confiance ».
« Le seul à qui je l’ai laissé conduire, c’est Thib. Avec lui, je me sentais en confiance ».
« Avec toi aussi je me sens en confiance » il ajoute, après avoir repris une taffe.
Ça fait du bien d’apprendre que Jérém m’accorde sa confiance très sélective. Comme à Thibault, le mec le plus rassurant que je connaisse. Voilà une belle marque de considération.
Une nouvelle fois je me sens bien dans son regard. Je commence à m’habituer à ce regard bienveillant, encourageant, valorisant.
« Merci, Jérém ».
Un instant plus tard, sa main quitte ma cuisse, elle se pose sur mon cou et entreprend de caresser le bas de ma nuque. Instantanément, un frisson géant se propage dans mon corps et a raison de ma concentration sur la conduite. Je suis troublé, et je mets un coup de frein aussi brusque qu’involontaire.
« Qu’est-ce qu’il y a ? ».
« Rien, c’est juste que quand tu me caresses là, ça me perturbe ».
« Ok, j’arrête ».
« Non… enfin… si… j’adore ça, mais je conduis, là ».
« Ok, ok ».
Oui, son haleine sent l’alcool. Mais Jérém n’a pas l’alcool mauvais, non, il a l’alcool câlin. Un instant plus tard, il pose le dos de sa main sur ma joue, il commence à la caresser tout doucement. Il fait des aller retour jusqu’à mon oreille, qu’il titille de façon répétée. Je frémis, j’ai envie de pleurer.
« Tu kiffes ça, hein ? ».
« Je ne peux même pas t’expliquer à quel point ! ».
Et alors que ses doigts continuent de caresser mon visage, je tourne ma tête d’un coup et je pose un bisou sur sa main.
Pour toute réponse, le bogoss s’approche d’un geste rapide et il pose un bisou tout doux dans mon cou.
« Merci » je l’entends chuchoter de façon tout juste perceptible.
« Merci de quoi ? ».
« Merci d’être là ».
« Je suis bien avec toi » je lâche, une vérité venant du profond de mon cœur.
« Je ne te mérite pas ».
« N’importe quoi. Pourquoi tu dis ça ? ».
« Je t’ai fait trop de mal ».
« C’est derrière nous tout ça ».
« Je ne veux plus te faire du mal ».
« Ça n’arrivera pas ».
« Dans quelques jours, on va être loin ».
« Je viendrai te voir à Paris ».
« Ça ne suffira pas ».
« On se verra à chaque fois qu’on pourra ».
« Ne m’oublie pas, Nico ».
A cet instant précis, j’ai l’impression que mon cœur vient de s’arrêter. Jérém ne m’a jamais dit « je t’aime ». Mais ce « Ne m’oublie pas, Nico » sonne dans ma tête comme une formulation alternative de ces trois petits mots que je rêve de lui entendre prononcer un jour.
Non, jamais je n’aurais imaginé entendre un jour une phrase comme celle-ci dans la bouche de Jérém. Alors lui aussi s’inquiète de l’avenir de notre amour. Alors, lui aussi a peur de me perdre. C’est touchant, adorable, émouvant. Parfois, l’alcool sait si bien faire les choses.
« Comment veux-tu que je t’oublie ? » j’ai à la fois envie et besoin de le rassurer « tu es le mec que j’aime, je ne pourrais jamais t’oublier ! ».
Son regard doux et perdu me fait fondre. J’ai envie de pleurer toutes les larmes de mon corps. Et je pleure en silence. Mais lorsque mon bobrun se penche vers moi, lorsqu’il pose un nouveau bisou dans le creux de mon cou, lorsqu’il pose sa tête sur mon épaule, je pleure pour de bon. J’ai envie de le couvrir de bisous et de câlins.
« Toi non plus, ne m’oublie pas » je lui retourne.
« Je ne t’oublierais pas ».
« Ça me fait plaisir de repartir en balade avec Charlène et toi, demain » j’ajoute, après un moment de silence..
« A moi aussi ça me fait plaisir ».
« Tu avais raison, cette nana est vraiment super ».
« Elle est un peu casse couilles, mais elle est top ».
« Elle l’a bien pris ».
« De quoi ? ».
« Pour nous ».
« Ouais ».
« Alors ça t’embête plus qu’elle nous ait vus ? ».
« Je ne sais pas… enfin, je ne crois pas. Charlène fait partie des quelques personnes que j’avais envie de mettre au jus. Elle a raison, si je t’ai présenté, c’est parce que j’avais envie qu’elle sache. Et si j’ai eu envie, c’est que je suis bien avec toi. Je regrette juste qu’elle l’ait appris en nous voyant, de ne pas avoir eu les couilles de lui dire direct ».
« C’est pas grave qu’elle l’ait appris comme ça. Parfois, il faut laisser faire les choses ».
« J’avais quand même peur de sa réaction, j’avais peur de la décevoir ».
« Ca n’a pas été le cas ».
« Non ».
« Et ce sont qui les autres personnes que tu voulais mettre au courant ? ».
« Maxime, mais c’est lui qui m’a tiré les vers du nez… et aussi Thib… ».
Soudain, j’ai l’impression de recevoir les réponses à bon nombre de questions.
« C’est pour ça que tu lui as proposé de faire un plan à trois ? ».
« Ça s’est présentée comme ça, c’était pas prévu. Tu étais là, il est passé à l’improviste. Alors je lui ai proposé de lui faire découvrir cette partie de ma vie que je lui avais cachée jusque-là… ».
« Tu sais pourquoi il était passé cette nuit-là ? ».
« Je pense que c’était à cause de ce qui avait failli se passer entre nous quelques jours plus tôt et du froid que ça avait mis entre nous ».
« Vous alliez failli coucher ensemble ? ».
« Je t’en ai déjà parlé… ».
« Oui, oui… Mais Thibault savait déjà pour nous. Un jour il m’a fait parler. Mais il savait bien avant ».
« Thibault est un gars génial, et il me connaît comme ses poches. Je me doutais qu’il savait, il m’avait tendu des perches, mais je n’avais pas osé les saisir. Si je n’osais pas, c’est aussi parce que je savais que Thibault ressentait des trucs pour moi. Je ne voulais pas lui faire de la peine. Et pourtant, j’avais envie qu’il sache. Alors, quand cette occasion s’est présentée, j’ai voulu lui montrer ce qu’il y avait entre nous deux, mais j’ai voulu aussi lui montrer que ce n’était que du sexe, parce qu’entre mecs, il n’y avait que la baise qui était possible ».
« Et en aucun cas des sentiments… ».
« Voilà, je voulais qu’il voit ça, qu’il le comprenne, et je voulais y croire aussi ».
« C’est pour ça que ce soir-là tu as été aussi brutal avec moi ? ».
« Oui, je suis désolé ».
Dans le noir, mon bobrun me fait plein de bisous sur la joue et dans le cou.
Je suis heureux. Même s’il n’est pas encore prêt à afficher notre amour au grand jour, j’ai à nouveau l’impression que, pierre après pierre, l’édifice magnifique de notre amour est en train de grandir.
Un nouveau silence s’installe.
« Alors, il t’a vraiment dragué, Sylvain, tout à l’heure ? » j’ai envie de savoir.
« Il a été relou ».
« Il t’a fait des propositions ? ».
« Non, mais il n’arrêtait pas de me causer ».
« Il te disait quoi ? ».
« Au début, il était marrant. Mais après, il a commencé à me saouler ».
« Allez, raconte ! ».
« Il voulait savoir si on était plus que potes ».
« Et tu lui as dit quoi ? ».
« Je suis resté vague ».
« Et c’est tout ? ».
« Après il a commencé à me dire que je montais super bien à cheval, que j’étais bomec, qu’il kiffait les mecs comme moi, musclés et sportifs. Et puis, rebelote, il a recommencé à me saouler avec des questions sur ma vie sexuelle. Il m’a dit que s’il avait eu un camarade de lycée comme moi, il se serait débrouillé pour coucher avec avant le bac. Je crevais d’envie de lui dire que c’est exactement ce qu’on avait fait toi et moi, mais je me suis dit que ça ne le regardait pas ».
« Bref, il t’a vraiment dragué… ».
« Oui ».
« Et ça t’a fait quoi ? ».
« Rien du tout, en plus je ne le kiffe pas du tout. Il a une tête de mec chiant, une voix de mec chiant, une dégaine de mec chiant. Bref, c’est un mec chiant ».
« Et si ça avait été un bogoss qui t’avait fait du rentre dedans ? ».
« Nico, t’as pas à t’inquiéter, c’est de toi que j’ai envie. J’avais tellement envie de toi ce soir… ».
« Ah bon ? ».
« Pas toi ? ».
« Non… moi j’avais juste envie de câlins… » je le balade.
« Ah bon… juste de câlins… ».
« Parfaitement ».
« Je ne te crois pas ! » fait-il, avec un petit rire coquin à craquer, un regard de petit voyou sexy en diable.
« C’est ça… ».
« Alors, comme ça, pendant la soirée tu avais juste envie de bisous… » il me relance, après un instant de silence.
« Oui… et quoi d’autre ? T’avais envie de quoi, toi ? » je le cherche.
« Moi j’avais envie de t’allonger sur la grande table en bois et de te prendre direct ! ».
« T’avais envie de me remplir ? ».
« Tu peux pas savoir ! ».
« Comme la fois sur le banc de massage au terrain de rugby ? ».
« Ah, putain, qu’est-ce que c’était bon ce soir-là ! ».
« C’est toujours bon avec toi, Jérém ».
« C’est clair, c’est toujours bon quand on le fait tous les deux ».
« Moi aussi ce soir j’avais envie de toi » je finis par admettre « j’avais envie de toi depuis ce matin. T’es tellement sexy à cheval ! ».
« Il paraît, oui » fait-il, le regard impertinent et l’air satisfait de sa bogossitude, comme une évidence.
« Petit con, va ! ».
« C’est vrai, les filles m’ont toujours dit ça » fait-il, l’air innocent. Il est à craquer !
« Elles sont folles » je commente.
« C’est bien vrai, mais elles sont marrantes ».
« Jérém, tu me rends dingue ».
« Toi aussi ».
« A midi, c’était trop bon dans les bois, c’était trop excitant, j’ai joui comme un fou ! ».
Jérém ne dit rien mais je le sens fier que je lui dise ça. Je le sens bien excité, en plus que pas mal éméché. Je sens que le retour à la petite maison va être chaud.
Mais en passant la porte d’entrée, la première chose que je constate, avec dépit, c’est que depuis notre départ de la maison au matin, le feu dans la cheminée est mort.
Et pourtant, je ne me suis pas trompé, la chaleur ne va pas manquer. Dès le seuil franchi, Jérém me plaque contre le mur, il m’embrasse fougueusement, nos langues se mélangent, nos corps s’enlacent, se caressent, s’excitent. Son envie de me faire des câlins à la fois doux et sensuels semble insatiable. Nos deux queues tendues se cherchent à travers les couches de vêtements qui ne vont pas tarder à sauter.
« Attends, bouge pas… » fait le bobrun, la voix étouffée par l’excitation, en quittant soudainement notre accolade.
« Où veux-tu que j’aille ? Tu es là, alors c’est ici et nulle part ailleurs que j’ai envie d’être ».
Je regarde mon bobrun dégager un peu les cendres dans l’âtre sans vie, mettre quelques brindilles de bois, les allumer avec son briquet, rajouter du bois plus massif, et faire repartir un beau feu crépitant en une minute chrono.
Très vite, les bruits, les odeurs, les lumières et la chaleur de la cheminée atteignent et dépassent mes sens, ils se rejoignent au plus profond de mon cœur pour afficher une seule et unique sensation : le bonheur.
Lorsque mon bobrun revient vers moi, il me plaque direct face contre mur et dégrafe mon pantalon de cheval. Je sens son souffle brûlant et alcoolisé sur mon cou. Je sens son envie, pressante, sauvage. Je la ressens dans ses gestes précipités, témoignant de l’urgence de son désir, et aussi de son état d’esprit, désinhibé par l’ivresse. Je sais à quel point l’alcool peut rendre mon bobrun sexuellement déchainé. J’ai hâte de découvrir ce qu’il me réserve ce soir. Comment il va prendre son pied. Quelles vont être ses attitudes. Comment il va me secouer. La proximité de sa virilité en surchauffe m’excite au plus haut point.
Ses mains fébriles descendent mon pantalon, ouvrent le sien, son gland fait des va-et-vient lents et appuyés sur le coton de mon boxer. Mon excitation s’envole vers des sommets vertigineux.
Très vite, ses mains font glisser mon boxer le long de mes cuisses. Puis, elles passent sous mon t-shirt et s’en vont exciter mes tétons Son corps plaque et enveloppe le mien de toute sa puissance, son gland entreprend de faire de nouveaux va-et-vient dans ma raie.
« J'ai envie de toi… » je l’entends me chuchoter à l’oreille.
« C’est moi qui ai envie de toi, comme un fou » je lâche, comme une délivrance.
« Tu veux ma queue, hein ? ».
« Je la veux, oui ».
« T’as envie de te faire défoncer, hein ? ».
« Oh, oui !!!! ».
« De te faire remplir ».
« J’ai tout le temps envie d’être rempli de toi, de ton jus… ».
« Tu vas l’avoir mon jus ! ».
Et ce disant, Jérém retire ses mains de mes tétons. Je l’entends cracher, je sens ses doigts lubrifier et travailler brièvement mon trou. Un instant plus tard, sa queue glisse lentement en moi, prend possession de moi, m’envahit.
La position, debout, face au mur, la pénétration directe, la précipitation et l’urgence de ses mouvements, son excitation extrême, son souffle excité dans mon cou : son attitude n’est pas sans me rappeler celle qui avait été la sienne lors de notre arrivé à l’appart de la rue de la Colombette après le bac philo, après que je l’avais bien chauffé pendant toute la durée de l’épreuve…
 Jérém&Nico, le Livre !
Jérém : qui est-il ce garçon?
PS : je cherche un pro des réseaux sociaux et autres moyens de communications pour orchestrer la promo du livre. Candidature à envoyer par retour de ce mail. Merci !
Après une longue gestation, le premier livre de Jérém&Nico est enfin imprimé et prêt à être expédié.
Ce livre reprend les 40 premiers épisodes de l'histoire, enrichis de nombreux passages piochés dans les épisodes plus récents, lorsque ces derniers s’intègrent aux premiers de façon intéressante.
Il en résulte une toute nouvelle structure narrative, allégée et plus cohérente.
Tu peux commander ta copie dédicacée en version papier ou epub (pour liseuse) via la plateforme tipeee.com/jerem-nico-s1.
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En achetant le livre papier ou numérique, tu contribues au travail d’écriture de la suite de l’aventure Jérém & Nico.
Merci d’avance pour ta contribution à Jérém et Nico !
Fabien
Jérém&NicoL'inspiration« Jérém & Nico est une histoire qui est venue à moi un jour d’été, un jour où j’ai eu l’intuition que je devais construire autre chose, réorienter ma vie tel un fleuve creusant un nouveau lit qui ferait dévier son cours ».
L'histoireJérémie est un beau brun ténébreux, rugbyman et tombeur de nanas. Son camarade de lycée Nico est un jeune homo à l’esprit pur et rêveur.
Pourtant, c’est Jérémie qui, lors des révisions pour le bac, initie Nico à l’amour physique entre garçons.
Mais alors que Jérémie ne semble intéressé que par le sexe, Nico est fou amoureux de lui. Ainsi, l’amour physique avec le beau brun, pourtant explosif, ne lui suffit pas.
Mais qui est réellement Jérémie ? Comment vit-il leurs « révisions » sexuelles avant le bac ? Que ressent-il vraiment pour Nico ?
Quel rôle pour Thibault, le meilleur ami de Jérémie, à qui Nico finira par se confier ?
L’histoire se déroule à Toulouse entre 2001 et « nos jours ». C’est en effet en 2018 que le Nico adulte raconte ses années lycée et fac.
Nico n’a jamais pu oublier son Jérém. Bien que depuis tant de temps déjà, leurs vies ne marchent plus ensemble.
« Allez, assez déconné ! » fait Daniel « il est temps de passer aux choses sérieuses… ».
Et là, ni un ni deux, le bonhomme attrape la guitare appuyée au mur derrière lui et commence à gratter sur ses cordes. Lola s’active aussi, elle sort de son sac plusieurs classeurs avec de dizaines de textes de chansons.
Daniel continue à gratter sur la guitare en alignant des notes au hasard. Puis, soudain, les accords s’accordent pour dessiner une mélodie, sur laquelle notre musicien aux cheveux d’argent va poser les couplets bien connus :
Je m'baladais sur l'avenue le cœur ouvert à l'inconnu…
« Allez, vous êtes prêts ? Vous suivez ? Are you ready ? » il nous nargue, alors que nous cherchons toujours le texte dans les épais cahiers.
Je m'baladais sur l'avenue le cœur ouvert à l'inconnu…J'avais envie de dire bonjour à n'importe quiN'importe qui et ce fut toi, je t'ai dit n'importe quoiIl suffisait de te parler, pour t'apprivoiser
La voix puissante de Daniel et la vibration sonore de la guitare m’enveloppent, la musique prend vie. Nous chantons ensemble, sans nous préoccuper de chanter juste. C’est la première fois que je vois et j’entends jouer de la guitare de si près. C’est la première fois que je vis un moment de partage aussi incroyable. Et j’en ai des frissons.
Les couplets défilent, ponctués parfois par des mots drôles, des regards marrants, des attitudes hilarantes de notre joyeux luron musicien dont la spécialité est d’apporter de la légèreté et de la bonne humeur.
Les chansons s’enchaînent, « Le sud », « Siffler sur la colline », « Le petit âne gris », « Stewball », « L’été indien », « Santiago », « La montagne », « Mon amant de Saint Jean », « La complainte de la butte ». Des grands classiques de la chanson française, entrecoupés par la répétition régulière d’un « tube maison » appelé « Il me faut du carburant ». Formule par laquelle, toujours en grattant sur sa guitare, Daniel réclame à boire régulièrement.
Le répertoire de notre musicien n’est pas composé de chansons d’aujourd’hui, et pas forcément des chansons les plus gaies qui soit. Mais ce sont toutes de belles chansons, des chansons des années ’70, des textes et des musiques empreints d’une double nostalgie. Il y a la nostalgie inscrite dans le texte par l’auteur. Et puis, il y a la nostalgie de Daniel, et de la plupart des cavaliers de l’ABCR, la nostalgie d’une époque, époque que ces chansons ont le pouvoir magique de faire ressurgir.
Après une énième pause à la bière, Daniel annonce « le dernier rappel avant le baisser de rideau… qui sera suivi d’une pipe et d’un bon dodo, hein, Minou ??? ».
« Tu peux toujours courir ! Ce soir si tu as des envies, c’est « libre-service sans assistance »… » balance Lola, du tac-au-tac.
J’adore l’humour abrasif de ce couple hétérogène par l’âge (Lola doit avoir tout juste la quarantaine, alors que Daniel me semble avoir la soixantaine révolue) et pourtant soudés et complices comme peu d’autres couples. Daniel est un joyeux luron. Lola a du répondant et de l’humour. Ensemble, ils forment presque un duo comique.
« Je vais branler la guitare, alors, Minou ».
« Branle ce que tu peux ».
« Je vais t’en jouer une pour te faire hérisser les poils… ».
« Allez, vas-y, fais hérisser les poils » fait-elle, l’air blasé.
« Une chanson qui parle de sexe ! ».
« Soudain, j’ai peur » elle se moque.
Et là, Daniel entonne les premiers couplets de celle que je considère l’une des plus belles chansons françaises de tous les temps :
Il venait d’avoir 18 ansIl était beau comme un enfantFort comme un homme…
Une chanson que j’ai entendue pour la première fois lorsque j’avais 14 ans, à la radio, une chanson que j’avais trouvée incroyablement culottée au fur et à mesure que les couplets étaient parvenus à mes oreilles pour la toute première fois.
Et aujourd’hui, l’entendre jouer, chanter, et de la chanter moi-même avec les autres cavaliers, me la fait redécouvrir et l’apprécier davantage encore. Ainsi, lorsque le dernier couplet résonne :
J’avais oublié simplementQue j’avais deux fois 18 ans…
j’ai envie de la rechanter dès le début.
« C’est vraiment une belle chanson » fait Charlène.
« Une chanson très vraie » relance Martine.
« C’est vrai, quelle femme de quarante ans n’a pas un jour eu envie de coucher avec un jeune qui lui ferait retrouver sa vingtaine ? » s’accorde Satine.
« Il paraît que cette chanson est autobiographique, il paraît que Dalida avait eu une aventure avec un jeune fan italien qui s’était pointé chez elle au culot un soir de Noël » raconte Carine.
« Eh, les nénettes, je vais vous calmer vite fait bien fait » fait Daniel « au cas où vous ne le saviez pas, cette chanson a été écrite par Pascal Sevran ».
« Et alors ? » fait Satine, interloquée.
« Et alors, Sevran aimait les mecs. Alors, ce n’est peut-être pas Dalida qui a couché avec le minet dont il est question dans cette chanson… ».
« Ah ! » fait-elle, surprise, alors que Martine et Charlène se moquent d’elle et que Nadine part dans l’un de ses fous rires incontrôlables.
« Il n’y a pas que les nanas qui ont envie de coucher avec des bogoss de 18 ans » fait Sylvain, le regard rivé sur Jérém. Celui-là commence vraiment à m’énerver.
« Les homos ne se reproduisent pas, et pourtant, ils sont de plus en plus nombreux ! » fait Daniel en citant une réplique de Coluche.
« Vous avez entendu que depuis quelques mois le mariage entre personnes du même sexe a été voté au Pays Bas ? » lance JP.
« Je pense que c’est une bonne chose » fait Charlène « je ne vois pas pourquoi deux mecs ou deux nanas ne pourraient pas s’unir civilement, et même adopter un gosse ».
« Vous en pensez quoi, vous, les garçons ? » lance Martine à l’attention de Loïc et Sylvain.
« Moi je voudrais que ça arrive chez nous » réagit Loïc « je voudrais pouvoir me marier comme tout le monde. Je voudrais pouvoir adopter un enfant comme tout le monde. J’en ai marre de me sentir un citoyen de seconde catégorie ».
« Nous ne pouvons même pas donner notre sang à cause du fait qu’on est gay ! Même si on est en couple ! ».
« Je pense qu’en France le mariage n’est pas près d’arriver. Les mentalités ont encore besoin de beaucoup évoluer » fait Carine.
« Dans 10-12 ans, peut-être » fait JP, le visionnaire.
« Quand tu penses qu’il y a tous les jours des mecs qui se font tabasser juste parce qu’ils sont gays » s’indigne Nadine.
« Et qu’il y a des pays où les gays sont rejetés par leurs familles, persécutés par la religion, par le pouvoir, où ils sont torturés, tués par la police » abonde Loïc.
« Ma mère avait un frère » raconte Ginette « apparemment, c’était quelqu’un de bien. Et puis, un jour, il est parti. Il a mis fin à ses jours.
Je n’étais qu’une gamine quand c’est arrivé. Par la suite, maman ne parlait jamais de son frère. Alors, un jour je lui ai demandé de me parler de lui, de me raconter quel genre de personne il était.
Elle m’a dit que c’était un garçon sensible et gentil, peut-être trop sensible et gentil. Elle m’a dit que c’était le seul de la famille sur lequel on pouvait toujours compter.
Alors, je lui ai demandé si elle savait pourquoi il avait fait ça.
Elle m’a dit qu’elle pensait qu’il ne supportait plus le regard que les gens portaient sur lui. Qu’il ne supportait plus les bruits, la honte, la solitude. Parce qu’il aimait les hommes. Il semblerait qu’à un moment cela soit devenu trop dur à porter pour lui.
C’était une autre époque. C’était très dur d’être gays dans les années ‘50. Heureusement, les temps ont changé. Enfin, un peu, mais pas encore assez ».
Le récit de Ginette, venant du fond du cœur, son regard ému, m’ont profondément touché.
« Moi je n’arrive pas à comprendre pourquoi il y a tant de haine, de mépris et de violence autour des gays » fait Charlène et posant un regard bienveillant sur Jérém « vraiment, je ne vois pas en quoi le fait que deux mecs s’aiment puisse déranger qui que ce soit. Il y a bien d’autres choses autrement plus dérangeantes que cela, il y a bien d’autres raisons de s’indigner… ».
« C’est vrai » abonde JP « chaque jour on assiste sans ciller à des guerres, des famines, à la pauvreté, à l’injustice sociale, à la corruption, au pillage de la planète, à des catastrophes naturelles et écologiques. Mais deux gars qui s’aiment, ça choque. Franchement, qu’est-ce qu’on en a à foutre de ce que les gens font dans leur lit et avec qui ! La liberté ne s’arrête que lorsqu’elle entrave celle d’autrui. Et les gays n’entravent en rien les libertés des hétéros, alors que certains hétéros, et ils sont nombreux à le faire, ne serait-ce que par le mépris, essayent trop souvent d’entraver les libertés des gays ! ».
« C’est pour ça qu’il y encore tant de gays qui n’osent pas sortir du placard » fait Loïc en me regardant droit dans les yeux.
Mais il cherche quoi, lui aussi ?
« Le pire c’est que lorsqu’on regarde l’histoire, ça ne fait pas longtemps que l’homosexualité est devenue un « problème », qu’elle attire tant de haine » relance JP l’érudit.
« C'est-à-dire ? » l’interroge Satine.
« Dans bon nombre de sociétés anciennes, l’homosexualité ne posait pas de problème ».
« On dit bien « va te faire voir chez les grecs » ! » plaisante Daniel.
« La distinction entre homo et hétéro était inconnue dans le monde antique. En Grèce, les mecs étaient spontanément bisexuels. D’ailleurs, même les dieux donnaient l’exemple : Zeus, le dieu des dieux himself, trompait sa femme Héra aussi bien avec des nénettes qu’avec des éphèbes.
A Rome c’était un peu pareil, d’ailleurs Jules César était surnommé « le mari de toutes les femmes et la femme de tous les maris ». A Rome les pratiques sexuelles devaient correspondre à certains usages sociaux. Il était considéré normal qu’un jeune se donne à un aîné, mais pas l’inverse. Pour un esclave, satisfaire les besoins de son maître était une obligation. Chez l’affranchi, c’était un service qu’il devait à vie à son ancien maître ».
« Pour les Iroquoiens, les indiens du Canada, il existait non pas deux, mais cinq sexes, ou cinq sexualités différentes : les hommes, les femmes, les hommes qui se sentent femmes, les femmes qui se sentent hommes et ceux qui se sentent hommes et femmes à la fois. Et il était considéré que chacun des cinq sexes avait son rôle à jouer dans la communauté. Pour ces peuples, le fait d’être « moitié homme, moitié femme », permettait une meilleure compréhension de la dimension sacrée du monde. Ainsi, les gays occupaient souvent la fonction de chaman ».
« Alors ils étaient bien acceptés » considère Satine.
« Oui, mais avec quelques réserves quand-même. Si d’un côté on leur reconnaissait des qualités, de l’autre on sommait les hommes de se méfier d’eux. On pensait que s’ils les fréquentaient trop, les chasseurs risqueraient d’être séduits. A bon entendeur, salut !
Bref, tout ça pour dire que par le passé, et dans d’autres civilisations dites « moins évoluées », les homosexuels étaient bien mieux acceptés que dans nos sociétés occidentales. Quand on regarde d’un peu plus prês, l’homosexualité, et sa stigmatisation, ressemble à une invention récente. D’ailleurs, les trois grandes religions modernes, Judaïsme, Christianisme et Islam, qui n’ont cessé de se faire la guerre depuis des siècles, s’accordent sur la condamnation des rapports homosexuels ».
Jérém avait raison, JP est un véritable puit de science. JP est le genre d’homme qui t’apprend quelque chose d’intéressant à chaque fois qu’il l’ouvre. Oui, ce type est vraiment un type bien. Et sa simple présence, son regard, donnent direct l’envie, l’inspiration et l’énergie pour chercher à devenir quelqu’un de meilleur.
« L’Eglise catholique est aussi contre l’utilisation de la capote, ce qui est criminel à une époque marquée par le Sida » lance Loïc.
« L’Eglise propose de remplacer la capote par l’abstinence » fait JP, taquin.
« C’est aussi pour ça que l’Eglise a de moins en moins de fans » conclut Daniel.
JP se marre sous la moustache.
« Pour les religions, le seul but du sexe c’est la procréation. Et baiser sans but de procréation est un péché » précise Charlène« Quelle connerie » commente Nadine.
« L’homosexualité ne crée préjudice à personne et les homosexuels ne demandent rien de plus que d’être respectés en tant qu’êtres humains comme tous les autres » fait Charlène sous les regards approbateurs de Loïc et Sylvain.
Depuis plusieurs minutes, j’écoute attentivement les échanges entre les cavaliers au sujet de l’homosexualité et j’en suis profondément ému. Jamais de ma vie je me suis retrouvé dans un environnement aussi accueillant, aussi rassurant, aussi gay friendly. Vraiment, ça fait un bien de fou. Charlène avait raison, à l’ABCR, le fait que deux mecs s’aiment ne pose problème à personne. J’en ai les larmes aux yeux. Et si ça ne tenait qu’à moi, si ça ne concernait que moi, je crois que je ferais mon coming out sur le champ.
Définitivement, dans ce relais, au sein de cette petite « communauté », je découvre un autre monde, un monde tellement différent de celui du lycée, de ma famille, de ma ville, un monde à part. J’ai de plus en plus l’impression d’avoir enfin trouvé de vrais potes, même s’ils sont tous bien plus âgés que moi. Mais qu’importe l’âge au fond ? Car je suis conquis. C’est magique, et je suis heureux comme jamais.
Après cette parenthèse un plus grave, l’adorable Daniel nous joue et nous chante une chanson paillarde au vocabulaire bien salace pour remettre le rire au centre de la soirée.
A un moment, quelque chose me surprend. Jérém est en train de me faire du pied sous la table. Nos regards se croisent. Et dans le sien, je découvre une étincelle lubrique qui embrase illico mon désir. Car son regard de braise est une promesse de baise sauvage et torride. Notre complicité est géniale. Et putain, qu’est-ce qu’il est sexy dans son maillot Wilkinson !
Les cavaliers commencent à sortir de table et des petits groupes se forment à la cuisine (pour les fées et magiciens du logis) autour de la machine à café (pour les amateurs de boissons chaudes), et à proximité de la cheminée (pour les fumeurs).
Jérém est bien évidemment dans ce dernier groupe. Tout comme Sylvain. Sylvain qui, très vite, semble se familiariser et discuter de façon plutôt complice avec mon bobrun.
Et alors que je me retrouve coincé entre Martine et Ginette me questionnant sur mes études à venir, je trouve que Sylvain a une attitude qui ne me plaît pas du tout. Déjà, il a l’air trop intime avec mon bobrun, alors qu’il ne le connaît ni d’Eve, et surtout pas d’Adam.
Mais ce qui m’intrigue le plus, et qui me rend jaloux et inquiet, c’est le regard que Sylvain pose sur mon bobrun. Certes, son regard trahit avant tout l’ivresse de la boisson. Mais ce que je vois avant tout, c’est un regard aimanté.
A quoi joue-t-il mon Jérém ? Est-ce qu’il ne se rend pas compte que Sylvain le drague ?
J’ignore de quoi ils causent, car je suis trop loin pour tendre l’oreille, mais leur conversation a l’air amusante : mon bobrun lâche à plusieurs reprises son sourire incendiaire qui fait instantanément augmenter la température dans la pièce de plusieurs degrés. Quant à Sylvain, il semble complètement sous le charme. Il ne quitte pas Jérém des yeux, et un petit sourire niais, et hébété ne quitte pas son visage.
Ce qui m’inquiète le plus c’est que le sourire de Jérém est un sourire flatté, signe que Sylvain doit lui dire des choses qui touchent des cordes sensibles. Quelles cordes Sylvain est-il en train de faire vibrer chez mon bobrun ? Que cherche-t-il ?
Oui, leur conversation se prolonge beaucoup trop. Elle me perturbe un peu plus à chaque seconde. Au bout d’un petit moment, je me surprends à être carrément jaloux. Je me surprends à m’imaginer que Sylvain soit en train de dire à Jérém qu’il le trouve canon, qu’il soit en train de lui faire des propositions, ou du moins lui faire comprendre qu’il le kiffe et qu’il serait partant pour coucher avec lui. Certes, Sylvain n’est pas vraiment ce qu’on appelle un canon, et il a bien dix ans de plus que Jérém, et pourtant je ne peux m’empêcher de bouillir intérieurement.
Jusqu’à ce que ce mon bobrun me rassure par lui-même. Ainsi, alors que je ne cesse de le fixer, j’ai l’impression à un moment que sur son visage l’amusement laisse la place à une sorte d’agacement. Et lorsque je croise son regard, il lève les yeux au ciel, geste doublé d’un haussement de sourcils et d’une « mise en chapeau » comme il sait si bien le faire. Le sien, c’est un regard complice, suivi d’un clin d’œil à me faire tomber à la renverse. J’ai l’impression que le bogoss cherche à me rassurer, à me dire qu’il n’en peut plus de se faire tenir la jambe, que ça le saoule.
Ça me rassure, mais en même temps ça me donne un aperçu grandeur nature des tentations qui l’attendent à Paris, dans des soirées, dans les troisièmes mi-temps, dans le métro, dans la rue, partout. Le regard complice de Jérém me rassure et m’inquiète à la fois.
Mais très vite, je vais réaliser que cette conversation qui se prolonge n’alarme pas que moi. Et alors que je réfléchis à toute vitesse pour trouver un prétexte et sortir mon bobrun de ce piège, quelqu’un d’autre s’en charge à ma place.
« Tu fiches quoi, là ? » fait Loïc, en haussant la voix, le ton agressif et accusateur.
« De quoi tu parles ? » lui retorque Sylvain sur un ton vexé.
Loïc aussi a bu. Et lui aussi il a vu ce que j’ai cru voir.
« Arrête de le draguer ou ça va mal finir ».
« Mais ta gueule ».
« Tu arrêtes ça tout de suite ».
« Sinon ? ».
Jérém a l’air amusé et on dirait qu’il compte les points. Soudain, le silence s’est fait autour de cette scène de ménage. Je crois que tout le monde compte les points.
« Sinon tu vas rentrer tout seul ! ».
« Chiche ! » fait Sylvain sur un ton très provocateur.
« T’arrêtes un peu de te donner en spectacle ? ».
« Je fais ce que je veux… ».
« Va te faire voir… ».
« Si vraiment tu insistes… ».
Loïc part alors en claquant la porte.
« Et bien, sympa cette petite impro… moi, je bois… santé ! » rigole Daniel en mettant fin au froid qui vient d’envahir la salle.
C’est à cet instant que Sylvain semble enfin réaliser ce qui vient de se produire. Il jette sa cigarette dans le feu, il pose lourdement son verre sur la table et il emboîte le pas à Loïc.
« J’aime pas assister à des scènes de ménage, ça me met toujours mal à l’aise » fait Charlène.
« Moi j’ai pas compris ce qui vient de se passer » fait Daniel, l’air perdu.
« Il vient de se passe que Loïc est jaloux » fait Satine.
« Jaloux ? Mais de qui, de quoi ? ».
« Il est jaloux parce que Sylvain a fait du gringue à Jérémie ».
« Il t’a dragué ? » fait Daniel.
« Je ne sais pas trop » bafouille Jérém.
« Oh, que oui » fait Satine, très sûre d’elle « c’est simple, quand il te regardait, il avait des étoiles dans les yeux ».
« Ah bon ? » fait Daniel, l’air (faussement) outré « il est culotté de s’attaquer à un mec comme Jérémie, un mec qui n’est pas de son bord ».
« Et aussi un mec qui ne joue pas vraiment dans sa catégorie. C’est vrai, Jérémie est un vrai bogoss » considère Satine.
Le bobrun sourit sous la moustache. Il aime vraiment qu’on le flatte.
« Il avait bu » fait JP.
« Oui, mais enfin, je comprends que Loïc soit jaloux » conclut Satine « et si c’était pour voir ça, c’était bien la peine de quitter Florian. Avec tous ses défauts, c’est un bon gars. On se demande ce que Loïc a dans la tête, parfois… ».
« On ne commande pas aux sentiments » fait Martine.
« Certes, mais enfin, c’est l’arroseur arrosé » persiste Satine « il a voulu se mettre avec un mec beaucoup plus jeune que lui, et maintenant c’est Sylvain qui s’intéresse aux mecs plus jeunes que lui ».
« Après » elle continue, sur une note plus légère « on ne peut pas lui reprocher d’être sensible au charme d’un gars comme Jérémie. Qui ne mate pas Jérémie ? ».
« Moi je ne le mate pas » se marre Daniel.
« Je parle des femmes et des gars qui sont sensibles à ça » fait elle en tâtant ses biceps « putain, ça c’est du bras de mec ! ».
« Pas touche ! » fait Martine en rigolant « il est bien trop jeune pour toi ! ».
« C’est ça mon malheur, avoir un corps de 50 piges et aimer les mecs de 20 ! »« En plus il doit déjà avoir une copine » fait Martine « ou plein de copines… ».
Jérém me lance un petit regard en biais, un regard amusé.
« Eh, Nico, raconte-nous, il avait combien de copines au lycée ? » me prend à parti Martine.
« Beaucoup, beaucoup de copines ! » je plaisante.
« Tu rends dingue tout le monde ! » lance Nadine.
« Mais je n’ai rien fait, moi » lâche mon bobrun, en mode parfait petit con, en simulant un air innocent et surpris, alors que son petit sourire est coquin et malicieux. Quant à son maillot, avec ses trois boutons désormais ouverts et qui laissent dépasser quelques petits poils et sa chaînette de mec, avec sa façon de souligner ses pecs et le V de son torse, avec les manchettes moulant ses biceps, est vraiment à hurler. Quelque part, je me dis que c’est tout simplement naturel qu’un mec aussi sexy attise les convoitises d’autres gays. Comment ça pourrait en être autrement ? J’ai vraiment du souci à me faire.
« Je t’ai vu faire » se moque Nadine « tu lui as balancé un sourire, t’as bandé un peu tes biceps. Et lui, il a bandé ailleurs… ».
« J’ai été victime de harcèlement » lance Jérém, l’air angélique.
« Ah, bah, si tu ne veux pas te faire harceler, t’as qu’à pas être si sexy ! » lâche Satine.
« Mais je n’ai rien fait, moi » il répète, d’un air coquin, en joignant à la parole un geste d’une sexytude inouïe, un geste faisant preuve de son goût prononcé pour le danger. Ce geste est celui d’attraper son maillot par le bas, de le soulever, en dévoilant au passage le bas-relief spectaculaire de ses abdos, tout un baissant la tête, comme s’il voulait s’essuyer le front.
Paf ! Une nouvelle claque.
Les sifflements féminins fusent dans la grande salle.
« Mais mate-moi un peu ces abdos ! » fait Nadine.
« J’ai les mêmes » plaisante Daniel.
« Tu avais les mêmes, à son âge, si on en croit les photos… » fait Lola.
« Moi, même à son âge, je n’avais pas les mêmes… » commente JP, réaliste.
Le maillot retombe vite sur cette vision de bonheur et de désir. J’ai envie de lui…« Allez, finie la récré, on va peut-être ranger un peu tout ce bordel ! » lance Martine.
Et pendant que Daniel recommence à jouer sur sa guitare et à débiter les couplets de Santiago, tous les autres cavaliers sans exception s’activent pour débarrasser la table, nettoyer, balayer.
Soudain, ça sent la fin de la soirée, ça sent le départ, la fin de ce moment heureux. Au fond de moi, je me sens triste. Comme au dernier jour des vacances. J’ai envie que cette soirée dure encore.
Hélas, en quelques minutes tout est rangé, et l’un après l’autre les cavaliers commencent à prendre congé. Des bises sont échangées lors d’aurevoirs prometteurs de joyeuses retrouvailles à cheval et/ou à table.
« Merci à vous tous, qui avez fait de cette soirée, une fois encore, un moment heureux » lance JP à la petite assemblée.
J’ai moi aussi envie de remercier tout le monde pour cette belle soirée, tellement riche en émotions ! Une envie que je n’ose pas assouvir.
« Alors, tu restes dans notre région combien de temps ? » me demande Ginette après m’avoir fait la double bise d’au revoir.
« Je ne sais pas encore, un jour ou deux ».
« Si vous avez le temps, passez prendre un café à la maison ».
« On essaiera de venir, oui » fait Jérém.
« Vous avez prévu quoi pour demain ? » demande Charlène.
« Rien de spécial » fait Jérém.
« Si ça vous dit, on se refait une petite balade, histoire de bien remettre Nico en selle et de lui donner quelques astuces supplémentaires ».
« Je ne sais pas trop »« On ne serait que tous les trois ».
« T’en dis quoi, Nico ? ».
« Moi ça me va » je lance, tout heureux de cette prolongation du bonheur ressenti pendant cette journée. Aussi, j’ai hâte de retrouver Charlène après la petite mise au point de la soirée, et j’ai hâte de voir comment Jérém a intégré son « sermon », hâte de voir comment il va se comporter avec elle, avec moi devant elle, hâte de savoir si Charlène va remettre ça sur la table, si elle va avoir envie d’en savoir un peu plus sur notre relation, de savoir comment son Jérémie est devenu « mon Jérém ».
« Ok, c’est bon ».
« Neuf heures chez moi ? ».
« Ok, s’il ne pleut pas ».
« Mais non, il va faire beau ! Venez même un peu plus tôt, on déjeunera ensemble ».
« On viendra vers huit heures et on te donnera un coup de main aux chevaux ».
« Ah, qu’il est bien ce petit ! ».
« Tu en doutais encore ? ».
« Non, parce que c’est moi qui t’ai bien dressé ».
« Vieille peau ! ».
« Petit con ! ».
Leur complicité retrouvée me fait vraiment chaud au cœur.
Nous faisons la bise de la bonne nuit à Satine, Marie-Line, Bernard et Carla qui sont les heureux squatteurs des niches en bois du relais.
Charlène, Martine, Jérém et moi redescendons vers la pension, éclairés par la lampe frontale « troisième œil » de Charlène elle-même. Pendant le court trajet, les échanges portent sur la soirée, sur le bonheur simple et pourtant intense de ce moment de partage et d’amitié. Nous aurons le temps demain de revenir sur les sujets brûlants. Du moins, je l’espère.
En arrivant à la voiture, Jérém sort les clefs de sa poche et les fait tomber par terre. Et alors qu’il se baisse, avec lenteur et hésitation, pour les ramasser, j’entends Charlène lui balancer :« Tu vas pas conduire, j’espère ? ».
« Et pourquoi pas ? ».
« Parce que t’as pas mal bu ».
« T’as compté mes verres ? ».
« Non, mais t’as pas l’air d’être en état de conduire ».
En effet, mon Jérém a l’air un tantinet éméché.
« C’est pas loin, t’inquiète ».
« Je m’inquiète si je veux ! Nico, tu conduis, ok ? ».
« Oui, je peux conduire ».
« Je vais conduire » insiste Jérém.
« Tu ne vas pas gagner » rigole Martine.
« Donne lui les clefs ! » insiste Charlène.
« Non ! ».
« Donne lui les clefs ou je te mets une fessée ! ».
« Ne lui donne pas les clefs… c’est moi qui vais lui mettre une fessée ! Je rêve de mettre une fessée sur ce cul d’enfer » fait Martine, morte de rire.
« Allez, prends les clef, sinon elle va nous faire un scandale » me lance Jérém, sur un ton faussement agacé, la voix un brin pâteuse, le regard un peu ahuri, témoin d’un début d’ivresse qui le rend à la fois touchant et sexy en diable.
« Mais tu fais attention à ma voiture, elle est presque neuve » il ajoute sur un ton d’autodérision.
« Elle est presque bonne pour la casse tu veux dire ! » lui balance Martine.
Un instant plus tard, nous échangeons avec Charlène et Martine les dernières bises de la soirée.
« Bonne nuit ! » lance cette dernière en démarrant sa voiture.
« A demain, les mecs ! » fait Charlène en prenant la direction de sa maison.
Elle n’a pas fait vingt pas que mon bobrun essaie à nouveau de n’en faire qu’à sa tête.
« Allez, file-moi les clefs ».
« Non, je conduis ».
« Tu connais pas la route ».
« Si. Laisse-moi faire, s’il te plaît ».
« Vous me fatiguez » fait-il, tout en prenant place côté passager.
J’ouvre la porte et je prends place côté conducteur. Je viens de claquer la porte, et immédiatement je réalise à quel point ça me fait bizarre de m’installer au volant de cette voiture, la 205 rouge de mon Jérém, cette voiture mythique dans laquelle je suis monté un certain nombre de fois, de retour de boîte, direction l’appartement de la rue de la Colombette.
Soudain, je repense à ce lieu, cet appart, cette adresse magique dans laquelle j’ai connu l’amour avec mon Jérém. Je réalise que je ne reverrai certainement plus jamais cet endroit. Est-ce qu’il a déjà été reloué ? Qui a pris la place de mon Jérém ?
Ce qui est certain, c’est que le nouveau locataire est loin d’imaginer ce qui s’est passé entre ces murs, le plaisir qu’on s’est donné, Jérém et moi, le nombre d’orgasmes qu’on s’est offerts. Il ignore qu’entre ces quatre murs j’ai été heureux, triste, jaloux, blessé, frustré, désespéré.
Oui, je réalise que je ne reverrai plus jamais cet appart. Et cette idée me remplit de désolation. Ce lieu, c’était L’adresse de Jérém. C’était le lieu où je pouvais espérer le retrouver. Son ancrage dans l’espace. Et c’était un ancrage que je pouvais atteindre en quelques minutes de marche à pied. Désormais, quel sera l’encrage de mon Jérém ? Où est-ce que je vais pourvoir le retrouver ? Combien d’heures de voiture, de train, d’avion, pour rejoindre mon bobrun ?
« Qu’est-ce qu’il y a, t’as pas trouvé la clef ? » fait Jérém, en me tirant de mes réflexions.
Jérém parle fort, et sa voix est raillée. Son haleine est clairement alcoolisée. Charlène a eu bien raison d’insister pour que je conduise à sa place.
« Si, si… ».
J’ai envie de conduire, et c’est mon devoir de le faire, car Jérém est vraiment éméché. Mais une partie de moi appréhende l’idée de conduire devant mon bobrun. Je viens d’avoir le permis, il l’a depuis plus d’un an. De plus, ce n’est pas ma voiture. J’ai peur de perdre mes moyens, de me mélanger les pinceaux, de conduire comme un pied. J’ai peur de ne pas être à la hauteur. Non pas que je cherche à l’impressionner, mais je n’ai pas envie non plus de passer pour un nul devant le mec que j’aime.
En m’installant dans le siège de Jérém, j’ai l’impression de me glisser dans sa peau, de voir le monde avec ses yeux. Je le regarde, enfoncé dans le siège côté passager, le regard dans le vide, et j’ai l’impression de ressentir ce qu’il ressentait lorsqu’il me prenait en voiture avec lui, lorsqu’il conduisait. Le simple fait d’être au poste de conduite donne de l’assurance, comme une illusion de « pouvoir ».
« Allez, on y va ou quoi ? Tu veux que je conduise ? » il me taquine.
« Non, c’est juste que ça me fait bizarre de me retrouver sur ce siège ».
« Allez, roule ! » il lâche, sans essayer de comprendre ma remarque.
Et je démarre enfin. Après un petit différend avec le levier de vitesse pour trouver la marche arrière qui n’est pas positionné de la même façon que sur ma voiture, je roule. Jérém descend la vitre à moitié, il allume une cigarette et s’enfonce un peu plus encore dans le siège.
Ah, putain, qu’est-ce qu’il est sexy dans son maillot Wilkinson et avec sa cigarette !
« Ça va ? » il me demande, après un petit moment de silence. Et là, je sens sa main gauche se poser doucement sur ma cuisse. Son pouce fait de petits va et vient appuyés, comme une petite caresse tendre et complice. J’ai envie de lui faire plein de câlins. J’ai envie de pleurer de bonheur.
« Oui, très bien, et toi ? » je finis par répondre.
« Oui » il lâche.
« C’était une super soirée ».
« C’est toujours des super soirées avec eux ».
Soudain, je repense à cette conversation sur l’homosexualité, à cette ouverture d’esprit dont tous les cavaliers ont fait preuve ce soir. Vraiment, j’étais loin d’imaginer que des gens aussi géniaux puissent exister. Ce soir, ces gens m’ont aidé à m’accepter un peu plus, à m’aimer un peu plus, ils m’ont convaincu un peu plus de la légitimité de mon orientation sexuelle. Ils m’ont donné envie de me battre pour ce que je suis. J’espère que ça en est de même pour Jérém. J’ai envie de mettre le sujet sur le tapis, mais je me dis que ce n’est pas le bon moment. Il y aura d’autres occasions.
Jérém est en pleine phase décuve-cigarette. Le silence s’installe. Je conduis lentement, il fume lentement. A un moment, je sens son regard insistant sur moi.
« Qu’est-ce qu’il y a ? » je finis par lui demander.
« C’est la première fois que tu conduis ma bagnole ».
« Merci de me faire confiance ».
« Le seul à qui je l’ai laissé conduire, c’est Thib. Avec lui, je me sentais en confiance ».
« Avec toi aussi je me sens en confiance » il ajoute, après avoir repris une taffe.
Ça fait du bien d’apprendre que Jérém m’accorde sa confiance très sélective. Comme à Thibault, le mec le plus rassurant que je connaisse. Voilà une belle marque de considération.
Une nouvelle fois je me sens bien dans son regard. Je commence à m’habituer à ce regard bienveillant, encourageant, valorisant.
« Merci, Jérém ».
Un instant plus tard, sa main quitte ma cuisse, elle se pose sur mon cou et entreprend de caresser le bas de ma nuque. Instantanément, un frisson géant se propage dans mon corps et a raison de ma concentration sur la conduite. Je suis troublé, et je mets un coup de frein aussi brusque qu’involontaire.
« Qu’est-ce qu’il y a ? ».
« Rien, c’est juste que quand tu me caresses là, ça me perturbe ».
« Ok, j’arrête ».
« Non… enfin… si… j’adore ça, mais je conduis, là ».
« Ok, ok ».
Oui, son haleine sent l’alcool. Mais Jérém n’a pas l’alcool mauvais, non, il a l’alcool câlin. Un instant plus tard, il pose le dos de sa main sur ma joue, il commence à la caresser tout doucement. Il fait des aller retour jusqu’à mon oreille, qu’il titille de façon répétée. Je frémis, j’ai envie de pleurer.
« Tu kiffes ça, hein ? ».
« Je ne peux même pas t’expliquer à quel point ! ».
Et alors que ses doigts continuent de caresser mon visage, je tourne ma tête d’un coup et je pose un bisou sur sa main.
Pour toute réponse, le bogoss s’approche d’un geste rapide et il pose un bisou tout doux dans mon cou.
« Merci » je l’entends chuchoter de façon tout juste perceptible.
« Merci de quoi ? ».
« Merci d’être là ».
« Je suis bien avec toi » je lâche, une vérité venant du profond de mon cœur.
« Je ne te mérite pas ».
« N’importe quoi. Pourquoi tu dis ça ? ».
« Je t’ai fait trop de mal ».
« C’est derrière nous tout ça ».
« Je ne veux plus te faire du mal ».
« Ça n’arrivera pas ».
« Dans quelques jours, on va être loin ».
« Je viendrai te voir à Paris ».
« Ça ne suffira pas ».
« On se verra à chaque fois qu’on pourra ».
« Ne m’oublie pas, Nico ».
A cet instant précis, j’ai l’impression que mon cœur vient de s’arrêter. Jérém ne m’a jamais dit « je t’aime ». Mais ce « Ne m’oublie pas, Nico » sonne dans ma tête comme une formulation alternative de ces trois petits mots que je rêve de lui entendre prononcer un jour.
Non, jamais je n’aurais imaginé entendre un jour une phrase comme celle-ci dans la bouche de Jérém. Alors lui aussi s’inquiète de l’avenir de notre amour. Alors, lui aussi a peur de me perdre. C’est touchant, adorable, émouvant. Parfois, l’alcool sait si bien faire les choses.
« Comment veux-tu que je t’oublie ? » j’ai à la fois envie et besoin de le rassurer « tu es le mec que j’aime, je ne pourrais jamais t’oublier ! ».
Son regard doux et perdu me fait fondre. J’ai envie de pleurer toutes les larmes de mon corps. Et je pleure en silence. Mais lorsque mon bobrun se penche vers moi, lorsqu’il pose un nouveau bisou dans le creux de mon cou, lorsqu’il pose sa tête sur mon épaule, je pleure pour de bon. J’ai envie de le couvrir de bisous et de câlins.
« Toi non plus, ne m’oublie pas » je lui retourne.
« Je ne t’oublierais pas ».
« Ça me fait plaisir de repartir en balade avec Charlène et toi, demain » j’ajoute, après un moment de silence..
« A moi aussi ça me fait plaisir ».
« Tu avais raison, cette nana est vraiment super ».
« Elle est un peu casse couilles, mais elle est top ».
« Elle l’a bien pris ».
« De quoi ? ».
« Pour nous ».
« Ouais ».
« Alors ça t’embête plus qu’elle nous ait vus ? ».
« Je ne sais pas… enfin, je ne crois pas. Charlène fait partie des quelques personnes que j’avais envie de mettre au jus. Elle a raison, si je t’ai présenté, c’est parce que j’avais envie qu’elle sache. Et si j’ai eu envie, c’est que je suis bien avec toi. Je regrette juste qu’elle l’ait appris en nous voyant, de ne pas avoir eu les couilles de lui dire direct ».
« C’est pas grave qu’elle l’ait appris comme ça. Parfois, il faut laisser faire les choses ».
« J’avais quand même peur de sa réaction, j’avais peur de la décevoir ».
« Ca n’a pas été le cas ».
« Non ».
« Et ce sont qui les autres personnes que tu voulais mettre au courant ? ».
« Maxime, mais c’est lui qui m’a tiré les vers du nez… et aussi Thib… ».
Soudain, j’ai l’impression de recevoir les réponses à bon nombre de questions.
« C’est pour ça que tu lui as proposé de faire un plan à trois ? ».
« Ça s’est présentée comme ça, c’était pas prévu. Tu étais là, il est passé à l’improviste. Alors je lui ai proposé de lui faire découvrir cette partie de ma vie que je lui avais cachée jusque-là… ».
« Tu sais pourquoi il était passé cette nuit-là ? ».
« Je pense que c’était à cause de ce qui avait failli se passer entre nous quelques jours plus tôt et du froid que ça avait mis entre nous ».
« Vous alliez failli coucher ensemble ? ».
« Je t’en ai déjà parlé… ».
« Oui, oui… Mais Thibault savait déjà pour nous. Un jour il m’a fait parler. Mais il savait bien avant ».
« Thibault est un gars génial, et il me connaît comme ses poches. Je me doutais qu’il savait, il m’avait tendu des perches, mais je n’avais pas osé les saisir. Si je n’osais pas, c’est aussi parce que je savais que Thibault ressentait des trucs pour moi. Je ne voulais pas lui faire de la peine. Et pourtant, j’avais envie qu’il sache. Alors, quand cette occasion s’est présentée, j’ai voulu lui montrer ce qu’il y avait entre nous deux, mais j’ai voulu aussi lui montrer que ce n’était que du sexe, parce qu’entre mecs, il n’y avait que la baise qui était possible ».
« Et en aucun cas des sentiments… ».
« Voilà, je voulais qu’il voit ça, qu’il le comprenne, et je voulais y croire aussi ».
« C’est pour ça que ce soir-là tu as été aussi brutal avec moi ? ».
« Oui, je suis désolé ».
Dans le noir, mon bobrun me fait plein de bisous sur la joue et dans le cou.
Je suis heureux. Même s’il n’est pas encore prêt à afficher notre amour au grand jour, j’ai à nouveau l’impression que, pierre après pierre, l’édifice magnifique de notre amour est en train de grandir.
Un nouveau silence s’installe.
« Alors, il t’a vraiment dragué, Sylvain, tout à l’heure ? » j’ai envie de savoir.
« Il a été relou ».
« Il t’a fait des propositions ? ».
« Non, mais il n’arrêtait pas de me causer ».
« Il te disait quoi ? ».
« Au début, il était marrant. Mais après, il a commencé à me saouler ».
« Allez, raconte ! ».
« Il voulait savoir si on était plus que potes ».
« Et tu lui as dit quoi ? ».
« Je suis resté vague ».
« Et c’est tout ? ».
« Après il a commencé à me dire que je montais super bien à cheval, que j’étais bomec, qu’il kiffait les mecs comme moi, musclés et sportifs. Et puis, rebelote, il a recommencé à me saouler avec des questions sur ma vie sexuelle. Il m’a dit que s’il avait eu un camarade de lycée comme moi, il se serait débrouillé pour coucher avec avant le bac. Je crevais d’envie de lui dire que c’est exactement ce qu’on avait fait toi et moi, mais je me suis dit que ça ne le regardait pas ».
« Bref, il t’a vraiment dragué… ».
« Oui ».
« Et ça t’a fait quoi ? ».
« Rien du tout, en plus je ne le kiffe pas du tout. Il a une tête de mec chiant, une voix de mec chiant, une dégaine de mec chiant. Bref, c’est un mec chiant ».
« Et si ça avait été un bogoss qui t’avait fait du rentre dedans ? ».
« Nico, t’as pas à t’inquiéter, c’est de toi que j’ai envie. J’avais tellement envie de toi ce soir… ».
« Ah bon ? ».
« Pas toi ? ».
« Non… moi j’avais juste envie de câlins… » je le balade.
« Ah bon… juste de câlins… ».
« Parfaitement ».
« Je ne te crois pas ! » fait-il, avec un petit rire coquin à craquer, un regard de petit voyou sexy en diable.
« C’est ça… ».
« Alors, comme ça, pendant la soirée tu avais juste envie de bisous… » il me relance, après un instant de silence.
« Oui… et quoi d’autre ? T’avais envie de quoi, toi ? » je le cherche.
« Moi j’avais envie de t’allonger sur la grande table en bois et de te prendre direct ! ».
« T’avais envie de me remplir ? ».
« Tu peux pas savoir ! ».
« Comme la fois sur le banc de massage au terrain de rugby ? ».
« Ah, putain, qu’est-ce que c’était bon ce soir-là ! ».
« C’est toujours bon avec toi, Jérém ».
« C’est clair, c’est toujours bon quand on le fait tous les deux ».
« Moi aussi ce soir j’avais envie de toi » je finis par admettre « j’avais envie de toi depuis ce matin. T’es tellement sexy à cheval ! ».
« Il paraît, oui » fait-il, le regard impertinent et l’air satisfait de sa bogossitude, comme une évidence.
« Petit con, va ! ».
« C’est vrai, les filles m’ont toujours dit ça » fait-il, l’air innocent. Il est à craquer !
« Elles sont folles » je commente.
« C’est bien vrai, mais elles sont marrantes ».
« Jérém, tu me rends dingue ».
« Toi aussi ».
« A midi, c’était trop bon dans les bois, c’était trop excitant, j’ai joui comme un fou ! ».
Jérém ne dit rien mais je le sens fier que je lui dise ça. Je le sens bien excité, en plus que pas mal éméché. Je sens que le retour à la petite maison va être chaud.
Mais en passant la porte d’entrée, la première chose que je constate, avec dépit, c’est que depuis notre départ de la maison au matin, le feu dans la cheminée est mort.
Et pourtant, je ne me suis pas trompé, la chaleur ne va pas manquer. Dès le seuil franchi, Jérém me plaque contre le mur, il m’embrasse fougueusement, nos langues se mélangent, nos corps s’enlacent, se caressent, s’excitent. Son envie de me faire des câlins à la fois doux et sensuels semble insatiable. Nos deux queues tendues se cherchent à travers les couches de vêtements qui ne vont pas tarder à sauter.
« Attends, bouge pas… » fait le bobrun, la voix étouffée par l’excitation, en quittant soudainement notre accolade.
« Où veux-tu que j’aille ? Tu es là, alors c’est ici et nulle part ailleurs que j’ai envie d’être ».
Je regarde mon bobrun dégager un peu les cendres dans l’âtre sans vie, mettre quelques brindilles de bois, les allumer avec son briquet, rajouter du bois plus massif, et faire repartir un beau feu crépitant en une minute chrono.
Très vite, les bruits, les odeurs, les lumières et la chaleur de la cheminée atteignent et dépassent mes sens, ils se rejoignent au plus profond de mon cœur pour afficher une seule et unique sensation : le bonheur.
Lorsque mon bobrun revient vers moi, il me plaque direct face contre mur et dégrafe mon pantalon de cheval. Je sens son souffle brûlant et alcoolisé sur mon cou. Je sens son envie, pressante, sauvage. Je la ressens dans ses gestes précipités, témoignant de l’urgence de son désir, et aussi de son état d’esprit, désinhibé par l’ivresse. Je sais à quel point l’alcool peut rendre mon bobrun sexuellement déchainé. J’ai hâte de découvrir ce qu’il me réserve ce soir. Comment il va prendre son pied. Quelles vont être ses attitudes. Comment il va me secouer. La proximité de sa virilité en surchauffe m’excite au plus haut point.
Ses mains fébriles descendent mon pantalon, ouvrent le sien, son gland fait des va-et-vient lents et appuyés sur le coton de mon boxer. Mon excitation s’envole vers des sommets vertigineux.
Très vite, ses mains font glisser mon boxer le long de mes cuisses. Puis, elles passent sous mon t-shirt et s’en vont exciter mes tétons Son corps plaque et enveloppe le mien de toute sa puissance, son gland entreprend de faire de nouveaux va-et-vient dans ma raie.
« J'ai envie de toi… » je l’entends me chuchoter à l’oreille.
« C’est moi qui ai envie de toi, comme un fou » je lâche, comme une délivrance.
« Tu veux ma queue, hein ? ».
« Je la veux, oui ».
« T’as envie de te faire défoncer, hein ? ».
« Oh, oui !!!! ».
« De te faire remplir ».
« J’ai tout le temps envie d’être rempli de toi, de ton jus… ».
« Tu vas l’avoir mon jus ! ».
Et ce disant, Jérém retire ses mains de mes tétons. Je l’entends cracher, je sens ses doigts lubrifier et travailler brièvement mon trou. Un instant plus tard, sa queue glisse lentement en moi, prend possession de moi, m’envahit.
La position, debout, face au mur, la pénétration directe, la précipitation et l’urgence de ses mouvements, son excitation extrême, son souffle excité dans mon cou : son attitude n’est pas sans me rappeler celle qui avait été la sienne lors de notre arrivé à l’appart de la rue de la Colombette après le bac philo, après que je l’avais bien chauffé pendant toute la durée de l’épreuve…
 Jérém&Nico, le Livre !
Jérém : qui est-il ce garçon?
PS : je cherche un pro des réseaux sociaux et autres moyens de communications pour orchestrer la promo du livre. Candidature à envoyer par retour de ce mail. Merci !
Après une longue gestation, le premier livre de Jérém&Nico est enfin imprimé et prêt à être expédié.
Ce livre reprend les 40 premiers épisodes de l'histoire, enrichis de nombreux passages piochés dans les épisodes plus récents, lorsque ces derniers s’intègrent aux premiers de façon intéressante.
Il en résulte une toute nouvelle structure narrative, allégée et plus cohérente.
Tu peux commander ta copie dédicacée en version papier ou epub (pour liseuse) via la plateforme tipeee.com/jerem-nico-s1.
Pour commander le livre en version epub, cliquer ici.
Pour commander le livre en version papier, cliquer ici.
En achetant le livre papier ou numérique, tu contribues au travail d’écriture de la suite de l’aventure Jérém & Nico.
Merci d’avance pour ta contribution à Jérém et Nico !
Fabien
Jérém&NicoL'inspiration« Jérém & Nico est une histoire qui est venue à moi un jour d’été, un jour où j’ai eu l’intuition que je devais construire autre chose, réorienter ma vie tel un fleuve creusant un nouveau lit qui ferait dévier son cours ».
L'histoireJérémie est un beau brun ténébreux, rugbyman et tombeur de nanas. Son camarade de lycée Nico est un jeune homo à l’esprit pur et rêveur.
Pourtant, c’est Jérémie qui, lors des révisions pour le bac, initie Nico à l’amour physique entre garçons.
Mais alors que Jérémie ne semble intéressé que par le sexe, Nico est fou amoureux de lui. Ainsi, l’amour physique avec le beau brun, pourtant explosif, ne lui suffit pas.
Mais qui est réellement Jérémie ? Comment vit-il leurs « révisions » sexuelles avant le bac ? Que ressent-il vraiment pour Nico ?
Quel rôle pour Thibault, le meilleur ami de Jérémie, à qui Nico finira par se confier ?
L’histoire se déroule à Toulouse entre 2001 et « nos jours ». C’est en effet en 2018 que le Nico adulte raconte ses années lycée et fac.
Nico n’a jamais pu oublier son Jérém. Bien que depuis tant de temps déjà, leurs vies ne marchent plus ensemble.
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