Carol, belle et dangereuse chapitre 2
Récit érotique écrit par Sappho [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 07-03-2022 dans la catégorie Entre-nous, les femmes
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Carol, belle et dangereuse chapitre 2
2 Désillusion
– Allo maman...
– Emily ! T’es où, mon bébé ? Je suis morte d’inquiétude.
Si je me laissais déborder par mes émotions, le portable intraçable fourni par Jude finirait en poussière. Noël approchait, trois mois à South Shell Peak avaient suffi pour découvrir l’essentiel de mes pouvoirs, restait à les maîtriser.
– Je ne peux pas te le dire, mais ne t’en fais pas. Papa va bien ?
– Comment tu veux que ça aille ! Tu as disparu du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Tes tantes aussi sont inquiètes. C’est quoi cette histoire d’arrestation à la fête de la remise des diplômes ? T’es en prison ? J’ai failli abandonner la méditation pour me lancer à ta recherche.
Entendre ma mère pleurer au téléphone me donnait la nausée ; malheureusement, je n’avais pas le choix que de la laisser dans l’ignorance, en partie du moins. Il fallait que je la dissuade de briser la barrière psychique qui maintenait l’essentiel de ses pouvoirs sous cloche, ou toute la famille serait en danger, et papa était incapable de se défendre seul contre la machine à broyer que représentait la CIA.
– Non maman, je travaille pour une agence gouvernementale, un projet confidentiel. Tu dois me faire confiance.
Le silence au bout du fil dit qu’elle avait compris, ma nature de succube n’était plus secrète, ses craintes exprimées pendant mon adolescence se confirmaient.
– « Ils » savent, n’est-ce-pas ?
– Oui et non, je ne leur montre pas tout mon potentiel. Et surtout, ils ignorent que c’est héréditaire, vous êtes en sécurité.
– Quels parents privilégieraient leur bien-être à celui de leur enfant ! Je t’aime, mon bébé, je donnerai ma vie pour protéger la tienne.
C’était bien ce qui me faisait peur. Maintenant, je savais de quoi elle serait capable. Quoique, mes tantes, ma mère et moi au mieux de notre forme, ça devait valoir le coup d’œil. Une équipe de quatre succubes... Non, je devais contenir cet excès d’énergie dont je ne savais quoi faire, nos pouvoirs ne faisaient pas de nous des immortelles.
– Les histoires de certaines de nos ancêtres, ce sont des légendes ?
– Il y a toujours un fond de vérité, Emily. Les hommes qui ont amené les sorcières de Salem au bûcher ne possédaient pas les armes d’aujourd’hui, ça na rien empêché. Ils ont le nombre pour eux.
Oui, et les moralistes du 21ème siècle avaient accès à la technologie, raison de plus pour laisser les parents en dehors, quitte à mentir par omission à ma mère adorée.
– Écoute, maman, tu dois comprendre que je ne voulais pas vivre cachée comme toi. Ce travail me permet d’être moi-même, j’en ai envie autant que j’en ai besoin.
Dans l’écouteur, la déglutition difficile malmena mon tympan.
– D’accord, mon bébé. Promets-moi de rester prudente, l’humanité n’est pas prête, on ne peut pas leur faire confiance.
Une semblable intolérance dans les deux camps rendait la cohabitation impossible, j’étais bien décidée à briser la malédiction.
– Je dois y aller, embrasse papa, je vous aime.
---
Le mess des officiers sonnait le creux, une rotation de commandos venait de quitter la base, la prochaine arriverait après les fêtes de fin d’année, le personnel en poste fixe profitait de la pause de Noël en famille.
– Pourquoi tu bois autant ?
Depuis mon arrivée, je m’offrais chaque soir le luxe de quelques verres de whisky aux frais de la CIA avant de m’éclipser régulièrement avec un membre du personnel féminin, combattant ou non, excepté quand Jude m’accompagnait ; je lui consacrais du temps. Aussi, l’amertume dans sa voix à l’instant présent me laissait pantoise. Je me surpris à prier qu’elle ne soit pas amoureuse. Le sexe d’accord, les sentiments c’était compliqué, surtout avec une libido débordante comme la mienne.
– Ça stimule la production d’endorphine du cerveau sans conséquences hépatiques ou cardiovasculaires sur moi, la chance d’être un monstre. Vous devriez essayer, c’est euphorisant pour une personne normale.
– Tu n’es pas un monstre, seulement différente.
La violence de la réaction me troubla. L’agent Price, mariée sans histoire à un gentil professeur d’université depuis huit ans, perdait son professionnalisme. À cause de moi ? Si elle m’avait laissé la moindre ouverture, j’aurais tenté ma chance. Ce que les femmes pouvaient se montrer compliquées parfois.
– C’était de l’humour au cas où ça vous aurait échappé. Vous êtes plus marrante, d’habitude. On en parle comme des gens civilisés ou on se fait la gueule ?
Jude glissa une main sur la mienne crispée autour de la bouteille, jamais encore elle n’avait osé un contact physique.
– Désolée. Tu pars bientôt.
Enfin ! Je commençais à me faire un peu chier dans ce trou perdu, surtout depuis la fin du dernier stage d’aguerrissement. Je connaissais intimement toutes les femmes de la base, il me fallait de la nouveauté.
– On va où ?
– Pas nous, toi, tu rejoins un nouveau centre d’entrainement dans neuf jours. Je ne peux pas t’en dire davantage.
Mouais, j’aurais préféré une mission après quatre mois de préparation. Mes pouvoirs sous contrôle, je me sentais prête à passer à l’action. Jude guida ma main pour se servir une rasade d’alcool, une première ; elle donnait l’impression de détester son boulot.
– Voyons si ça marche avec moi. Je te préviens, je n’ai jamais fait l’amour avec une femme, alors ne te moque pas.
Ceci étant dit, plus besoin de prendre de gant, son impuissance à renier un désir dérangeant justifiait l’agacement.
– Si ça peut vous rassurer, je n’ai jamais couché avec une espionne à la solde du gouvernement, nous sommes sur un pied d’égalité.
---
Le petit appartement paraissait luxueux, loin de l’austérité militaire imposée au reste de la base ; la CIA multipliait les efforts afin de me garder sous contrôle. La baignoire à remous trônait au centre de la salle de bain, pièce maîtresse d’un espace à la fois ludique et confortable. Jude, détendue après une vingtaine de minutes de massage par hydrojets, s’abandonna à mes soins devant la psyché. J’avais revêtu un peignoir éponge, peut-être afin d’éviter une comparaison offensante à l’agent Price, ou pour lui laisser la possibilité de changer d’avis.
Le bain avait été l’occasion d’une discussion à bâton rompu sur un tas de sujets plus ou moins légers dont l’entretien du corps féminin ; après tout, on était à poil. Le désir fut aussi évoqué, de manière détournée, la crainte d’un faux pas avait retenu Jude de se lâcher complètement, à mon grand regret ; ce choix était le sien, son désir palpable, elle refusait de se dérober. De mon côté, habituée à profiter égoïstement de l’occasion pour récupérer des forces, j’avais envie de la marquer de mon empreinte au lieu de lui laisser le simple souvenir d’un agréable moment.
Au premier baiser dans sa nuque, à peine un effleurement à la pointe des cheveux châtains coiffés à la garçonne, comme si un papillon s’était posé là par maladresse, Jude se crispa, nos regards se croisèrent dans la psyché. Elle n’osait pas bouger par crainte d’effrayer le papillon audacieux qui butinait le sel de sa peau. J’enveloppai ses épaules d’une douceur singulière, promesse des délices à venir. La nervosité s’évapora au fil d’interminables secondes.
Ma bouche glissa d’une lenteur consommée dans le cou tendre, traçant un chemin humide sur la joue veloutée loin des lèvres tentantes. Les senteurs fleuries de lavande des sels de bain mêlées à son odeur naturelle consumèrent mes ultimes réticences. Cet instant précis berçait mes rêves depuis notre rencontre au poste de police du campus. Patiente, je mordillai le lobe puis glissai une langue audacieuse dans l’oreille. Ma proie laissa échapper un soupir.
Mon souffle donna l’impression de réveiller un désir condamné depuis longtemps, Jude se libéra dans un réflexe incontrôlable du drap de bain humide noué au dessus de sa poitrine, rejetant au passage ses certitudes de femme mariée au seul homme qui l’avait connue intimement. L’instant était venu de succomber à d’autres attentions, de s’initier à d’autres frissons, de s’abandonner à d’autres tourments, de savoir enfin à quoi ressemblait le plaisir au féminin pluriel.
Les lèvres dans son cou, je tâtonnai à la recherche de la télécommande de la stéréo que je savais là, quelque part, une voix sensuelle s’éleva bientôt sur un air de chill out. Jude me bouscula gentiment pour se camper dans l’encadrement de la porte mitoyenne entre la salle de bain et la chambre ; d’accord, on ferait l’amour sur le lit. Une main se referma sur la mienne, toute trace de peur avait enfin disparu, je me laissai enlacer pour un slow lascif.
Un regard échangé, l’acceptation du désir, la tendresse partagée d’un sourire, je pris ses lèvres avec douceur. Notre baiser s’éternisa le temps de la danse, sans autre geste que mes mains sur ses hanches et ses bras autour de mon cou. Les corps enlacés, les langues lovées l’une contre l’autre, on laissa monter la fièvre sans provocation inutile. Ma cuisse gauche emprisonnée entre les siennes, Jude frotta les pétales de son sexe jusqu’à déposer un peu de mouille sur ma peau.
---
La nuit étalait son insondable beauté sur les montagnes boisées autour du camp, avec son point culminant à 3577 m couvert de neige éternelle, un immense territoire balisé par les unités des forces spéciales et les exécutants des agences gouvernementales qui en avaient fait leur terrain de jeu.
– Ça devait être magnifique avant notre arrivée, susurra Jude emmitouflée dans une couverture devant la fenêtre au cinquième et dernier étage de l’immeuble CIA.
Je fis semblant de n’avoir rien entendu.
– Qu’est-ce que vous dites ?
D’accord, ça pouvait sembler ridicule de la vouvoyer après un tel débordement, mais l’agent Price symbolisait l’autorité à laquelle je venais de prêter allégeance. Elle se retourna, son regard sombre brillait d’un éclat surnaturel qui ne trouvait pas sa source dans le plaisir.
– Je réfléchis au moyen de te faire sortir d’ici.
Le timbre grave m’interpella. J’avais pourtant été claire, du sexe sans sentiment, pas de relation exclusive, ce serait aller contre ma nature.
– Qu’est-ce qu’il se passe, Jude ? On en a discuté.
– Ça n’a rien à voir, éructa-t-elle avant de retrouver son calme. Will Carter t’a menti, il nous a bernées toutes les deux.
Les magouilles de la CIA n’étaient pas qu’une élucubration née de l’esprit tortueux d’un scénariste hollywoodien ; l’Agence cherchait à s’approprier mes pouvoirs au nom de la sécurité des U.S.A., rien de surprenant. Toutefois, Jude semblait tiraillée entre son serment au drapeau étoilé et l’honnêteté morale dont elle s’efforçait de faire preuve en toute circonstance.
– Si tu me disais ce qu’il en est.
Elle ne remarqua même pas que je venais de la tutoyer.
– Ce camp que tu dois rejoindre en Amérique du Sud, c’est là qu’on entraîne les agents aux techniques d’assassinat. « Ils » veulent faire de toi une tueuse.
Eh ! Carter pouvait aller se faire voir, je ne voulais tuer personne, moi, encore moins sur commande. Sauf lui peut-être, juste pour rigoler.
– Tu le sais comment ?
– Je suis tombée sur une note de service par hasard. Je te jure que j’ignorais leurs intentions, tu dois me faire confiance.
La barrière entre confiance et crédulité se voulait parfois très mince ; toutefois, Jude n’avait rien d’un agent de terrain capable de pleurer sur commande. Je bondis du lit pour l’enlacer, sa peine me brisait davantage le cœur que le fait d’avoir été bernée. Ça, ce n’était pas vraiment une surprise.
– Laisse tomber, je vais m’occuper de ce salopard.
Elle m’entraîna dans le coin cuisine, extirpa un bouteille de whisky et deux verres d’un placard, puis assura le service. J’avais l’impression de voir les neurones à l’œuvre derrière son front haut.
– Ce serait la pire chose à faire, l’Agence ne te le pardonnerait jamais, laisse-moi te sortir de ce merdier.
– Comment ? Je te préviens, pas question de jouer leur putain de jeu.
---
Minuit et demi à la pendule au-dessus du réfrigérateur, personne ne viendrait nous faire chier un dimanche, la CIA aussi se trouvait en effectif réduit à l’approche de Noël. Le regard de Jude gagnait en profondeur au fur et à mesure que la bouteille prenait une bonne claque, je m’attendais à l’entendre crier « Euréka » d’un instant à l’autre, ou je l’espérais. Dans le cas contraire, ce serait à moi d’envisager une solution qu’elle risquait de trouver extrême.
– Tu n’es pas un succube, vas-y mollo.
Jude balaya la remarque d’un haussement des épaules, l’abus d’alcool n’atténuait en rien l’amertume de la désillusion, une petite phrase qui me venait de papa. Car de mon côté, ça me rendait plutôt charitable, allez savoir pourquoi.
– Rassure-toi, je n’ai peut-être pas les qualités requises à l’action sur le terrain, mais le travail d’analyste m’oblige à fréquenter des informateurs, et les rendez-vous se font souvent dans les bars.
– Il m’est arrivé d’entrer dans une église, pas depuis longtemps mais quand même, je ne suis pas croyante pour autant.
Assimiler le rapprochement entre nos histoires ne lui demanda qu’une seconde, puis son rire me réconcilia avec la nature humaine. Un peu seulement, mais c’était mieux que rien vu les circonstances.
– Je fais affaire avec des agents doubles motivés par notre mode de vie occidental, s’esclaffa Jude en partageant le reste du whisky. Boire de l’eau fait rarement partie du rêve américain, c’est comme ça.
Évidemment, elle avait de l’entraînement sous ses airs de ne pas y toucher.
---
Sans trop s’attarder aux préliminaires, Jude me plaqua contre le lit, une main à plat sur ma gorge, le regard brûlant accroché au mien. Elle se pencha lentement puis glissa une langue dans mon oreille.
– Tu la veux dans la chatte ?
La vulgarité lui seyait, ma poitrine se souleva pour toute réponse. J’avais mené la danse la première fois, sans rien exiger en retour, l’heure de la revanche sonnait. Une bouche vorace s’attarda sur mes seins le temps d’en suçoter les pointes tendues, de les faire durcir encore. Une main dans ma touffe me poussa à ronronner comme une chatte en manque de câlins.
Jude continua sa progression jusqu’à se retrouver au bas du lit, agenouillée à même le parquet entre mes cuisses. Ses doigts explorèrent ma vulve par touches légères. La belle n’avait aucune expérience lesbienne, ça ne la privait pas de connaître la nature féminine. Enfin, elle se pencha pour enfouir sa langue dans ma grotte. Je glissai les oreillers sous ma nuque, désireuse de profiter du spectacle.
La merveilleuse sensation m’arracha un soupir précipité. Le feu se répandit dans mes entrailles, ma tête bourdonna d’une musique que moi seule pouvais entendre. De son application dépendait l’extase, Jude s’appliqua. La délivrance fut brutale, intense, un orgasme qui m’amena à la limite de l’inconscience. Elle abandonna mon clito, sa langue retrouva la moiteur de ma grotte. Les mains sur mes seins, la tête renversée dans les oreillers, j’ouvris la bouche sur un feulement rauque, à la recherche d’oxygène.
---
J’avais couru longtemps une grande partie de la nuit de Noël, guidée par un détecteur GPS portable, pour émerger au petit matin d’une épaisse forêt à la limite ouest du camp. La voiture m’attendait comme promis, un coupé sport équipé de pneus hiver conduit par une jeune femme dont les traits ne m’étaient pas complètement inconnus.
– Je suis Lena Price. Il y a des vêtements dans le sac sur la banquette arrière ainsi que des papiers au nom de Carol Hamilton, votre nouvelle identité. Soyez tranquille, la CIA n’a aucun pouvoir sur le territoire des États-Unis, vous ne risquez rien à condition de rester discrète. Jude sèmera des indices pour faire croire à une fuite à l’étranger.
Bien vu, elle aurait mérité une promotion d’avoir monté une telle opération en si peu de temps.
– On va où ?
– Dans le Massachussetts. Ça vous tente de reprendre vos études ? On m’a dit que vous étiez douée. Le gouverneur me doit un service, il peut vous faire intégrer le MIT après les vacances de Noël. Un campus universitaire est une planque idéale le temps que les choses se tassent.
Décidemment, Lena tenait de sa sœur.
– Qu’est-ce que Jude a dit d’autre sur moi ?
– À peu près tout de vos capacités physiques et psychiques, c’est intéressant. Je suis soumise à l’obligation de confidentialité entre un avocat et ses clients, vous n’avez rien à craindre.
Tirer une mutante des griffes de la CIA, faire jouer ses relations pour lui offrir une vie nouvelle, cette nana m’épatait.
– Allo maman...
– Emily ! T’es où, mon bébé ? Je suis morte d’inquiétude.
Si je me laissais déborder par mes émotions, le portable intraçable fourni par Jude finirait en poussière. Noël approchait, trois mois à South Shell Peak avaient suffi pour découvrir l’essentiel de mes pouvoirs, restait à les maîtriser.
– Je ne peux pas te le dire, mais ne t’en fais pas. Papa va bien ?
– Comment tu veux que ça aille ! Tu as disparu du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Tes tantes aussi sont inquiètes. C’est quoi cette histoire d’arrestation à la fête de la remise des diplômes ? T’es en prison ? J’ai failli abandonner la méditation pour me lancer à ta recherche.
Entendre ma mère pleurer au téléphone me donnait la nausée ; malheureusement, je n’avais pas le choix que de la laisser dans l’ignorance, en partie du moins. Il fallait que je la dissuade de briser la barrière psychique qui maintenait l’essentiel de ses pouvoirs sous cloche, ou toute la famille serait en danger, et papa était incapable de se défendre seul contre la machine à broyer que représentait la CIA.
– Non maman, je travaille pour une agence gouvernementale, un projet confidentiel. Tu dois me faire confiance.
Le silence au bout du fil dit qu’elle avait compris, ma nature de succube n’était plus secrète, ses craintes exprimées pendant mon adolescence se confirmaient.
– « Ils » savent, n’est-ce-pas ?
– Oui et non, je ne leur montre pas tout mon potentiel. Et surtout, ils ignorent que c’est héréditaire, vous êtes en sécurité.
– Quels parents privilégieraient leur bien-être à celui de leur enfant ! Je t’aime, mon bébé, je donnerai ma vie pour protéger la tienne.
C’était bien ce qui me faisait peur. Maintenant, je savais de quoi elle serait capable. Quoique, mes tantes, ma mère et moi au mieux de notre forme, ça devait valoir le coup d’œil. Une équipe de quatre succubes... Non, je devais contenir cet excès d’énergie dont je ne savais quoi faire, nos pouvoirs ne faisaient pas de nous des immortelles.
– Les histoires de certaines de nos ancêtres, ce sont des légendes ?
– Il y a toujours un fond de vérité, Emily. Les hommes qui ont amené les sorcières de Salem au bûcher ne possédaient pas les armes d’aujourd’hui, ça na rien empêché. Ils ont le nombre pour eux.
Oui, et les moralistes du 21ème siècle avaient accès à la technologie, raison de plus pour laisser les parents en dehors, quitte à mentir par omission à ma mère adorée.
– Écoute, maman, tu dois comprendre que je ne voulais pas vivre cachée comme toi. Ce travail me permet d’être moi-même, j’en ai envie autant que j’en ai besoin.
Dans l’écouteur, la déglutition difficile malmena mon tympan.
– D’accord, mon bébé. Promets-moi de rester prudente, l’humanité n’est pas prête, on ne peut pas leur faire confiance.
Une semblable intolérance dans les deux camps rendait la cohabitation impossible, j’étais bien décidée à briser la malédiction.
– Je dois y aller, embrasse papa, je vous aime.
---
Le mess des officiers sonnait le creux, une rotation de commandos venait de quitter la base, la prochaine arriverait après les fêtes de fin d’année, le personnel en poste fixe profitait de la pause de Noël en famille.
– Pourquoi tu bois autant ?
Depuis mon arrivée, je m’offrais chaque soir le luxe de quelques verres de whisky aux frais de la CIA avant de m’éclipser régulièrement avec un membre du personnel féminin, combattant ou non, excepté quand Jude m’accompagnait ; je lui consacrais du temps. Aussi, l’amertume dans sa voix à l’instant présent me laissait pantoise. Je me surpris à prier qu’elle ne soit pas amoureuse. Le sexe d’accord, les sentiments c’était compliqué, surtout avec une libido débordante comme la mienne.
– Ça stimule la production d’endorphine du cerveau sans conséquences hépatiques ou cardiovasculaires sur moi, la chance d’être un monstre. Vous devriez essayer, c’est euphorisant pour une personne normale.
– Tu n’es pas un monstre, seulement différente.
La violence de la réaction me troubla. L’agent Price, mariée sans histoire à un gentil professeur d’université depuis huit ans, perdait son professionnalisme. À cause de moi ? Si elle m’avait laissé la moindre ouverture, j’aurais tenté ma chance. Ce que les femmes pouvaient se montrer compliquées parfois.
– C’était de l’humour au cas où ça vous aurait échappé. Vous êtes plus marrante, d’habitude. On en parle comme des gens civilisés ou on se fait la gueule ?
Jude glissa une main sur la mienne crispée autour de la bouteille, jamais encore elle n’avait osé un contact physique.
– Désolée. Tu pars bientôt.
Enfin ! Je commençais à me faire un peu chier dans ce trou perdu, surtout depuis la fin du dernier stage d’aguerrissement. Je connaissais intimement toutes les femmes de la base, il me fallait de la nouveauté.
– On va où ?
– Pas nous, toi, tu rejoins un nouveau centre d’entrainement dans neuf jours. Je ne peux pas t’en dire davantage.
Mouais, j’aurais préféré une mission après quatre mois de préparation. Mes pouvoirs sous contrôle, je me sentais prête à passer à l’action. Jude guida ma main pour se servir une rasade d’alcool, une première ; elle donnait l’impression de détester son boulot.
– Voyons si ça marche avec moi. Je te préviens, je n’ai jamais fait l’amour avec une femme, alors ne te moque pas.
Ceci étant dit, plus besoin de prendre de gant, son impuissance à renier un désir dérangeant justifiait l’agacement.
– Si ça peut vous rassurer, je n’ai jamais couché avec une espionne à la solde du gouvernement, nous sommes sur un pied d’égalité.
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Le petit appartement paraissait luxueux, loin de l’austérité militaire imposée au reste de la base ; la CIA multipliait les efforts afin de me garder sous contrôle. La baignoire à remous trônait au centre de la salle de bain, pièce maîtresse d’un espace à la fois ludique et confortable. Jude, détendue après une vingtaine de minutes de massage par hydrojets, s’abandonna à mes soins devant la psyché. J’avais revêtu un peignoir éponge, peut-être afin d’éviter une comparaison offensante à l’agent Price, ou pour lui laisser la possibilité de changer d’avis.
Le bain avait été l’occasion d’une discussion à bâton rompu sur un tas de sujets plus ou moins légers dont l’entretien du corps féminin ; après tout, on était à poil. Le désir fut aussi évoqué, de manière détournée, la crainte d’un faux pas avait retenu Jude de se lâcher complètement, à mon grand regret ; ce choix était le sien, son désir palpable, elle refusait de se dérober. De mon côté, habituée à profiter égoïstement de l’occasion pour récupérer des forces, j’avais envie de la marquer de mon empreinte au lieu de lui laisser le simple souvenir d’un agréable moment.
Au premier baiser dans sa nuque, à peine un effleurement à la pointe des cheveux châtains coiffés à la garçonne, comme si un papillon s’était posé là par maladresse, Jude se crispa, nos regards se croisèrent dans la psyché. Elle n’osait pas bouger par crainte d’effrayer le papillon audacieux qui butinait le sel de sa peau. J’enveloppai ses épaules d’une douceur singulière, promesse des délices à venir. La nervosité s’évapora au fil d’interminables secondes.
Ma bouche glissa d’une lenteur consommée dans le cou tendre, traçant un chemin humide sur la joue veloutée loin des lèvres tentantes. Les senteurs fleuries de lavande des sels de bain mêlées à son odeur naturelle consumèrent mes ultimes réticences. Cet instant précis berçait mes rêves depuis notre rencontre au poste de police du campus. Patiente, je mordillai le lobe puis glissai une langue audacieuse dans l’oreille. Ma proie laissa échapper un soupir.
Mon souffle donna l’impression de réveiller un désir condamné depuis longtemps, Jude se libéra dans un réflexe incontrôlable du drap de bain humide noué au dessus de sa poitrine, rejetant au passage ses certitudes de femme mariée au seul homme qui l’avait connue intimement. L’instant était venu de succomber à d’autres attentions, de s’initier à d’autres frissons, de s’abandonner à d’autres tourments, de savoir enfin à quoi ressemblait le plaisir au féminin pluriel.
Les lèvres dans son cou, je tâtonnai à la recherche de la télécommande de la stéréo que je savais là, quelque part, une voix sensuelle s’éleva bientôt sur un air de chill out. Jude me bouscula gentiment pour se camper dans l’encadrement de la porte mitoyenne entre la salle de bain et la chambre ; d’accord, on ferait l’amour sur le lit. Une main se referma sur la mienne, toute trace de peur avait enfin disparu, je me laissai enlacer pour un slow lascif.
Un regard échangé, l’acceptation du désir, la tendresse partagée d’un sourire, je pris ses lèvres avec douceur. Notre baiser s’éternisa le temps de la danse, sans autre geste que mes mains sur ses hanches et ses bras autour de mon cou. Les corps enlacés, les langues lovées l’une contre l’autre, on laissa monter la fièvre sans provocation inutile. Ma cuisse gauche emprisonnée entre les siennes, Jude frotta les pétales de son sexe jusqu’à déposer un peu de mouille sur ma peau.
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La nuit étalait son insondable beauté sur les montagnes boisées autour du camp, avec son point culminant à 3577 m couvert de neige éternelle, un immense territoire balisé par les unités des forces spéciales et les exécutants des agences gouvernementales qui en avaient fait leur terrain de jeu.
– Ça devait être magnifique avant notre arrivée, susurra Jude emmitouflée dans une couverture devant la fenêtre au cinquième et dernier étage de l’immeuble CIA.
Je fis semblant de n’avoir rien entendu.
– Qu’est-ce que vous dites ?
D’accord, ça pouvait sembler ridicule de la vouvoyer après un tel débordement, mais l’agent Price symbolisait l’autorité à laquelle je venais de prêter allégeance. Elle se retourna, son regard sombre brillait d’un éclat surnaturel qui ne trouvait pas sa source dans le plaisir.
– Je réfléchis au moyen de te faire sortir d’ici.
Le timbre grave m’interpella. J’avais pourtant été claire, du sexe sans sentiment, pas de relation exclusive, ce serait aller contre ma nature.
– Qu’est-ce qu’il se passe, Jude ? On en a discuté.
– Ça n’a rien à voir, éructa-t-elle avant de retrouver son calme. Will Carter t’a menti, il nous a bernées toutes les deux.
Les magouilles de la CIA n’étaient pas qu’une élucubration née de l’esprit tortueux d’un scénariste hollywoodien ; l’Agence cherchait à s’approprier mes pouvoirs au nom de la sécurité des U.S.A., rien de surprenant. Toutefois, Jude semblait tiraillée entre son serment au drapeau étoilé et l’honnêteté morale dont elle s’efforçait de faire preuve en toute circonstance.
– Si tu me disais ce qu’il en est.
Elle ne remarqua même pas que je venais de la tutoyer.
– Ce camp que tu dois rejoindre en Amérique du Sud, c’est là qu’on entraîne les agents aux techniques d’assassinat. « Ils » veulent faire de toi une tueuse.
Eh ! Carter pouvait aller se faire voir, je ne voulais tuer personne, moi, encore moins sur commande. Sauf lui peut-être, juste pour rigoler.
– Tu le sais comment ?
– Je suis tombée sur une note de service par hasard. Je te jure que j’ignorais leurs intentions, tu dois me faire confiance.
La barrière entre confiance et crédulité se voulait parfois très mince ; toutefois, Jude n’avait rien d’un agent de terrain capable de pleurer sur commande. Je bondis du lit pour l’enlacer, sa peine me brisait davantage le cœur que le fait d’avoir été bernée. Ça, ce n’était pas vraiment une surprise.
– Laisse tomber, je vais m’occuper de ce salopard.
Elle m’entraîna dans le coin cuisine, extirpa un bouteille de whisky et deux verres d’un placard, puis assura le service. J’avais l’impression de voir les neurones à l’œuvre derrière son front haut.
– Ce serait la pire chose à faire, l’Agence ne te le pardonnerait jamais, laisse-moi te sortir de ce merdier.
– Comment ? Je te préviens, pas question de jouer leur putain de jeu.
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Minuit et demi à la pendule au-dessus du réfrigérateur, personne ne viendrait nous faire chier un dimanche, la CIA aussi se trouvait en effectif réduit à l’approche de Noël. Le regard de Jude gagnait en profondeur au fur et à mesure que la bouteille prenait une bonne claque, je m’attendais à l’entendre crier « Euréka » d’un instant à l’autre, ou je l’espérais. Dans le cas contraire, ce serait à moi d’envisager une solution qu’elle risquait de trouver extrême.
– Tu n’es pas un succube, vas-y mollo.
Jude balaya la remarque d’un haussement des épaules, l’abus d’alcool n’atténuait en rien l’amertume de la désillusion, une petite phrase qui me venait de papa. Car de mon côté, ça me rendait plutôt charitable, allez savoir pourquoi.
– Rassure-toi, je n’ai peut-être pas les qualités requises à l’action sur le terrain, mais le travail d’analyste m’oblige à fréquenter des informateurs, et les rendez-vous se font souvent dans les bars.
– Il m’est arrivé d’entrer dans une église, pas depuis longtemps mais quand même, je ne suis pas croyante pour autant.
Assimiler le rapprochement entre nos histoires ne lui demanda qu’une seconde, puis son rire me réconcilia avec la nature humaine. Un peu seulement, mais c’était mieux que rien vu les circonstances.
– Je fais affaire avec des agents doubles motivés par notre mode de vie occidental, s’esclaffa Jude en partageant le reste du whisky. Boire de l’eau fait rarement partie du rêve américain, c’est comme ça.
Évidemment, elle avait de l’entraînement sous ses airs de ne pas y toucher.
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Sans trop s’attarder aux préliminaires, Jude me plaqua contre le lit, une main à plat sur ma gorge, le regard brûlant accroché au mien. Elle se pencha lentement puis glissa une langue dans mon oreille.
– Tu la veux dans la chatte ?
La vulgarité lui seyait, ma poitrine se souleva pour toute réponse. J’avais mené la danse la première fois, sans rien exiger en retour, l’heure de la revanche sonnait. Une bouche vorace s’attarda sur mes seins le temps d’en suçoter les pointes tendues, de les faire durcir encore. Une main dans ma touffe me poussa à ronronner comme une chatte en manque de câlins.
Jude continua sa progression jusqu’à se retrouver au bas du lit, agenouillée à même le parquet entre mes cuisses. Ses doigts explorèrent ma vulve par touches légères. La belle n’avait aucune expérience lesbienne, ça ne la privait pas de connaître la nature féminine. Enfin, elle se pencha pour enfouir sa langue dans ma grotte. Je glissai les oreillers sous ma nuque, désireuse de profiter du spectacle.
La merveilleuse sensation m’arracha un soupir précipité. Le feu se répandit dans mes entrailles, ma tête bourdonna d’une musique que moi seule pouvais entendre. De son application dépendait l’extase, Jude s’appliqua. La délivrance fut brutale, intense, un orgasme qui m’amena à la limite de l’inconscience. Elle abandonna mon clito, sa langue retrouva la moiteur de ma grotte. Les mains sur mes seins, la tête renversée dans les oreillers, j’ouvris la bouche sur un feulement rauque, à la recherche d’oxygène.
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J’avais couru longtemps une grande partie de la nuit de Noël, guidée par un détecteur GPS portable, pour émerger au petit matin d’une épaisse forêt à la limite ouest du camp. La voiture m’attendait comme promis, un coupé sport équipé de pneus hiver conduit par une jeune femme dont les traits ne m’étaient pas complètement inconnus.
– Je suis Lena Price. Il y a des vêtements dans le sac sur la banquette arrière ainsi que des papiers au nom de Carol Hamilton, votre nouvelle identité. Soyez tranquille, la CIA n’a aucun pouvoir sur le territoire des États-Unis, vous ne risquez rien à condition de rester discrète. Jude sèmera des indices pour faire croire à une fuite à l’étranger.
Bien vu, elle aurait mérité une promotion d’avoir monté une telle opération en si peu de temps.
– On va où ?
– Dans le Massachussetts. Ça vous tente de reprendre vos études ? On m’a dit que vous étiez douée. Le gouverneur me doit un service, il peut vous faire intégrer le MIT après les vacances de Noël. Un campus universitaire est une planque idéale le temps que les choses se tassent.
Décidemment, Lena tenait de sa sœur.
– Qu’est-ce que Jude a dit d’autre sur moi ?
– À peu près tout de vos capacités physiques et psychiques, c’est intéressant. Je suis soumise à l’obligation de confidentialité entre un avocat et ses clients, vous n’avez rien à craindre.
Tirer une mutante des griffes de la CIA, faire jouer ses relations pour lui offrir une vie nouvelle, cette nana m’épatait.
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