Faiblesse éthylique
Récit érotique écrit par J A [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 08-04-2023 dans la catégorie Entre-nous, hommes et femmes
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Faiblesse éthylique
Cela faisait huit ans que j’étais en couple avec Dominique et je n’en regrettais pas une seule seconde. Nous avions décidé de ne pas nous marier pour ne pas laisser ce carcan nous étouffer et à l’approche de la trentaine, nous étions convaincus d’avoir choisi la bonne solution. Notre couple était basé sur la confiance, le respect, la discussion et surtout l’amour. Nous avions eus nos hauts et nos bas mais nous avions toujours surmonté les difficultés ensemble, certains d’avoir trouvé la formule magique. D’autant plus, que plusieurs nos amis étaient en plein processus de divorce.
Notre histoire d’amour avait commencé à la fac et n’avait pas faibli sous le poids des ans. Toujours complices et toujours (presque) d’accord sur tout, nous étions heureux et enviés par beaucoup de nos amis.
Une des chose qui nous avait rapprochés, c’était que nous étions tous deux orphelins. Le père de Dom était décédé avant sa naissance dans un accident et il avait perdu sa mère peu avant de partir à l’université. Il racontait toujours comment il avait fui son patelin et sa famille de bigots bourrins. Il n’y retournait plus et prenait, de temps en temps, des nouvelles de ceux qui étaient le plus fréquentables. Pour ma part j’avais perdu mes parents très jeune et j’avais grandi en foyer, n’ayant pas d’autre famille
C’était trop beau pour durer malheureusement et un petit grain de sable vint enrayer la machine. Dom se déplaçait régulièrement pour son boulot, jamais plus d’une, voire deux nuits à l’extérieur. Cette fois ce fut une urgence et il dut rester loin une dizaine de jours. Ma copine Sonia nous avait invités à dîner et, une fois n’est pas coutume, j’y allais seule.
Nous étions une vingtaine de convives, Sonia qui venait de divorcer semblait vouloir rattraper le temps perdu, en organisant régulièrement des soirées. À peine arrivée, Sonia se précipita vers moi et me fit les honneurs de sa nouvelle maison, financée par une généreuse pension alimentaire. Après avoir fait le tour de toutes les pièces, elle me présenta son cousin, le beau Serge. L’expression vient d’elle pas de moi, mais elle le décrivait parfaitement.
Après avoir fait les présentations, m’avoir servi un verre et insisté sur le beau couple que nous faisions, Sonia nous laissa seuls. C’est vrai qu’il était beau, il dégageait une aura de virilité et il le savait. Ce devait être un bourreau des cœurs auquel toutes succombaient irrémédiablement, mais je n’étais pas ce genre de femme.
L’apéro dura longtemps et Sonia m’amena plusieurs verres, ce qui fit que je restai tout du long avec Serge. Il était intelligent et savait parler, c’était très agréable. Quand nous passâmes à table, ma copine m’avait bien entendu assise à côté de son cousin, en bout de table. C’était mon seul interlocuteur, nous continuâmes donc à converser dans notre bulle. Il était charmant et charmeur et ne tarissait pas de compliments sur moi, mes goûts, ma conversation, mon physique. Mon verre ne désemplissait pas et je glissais lentement vers un état de douce euphorie.
Il commença par poser sa main sur la mienne qu’il la caressa doucement, puis elle se posa sur mon genou et remonta lentement sur ma cuisse. J’étais ivre et ses attentions ne me paraissaient pas déplacées, mais agréables et stimulantes au contraire. Sonia me lançait régulièrement des regards et semblait ravie de la tournure des événements.
J’avais de plus en plus chaud et quand j’émis le souhait d’aller prendre l’air sur la terrasse, Serge ne se fit pas prier pour m’accompagner. Il me prit par la taille et m’aida à sortir car le sol tanguait sous mes pieds. J’étais bien dehors au frais, il m’avait enlacée pour m’éviter tomber et me tenait serrée contre lui. Je me laissais aller et posais ma tête sur son épaule. Je ne vis pas venir son baiser lorsqu’il se pencha vers moi et m’embrassa tendrement. Puis sa bouche s’empara avidement de la mienne et je répondis tout aussi violemment, ma langue venant rejoindre la sienne.
Je ne sais pas combien de temps nous restâmes dehors à nous embrasser, mais d’autres invités sortirent bruyamment, ce qui me fit sursauter et me sépara de Serge. Je restai à distance pendant un moment, en essayant de reprendre mes esprits. J’avais trop bu et je faisais n’importe quoi, je devais partir au plus vite. Je profitai du moment où il était accaparé par une autre invitée pour me rendre dans la chambre où nous avions laissé nos vestes.
J’étais en train de chercher la mienne dans la pile qu’il y avait sur le lit, quand je sentis une présence derrière moi et une main se poser sur ma hanche.
- Tu veux déjà partir ?
- Oui… oui je dois rentrer.
- Quelqu’un t’attend à la maison ?
- Non… non pas ce soir, mais je suis fatiguée.
- Reste encore un peu, je te ramènerai après.
Serge me fit pivoter, tout en me caressant et il m’embrassa à nouveau. Ces sensations m’envoyèrent une décharge au creux des reins, j’étais excitée, très excitée. Ses mains caressaient tout mon corps et s’attardaient sur mes seins. Il me poussa et me coucha sur le lit à côté de la montagne de vestes. Une de ses mains se fit plus entreprenante, remonta le long de ma cuisse et atteignit mon entrejambe. J’ai honte de le dire, mais je coulais comme le miel. Doucement il passa sa main dans ma culotte et entreprit de me caresser. Je gémissais au comble du bonheur. Il me pénétrait avec deux doigts puis il revenait me caresser le clitoris, je n’allais pas tarder à jouir. Il ôta sa main, se releva et commença à m’enlever ma culotte. Ce fut à ce moment-là que j’eus un éclair de lucidité. Non ! Je ne pouvais pas faire ça, j’aimais Dom. Je me relevais et le repoussais violemment.
- Non, ne me touche pas !
- Mais enfin ! Tu en as autant envie que moi, ne dis pas le contraire.
- Non c’est fini, lâche-moi, je dois m’en aller.
Le beau Serge essaya encore d’argumenter mais je m’enfuis, morte de honte en repensant à ce que j’avais fait et pire, à ce que j’avais failli faire. Je rentrai en taxi et me précipitai sous la douche pour essayer de me laver de tous les attouchements, les sensations et les souvenirs de cette soirée.
Je passai le reste du week-end à ressasser mon comportement pendant cette soirée. J’avais failli tromper Dominique et je culpabilisais au souvenir de ce que j’avais accordé à Serge. Cette intimité, ces préliminaires et ce presque orgasme me bouffaient de l’intérieur. En début de semaine j’allai travailler sans enthousiasme en attendant que Dom rentre. Mercredi à mon retour il était déjà rentré et je courus me blottir dans ses bras, j’avais besoin de réconfort, de sécurité, de tendresse et de son amour.
J’aurais dû lui parler de ce qui s’était passé avec Serge, mais par lâcheté j’ai préféré cacher la merde au chat, par peur de sa réaction. Nos retrouvailles furent brûlantes après une semaine de séparation. Le seul moment difficile fut quand il me caressa le clitoris, ce qui me fit me crisper au souvenir des doigts de Serge. Ce moment de gêné passé, nous fîmes l’amour comme des affamés dans tous les recoins de la maison. Je jouis dans presque toutes les pièces, même lorsqu’il me sodomisa appuyée sur la table de la cuisine, c’était la première fois que j’avais du plaisir avec le sexe anal.
J’avais retrouvé ma joie de vivre et repoussé l’épisode avec Serge dans les limbes de ma mémoire. Cela ne dura cependant pas et dès le week-end suivant je commençai à recevoir des messages de Serge, sa cousine lui avait certainement donné mon numéro. Il voulait me rencontrer, il n’arrivait pas à m’oublier, il me suppliait de lui répondre. J’avais beau refuser, il revenait sans cesse à la charge. Je me sentais coupable et j’avais peur que Dom ne s’aperçoive de quelque chose, je finis donc par accepter un rendez-vous dans un café après le boulot, je voulais mettre les choses au point et en finir.
Quand j’arrivai Serge était déjà là, tout sourire. Il avait choisi une table en plein milieu alors que j’aurais préféré un recoin plus discret, je n’avais pas envie qu’on nous voie ensemble, j’avais honte. Il m’accueilli chaleureusement et se leva pour me faire la bise. Quand je réalisai qu’il voulait m’embrasser sur la bouche, je tournai la tête et le repoussai vers sa chaise.
- Ça suffit maintenant ! Je suis venue mettre les choses au point.
- Assieds-toi donc. Qu’est-ce que tu veux boire ?
- Rien, je suis pressée.
- Nous avons tout notre temps, nous pouvons reprendre là où nous en étions restés.
- Oublie cette soirée. Ce n’était qu’un dérapage dû à l’alcool. J’étais ivre, j’ai fait une connerie et failli en faire une plus grosse. J’aime Dominique et je n’envisage pas de le tromper.
- Pourtant tu en avais envie, je l’ai bien senti.
- L’alcool rien d’autre. Maintenant, je souhaite que tu sortes de ma vie. Je ne veux plus rien savoir de toi, j’espère que c’est clair. Salut.
Je n’attendis pas la réponse de Serge, je me levai et sortis sans un regard en arrière. J’étais à peine arrivée dans la rue que je reçu un message de sa part :
« Toi et moi c’est inévitable, nous sommes faits l’un pour l’autre »
Cette fois c’en était trop, je le bloquai définitivement. Cet abruti était tellement imbu de lui-même qu’il ne comprenait pas qu’on lui réponde non, même si à ma grande honte j’avais trop tardé à le repousser chez Sonia. Je n’osais pas en parler à Dom car j’avais laissé Serge aller beaucoup trop loin et j’avais du mal à l’assumer. En plus ce n’était pas le moment de mettre ce genre du sujet sur le tapis, Dom était submergé de boulot, irascible, très distant et il me tournait le dos tous les soirs dans le lit.
Les jours suivants furent de plus en plus tendus à la maison et quand Sonia me proposa un resto à midi, j’accueilli avec joie cette distraction. J’arrivai en avance et m’installai en l’attendant. Je ne le vis qu’une fraction de seconde avant qu’il ne s’assoie, c’était Serge.
- Ne m’en veut pas, j’ai supplié Sonia de m’arranger une rencontre avec toi.
- Merde qu’est-ce que tu veux ? J’ai pourtant été claire avec toi.
- Je sais, mais souvent on dit des choses parce qu’on a peur et on les regrette après. Je suis sûr qu’au fond de toi, tu désires être avec moi. Tu ne peux pas nier ton attirance pour moi, tu ne simulais pas chez Sonia.
- Écoute j’en ai marre. Toi et moi c’est fini, cela n’a même jamais commencé. C’est ton délire et je ne le partage pas. Oublie-moi, sinon je porte plainte pour harcèlement.
- Parfait, ton mari saura ce qu’il se passe entre nous et cela te libérera.
- Va te faire foutre connard !
Folle de rage, je me levai et sortis. Ce mec était un vrai con, comment est-ce que j’avais pu autant ma laisser aller avec lui ? Je m’en voulais d’avoir été aussi faible et stupide. Quant à Sonia, elle allait m’entendre. Je retournai au boulot et travaillai avec acharnement tout l’après-midi.
Le soir en rentrant, je trouvai Dom morose et épuisé. Il ne voulut ni discuter, ni manger et partit se coucher prétextant une grande fatigue. Moi aussi j’étais fatiguée, c’était vraiment une sale période, vivement qu’elle se termine. Dominique était épuisé, stressé et distant, Sonia jouait à la conne et ce connard de Serge n’acceptait pas mon refus, tout cela me mettait sur les rotules.
Le lendemain à mon réveil Dom était déjà parti travailler, il devait vraiment crouler sous le travail pour se lever si tôt. Pour ma part, je me trainai jusqu’au bureau et essayai d’être productive pour me changer les idées. Le soir je rentrai lessivée par la tension qui m’habitait ces derniers temps. Dom n’était pas encore rentré, je sentis un malaise une fois la porte franchie.
J’allai dans la chambre pour me changer et je vis une feuille posée sur le lit. Je la pris et le premier mot que je lus me liquéfia les organes : Corinne.
Pas ma chérie, mon amour ou un de mes petits surnoms affectueux, non. Rien que mon prénom, sec, concis, brutal. Je continuai à lire pendant que mon âme s’effondrait à mes pieds.
« Corinne,
Nous n’avons pas voulu nous marier pour nous prouver que si nous étions ensemble, c’était parce que nous nous aimions et non parce que c’était écrit sur un bout de papier.
Quand il y avait le moindre problème nous en discutions et décidions en conséquence.
J’ai récemment appris que tu avais un amant. J’ai d’abord refusé de le croire, mais j’ai reçu les preuves de ton infidélité et de vos rencontres régulières.
Je t’en veux de ne pas m’en avoir parlé. Si tu ne m’aimais plus il fallait me le dire, nous nous étions promis d’être honnêtes l’un envers l’autre. S’il n’y a plus ni confiance ni amour, nous n’avons plus rien à faire ensemble.
Aujourd’hui, j’ai déménagé mes affaires, j’ai laissé tout ce que nous avions acheté en commun, je n’en veux pas, je veux recommencer à zéro sans rien qui me rattache au passé.
Je te laisse les tristes preuves de ta trahison sur la clé USB à côté de ma lettre.
Je ne souhaite pas te revoir, jamais. »
J’étais effondrée, en larmes, terrifiée. Mon avenir venait de disparaitre, mon amour était parti. Ce n’était pas possible, je n’avais pas d’amant, même si la soirée chez Sonia avait salement dérapé, comment avait-il pu penser cela ? Je me levai paniquée et j’ouvris tous les tiroirs et toutes les armoires ; il ne restait que mes affaires.
Je me réveillai au matin en boule sur le lit, je m’étais endormie sans m’en rendre compte, épuisée de tant pleurer. Je me déshabillai et me dirigeai vers la douche. Je laissai l’eau couler en espérant me réveiller de ce cauchemar, mais c’était la réalité. J’avais désespérément essayé de joindre Dom hier soir, mais il m’avait bloquée partout. Avant de sombrer j’avais décidé de passer à son travail ce matin.
J’allais partir quand je remarquai la clé USB que Dom mentionnait dans sa lettre. Je voulais savoir, je l’insérai dans l’ordi et ouvris le fichier ; c’était dégueulasse sans le moindre doute. Sur les premières photos, Serge et moi nous embrassions passionnément sur la terrasse mais les suivantes étaient les plus dures à regarder. J’étais couchée sur le lit et Serge penché sur moi me caressais, on voyait sa main glissée dans ma culotte et le plaisir que j’y prenais. Les dernières photos nous montraient au café et au restaurant lors de nos deux rencontres postérieures.
J’étais atterrée, je comprenais la réaction de Dom et les conclusions qu’il en avait tiré. Je savais que j’avais grave merdé pendant la soirée de Sonia, mais le voir en image rendait la chose encore plus sordide. Rétrospectivement, j’aurais dû parler de cette soirée à Dom, car les conséquences n’auraient pu être pires, mais j’avais été lâche et j’avais choisi la solution de facilité : ne rien dire et oublier.
Je me précipitai à son travail, je devais lui parler, lui raconter la vérité. J’avais terriblement déconné mais pas au point qu’il imaginait. Je ne m’arrêtai pas à l’accueil et montai directement à son étage. Son bureau était vide, totalement débarrassé. Je cherchai une tête connue parmi ses collègues.
- Salut Paul, je cherche Dom.
- Il est parti. Je pensais que tu le savais.
- Quoi ? Parti où ?
- Il a accepté le poste que personne ne voulait au Canada. Comme il pouvait partir tout de suite, la direction était ravie. Il a dû décoller ce matin.
Je dus m’appuyer sur le bureau pour ne pas tomber. Un étau me serrait la poitrine et m’empêchait de respirer. Dom était parti le plus loin possible, dégoûté par ce que j’avais fait. Je sortis sans dire un mot à son collègue interloqué. Je titubai vers la sortie et rentrai, par je ne sais quel miracle, à la maison.
Une fois arrivée je tournai en rond à la maison en imaginant des scénarios plus invraisemblables les uns que les autres. Je revenais sur les événements et je les modifiais pour correspondre à ce que je souhaitais. Je n’avais pas cédé à Serge, je ne le connaissais même pas car il avait été renversé par une voiture en venant à la soirée ou agressé dans une ruelle ou mieux encore, il n’était jamais né. Je lui avais planté ma fourchette quand il avait commencé à me caresser la main ou je l’avais jeté de la terrasse. Je délirais en inventant des scénarios car je ne voulais pas affronter cette réalité qui me faisait si mal.
Ces ignobles photos. Comment ? Qui ? Pourquoi ? Et soudain une révélation, je savais qui. Je me précipitai à nouveau dehors, je devais rendre une visite, c’était loin mais j’avais envie de marcher. Arrivée devant la porte je sonnai et Sonia l’ouvrit.
- Salut Corinne, quelle surprise de…
Je frappai de toutes mes forces. Je n’avais jamais levé la main sur qui que ce soit, mais là, ma rage était indescriptible. Ce fut comme de frapper un mur, une douleur fulgurante traversa ma main, mais je m’en foutais car un mur ne s’écroule pas le visage couvert de sang.
Je sortis dans la rue et remarquai que ma main enflait à vue d’œil et me faisait de plus en plus mal. Je la passai sous l’eau d’une fontaine qui était sur mon chemin mais rien n’y faisait, je décidai donc et passer aux urgences. L’infirmière à qui je racontai avoir frappé le mur à la suite de ma rupture avec mon compagnon, me regarda avec commisération.
Une heure plus tard j’étais en salle de plâtre quand je vis passer un brancard avec une silhouette couverte de sang, l’ambulancier donnait les premières constatations à un médecin.
- Jeune femme 27 ans. Fracture du nez, perte de trois incisives, important trauma du visage. La police pense à une violente agression.
- OK on va faire des radios en urgence pour voir l’étendue des dégâts.
J’avais fait fort mais je ne regrettais rien, même si je devais finir en prison, ce qui n’arriva finalement pas. J’appris quelques mois plus tard que Sonia s’était réveillée avec une amnésie rétrograde, sans aucun souvenir des 24h précédent son agression. Dans l’état où j’étais, j’avais oublié mon portable et il n’avait pas borné dans la zone, personne ne m’avait vue, je n’étais donc pas le moins du monde suspecte. Faisant le deuil de ma relation avec Dom, je m’étais coupée du monde extérieur et personne n’avait vu mon plâtre, qui aurait peut-être pu permettre de faire le rapprochement.
Trois ans sont passés et j’habite toujours les décombres de ma vie, les ruines de mon histoire d’amour. Je n’ai pas déménagé même si le loyer est élevé pour moi seule, je m’accroche à l’espoir que Dominique revienne un jour. J’ai vaguement essayé de l’oublier et de refaire ma vie deux ou trois fois, mais sans succès. Aucun de ces hommes n’était Dominique, pas un ne lui arrivait pas à la cheville, à quelque niveau que ce soit.
Je ne m’étais jamais projetée dans le futur quand j’étais avec Dom, mais je réalisai que j’avais espéré fonder une famille pour mes trente ans. Maintenant que je les avais, ma solitude me pesait d’autant plus. Après le travail, plutôt que de rentrer à la maison constater le vide mon existence, je déambulais souvent sans but pour essayer de me changer les idées, sans succès je l’avoue.
Ce jour-là, le printemps approchait de son terme et à 19h il faisait jour. Je traversais un parc le regard dans le vide quand quelque chose attira mon attention et mon regard se focalisa sur… Dom !
Il était assis sur un banc à côté d’une jeune femme avec qui il discutait. Devant lui, accroché à sa jambe, un petit garçon de deux ans maximum cherchait à attirer son attention. Dom le prit dans ses bras et le couvrit de bisous pour le plus grand plaisir du bambin qui riait aux éclats.
Dom avait refait sa vie, il était père et tous mes fantasmes de retrouvailles et de réconciliation s’effondraient. Je me dirigeai dans une sorte de brouillard vers le banc le plus proche où je me laissai tomber plus que je ne m’assis. Je contemplai la vie dont j’avais rêvé se dérouler sous mes yeux. Ils avaient l’air si heureux que la jalousie me tordait les tripes. Je l’avais mérité mais ça n’en faisait pas moins mal.
Dom se leva, dit quelque chose à son épouse et partit. Je restai à contempler sa famille jusqu’à ce que sa femme se lève et parte à son tour. Tel un automate, je me levai et les suivis toujours fascinée. Ils avançaient lentement car le petit garçon têtu avait tenu à marcher à côté de sa maman.
Ils étaient sortis du parc, quand un clochard s’accrocha à la poussette et interpella la jeune maman. Le ton de la discussion monta rapidement, la femme essayait de se dégager, mais le clodo ne voulait pas lâcher prise. Le petit garçon avait pris peur et s’était éloigné. Je le vis brusquement se diriger droit vers le bord de trottoir.
Je paniquai, la circulation était dense et il allait tomber au milieu du trafic sous les roues d’une voiture. Je piquai le sprint de ma vie. Le gamin allait tomber, sa mère s’aperçut de son absence et son visage devint un masque de terreur en le voyant. Le petit basculait déjà quand je l’attrapai à bout de bras et, emportée par mon élan, je tombai sur le trottoir en pivotant pour que mon dos percute le sol, pendant que je protégeai le gamin serré sur ma poitrine.
Le choc fut violent et me coupa le souffle, mais je ne lâchai rien, la sécurité du bambin avant tout. J’entendais des bruits assourdis qui palpitaient dans mon crâne. Soudain tout devint net, une vive douleur m’envahit et les sons devinrent compréhensibles, mais c’était une cacophonie.
- Lâcher… ambulance… sauver… accident.
Je sombrai loin de la douleur et du bruit. Je me réveillai couchée sur le ventre dans un lit d’hôpital. La première chose que je fis, fut de demander des nouvelles du petit, on me rassura, pas une égratignure. Tout le monde était aux petits soins pour moi. Mon sauvetage avait été filmé par des touristes et faisait la une des médias. Apparemment j’avais des fans à l’autre bout du monde.
Le médecin vint m’expliquer que mon dos n’était qu’un gigantesque hématome, couvert de profondes plaies car mon chemisier ne m’avait pas vraiment protégée et je m’étais écorchée quand j’avais glissé sur le trottoir. De plus, ma tête avait heurté un poteau dans ma chute et je souffrais d’un trauma crânien. J’allais rester hospitalisée une bonne semaine au moins.
Quelques jours plus tard, les médecins autorisèrent une visite pour laquelle j’avais donné mon accord. Quand je vis le bambin en pleine forme dans les bras de sa maman j’éclatais en sanglots. Nous pleurâmes toutes les deux pendant de longues minutes pendant qu’elle me remerciait sans cesse, puis l’infirmière vint l’avertir que la visite était terminée et elle sortit en me remerciant encore.
Mes souvenirs des jours suivants furent assez flous, j’étais assommée par des calmants la plupart du temps. Finalement, mon séjour hospitalier dura presque trois semaines. À ma sortie, je pris un taxi et quittai mon statut d’héroïne pour retourner à ma solitude. Quand je rentrai à la maison la sensation de vide me pesa plus que d’habitude, je m’étais habituée à être entourée de gens.
Les antidouleurs me permirent d’avoir une nuit plus ou moins correcte. Je me préparai un petit-déjeuner - juste un café en réalité - en bougeant à la vitesse du paresseux de Zootopie. J’étais percluse de douleurs et je n’avais pas fini de cicatriser. Quand on sonna à la porte je me souvins qu’une infirmière devait venir tous les jours pour changer les pansements et contrôler les plaies. J’ouvris la porte à la plus grande surprise de ma vie : Dominique.
Il me regardait l’air de chercher à deviner mon état de santé. Son évidente préoccupation pour moi me fit du bien.
- Salut Corinne.
- Salut Dom. Si je m’attendais, viens entre.
- Je ne te dérange pas ?
- Pas de risque.
J’ouvris la marche de mon pas de centenaire, jusqu’au salon où je lui fis signe de s’asseoir. Je dus m’asseoir sur une chaise en évitant de toucher le dossier, car les fauteuils étaient trop moelleux pour mon dos qui frottait douloureusement. J’attendis patiemment qu’il me précise la raison de sa visite, mais il ne semblait pas décidé à parler, je fis donc le premier pas.
- Dis-moi, depuis quand es-tu revenu ?
- Quelques mois, j’ai repris le poste du directeur qui partait à la retraite.
- C’est bien, bravo.
- Je… je venais voir comment tu allais.
- On ne peut mieux, comme tu le vois.
- Je suis arrivé peu après ton départ en ambulance, il y avait du sang partout, Martine pleurait sans arrêt et je n’arrivais pas à la calmer, elle croyait que tu allais mourir par sa faute. Quand elle t’a vue à l’hôpital, couverte de pansement, cela l’a un peu rassurée, mais elle se sent d’autant plus coupable.
- Elle n’y est pour rien.
- Elle s’en veut d’avoir perdu Domi de vue et pense être responsable de tout ce qui est arrivé.
- C’était imprévisible, le clochard était agressif et accaparait son attention – son fils s’appelait Dominique comme lui, ça m’a fait mal -.
- Comment as-tu pu être là ? Le hasard fait-il si bien les choses ?
- Le hasard oui. Je me promenais quand je t’ai vu avec ta famille dans le parc. Je me suis arrêtée pour vous regarder, vous aviez l’air tellement heureux. Quand tu les as quittés je suis restée et quand ils sont partis je ne voulais pas rompre la magie, je les ai suivis et… et la suite tu la connais.
- Tu es courageuse, tu as pris d’énormes risques, tu aurais pu te tuer ou être plus grièvement blessée encore.
- La vie d’un enfant vaut plus que la mienne, le tien qui plus est.
Il me regarda d’un drôle d’air, mais notre conversation s’arrêta là car on sonnait à la porte. Cette fois c’était bien l’infirmière qui venait pour mes soins. Dom prit congé rapidement en me demandant la permission de revenir. J’acquiesçais, épuisée par la tension accumulée pendant notre brève discussion. J’obéis docilement à l’infirmière et après son départ je m’abandonnais à un sommeil réparateur.
Le lendemain l’infirmière était déjà passée, quand on sonna. Je me levai et allai péniblement ouvrir la porte. C’était Dom, il tenait le petit Domi dans les bras et Martine les accompagnait. Quand elle me vit, un sourire éblouissant apparut sur son visage et elle se jeta en avant pour me prendre dans ses bras. Elle se retint in extremis de faire cette bêtise, toute penaude et rouge de honte.
- Désolée je n’ai pas réfléchi.
- Ce n’est rien. Entrez, ça me fait plaisir de revoir ce p’tit gars.
Je les accompagnai jusqu’au salon et les priai de se mettre à leur aise. Pour ma part je me rassis sur ma chaise. Il y eu un moment de flottement, personne ne voulant prendre la parole. Je rompis le silence la première.
- Je suis vraiment heureuse que Domi aille bien. Quel âge a-t-il ?
- Il a 20 mois.
- Il est adorable, vous en avez de la chance.
- Oui, c’est la lumière de ma vie. Ça a été dur mais je ne regrette rien.
- Vous avez eu des difficultés pendant la grossesse ?
- Ah… heu non ce n’est pas ça. Ce sont mes parents. Ils m’ont mise à la porte lorsque je leur ai annoncé que j’étais enceinte. J’aurais bientôt dix-neuf ans, mais j’étais mineure à l’époque.
Je regardais Dom avec un air d’incompréhension. Qu’est-ce qu’il avait fait à cette pauvre fille ? Mineure qui plus est.
- Toute ma famille m’a tourné le dos, j’avais été déshonorée, j’avais commis un péché impardonnable et j’étais une âme perdue qui faisait honte à toute la famille. Dom, était à des milliers de kilomètres, mais c’est le seul qui m’a tendu la main. Il est revenu du Canada, m’a trouvé un logement en ville et a pourvu à mes besoins de future maman. Il traversait régulièrement l’Atlantique pour venir me voir et il a réussi à être présent à l’accouchement, sans lui je ne sais pas ce que nous serions devenus Domi et moi.
J’acquiesçai un peu perdue dans les explications de Martine. Je ne l’avais pas remarqué, mais c’est vrai qu’elle était très jeune. Son visage avait été marqué par les épreuves, mais elle respirait la joie de vivre, cela faisait du bien, c’était une belle personne.
- Il m’a trouvé du travail dans son entreprise, je suis réceptionniste maintenant. Il m’encourage même à reprendre mes études. Cousin Dom était mon seul et unique héros jusqu’à ce que je vous rencontre. Il m’a dit que vous étiez ensemble autrefois, ça ne m’étonne pas, vous êtes les deux meilleures personnes que je connaisse.
Tilt ! La lumière se fit dans mon cerveau. Cousin Dom ! Je le regardai interloquée, mais son attention était fixée sur Martine. Il souriait et la couvait d’un regard… fraternel ! J’avais une boule à la gorge et j’étais incapable d’articuler un mot.
- Martine ma puce, laisse Corinne respirer un peu.
- Désolée je parle beaucoup trop, on me fait souvent la remarque.
- Pourquoi tu n’irais pas faire une promenade avec Domi, il y a un parc au bout de la rue.
- D’accord, bonne idée, comme ça vous pourrez fêter vos retrouvailles sans que je sois là pour vous saouler de paroles.
Une fois Martine et Domi sortis, une gêne palpable perdura suite à sa dernière remarque. Nous retrouver, j’en avais rêvé mais maintenant que c’était réel, je ne savais pas par où commencer. Dom avait l’air aussi perturbé que moi.
- Je…
- Attends Dom, laisse-moi commencer. Ce que j’ai fait ce soir-là était impardonnable. Sonia m’avait servi apéritif sur apéritif et elle m’avait coincé à table avec son cousin qui ne laissait pas mon verre se vider. Je n’ai pas été prudente, je me suis laissé gagner par une agréable euphorie et je n’ai pas repoussé ses avances.
- Non, je…
- Laisse-moi terminer sinon je n’arriverai pas au bout. Je suis sortie sur la terrasse prendre l’air, il m’a accompagnée car je titubais et quand il m’a embrassée je n’ai pas résisté, je lui ai même rendu son baiser. Quand j’ai réalisé ce que je faisais, j’ai voulu partir, j’ai été cherché ma veste mais il m’a suivie. J’étais ivre, il était doux, attentionné, entreprenant et j’ai perdu pied. Il m’a couchée sur le lit et m’a caressée le clitoris tout en me pénétrant de ses doigts et j’y ai pris du plaisir, mais cela s’est arrêté là, j’ai retrouvé ma lucidité, je l’ai repoussé et je me suis enfuie. J’étais bouleversée, je me sentais sale et j’avais honte. J’aurais dû t’en parler mais j’ai été lâche et j’ai choisi le silence, c’était plus facile.
Cela me faisait mal de parler de mon moment de faiblesse, même si je m’étais répétée des centaines de fois ce discours dans ma tête. Je devais faire ce que je n’avais pas eu le courage de faire il y a trois ans. Dom me regardait impassible et attentif. Je continuai.
- Quelques jours plus tard, Serge a commencé à me harceler, Sonia lui avait donné mon numéro. Il voulait me voir car il m’aimait, me désirait et était sûr que moi aussi. Selon lui, j’étais la plus belle des femmes et nous étions faits l’un pour l’autre. J’ai perdu une autre occasion de t’en parler. Je lui ai donné rendez-vous dans un café pour lui mettre les points sur les i. Il n’y avait rien entre nous et il n’y aurait jamais rien. Deux minutes chrono pour l’envoyer paître, mais il n’avait pas l’air de comprendre alors je l’ai bloqué. Peu après Sonia m’a proposée d’aller au resto à midi et j’ai accepté, mais Serge s’est présenté à sa place et je l’ai rembarré encore une fois. C’est la dernière fois que je l’ai vu.
- Je… C’est Sonia qui m’a fait parvenir les photos. Elle voulait m’avertir de ton infidélité et me proposait de coucher avec elle pour me venger. J’ai refusé, mais les photos confirmaient son histoire sur ton amant.
- J’avais compris que cette salope de Sonia derrière tout ça, mais je ne savais pas pourquoi. Elle te voulait toi !
- Elle ne l’a pas emporté au paradis, j’ai appris que peu après elle avait été violemment agressée et qu’aujourd’hui encore elle fait de la chirurgie esthétique, jamais contente de son nouveau nez.
- Je ne regrette pas les deux mois de plâtre et la douzaine de séances chez le physio.
- C’est toi qui…
- Si j’avais su qu’elle détruisait ma vie pour coucher avec toi, je… heureusement pour elle que je ne savais pas.
Le silence retomba entre nous, chacun perdu dans ses pensées. J’avais enfin tout dit, je voulais qu’il sache la vérité sur les limites que je n’avais pas franchies, mais ma faute n’en était pas moins lourde. J’étais tendue en attendant ce qu’il avait à dire.
- Quand Sonia m’a fait parvenir les photos de la soirée, j’ai été dévasté et j’ai attendu que tu me dises quelque chose, en vain. Après elle m’a envoyé deux séries de photos de vos rendez-vous qui démontraient vos rencontres régulières. Au deuxième envoi, je ne l’ai plus supporté et je t’ai quittée. J’étais blessé, ma vie était en miettes et je ne croyais plus en rien. J’aurais pu t’en parler, te jeter les preuves de ton infidélité à la figure et on en aurait discuté, mais j’avais trop mal et j’ai choisi la fuite.
- Je suis désolée, je te demande pardon, je regrette de t’avoir fait souffrir. Tu avais raison, j’ai mérité que tu me quittes. Je voulais seulement que tu saches que je n’avais pas d’amant et que mon infidélité à peine entamée s’était arrêtée le soir même. Pas un jour n’est passé sans que je ne regrette ce que j’ai fait.
Nous étions plongés dans nos réflexions quand on sonna à la porte. C’était Martine qui souhaitait rentrer pour faire manger le petit. Les salutations furent chaleureuses et Martine failli encore se jeter à mon cou. Après leur départ je me sentais bien, en paix avec moi-même après avoir réglé les comptes avec mon passé.
Les jours passèrent, mon état s’améliora peu à peu, j’avais besoin de temps pour cicatriser mon dos et mon cœur. Les visites de Dom, Martine et Domi me faisaient très plaisir, ils m’organisaient de courtes promenades pour que je prenne l’air. Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas sentie aussi bien.
L’infirmière ne passait plus depuis une semaine quand on sonna à ma porte un matin. J’étais étonnée car Martine m’avait dit qu’elle allait à la piscine avec Domi et Dom devait certainement travailler. J’ouvris et mon plus grand cauchemar se matérialisa. Serge !
- Salut Corinne
- … ?
- Je suis venu te voir car j’ai entendu parler de ton accident. Je voulais prendre de tes nouvelles et t’aider dans la mesure de mes moyens.
J’étais si interloquée que je n’eus pas le réflexe de l’empêcher de rentrer, ce sale con avait pris mon manque de réaction pour une invitation. Je bondis, toujours un peu lente, pour passer devant lui et l’empêcher d’aller au-delà du salon.
- Tu sais, j’ai beaucoup pensé à toi ces dernières années, mais je ne connaissais pas ton adresse, tu m’avais bloqué et ma cousine, à la suite de son accident, avait beaucoup d’autres soucis alors de je ne l’avais pas ennuyée.
- C’était pour une bonne raison, je ne voulais pas de contact entre nous.
- Je sais Sonia m’avait expliqué que ton mari était un jaloux maladif et violent qui te gardait sous sa coupe et qui te terrorisait.
- … ?
- À la fête, elle m’avait demandé de te faire boire pour te désinhiber et te faire connaître le bonheur avec un autre homme, pour te permettre de te libérer de lui.
- … Quoi ?
- Je sais cela n’a pas l’air romantique, mais c’est en essayant de t’aider, comme demandé par ma cousine, que j’ai commencé à éprouver des sentiments pour toi. Je me suis rendu compte que toi aussi tu en éprouvais pour moi, d’ailleurs.
- Hein ? Mais pas du tout.
- Tu avais tellement envie d’être avec moi, mais ton mari te terrifiait et tu n’arrivais pas à échapper à son emprise, je l’ai bien vu.
- Écoute connard, je n’ai jamais rien éprouvé pour toi, j’avais simplement trop bu, tout s’est mélangé dans ma tête et toi, salaud, tu en as profité.
- Au fond de toi, tu sais bien que c’est faux, mais maintenant nous sommes libres de nous aimer, Sonia m’a dit que ton mari t’avait quittée.
- Mais vous êtes complètement tarés ta cousine et toi. À cause de vos manigances, l’amour de ma vie m’a quitté persuadé que j’avais un amant. Je vous hais tous les deux.
Serge s’approcha de moi et me prit par les bras, une joie enfantine peinte sur son visage. J’essayai de se dégager sans succès, il était trop fort et mon dos à peine cicatrisé m’empêchait de forcer. Serge respirait la compassion à mon égard, il se prenait pour un preux chevalier venu délivrer une princesse rendue folle par la captivité.
- Je comprends tu as encore peur de lui, mais tu n’as pas à t’inquiéter, je suis là maintenant, je vais t’aimer et te protéger.
- Va chier connard ! Lâche-moi ! Je n’ai jamais aimé que Dom et je l’aime encore. Il sera toujours le seul et l’unique pour moi.
- C’est horrible de voir à quel point tu es encore sous son emprise, mais je…
Le flot de conneries sortant de la bouche de Serge s’interrompit soudain, quand un poing sortant du néant percuta sa mâchoire. Il me lâcha et tituba en arrière, un pied rageur lui fracassa les bijoux de famille et l’acheva. Serge s’écroula sur place foudroyé. Dom se dirigea vers le meuble qui contenait les bouteilles d’alcool et en prit une de mauvais whisky qu’on nous avait offert des années auparavant. Il retourna vers Serge affalé par terre et le prit par les cheveux pour lui relever la tête.
- Tu aimes bien faire boire les autres pour abuser d’eux, maintenant bois !
Serge encore tétanisé par la douleur et terrorisé il commença à boire. Il s’étrangla à la première gorgée et recracha une partie du liquide sur lui.
- Tu n’as pas intérêt à t’arrêter de boire. Si tu ne finis pas la bouteille, je continue ma leçon. Sonia t’a dit que j’étais très violent ne l’oublie pas.
Serge, docile et transpirant la peur, continua à boire en grimaçant et en toussant. Dom lui mit la pression et il termina la bouteille en dix minutes. Quand Serge eut fini, Dom le força à se relever, le traina jusqu’au palier appela l’ascenseur et le jeta dedans. Serge s’écroula à l’intérieur et, avant que la porte ne se referme, Dom l’envoya au rez.
- Ne recroise plus jamais ma route.
J’avais été soulagée par l’intervention de Dom, mais maintenant j’étais inquiète en voyant sa réaction avec Serge. Je voulais m’expliquer tout de suite cette fois et ne pas laisser traîner, je ne voulais pas commettre deux fois la même erreur.
- Écoute Dom, je ne l’ai pas invité à entrer…
- Je sais. Je suis arrivé, la porte étant ouverte je suis entré. En vous entendant discuter j’ai compris qui c’était et cela m’a blessé mais j’ai entendu votre discussion.
- Tu as…
- Oui, j’ai entendu tes explications et le délire de l’autre con. Sonia est vraiment une salope.
- Oh que oui !
- Je regrette d’avoir perdu ces trois ans loin de toi à croire que tu avais un amant. Serge a pris toute ma frustration dans la gueule.
- Cette séparation est entièrement ma faute. Si j’avais résisté ou eu le courage de t’en parler tout de suite, rien ne serait arrivé. Je t’aime et je t’ai toujours aimé.
- Je le sais je t’ai entendue. Je t’aime aussi et je n’ai jamais cessé de t’aimer.
Lequel des nous deux avait bougé le premier ? Mystère. Nos corps se percutèrent affamés de caresses, nos bouches se retrouvèrent collées l’une à l’autre dans un baiser sans fin. Nous nous déshabillâmes maladroitement, trop excités et pressés de nous retrouver nus. Je le voulais sur moi, je le voulais en moi, sans délai.
Dès que je vis son sexe émerger de son boxer, je me jetai dessus comme une affamée. J’en avais tellement rêvé que je l’engloutis entièrement, ce que je n’avais jamais réussi à faire jusque-là. J’avais oublié à quel point c’était bon, je n’avais pas retrouvé cela chez mes rares amants. Ce n’était pas la taille de son sexe, qui ne compte pas vraiment, c’était… c’était… les sentiments ! J’aime Dom et son bonheur compte plus que tout pour moi et la réciproque est vraie.
Lorsqu’il se retira de ma bouche, je grognai frustrée en tirant la langue pour essayer de garder le contact. Il me souleva et malgré son évidente impatience, il me reposa avec une infinie douceur sur le lit qu’il avait rejoint en quelques enjambées. Sa bouche vorace me léchât de bas en haut plusieurs fois et s’attarda sur mon clitoris, alors que ses doigts s’activaient dans mon sexe et dans mes fesses. Je ne sentis pas monter le puissant orgasme qui me terrassa soudainement. Ça avait été tellement violent que je peinais à reprendre mon souffle. Je n’avais jamais connu ça avant, même avec Dom.
Il vint sur moi et me pénétra. J’attendais cela depuis… vraiment trop longtemps. Son corps sur le mien et son sexe dans le mien, je l’avais tellement espéré que je ne tardai pas à jouir, c’était trop bon. Je l’entourai de mes jambes et l’incitai à accélérer son rythme. Nos orgasmes simultanés furent d’une rare intensité encore une fois et nous nous séparâmes, vidés de toute énergie. Je récupérai plus vite que Dom qui s’était laissé gagner par une douce torpeur. Je me relevai, me penchai et engloutis son sexe qui était toujours en semi-érection. Après l’avoir sucé, je le léchai consciencieusement sur toute sa longueur, puis je laissai ma langue descendre jusqu’au scrotum pour titiller ses fesses. Dom parut apprécier la caresse car c’est une barre d’acier que je pris dans ma bouche en remontant. Je m’appliquai comme s’il n’y avait pas de lendemain pour recommencer. J’avais tellement rêvé de ces retrouvailles que je ne fus satisfaite que lorsqu’il m’emplit la bouche de sa semence.
Cette fois, repus tous les deux, nous nous laissâmes aller à une somnolence bienvenue et réparatrice. Quand nous nous réveillâmes, deux faims différentes nous tenaillèrent, ce fut celle de sexe qui l’emporta. Dom me fit encore jouir avec sa bouche et ses doigts, j’adorais ça. Il me prenait en levrette quand je me penchai sur ma table de chevet et sortit un tube de lubrifiant.
- Je veux que tu me possèdes totalement.
- Tu es sûre ? Je sais que tu n’appréciais pas spécialement la sodomie.
- Tais-toi et encule-moi. J’ai tellement fantasmé sur ce moment que je veux aller jusqu’au bout.
Dominique lubrifia mon anus délicatement. J’appréciais la sensation de ses doigts de plus en plus nombreux et qui allaient de plus en plus loin, mais je n’attendais qu’une chose : son sexe. Le moment arriva, Dom s’introduisit lentement, pour me laisser le temps de bien me dilater. Je n’avais jamais vraiment apprécié la sodomie, mais cette fois je ressentais une sensation de bien-être que je n’aurais jamais crue possible. La douceur céda peu à peu le pas à une pénétration plus virile de Dom qui jouit et m’entraîna avec lui dans l’orgasme.
J’avais enfin tout ce dont j’avais toujours rêvé, une famille : Dom, Martine et Domi. Maintenant il ne tenait qu’à moi d’ajouter de nouveaux membres à cette famille.
Avant que j’oublie, la concierge m’a parlé d’un clodo ivre mort baignant dans son vomi, qu’elle a trouvé dans l’ascenseur. Elle a appelé la police qui l’a embarqué.
Notre histoire d’amour avait commencé à la fac et n’avait pas faibli sous le poids des ans. Toujours complices et toujours (presque) d’accord sur tout, nous étions heureux et enviés par beaucoup de nos amis.
Une des chose qui nous avait rapprochés, c’était que nous étions tous deux orphelins. Le père de Dom était décédé avant sa naissance dans un accident et il avait perdu sa mère peu avant de partir à l’université. Il racontait toujours comment il avait fui son patelin et sa famille de bigots bourrins. Il n’y retournait plus et prenait, de temps en temps, des nouvelles de ceux qui étaient le plus fréquentables. Pour ma part j’avais perdu mes parents très jeune et j’avais grandi en foyer, n’ayant pas d’autre famille
C’était trop beau pour durer malheureusement et un petit grain de sable vint enrayer la machine. Dom se déplaçait régulièrement pour son boulot, jamais plus d’une, voire deux nuits à l’extérieur. Cette fois ce fut une urgence et il dut rester loin une dizaine de jours. Ma copine Sonia nous avait invités à dîner et, une fois n’est pas coutume, j’y allais seule.
Nous étions une vingtaine de convives, Sonia qui venait de divorcer semblait vouloir rattraper le temps perdu, en organisant régulièrement des soirées. À peine arrivée, Sonia se précipita vers moi et me fit les honneurs de sa nouvelle maison, financée par une généreuse pension alimentaire. Après avoir fait le tour de toutes les pièces, elle me présenta son cousin, le beau Serge. L’expression vient d’elle pas de moi, mais elle le décrivait parfaitement.
Après avoir fait les présentations, m’avoir servi un verre et insisté sur le beau couple que nous faisions, Sonia nous laissa seuls. C’est vrai qu’il était beau, il dégageait une aura de virilité et il le savait. Ce devait être un bourreau des cœurs auquel toutes succombaient irrémédiablement, mais je n’étais pas ce genre de femme.
L’apéro dura longtemps et Sonia m’amena plusieurs verres, ce qui fit que je restai tout du long avec Serge. Il était intelligent et savait parler, c’était très agréable. Quand nous passâmes à table, ma copine m’avait bien entendu assise à côté de son cousin, en bout de table. C’était mon seul interlocuteur, nous continuâmes donc à converser dans notre bulle. Il était charmant et charmeur et ne tarissait pas de compliments sur moi, mes goûts, ma conversation, mon physique. Mon verre ne désemplissait pas et je glissais lentement vers un état de douce euphorie.
Il commença par poser sa main sur la mienne qu’il la caressa doucement, puis elle se posa sur mon genou et remonta lentement sur ma cuisse. J’étais ivre et ses attentions ne me paraissaient pas déplacées, mais agréables et stimulantes au contraire. Sonia me lançait régulièrement des regards et semblait ravie de la tournure des événements.
J’avais de plus en plus chaud et quand j’émis le souhait d’aller prendre l’air sur la terrasse, Serge ne se fit pas prier pour m’accompagner. Il me prit par la taille et m’aida à sortir car le sol tanguait sous mes pieds. J’étais bien dehors au frais, il m’avait enlacée pour m’éviter tomber et me tenait serrée contre lui. Je me laissais aller et posais ma tête sur son épaule. Je ne vis pas venir son baiser lorsqu’il se pencha vers moi et m’embrassa tendrement. Puis sa bouche s’empara avidement de la mienne et je répondis tout aussi violemment, ma langue venant rejoindre la sienne.
Je ne sais pas combien de temps nous restâmes dehors à nous embrasser, mais d’autres invités sortirent bruyamment, ce qui me fit sursauter et me sépara de Serge. Je restai à distance pendant un moment, en essayant de reprendre mes esprits. J’avais trop bu et je faisais n’importe quoi, je devais partir au plus vite. Je profitai du moment où il était accaparé par une autre invitée pour me rendre dans la chambre où nous avions laissé nos vestes.
J’étais en train de chercher la mienne dans la pile qu’il y avait sur le lit, quand je sentis une présence derrière moi et une main se poser sur ma hanche.
- Tu veux déjà partir ?
- Oui… oui je dois rentrer.
- Quelqu’un t’attend à la maison ?
- Non… non pas ce soir, mais je suis fatiguée.
- Reste encore un peu, je te ramènerai après.
Serge me fit pivoter, tout en me caressant et il m’embrassa à nouveau. Ces sensations m’envoyèrent une décharge au creux des reins, j’étais excitée, très excitée. Ses mains caressaient tout mon corps et s’attardaient sur mes seins. Il me poussa et me coucha sur le lit à côté de la montagne de vestes. Une de ses mains se fit plus entreprenante, remonta le long de ma cuisse et atteignit mon entrejambe. J’ai honte de le dire, mais je coulais comme le miel. Doucement il passa sa main dans ma culotte et entreprit de me caresser. Je gémissais au comble du bonheur. Il me pénétrait avec deux doigts puis il revenait me caresser le clitoris, je n’allais pas tarder à jouir. Il ôta sa main, se releva et commença à m’enlever ma culotte. Ce fut à ce moment-là que j’eus un éclair de lucidité. Non ! Je ne pouvais pas faire ça, j’aimais Dom. Je me relevais et le repoussais violemment.
- Non, ne me touche pas !
- Mais enfin ! Tu en as autant envie que moi, ne dis pas le contraire.
- Non c’est fini, lâche-moi, je dois m’en aller.
Le beau Serge essaya encore d’argumenter mais je m’enfuis, morte de honte en repensant à ce que j’avais fait et pire, à ce que j’avais failli faire. Je rentrai en taxi et me précipitai sous la douche pour essayer de me laver de tous les attouchements, les sensations et les souvenirs de cette soirée.
Je passai le reste du week-end à ressasser mon comportement pendant cette soirée. J’avais failli tromper Dominique et je culpabilisais au souvenir de ce que j’avais accordé à Serge. Cette intimité, ces préliminaires et ce presque orgasme me bouffaient de l’intérieur. En début de semaine j’allai travailler sans enthousiasme en attendant que Dom rentre. Mercredi à mon retour il était déjà rentré et je courus me blottir dans ses bras, j’avais besoin de réconfort, de sécurité, de tendresse et de son amour.
J’aurais dû lui parler de ce qui s’était passé avec Serge, mais par lâcheté j’ai préféré cacher la merde au chat, par peur de sa réaction. Nos retrouvailles furent brûlantes après une semaine de séparation. Le seul moment difficile fut quand il me caressa le clitoris, ce qui me fit me crisper au souvenir des doigts de Serge. Ce moment de gêné passé, nous fîmes l’amour comme des affamés dans tous les recoins de la maison. Je jouis dans presque toutes les pièces, même lorsqu’il me sodomisa appuyée sur la table de la cuisine, c’était la première fois que j’avais du plaisir avec le sexe anal.
J’avais retrouvé ma joie de vivre et repoussé l’épisode avec Serge dans les limbes de ma mémoire. Cela ne dura cependant pas et dès le week-end suivant je commençai à recevoir des messages de Serge, sa cousine lui avait certainement donné mon numéro. Il voulait me rencontrer, il n’arrivait pas à m’oublier, il me suppliait de lui répondre. J’avais beau refuser, il revenait sans cesse à la charge. Je me sentais coupable et j’avais peur que Dom ne s’aperçoive de quelque chose, je finis donc par accepter un rendez-vous dans un café après le boulot, je voulais mettre les choses au point et en finir.
Quand j’arrivai Serge était déjà là, tout sourire. Il avait choisi une table en plein milieu alors que j’aurais préféré un recoin plus discret, je n’avais pas envie qu’on nous voie ensemble, j’avais honte. Il m’accueilli chaleureusement et se leva pour me faire la bise. Quand je réalisai qu’il voulait m’embrasser sur la bouche, je tournai la tête et le repoussai vers sa chaise.
- Ça suffit maintenant ! Je suis venue mettre les choses au point.
- Assieds-toi donc. Qu’est-ce que tu veux boire ?
- Rien, je suis pressée.
- Nous avons tout notre temps, nous pouvons reprendre là où nous en étions restés.
- Oublie cette soirée. Ce n’était qu’un dérapage dû à l’alcool. J’étais ivre, j’ai fait une connerie et failli en faire une plus grosse. J’aime Dominique et je n’envisage pas de le tromper.
- Pourtant tu en avais envie, je l’ai bien senti.
- L’alcool rien d’autre. Maintenant, je souhaite que tu sortes de ma vie. Je ne veux plus rien savoir de toi, j’espère que c’est clair. Salut.
Je n’attendis pas la réponse de Serge, je me levai et sortis sans un regard en arrière. J’étais à peine arrivée dans la rue que je reçu un message de sa part :
« Toi et moi c’est inévitable, nous sommes faits l’un pour l’autre »
Cette fois c’en était trop, je le bloquai définitivement. Cet abruti était tellement imbu de lui-même qu’il ne comprenait pas qu’on lui réponde non, même si à ma grande honte j’avais trop tardé à le repousser chez Sonia. Je n’osais pas en parler à Dom car j’avais laissé Serge aller beaucoup trop loin et j’avais du mal à l’assumer. En plus ce n’était pas le moment de mettre ce genre du sujet sur le tapis, Dom était submergé de boulot, irascible, très distant et il me tournait le dos tous les soirs dans le lit.
Les jours suivants furent de plus en plus tendus à la maison et quand Sonia me proposa un resto à midi, j’accueilli avec joie cette distraction. J’arrivai en avance et m’installai en l’attendant. Je ne le vis qu’une fraction de seconde avant qu’il ne s’assoie, c’était Serge.
- Ne m’en veut pas, j’ai supplié Sonia de m’arranger une rencontre avec toi.
- Merde qu’est-ce que tu veux ? J’ai pourtant été claire avec toi.
- Je sais, mais souvent on dit des choses parce qu’on a peur et on les regrette après. Je suis sûr qu’au fond de toi, tu désires être avec moi. Tu ne peux pas nier ton attirance pour moi, tu ne simulais pas chez Sonia.
- Écoute j’en ai marre. Toi et moi c’est fini, cela n’a même jamais commencé. C’est ton délire et je ne le partage pas. Oublie-moi, sinon je porte plainte pour harcèlement.
- Parfait, ton mari saura ce qu’il se passe entre nous et cela te libérera.
- Va te faire foutre connard !
Folle de rage, je me levai et sortis. Ce mec était un vrai con, comment est-ce que j’avais pu autant ma laisser aller avec lui ? Je m’en voulais d’avoir été aussi faible et stupide. Quant à Sonia, elle allait m’entendre. Je retournai au boulot et travaillai avec acharnement tout l’après-midi.
Le soir en rentrant, je trouvai Dom morose et épuisé. Il ne voulut ni discuter, ni manger et partit se coucher prétextant une grande fatigue. Moi aussi j’étais fatiguée, c’était vraiment une sale période, vivement qu’elle se termine. Dominique était épuisé, stressé et distant, Sonia jouait à la conne et ce connard de Serge n’acceptait pas mon refus, tout cela me mettait sur les rotules.
Le lendemain à mon réveil Dom était déjà parti travailler, il devait vraiment crouler sous le travail pour se lever si tôt. Pour ma part, je me trainai jusqu’au bureau et essayai d’être productive pour me changer les idées. Le soir je rentrai lessivée par la tension qui m’habitait ces derniers temps. Dom n’était pas encore rentré, je sentis un malaise une fois la porte franchie.
J’allai dans la chambre pour me changer et je vis une feuille posée sur le lit. Je la pris et le premier mot que je lus me liquéfia les organes : Corinne.
Pas ma chérie, mon amour ou un de mes petits surnoms affectueux, non. Rien que mon prénom, sec, concis, brutal. Je continuai à lire pendant que mon âme s’effondrait à mes pieds.
« Corinne,
Nous n’avons pas voulu nous marier pour nous prouver que si nous étions ensemble, c’était parce que nous nous aimions et non parce que c’était écrit sur un bout de papier.
Quand il y avait le moindre problème nous en discutions et décidions en conséquence.
J’ai récemment appris que tu avais un amant. J’ai d’abord refusé de le croire, mais j’ai reçu les preuves de ton infidélité et de vos rencontres régulières.
Je t’en veux de ne pas m’en avoir parlé. Si tu ne m’aimais plus il fallait me le dire, nous nous étions promis d’être honnêtes l’un envers l’autre. S’il n’y a plus ni confiance ni amour, nous n’avons plus rien à faire ensemble.
Aujourd’hui, j’ai déménagé mes affaires, j’ai laissé tout ce que nous avions acheté en commun, je n’en veux pas, je veux recommencer à zéro sans rien qui me rattache au passé.
Je te laisse les tristes preuves de ta trahison sur la clé USB à côté de ma lettre.
Je ne souhaite pas te revoir, jamais. »
J’étais effondrée, en larmes, terrifiée. Mon avenir venait de disparaitre, mon amour était parti. Ce n’était pas possible, je n’avais pas d’amant, même si la soirée chez Sonia avait salement dérapé, comment avait-il pu penser cela ? Je me levai paniquée et j’ouvris tous les tiroirs et toutes les armoires ; il ne restait que mes affaires.
Je me réveillai au matin en boule sur le lit, je m’étais endormie sans m’en rendre compte, épuisée de tant pleurer. Je me déshabillai et me dirigeai vers la douche. Je laissai l’eau couler en espérant me réveiller de ce cauchemar, mais c’était la réalité. J’avais désespérément essayé de joindre Dom hier soir, mais il m’avait bloquée partout. Avant de sombrer j’avais décidé de passer à son travail ce matin.
J’allais partir quand je remarquai la clé USB que Dom mentionnait dans sa lettre. Je voulais savoir, je l’insérai dans l’ordi et ouvris le fichier ; c’était dégueulasse sans le moindre doute. Sur les premières photos, Serge et moi nous embrassions passionnément sur la terrasse mais les suivantes étaient les plus dures à regarder. J’étais couchée sur le lit et Serge penché sur moi me caressais, on voyait sa main glissée dans ma culotte et le plaisir que j’y prenais. Les dernières photos nous montraient au café et au restaurant lors de nos deux rencontres postérieures.
J’étais atterrée, je comprenais la réaction de Dom et les conclusions qu’il en avait tiré. Je savais que j’avais grave merdé pendant la soirée de Sonia, mais le voir en image rendait la chose encore plus sordide. Rétrospectivement, j’aurais dû parler de cette soirée à Dom, car les conséquences n’auraient pu être pires, mais j’avais été lâche et j’avais choisi la solution de facilité : ne rien dire et oublier.
Je me précipitai à son travail, je devais lui parler, lui raconter la vérité. J’avais terriblement déconné mais pas au point qu’il imaginait. Je ne m’arrêtai pas à l’accueil et montai directement à son étage. Son bureau était vide, totalement débarrassé. Je cherchai une tête connue parmi ses collègues.
- Salut Paul, je cherche Dom.
- Il est parti. Je pensais que tu le savais.
- Quoi ? Parti où ?
- Il a accepté le poste que personne ne voulait au Canada. Comme il pouvait partir tout de suite, la direction était ravie. Il a dû décoller ce matin.
Je dus m’appuyer sur le bureau pour ne pas tomber. Un étau me serrait la poitrine et m’empêchait de respirer. Dom était parti le plus loin possible, dégoûté par ce que j’avais fait. Je sortis sans dire un mot à son collègue interloqué. Je titubai vers la sortie et rentrai, par je ne sais quel miracle, à la maison.
Une fois arrivée je tournai en rond à la maison en imaginant des scénarios plus invraisemblables les uns que les autres. Je revenais sur les événements et je les modifiais pour correspondre à ce que je souhaitais. Je n’avais pas cédé à Serge, je ne le connaissais même pas car il avait été renversé par une voiture en venant à la soirée ou agressé dans une ruelle ou mieux encore, il n’était jamais né. Je lui avais planté ma fourchette quand il avait commencé à me caresser la main ou je l’avais jeté de la terrasse. Je délirais en inventant des scénarios car je ne voulais pas affronter cette réalité qui me faisait si mal.
Ces ignobles photos. Comment ? Qui ? Pourquoi ? Et soudain une révélation, je savais qui. Je me précipitai à nouveau dehors, je devais rendre une visite, c’était loin mais j’avais envie de marcher. Arrivée devant la porte je sonnai et Sonia l’ouvrit.
- Salut Corinne, quelle surprise de…
Je frappai de toutes mes forces. Je n’avais jamais levé la main sur qui que ce soit, mais là, ma rage était indescriptible. Ce fut comme de frapper un mur, une douleur fulgurante traversa ma main, mais je m’en foutais car un mur ne s’écroule pas le visage couvert de sang.
Je sortis dans la rue et remarquai que ma main enflait à vue d’œil et me faisait de plus en plus mal. Je la passai sous l’eau d’une fontaine qui était sur mon chemin mais rien n’y faisait, je décidai donc et passer aux urgences. L’infirmière à qui je racontai avoir frappé le mur à la suite de ma rupture avec mon compagnon, me regarda avec commisération.
Une heure plus tard j’étais en salle de plâtre quand je vis passer un brancard avec une silhouette couverte de sang, l’ambulancier donnait les premières constatations à un médecin.
- Jeune femme 27 ans. Fracture du nez, perte de trois incisives, important trauma du visage. La police pense à une violente agression.
- OK on va faire des radios en urgence pour voir l’étendue des dégâts.
J’avais fait fort mais je ne regrettais rien, même si je devais finir en prison, ce qui n’arriva finalement pas. J’appris quelques mois plus tard que Sonia s’était réveillée avec une amnésie rétrograde, sans aucun souvenir des 24h précédent son agression. Dans l’état où j’étais, j’avais oublié mon portable et il n’avait pas borné dans la zone, personne ne m’avait vue, je n’étais donc pas le moins du monde suspecte. Faisant le deuil de ma relation avec Dom, je m’étais coupée du monde extérieur et personne n’avait vu mon plâtre, qui aurait peut-être pu permettre de faire le rapprochement.
Trois ans sont passés et j’habite toujours les décombres de ma vie, les ruines de mon histoire d’amour. Je n’ai pas déménagé même si le loyer est élevé pour moi seule, je m’accroche à l’espoir que Dominique revienne un jour. J’ai vaguement essayé de l’oublier et de refaire ma vie deux ou trois fois, mais sans succès. Aucun de ces hommes n’était Dominique, pas un ne lui arrivait pas à la cheville, à quelque niveau que ce soit.
Je ne m’étais jamais projetée dans le futur quand j’étais avec Dom, mais je réalisai que j’avais espéré fonder une famille pour mes trente ans. Maintenant que je les avais, ma solitude me pesait d’autant plus. Après le travail, plutôt que de rentrer à la maison constater le vide mon existence, je déambulais souvent sans but pour essayer de me changer les idées, sans succès je l’avoue.
Ce jour-là, le printemps approchait de son terme et à 19h il faisait jour. Je traversais un parc le regard dans le vide quand quelque chose attira mon attention et mon regard se focalisa sur… Dom !
Il était assis sur un banc à côté d’une jeune femme avec qui il discutait. Devant lui, accroché à sa jambe, un petit garçon de deux ans maximum cherchait à attirer son attention. Dom le prit dans ses bras et le couvrit de bisous pour le plus grand plaisir du bambin qui riait aux éclats.
Dom avait refait sa vie, il était père et tous mes fantasmes de retrouvailles et de réconciliation s’effondraient. Je me dirigeai dans une sorte de brouillard vers le banc le plus proche où je me laissai tomber plus que je ne m’assis. Je contemplai la vie dont j’avais rêvé se dérouler sous mes yeux. Ils avaient l’air si heureux que la jalousie me tordait les tripes. Je l’avais mérité mais ça n’en faisait pas moins mal.
Dom se leva, dit quelque chose à son épouse et partit. Je restai à contempler sa famille jusqu’à ce que sa femme se lève et parte à son tour. Tel un automate, je me levai et les suivis toujours fascinée. Ils avançaient lentement car le petit garçon têtu avait tenu à marcher à côté de sa maman.
Ils étaient sortis du parc, quand un clochard s’accrocha à la poussette et interpella la jeune maman. Le ton de la discussion monta rapidement, la femme essayait de se dégager, mais le clodo ne voulait pas lâcher prise. Le petit garçon avait pris peur et s’était éloigné. Je le vis brusquement se diriger droit vers le bord de trottoir.
Je paniquai, la circulation était dense et il allait tomber au milieu du trafic sous les roues d’une voiture. Je piquai le sprint de ma vie. Le gamin allait tomber, sa mère s’aperçut de son absence et son visage devint un masque de terreur en le voyant. Le petit basculait déjà quand je l’attrapai à bout de bras et, emportée par mon élan, je tombai sur le trottoir en pivotant pour que mon dos percute le sol, pendant que je protégeai le gamin serré sur ma poitrine.
Le choc fut violent et me coupa le souffle, mais je ne lâchai rien, la sécurité du bambin avant tout. J’entendais des bruits assourdis qui palpitaient dans mon crâne. Soudain tout devint net, une vive douleur m’envahit et les sons devinrent compréhensibles, mais c’était une cacophonie.
- Lâcher… ambulance… sauver… accident.
Je sombrai loin de la douleur et du bruit. Je me réveillai couchée sur le ventre dans un lit d’hôpital. La première chose que je fis, fut de demander des nouvelles du petit, on me rassura, pas une égratignure. Tout le monde était aux petits soins pour moi. Mon sauvetage avait été filmé par des touristes et faisait la une des médias. Apparemment j’avais des fans à l’autre bout du monde.
Le médecin vint m’expliquer que mon dos n’était qu’un gigantesque hématome, couvert de profondes plaies car mon chemisier ne m’avait pas vraiment protégée et je m’étais écorchée quand j’avais glissé sur le trottoir. De plus, ma tête avait heurté un poteau dans ma chute et je souffrais d’un trauma crânien. J’allais rester hospitalisée une bonne semaine au moins.
Quelques jours plus tard, les médecins autorisèrent une visite pour laquelle j’avais donné mon accord. Quand je vis le bambin en pleine forme dans les bras de sa maman j’éclatais en sanglots. Nous pleurâmes toutes les deux pendant de longues minutes pendant qu’elle me remerciait sans cesse, puis l’infirmière vint l’avertir que la visite était terminée et elle sortit en me remerciant encore.
Mes souvenirs des jours suivants furent assez flous, j’étais assommée par des calmants la plupart du temps. Finalement, mon séjour hospitalier dura presque trois semaines. À ma sortie, je pris un taxi et quittai mon statut d’héroïne pour retourner à ma solitude. Quand je rentrai à la maison la sensation de vide me pesa plus que d’habitude, je m’étais habituée à être entourée de gens.
Les antidouleurs me permirent d’avoir une nuit plus ou moins correcte. Je me préparai un petit-déjeuner - juste un café en réalité - en bougeant à la vitesse du paresseux de Zootopie. J’étais percluse de douleurs et je n’avais pas fini de cicatriser. Quand on sonna à la porte je me souvins qu’une infirmière devait venir tous les jours pour changer les pansements et contrôler les plaies. J’ouvris la porte à la plus grande surprise de ma vie : Dominique.
Il me regardait l’air de chercher à deviner mon état de santé. Son évidente préoccupation pour moi me fit du bien.
- Salut Corinne.
- Salut Dom. Si je m’attendais, viens entre.
- Je ne te dérange pas ?
- Pas de risque.
J’ouvris la marche de mon pas de centenaire, jusqu’au salon où je lui fis signe de s’asseoir. Je dus m’asseoir sur une chaise en évitant de toucher le dossier, car les fauteuils étaient trop moelleux pour mon dos qui frottait douloureusement. J’attendis patiemment qu’il me précise la raison de sa visite, mais il ne semblait pas décidé à parler, je fis donc le premier pas.
- Dis-moi, depuis quand es-tu revenu ?
- Quelques mois, j’ai repris le poste du directeur qui partait à la retraite.
- C’est bien, bravo.
- Je… je venais voir comment tu allais.
- On ne peut mieux, comme tu le vois.
- Je suis arrivé peu après ton départ en ambulance, il y avait du sang partout, Martine pleurait sans arrêt et je n’arrivais pas à la calmer, elle croyait que tu allais mourir par sa faute. Quand elle t’a vue à l’hôpital, couverte de pansement, cela l’a un peu rassurée, mais elle se sent d’autant plus coupable.
- Elle n’y est pour rien.
- Elle s’en veut d’avoir perdu Domi de vue et pense être responsable de tout ce qui est arrivé.
- C’était imprévisible, le clochard était agressif et accaparait son attention – son fils s’appelait Dominique comme lui, ça m’a fait mal -.
- Comment as-tu pu être là ? Le hasard fait-il si bien les choses ?
- Le hasard oui. Je me promenais quand je t’ai vu avec ta famille dans le parc. Je me suis arrêtée pour vous regarder, vous aviez l’air tellement heureux. Quand tu les as quittés je suis restée et quand ils sont partis je ne voulais pas rompre la magie, je les ai suivis et… et la suite tu la connais.
- Tu es courageuse, tu as pris d’énormes risques, tu aurais pu te tuer ou être plus grièvement blessée encore.
- La vie d’un enfant vaut plus que la mienne, le tien qui plus est.
Il me regarda d’un drôle d’air, mais notre conversation s’arrêta là car on sonnait à la porte. Cette fois c’était bien l’infirmière qui venait pour mes soins. Dom prit congé rapidement en me demandant la permission de revenir. J’acquiesçais, épuisée par la tension accumulée pendant notre brève discussion. J’obéis docilement à l’infirmière et après son départ je m’abandonnais à un sommeil réparateur.
Le lendemain l’infirmière était déjà passée, quand on sonna. Je me levai et allai péniblement ouvrir la porte. C’était Dom, il tenait le petit Domi dans les bras et Martine les accompagnait. Quand elle me vit, un sourire éblouissant apparut sur son visage et elle se jeta en avant pour me prendre dans ses bras. Elle se retint in extremis de faire cette bêtise, toute penaude et rouge de honte.
- Désolée je n’ai pas réfléchi.
- Ce n’est rien. Entrez, ça me fait plaisir de revoir ce p’tit gars.
Je les accompagnai jusqu’au salon et les priai de se mettre à leur aise. Pour ma part je me rassis sur ma chaise. Il y eu un moment de flottement, personne ne voulant prendre la parole. Je rompis le silence la première.
- Je suis vraiment heureuse que Domi aille bien. Quel âge a-t-il ?
- Il a 20 mois.
- Il est adorable, vous en avez de la chance.
- Oui, c’est la lumière de ma vie. Ça a été dur mais je ne regrette rien.
- Vous avez eu des difficultés pendant la grossesse ?
- Ah… heu non ce n’est pas ça. Ce sont mes parents. Ils m’ont mise à la porte lorsque je leur ai annoncé que j’étais enceinte. J’aurais bientôt dix-neuf ans, mais j’étais mineure à l’époque.
Je regardais Dom avec un air d’incompréhension. Qu’est-ce qu’il avait fait à cette pauvre fille ? Mineure qui plus est.
- Toute ma famille m’a tourné le dos, j’avais été déshonorée, j’avais commis un péché impardonnable et j’étais une âme perdue qui faisait honte à toute la famille. Dom, était à des milliers de kilomètres, mais c’est le seul qui m’a tendu la main. Il est revenu du Canada, m’a trouvé un logement en ville et a pourvu à mes besoins de future maman. Il traversait régulièrement l’Atlantique pour venir me voir et il a réussi à être présent à l’accouchement, sans lui je ne sais pas ce que nous serions devenus Domi et moi.
J’acquiesçai un peu perdue dans les explications de Martine. Je ne l’avais pas remarqué, mais c’est vrai qu’elle était très jeune. Son visage avait été marqué par les épreuves, mais elle respirait la joie de vivre, cela faisait du bien, c’était une belle personne.
- Il m’a trouvé du travail dans son entreprise, je suis réceptionniste maintenant. Il m’encourage même à reprendre mes études. Cousin Dom était mon seul et unique héros jusqu’à ce que je vous rencontre. Il m’a dit que vous étiez ensemble autrefois, ça ne m’étonne pas, vous êtes les deux meilleures personnes que je connaisse.
Tilt ! La lumière se fit dans mon cerveau. Cousin Dom ! Je le regardai interloquée, mais son attention était fixée sur Martine. Il souriait et la couvait d’un regard… fraternel ! J’avais une boule à la gorge et j’étais incapable d’articuler un mot.
- Martine ma puce, laisse Corinne respirer un peu.
- Désolée je parle beaucoup trop, on me fait souvent la remarque.
- Pourquoi tu n’irais pas faire une promenade avec Domi, il y a un parc au bout de la rue.
- D’accord, bonne idée, comme ça vous pourrez fêter vos retrouvailles sans que je sois là pour vous saouler de paroles.
Une fois Martine et Domi sortis, une gêne palpable perdura suite à sa dernière remarque. Nous retrouver, j’en avais rêvé mais maintenant que c’était réel, je ne savais pas par où commencer. Dom avait l’air aussi perturbé que moi.
- Je…
- Attends Dom, laisse-moi commencer. Ce que j’ai fait ce soir-là était impardonnable. Sonia m’avait servi apéritif sur apéritif et elle m’avait coincé à table avec son cousin qui ne laissait pas mon verre se vider. Je n’ai pas été prudente, je me suis laissé gagner par une agréable euphorie et je n’ai pas repoussé ses avances.
- Non, je…
- Laisse-moi terminer sinon je n’arriverai pas au bout. Je suis sortie sur la terrasse prendre l’air, il m’a accompagnée car je titubais et quand il m’a embrassée je n’ai pas résisté, je lui ai même rendu son baiser. Quand j’ai réalisé ce que je faisais, j’ai voulu partir, j’ai été cherché ma veste mais il m’a suivie. J’étais ivre, il était doux, attentionné, entreprenant et j’ai perdu pied. Il m’a couchée sur le lit et m’a caressée le clitoris tout en me pénétrant de ses doigts et j’y ai pris du plaisir, mais cela s’est arrêté là, j’ai retrouvé ma lucidité, je l’ai repoussé et je me suis enfuie. J’étais bouleversée, je me sentais sale et j’avais honte. J’aurais dû t’en parler mais j’ai été lâche et j’ai choisi le silence, c’était plus facile.
Cela me faisait mal de parler de mon moment de faiblesse, même si je m’étais répétée des centaines de fois ce discours dans ma tête. Je devais faire ce que je n’avais pas eu le courage de faire il y a trois ans. Dom me regardait impassible et attentif. Je continuai.
- Quelques jours plus tard, Serge a commencé à me harceler, Sonia lui avait donné mon numéro. Il voulait me voir car il m’aimait, me désirait et était sûr que moi aussi. Selon lui, j’étais la plus belle des femmes et nous étions faits l’un pour l’autre. J’ai perdu une autre occasion de t’en parler. Je lui ai donné rendez-vous dans un café pour lui mettre les points sur les i. Il n’y avait rien entre nous et il n’y aurait jamais rien. Deux minutes chrono pour l’envoyer paître, mais il n’avait pas l’air de comprendre alors je l’ai bloqué. Peu après Sonia m’a proposée d’aller au resto à midi et j’ai accepté, mais Serge s’est présenté à sa place et je l’ai rembarré encore une fois. C’est la dernière fois que je l’ai vu.
- Je… C’est Sonia qui m’a fait parvenir les photos. Elle voulait m’avertir de ton infidélité et me proposait de coucher avec elle pour me venger. J’ai refusé, mais les photos confirmaient son histoire sur ton amant.
- J’avais compris que cette salope de Sonia derrière tout ça, mais je ne savais pas pourquoi. Elle te voulait toi !
- Elle ne l’a pas emporté au paradis, j’ai appris que peu après elle avait été violemment agressée et qu’aujourd’hui encore elle fait de la chirurgie esthétique, jamais contente de son nouveau nez.
- Je ne regrette pas les deux mois de plâtre et la douzaine de séances chez le physio.
- C’est toi qui…
- Si j’avais su qu’elle détruisait ma vie pour coucher avec toi, je… heureusement pour elle que je ne savais pas.
Le silence retomba entre nous, chacun perdu dans ses pensées. J’avais enfin tout dit, je voulais qu’il sache la vérité sur les limites que je n’avais pas franchies, mais ma faute n’en était pas moins lourde. J’étais tendue en attendant ce qu’il avait à dire.
- Quand Sonia m’a fait parvenir les photos de la soirée, j’ai été dévasté et j’ai attendu que tu me dises quelque chose, en vain. Après elle m’a envoyé deux séries de photos de vos rendez-vous qui démontraient vos rencontres régulières. Au deuxième envoi, je ne l’ai plus supporté et je t’ai quittée. J’étais blessé, ma vie était en miettes et je ne croyais plus en rien. J’aurais pu t’en parler, te jeter les preuves de ton infidélité à la figure et on en aurait discuté, mais j’avais trop mal et j’ai choisi la fuite.
- Je suis désolée, je te demande pardon, je regrette de t’avoir fait souffrir. Tu avais raison, j’ai mérité que tu me quittes. Je voulais seulement que tu saches que je n’avais pas d’amant et que mon infidélité à peine entamée s’était arrêtée le soir même. Pas un jour n’est passé sans que je ne regrette ce que j’ai fait.
Nous étions plongés dans nos réflexions quand on sonna à la porte. C’était Martine qui souhaitait rentrer pour faire manger le petit. Les salutations furent chaleureuses et Martine failli encore se jeter à mon cou. Après leur départ je me sentais bien, en paix avec moi-même après avoir réglé les comptes avec mon passé.
Les jours passèrent, mon état s’améliora peu à peu, j’avais besoin de temps pour cicatriser mon dos et mon cœur. Les visites de Dom, Martine et Domi me faisaient très plaisir, ils m’organisaient de courtes promenades pour que je prenne l’air. Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas sentie aussi bien.
L’infirmière ne passait plus depuis une semaine quand on sonna à ma porte un matin. J’étais étonnée car Martine m’avait dit qu’elle allait à la piscine avec Domi et Dom devait certainement travailler. J’ouvris et mon plus grand cauchemar se matérialisa. Serge !
- Salut Corinne
- … ?
- Je suis venu te voir car j’ai entendu parler de ton accident. Je voulais prendre de tes nouvelles et t’aider dans la mesure de mes moyens.
J’étais si interloquée que je n’eus pas le réflexe de l’empêcher de rentrer, ce sale con avait pris mon manque de réaction pour une invitation. Je bondis, toujours un peu lente, pour passer devant lui et l’empêcher d’aller au-delà du salon.
- Tu sais, j’ai beaucoup pensé à toi ces dernières années, mais je ne connaissais pas ton adresse, tu m’avais bloqué et ma cousine, à la suite de son accident, avait beaucoup d’autres soucis alors de je ne l’avais pas ennuyée.
- C’était pour une bonne raison, je ne voulais pas de contact entre nous.
- Je sais Sonia m’avait expliqué que ton mari était un jaloux maladif et violent qui te gardait sous sa coupe et qui te terrorisait.
- … ?
- À la fête, elle m’avait demandé de te faire boire pour te désinhiber et te faire connaître le bonheur avec un autre homme, pour te permettre de te libérer de lui.
- … Quoi ?
- Je sais cela n’a pas l’air romantique, mais c’est en essayant de t’aider, comme demandé par ma cousine, que j’ai commencé à éprouver des sentiments pour toi. Je me suis rendu compte que toi aussi tu en éprouvais pour moi, d’ailleurs.
- Hein ? Mais pas du tout.
- Tu avais tellement envie d’être avec moi, mais ton mari te terrifiait et tu n’arrivais pas à échapper à son emprise, je l’ai bien vu.
- Écoute connard, je n’ai jamais rien éprouvé pour toi, j’avais simplement trop bu, tout s’est mélangé dans ma tête et toi, salaud, tu en as profité.
- Au fond de toi, tu sais bien que c’est faux, mais maintenant nous sommes libres de nous aimer, Sonia m’a dit que ton mari t’avait quittée.
- Mais vous êtes complètement tarés ta cousine et toi. À cause de vos manigances, l’amour de ma vie m’a quitté persuadé que j’avais un amant. Je vous hais tous les deux.
Serge s’approcha de moi et me prit par les bras, une joie enfantine peinte sur son visage. J’essayai de se dégager sans succès, il était trop fort et mon dos à peine cicatrisé m’empêchait de forcer. Serge respirait la compassion à mon égard, il se prenait pour un preux chevalier venu délivrer une princesse rendue folle par la captivité.
- Je comprends tu as encore peur de lui, mais tu n’as pas à t’inquiéter, je suis là maintenant, je vais t’aimer et te protéger.
- Va chier connard ! Lâche-moi ! Je n’ai jamais aimé que Dom et je l’aime encore. Il sera toujours le seul et l’unique pour moi.
- C’est horrible de voir à quel point tu es encore sous son emprise, mais je…
Le flot de conneries sortant de la bouche de Serge s’interrompit soudain, quand un poing sortant du néant percuta sa mâchoire. Il me lâcha et tituba en arrière, un pied rageur lui fracassa les bijoux de famille et l’acheva. Serge s’écroula sur place foudroyé. Dom se dirigea vers le meuble qui contenait les bouteilles d’alcool et en prit une de mauvais whisky qu’on nous avait offert des années auparavant. Il retourna vers Serge affalé par terre et le prit par les cheveux pour lui relever la tête.
- Tu aimes bien faire boire les autres pour abuser d’eux, maintenant bois !
Serge encore tétanisé par la douleur et terrorisé il commença à boire. Il s’étrangla à la première gorgée et recracha une partie du liquide sur lui.
- Tu n’as pas intérêt à t’arrêter de boire. Si tu ne finis pas la bouteille, je continue ma leçon. Sonia t’a dit que j’étais très violent ne l’oublie pas.
Serge, docile et transpirant la peur, continua à boire en grimaçant et en toussant. Dom lui mit la pression et il termina la bouteille en dix minutes. Quand Serge eut fini, Dom le força à se relever, le traina jusqu’au palier appela l’ascenseur et le jeta dedans. Serge s’écroula à l’intérieur et, avant que la porte ne se referme, Dom l’envoya au rez.
- Ne recroise plus jamais ma route.
J’avais été soulagée par l’intervention de Dom, mais maintenant j’étais inquiète en voyant sa réaction avec Serge. Je voulais m’expliquer tout de suite cette fois et ne pas laisser traîner, je ne voulais pas commettre deux fois la même erreur.
- Écoute Dom, je ne l’ai pas invité à entrer…
- Je sais. Je suis arrivé, la porte étant ouverte je suis entré. En vous entendant discuter j’ai compris qui c’était et cela m’a blessé mais j’ai entendu votre discussion.
- Tu as…
- Oui, j’ai entendu tes explications et le délire de l’autre con. Sonia est vraiment une salope.
- Oh que oui !
- Je regrette d’avoir perdu ces trois ans loin de toi à croire que tu avais un amant. Serge a pris toute ma frustration dans la gueule.
- Cette séparation est entièrement ma faute. Si j’avais résisté ou eu le courage de t’en parler tout de suite, rien ne serait arrivé. Je t’aime et je t’ai toujours aimé.
- Je le sais je t’ai entendue. Je t’aime aussi et je n’ai jamais cessé de t’aimer.
Lequel des nous deux avait bougé le premier ? Mystère. Nos corps se percutèrent affamés de caresses, nos bouches se retrouvèrent collées l’une à l’autre dans un baiser sans fin. Nous nous déshabillâmes maladroitement, trop excités et pressés de nous retrouver nus. Je le voulais sur moi, je le voulais en moi, sans délai.
Dès que je vis son sexe émerger de son boxer, je me jetai dessus comme une affamée. J’en avais tellement rêvé que je l’engloutis entièrement, ce que je n’avais jamais réussi à faire jusque-là. J’avais oublié à quel point c’était bon, je n’avais pas retrouvé cela chez mes rares amants. Ce n’était pas la taille de son sexe, qui ne compte pas vraiment, c’était… c’était… les sentiments ! J’aime Dom et son bonheur compte plus que tout pour moi et la réciproque est vraie.
Lorsqu’il se retira de ma bouche, je grognai frustrée en tirant la langue pour essayer de garder le contact. Il me souleva et malgré son évidente impatience, il me reposa avec une infinie douceur sur le lit qu’il avait rejoint en quelques enjambées. Sa bouche vorace me léchât de bas en haut plusieurs fois et s’attarda sur mon clitoris, alors que ses doigts s’activaient dans mon sexe et dans mes fesses. Je ne sentis pas monter le puissant orgasme qui me terrassa soudainement. Ça avait été tellement violent que je peinais à reprendre mon souffle. Je n’avais jamais connu ça avant, même avec Dom.
Il vint sur moi et me pénétra. J’attendais cela depuis… vraiment trop longtemps. Son corps sur le mien et son sexe dans le mien, je l’avais tellement espéré que je ne tardai pas à jouir, c’était trop bon. Je l’entourai de mes jambes et l’incitai à accélérer son rythme. Nos orgasmes simultanés furent d’une rare intensité encore une fois et nous nous séparâmes, vidés de toute énergie. Je récupérai plus vite que Dom qui s’était laissé gagner par une douce torpeur. Je me relevai, me penchai et engloutis son sexe qui était toujours en semi-érection. Après l’avoir sucé, je le léchai consciencieusement sur toute sa longueur, puis je laissai ma langue descendre jusqu’au scrotum pour titiller ses fesses. Dom parut apprécier la caresse car c’est une barre d’acier que je pris dans ma bouche en remontant. Je m’appliquai comme s’il n’y avait pas de lendemain pour recommencer. J’avais tellement rêvé de ces retrouvailles que je ne fus satisfaite que lorsqu’il m’emplit la bouche de sa semence.
Cette fois, repus tous les deux, nous nous laissâmes aller à une somnolence bienvenue et réparatrice. Quand nous nous réveillâmes, deux faims différentes nous tenaillèrent, ce fut celle de sexe qui l’emporta. Dom me fit encore jouir avec sa bouche et ses doigts, j’adorais ça. Il me prenait en levrette quand je me penchai sur ma table de chevet et sortit un tube de lubrifiant.
- Je veux que tu me possèdes totalement.
- Tu es sûre ? Je sais que tu n’appréciais pas spécialement la sodomie.
- Tais-toi et encule-moi. J’ai tellement fantasmé sur ce moment que je veux aller jusqu’au bout.
Dominique lubrifia mon anus délicatement. J’appréciais la sensation de ses doigts de plus en plus nombreux et qui allaient de plus en plus loin, mais je n’attendais qu’une chose : son sexe. Le moment arriva, Dom s’introduisit lentement, pour me laisser le temps de bien me dilater. Je n’avais jamais vraiment apprécié la sodomie, mais cette fois je ressentais une sensation de bien-être que je n’aurais jamais crue possible. La douceur céda peu à peu le pas à une pénétration plus virile de Dom qui jouit et m’entraîna avec lui dans l’orgasme.
J’avais enfin tout ce dont j’avais toujours rêvé, une famille : Dom, Martine et Domi. Maintenant il ne tenait qu’à moi d’ajouter de nouveaux membres à cette famille.
Avant que j’oublie, la concierge m’a parlé d’un clodo ivre mort baignant dans son vomi, qu’elle a trouvé dans l’ascenseur. Elle a appelé la police qui l’a embarqué.
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15 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Bonjour,
Je relis toutes vos histoires si bien écrites, un seul regret l'absence de nouvelles histoires
Paul
Je relis toutes vos histoires si bien écrites, un seul regret l'absence de nouvelles histoires
Paul
Bravo...Bravo...Bravo...
Une histoire très palpitante, on la dévore et on vit l'histoire du début à la fin...
Très content d'avoir découvert tes écrits, merci J A
Très content d'avoir découvert tes écrits, merci J A
JA vous êtes en grève !! Ça fait 1 moment qu’il n’y a plus d’histoires.
Le gros du récit est très bien là fin avec le sexe n était pas utile on s en serait douté. Quand à la garce de cousine j aurai aimé une vengeance plus perverse.
Une véritable histoire, digne d'une belle plume. Merci
JA vous faites grève, ça fait 1 moment qu'il n y a plus d'histoires, pareil pour PP06.
Bonne histoire, un scénario bien ficelé, un écriture propre, sans arguties ni aberrations grammaticales (de plus en plus rare sur le site) et un style dépouillé de fioritures et autres performances sexuelles ridicules. Cela fait plaisir, avec Laetitia, Olga T, PP06 et vous, J A, de retrouver de la qualité sur ce site qui, je le regrette, s'est laissé envahir par des écrivassiers de tous bords, et où la médiocrité fait légion. Bravo à vous.
Très agréable à lire. Merci
On ne se méfie jamais assez des amis…
Belle histoire qui se termine bien.
Belle histoire qui se termine bien.
Et bien, merci pour ce récits, pour ces récits que j'ai lu, du premier à celui-ci! vous faites parti des mes quelques auteurs préférés. comme les avis de tous, j'ai adoré ce texte, lu d'une seule traite. Bravo donc & merci, j'espère vous lire bientôt.
arnojan
arnojan
Histoire magnifique
Génial. J’adore!!
Ça fait longtemps que je n’ai pas lu une histoire aussi longue se terminer dans le même chapitre. Pas de tataouinage, on y va jusqu’à la fin. Merveilleux!
L’auteur n’oublie rien dans son récit, tellement qu’on croirait vivre les moments joyeux et les difficultés quotidiennes de Corrine.
L’histoire de pratiquement une vie en fin de compte et qui en plus fini très bien.
Félicitation à l’auteur
L’auteur n’oublie rien dans son récit, tellement qu’on croirait vivre les moments joyeux et les difficultés quotidiennes de Corrine.
L’histoire de pratiquement une vie en fin de compte et qui en plus fini très bien.
Félicitation à l’auteur
Bravo JA, superbe histoire
Belle fin.
Belle fin.