Histoire des libertines (108) : Les Mino, les amazones du Dahomey
Récit érotique écrit par Olga T [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 16-09-2023 dans la catégorie A dormir debout
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Histoire des libertines (108) : Les Mino, les amazones du Dahomey
Avertissement :
Dans ma dernière publication dans cette série, « Histoire des libertines (107) : Ranavalona, la Messaline de Madagascar », mise en ligne le 24 août dernier, j’ai annoncé ma volonté de parler de femmes libres, qui vécurent ailleurs qu’en Europe ou en Amérique du Nord. Mes recherches m’ont ainsi fait découvrir les Mino, ou amazones du Dahomey. Pour parler d’elles, je ferai, par rapport aux récits précédents, une entorse à la chronologie, la création de ce corps de guerrières remontant à la seconde moitié du XVIIème siècle. Elles furent surnommées « Amazones » par les colons occidentaux et les historiens à cause de leurs similitudes avec les Amazones de la mythologie grecque, dont j’ai aussi parlé sur HDS dans un texte publié le 22 février 2021(voir « Récits érotiques de la mythologie (22) les Amazones »).
Voici donc l’histoire de ces redoutables amazones africaines.
***
AUX ORIGINES : LA REINE HANGBE
Le royaume du Dahomey est un ancien royaume africain situé dans le sud de l'actuel Bénin et qui existera jusqu’à son intégration dans l’empire colonial français, à partir de 1894. Le roi Aho Houegbadja, véritable fondateur du Dahomey, et qui gouverna le royaume d’Abomey de 1645 à 1685, fut à l'origine de la création du groupe qui devint ensuite les Mino. Elles furent d’abord un corps de chasseurs d’éléphants, appelé « gbeto ». Le roi fit entraîner certaines de ces femmes à devenir ses gardes du corps.
Fille de Houegbadja et sœur jumelle d'Akaba, la reine Tassin Hangbè avait un frère cadet nommé Akaba, qui devint roi de Dahomey en 1685. Il décéda en 1708, à la veille d'une bataille décisive. Il est alors décidé de cacher sa mort, en déguisant sa sœur jumelle Hangbè, afin de ne pas décourager les combattants. Le combat gagné, Hangbè remplaça son frère comme reine, mais cette fois sous son vrai nom.
Hangbè est la vraie créatrice du corps des Mino du Dahomey, comme régiment combattant, intégré aux armées professionnelles du royaume. Elle créa aussi un comité pour les femmes, afin de leur apprendre les métiers traditionnellement masculins et veilla à ce que les hommes et les femmes participent aux mêmes travaux de force.
Hangbè fut largement effacée de l'histoire officielle du Dahomey, sous le roi Agadja son successeur, dont les partisans obligèrent la reine à abdiquer dès 1711. Les traditions orales sont en désaccord sur ce qui s'est passé. Une version raconte que son fils unique a été mis à mort pour empêcher toute réclamation au trône, tandis que Hangbè, dégoûtée du choix d'Agadja et de l'exécution de son fils, s'est déshabillée devant le conseil et a lavé ses organes génitaux pour montrer son mépris envers leur décision. D'autres versions disent que son fils resta en vie, mais que Hangbè prononça un discours de colère à l'adresse des conseils, qui incluait une prédiction selon laquelle tout cela conduirait à la conquête du Dahomey par les Européens.
DE REDOUTABLES ET IMPITOYABLES COMBATTANTES
Un fils de Houegbadja, Agadja, successeur de Hangbè jusque 1732, transforma les Mino, groupe de femmes gardes du corps, en une redoutable milice et les utilisa avec succès pour vaincre le Royaume houéda en 1727. Durant les années suivantes, les guerrières acquirent une réputation de combattantes sans peur. Le groupe de femmes guerrières prit le nom de « Mino », ce qui signifie « nos mères » en langue fon. Ce fut le nom que leur donna l'armée masculine du Dahomey.
À l'époque du roi Ghézo (1818-1858), le Dahomey se militarise de plus en plus. Ghézo donne une grande importance à l'armée, augmente son budget et améliore sa structure. Les Mino sont entraînées, obtiennent des uniformes et sont équipées avec des fusils danois, achetés grâce au commerce des esclaves. À cette époque, les Mino sont entre 4.000 et 6. 000 femmes et représentent environ le tiers de l'armée du Dahomey.
Les Mino sont sélectionnées parmi les enfants d'esclaves et seules les jeunes filles sont gardées, affranchies et entrent au harem du roi. Après une formation, elles intègrent le corps des femmes de guerre du roi, l’« Agoledjié ». Certaines femmes de la société fon deviennent Mino volontairement, alors que d'autres sont enrôlées de force. Tous les trois ans, les sujets du roi doivent présenter leurs filles devant un conseil de révision, qui désigne celles admises dans la maison du roi. Elles deviennent soldates ou officières, selon le rang social de leur famille.
Le corps des Mino est composé d'environ 5.000 guerrières, réparties en trois brigades de plusieurs régiments et il est commandé par une femme s'étant illustrée au combat. La hiérarchie comprend des officières (« Gahu »), des sous-officières (« Awhouangan ») et de simples soldates. Le régiment des femmes a un statut semi-sacré, qui est fortement lié à la croyance du peuple fon au vaudou.
Dès leur plus jeune âge, les amazones suivent un entrainement intense au combat et au maniement des armes. Elles sont conditionnées psychologiquement pour résister à la douleur et ignorer la pitié́. Leur entraînement comprend des combats, du maniement d'armes et des exercices extrêmes, comme traverser une construction d’épines, ou vaincre un taureau à mains nues. Elles sont vêtues de longues tuniques bleues, ceinturées à la taille, sur un pantalon bouffant. Leur crane est rasé et surmonté d’un petit bonnet blanc, brodé d’un caïman.
Leur stratégie n'obéit qu'à une seule règle : tuer sans se soucier de sa propre vie. Pour cela, elles s'enivrent d'alcool avant le combat. Généralement, au cours de la bataille, elles décapitent leurs ennemis et s’empressent de brandir les têtes tranchées afin de semer la panique dans les rangs adverses. Les captifs des Amazones sont généralement décapités, mais on peut imaginer que certains furent épargnés pour servir d’étalons. Une chose est certaine : les amazones du Dahomey étaient aussi impitoyables que leurs légendaires devancières de la mythologie grecque.
***
En 1890, le dernier roi du Dahomey, Behanzin, entra en guerre contre les forces françaises, pour tenter de sauver l’indépendance de son royaume. Ce qui devait être une campagne facile pour la puissante armée française se transforma très vite en calvaire. La progression fut lente, les troupes étant quotidiennement harcelées par des attaques de guérilla.
Le 26 octobre 1892, «la journée la plus meurtrière de cette guerre », selon les mots du chef du contingent français, le colonel Alfred Dodds, alors que les soldats sont à une cinquantaine de kilomètres d’Abomey, leur route est soudain bloquée par une immense armée, équipée de carabines Winchester et d’armes blanches. Au grand effarement des Français, elle est composée de femmes.
Renforcés par la Légion étrangère et disposant de meilleures armes, dont des mitrailleuses ainsi que d'une cavalerie et de l'infanterie de marine, les Français infligent aux Dahoméens des pertes dix fois supérieures aux leurs. Après plusieurs batailles, les Français finissent par l'emporter.
Les légionnaires souligneront « l'incroyable courage et audace » des Amazones ! 503 soldats fons sont tués et le célèbre corps des Amazones du Dahomey est décimé. En face, les Français comptent seulement 6 morts et 32 blessés. La guerre se termine par la mise en place d’un protectorat, plaçant sous tutelle française un frère de Behanzin, Agoli-Agbo. En 1900, c’est l’annexion pure et simple du Dahomey, qui intègre l’Afrique occidentale Française (AOF).
Quant aux Mino, le corps est dissous par le dernier roi fantoche du Dahomey et il ne reste plus que le souvenir de leurs exploits que l’on se transmettra de génération en génération sur les ruines de l’ancien royaume d’Abomey.
***
LEUR VIE SEXUELLE : DES VIERGES QUI AVAIENT DROIT AU REPOS DES GUERRIERES
Ces femmes, propriété du roi, devaient rester vierges et quiconque devenait leur amant était aussitôt exécuté́. L’historienne Sylvia Serbin rapporte à ce propos une plaisanterie qui circulait parmi les anciens et selon laquelle «moins d’hommes seraient morts au combat qu’en essayant de franchir le mur du camp des amazones». Tant qu'elles sont Mino, les femmes ne sont pas autorisées à avoir des enfants ou à être mariées mais, elles peuvent être offertes aux meilleurs guerriers ou choisies comme épouses par le roi. Beaucoup d'entre elles sont vierges.
L'historien béninois Arthur Vido a montré que les femmes enrôlées dans les troupes n'étaient pas toutes vierges. Des Mino en fonction ont eu des rapports sexuels dans le cadre d'une mission royale ou pour simplement assouvir leur désir. La prononciation d'un vœu de célibat devant la divinité Dewin, qui était censée provoquer une grossesse certaine chez les amazones ayant enfreint la règle de chasteté, la pratique abominable de l'excision pour prétendument ôter leur attrait aux relations sexuelles et la décision de leur faire prendre des liqueurs contraceptives ne les ont pas empêchées d'avoir des amants. Certaines Mino revendiquaient le repos de la guerrière, en quelque sorte !
LA LEGENDE DES MINO
Les amazones du Dahomey sont évoquées dans la littérature et le cinéma. C’est ainsi que Stieg Larsson fait référence aux Mino, dans sa série « Millénium », dans « La Reine dans le palais des courants d'air ». Les amazones jouent un rôle significatif dans le roman « Flash for Freedom! (1971) « de George MacDonald Fraser.
Au cinéma, les Mino du Dahomey sont représentées dans le film de 1987 « Cobra Verde » du réalisateur allemand Werner Herzog, qui relate les aventures d'un bandit brésilien mandaté au début du XIXe siècle pour être le dernier trafiquant d'esclaves au Dahomey. Dans le film « Black Panther » (2018), Ryan Coogler leur rend hommage à travers le rôle des Dora Milaje, la garde royale exclusivement féminine du roi T'Challa du Wakanda, composée de guerrières d'élite. En 2022, « The Woman King », film américano-canadien réalisé par Gina Prince-Bythewood, inspiré des amazones du Dahomey, raconte l'histoire de Nanisca, générale des Mino, et de sa fille Nawi.
Enfin dans la série « Lovecraft Country », une scène de l’épisode 7 se déroule au sein des Mino.
***
Ces guerrières sont, à la fois, fascinantes et effrayantes, comme leurs « homologues » de la mythologie grecque. Elles ne sont d’ailleurs pas, dans l’histoire, les seules « femmes de guerre ». Sans être exhaustive, je pense à Boudicca, la « furie celte », qui combattit les Romains au 1er siècle de notre ère, à la Kahina, cette reine berbère qui freina l’avancée de l’Islam au Maghreb au VIIème siècle, au Moyen-âge à Jeanne d’Arc ou encore à Jeanne Hachette, qui défendit Beauvais contre Charles le Téméraire.
Parmi ces femmes, il y eut aussi des groupes, comme ces femmes de la région des Mirdites, dans le Nord de l’Albanie, à propos desquels le linguiste Cyprien Robert (1807-1865) écrivit en 1844 : « Étrangères aux plaisirs qui amollissent, les femmes des Mirdites savent au besoin combattre et braver la mort. ».
Autre exemple, en Union Soviétique, pendant la seconde guerre mondiale, environ 300. 000 femmes furent mobilisées dans des unités anti-aériennes. Certaines furent pilotes de chasse dans les forces aériennes, formant trois escadres de bombardement et se joignant régulièrement à d'autres escadres. Les femmes soviétiques ont également été intégrées aux unités d’infanterie et aux unités blindées. Certaines tireuses d'élite sont d'ailleurs devenues célèbres en tant que snipers.
Tout cela pour récuser ceux qui penseraient que les Mino furent des « sauvages » et des « barbares ». Elles furent d’abord des femmes fières, l’élite de l’armée du royaume du Dahomey. Une seule chose est certaine : qu’elle soit menée par des hommes ou par des femmes, la guerre est une horreur !
REFERENCES :
Outre les articles Wikipédia qui ont largement inspiré ce texte, je signale, sur Internet :
• https://www.nouvelobs.com/histoire/20220928.OBS63803/ces-redoutables-guerrieres-beninoises-qui-inspirent-hollywood.html
• https://www.geo.fr/histoire/les-amazones-du-dahomey-elles-ont-dit-non-a-la-colonisation-francaise-161167
• https://destinationafrique.io/amazones-dahomey-benin-tout-sur-ces-femmes-guerrieres/
À noter aussi l’ouvrage de Sylvia Serbin, « Reines d'Afrique et héroïnes de la diaspora noire », (Sépia, 2004)
Dans ma dernière publication dans cette série, « Histoire des libertines (107) : Ranavalona, la Messaline de Madagascar », mise en ligne le 24 août dernier, j’ai annoncé ma volonté de parler de femmes libres, qui vécurent ailleurs qu’en Europe ou en Amérique du Nord. Mes recherches m’ont ainsi fait découvrir les Mino, ou amazones du Dahomey. Pour parler d’elles, je ferai, par rapport aux récits précédents, une entorse à la chronologie, la création de ce corps de guerrières remontant à la seconde moitié du XVIIème siècle. Elles furent surnommées « Amazones » par les colons occidentaux et les historiens à cause de leurs similitudes avec les Amazones de la mythologie grecque, dont j’ai aussi parlé sur HDS dans un texte publié le 22 février 2021(voir « Récits érotiques de la mythologie (22) les Amazones »).
Voici donc l’histoire de ces redoutables amazones africaines.
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AUX ORIGINES : LA REINE HANGBE
Le royaume du Dahomey est un ancien royaume africain situé dans le sud de l'actuel Bénin et qui existera jusqu’à son intégration dans l’empire colonial français, à partir de 1894. Le roi Aho Houegbadja, véritable fondateur du Dahomey, et qui gouverna le royaume d’Abomey de 1645 à 1685, fut à l'origine de la création du groupe qui devint ensuite les Mino. Elles furent d’abord un corps de chasseurs d’éléphants, appelé « gbeto ». Le roi fit entraîner certaines de ces femmes à devenir ses gardes du corps.
Fille de Houegbadja et sœur jumelle d'Akaba, la reine Tassin Hangbè avait un frère cadet nommé Akaba, qui devint roi de Dahomey en 1685. Il décéda en 1708, à la veille d'une bataille décisive. Il est alors décidé de cacher sa mort, en déguisant sa sœur jumelle Hangbè, afin de ne pas décourager les combattants. Le combat gagné, Hangbè remplaça son frère comme reine, mais cette fois sous son vrai nom.
Hangbè est la vraie créatrice du corps des Mino du Dahomey, comme régiment combattant, intégré aux armées professionnelles du royaume. Elle créa aussi un comité pour les femmes, afin de leur apprendre les métiers traditionnellement masculins et veilla à ce que les hommes et les femmes participent aux mêmes travaux de force.
Hangbè fut largement effacée de l'histoire officielle du Dahomey, sous le roi Agadja son successeur, dont les partisans obligèrent la reine à abdiquer dès 1711. Les traditions orales sont en désaccord sur ce qui s'est passé. Une version raconte que son fils unique a été mis à mort pour empêcher toute réclamation au trône, tandis que Hangbè, dégoûtée du choix d'Agadja et de l'exécution de son fils, s'est déshabillée devant le conseil et a lavé ses organes génitaux pour montrer son mépris envers leur décision. D'autres versions disent que son fils resta en vie, mais que Hangbè prononça un discours de colère à l'adresse des conseils, qui incluait une prédiction selon laquelle tout cela conduirait à la conquête du Dahomey par les Européens.
DE REDOUTABLES ET IMPITOYABLES COMBATTANTES
Un fils de Houegbadja, Agadja, successeur de Hangbè jusque 1732, transforma les Mino, groupe de femmes gardes du corps, en une redoutable milice et les utilisa avec succès pour vaincre le Royaume houéda en 1727. Durant les années suivantes, les guerrières acquirent une réputation de combattantes sans peur. Le groupe de femmes guerrières prit le nom de « Mino », ce qui signifie « nos mères » en langue fon. Ce fut le nom que leur donna l'armée masculine du Dahomey.
À l'époque du roi Ghézo (1818-1858), le Dahomey se militarise de plus en plus. Ghézo donne une grande importance à l'armée, augmente son budget et améliore sa structure. Les Mino sont entraînées, obtiennent des uniformes et sont équipées avec des fusils danois, achetés grâce au commerce des esclaves. À cette époque, les Mino sont entre 4.000 et 6. 000 femmes et représentent environ le tiers de l'armée du Dahomey.
Les Mino sont sélectionnées parmi les enfants d'esclaves et seules les jeunes filles sont gardées, affranchies et entrent au harem du roi. Après une formation, elles intègrent le corps des femmes de guerre du roi, l’« Agoledjié ». Certaines femmes de la société fon deviennent Mino volontairement, alors que d'autres sont enrôlées de force. Tous les trois ans, les sujets du roi doivent présenter leurs filles devant un conseil de révision, qui désigne celles admises dans la maison du roi. Elles deviennent soldates ou officières, selon le rang social de leur famille.
Le corps des Mino est composé d'environ 5.000 guerrières, réparties en trois brigades de plusieurs régiments et il est commandé par une femme s'étant illustrée au combat. La hiérarchie comprend des officières (« Gahu »), des sous-officières (« Awhouangan ») et de simples soldates. Le régiment des femmes a un statut semi-sacré, qui est fortement lié à la croyance du peuple fon au vaudou.
Dès leur plus jeune âge, les amazones suivent un entrainement intense au combat et au maniement des armes. Elles sont conditionnées psychologiquement pour résister à la douleur et ignorer la pitié́. Leur entraînement comprend des combats, du maniement d'armes et des exercices extrêmes, comme traverser une construction d’épines, ou vaincre un taureau à mains nues. Elles sont vêtues de longues tuniques bleues, ceinturées à la taille, sur un pantalon bouffant. Leur crane est rasé et surmonté d’un petit bonnet blanc, brodé d’un caïman.
Leur stratégie n'obéit qu'à une seule règle : tuer sans se soucier de sa propre vie. Pour cela, elles s'enivrent d'alcool avant le combat. Généralement, au cours de la bataille, elles décapitent leurs ennemis et s’empressent de brandir les têtes tranchées afin de semer la panique dans les rangs adverses. Les captifs des Amazones sont généralement décapités, mais on peut imaginer que certains furent épargnés pour servir d’étalons. Une chose est certaine : les amazones du Dahomey étaient aussi impitoyables que leurs légendaires devancières de la mythologie grecque.
***
En 1890, le dernier roi du Dahomey, Behanzin, entra en guerre contre les forces françaises, pour tenter de sauver l’indépendance de son royaume. Ce qui devait être une campagne facile pour la puissante armée française se transforma très vite en calvaire. La progression fut lente, les troupes étant quotidiennement harcelées par des attaques de guérilla.
Le 26 octobre 1892, «la journée la plus meurtrière de cette guerre », selon les mots du chef du contingent français, le colonel Alfred Dodds, alors que les soldats sont à une cinquantaine de kilomètres d’Abomey, leur route est soudain bloquée par une immense armée, équipée de carabines Winchester et d’armes blanches. Au grand effarement des Français, elle est composée de femmes.
Renforcés par la Légion étrangère et disposant de meilleures armes, dont des mitrailleuses ainsi que d'une cavalerie et de l'infanterie de marine, les Français infligent aux Dahoméens des pertes dix fois supérieures aux leurs. Après plusieurs batailles, les Français finissent par l'emporter.
Les légionnaires souligneront « l'incroyable courage et audace » des Amazones ! 503 soldats fons sont tués et le célèbre corps des Amazones du Dahomey est décimé. En face, les Français comptent seulement 6 morts et 32 blessés. La guerre se termine par la mise en place d’un protectorat, plaçant sous tutelle française un frère de Behanzin, Agoli-Agbo. En 1900, c’est l’annexion pure et simple du Dahomey, qui intègre l’Afrique occidentale Française (AOF).
Quant aux Mino, le corps est dissous par le dernier roi fantoche du Dahomey et il ne reste plus que le souvenir de leurs exploits que l’on se transmettra de génération en génération sur les ruines de l’ancien royaume d’Abomey.
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LEUR VIE SEXUELLE : DES VIERGES QUI AVAIENT DROIT AU REPOS DES GUERRIERES
Ces femmes, propriété du roi, devaient rester vierges et quiconque devenait leur amant était aussitôt exécuté́. L’historienne Sylvia Serbin rapporte à ce propos une plaisanterie qui circulait parmi les anciens et selon laquelle «moins d’hommes seraient morts au combat qu’en essayant de franchir le mur du camp des amazones». Tant qu'elles sont Mino, les femmes ne sont pas autorisées à avoir des enfants ou à être mariées mais, elles peuvent être offertes aux meilleurs guerriers ou choisies comme épouses par le roi. Beaucoup d'entre elles sont vierges.
L'historien béninois Arthur Vido a montré que les femmes enrôlées dans les troupes n'étaient pas toutes vierges. Des Mino en fonction ont eu des rapports sexuels dans le cadre d'une mission royale ou pour simplement assouvir leur désir. La prononciation d'un vœu de célibat devant la divinité Dewin, qui était censée provoquer une grossesse certaine chez les amazones ayant enfreint la règle de chasteté, la pratique abominable de l'excision pour prétendument ôter leur attrait aux relations sexuelles et la décision de leur faire prendre des liqueurs contraceptives ne les ont pas empêchées d'avoir des amants. Certaines Mino revendiquaient le repos de la guerrière, en quelque sorte !
LA LEGENDE DES MINO
Les amazones du Dahomey sont évoquées dans la littérature et le cinéma. C’est ainsi que Stieg Larsson fait référence aux Mino, dans sa série « Millénium », dans « La Reine dans le palais des courants d'air ». Les amazones jouent un rôle significatif dans le roman « Flash for Freedom! (1971) « de George MacDonald Fraser.
Au cinéma, les Mino du Dahomey sont représentées dans le film de 1987 « Cobra Verde » du réalisateur allemand Werner Herzog, qui relate les aventures d'un bandit brésilien mandaté au début du XIXe siècle pour être le dernier trafiquant d'esclaves au Dahomey. Dans le film « Black Panther » (2018), Ryan Coogler leur rend hommage à travers le rôle des Dora Milaje, la garde royale exclusivement féminine du roi T'Challa du Wakanda, composée de guerrières d'élite. En 2022, « The Woman King », film américano-canadien réalisé par Gina Prince-Bythewood, inspiré des amazones du Dahomey, raconte l'histoire de Nanisca, générale des Mino, et de sa fille Nawi.
Enfin dans la série « Lovecraft Country », une scène de l’épisode 7 se déroule au sein des Mino.
***
Ces guerrières sont, à la fois, fascinantes et effrayantes, comme leurs « homologues » de la mythologie grecque. Elles ne sont d’ailleurs pas, dans l’histoire, les seules « femmes de guerre ». Sans être exhaustive, je pense à Boudicca, la « furie celte », qui combattit les Romains au 1er siècle de notre ère, à la Kahina, cette reine berbère qui freina l’avancée de l’Islam au Maghreb au VIIème siècle, au Moyen-âge à Jeanne d’Arc ou encore à Jeanne Hachette, qui défendit Beauvais contre Charles le Téméraire.
Parmi ces femmes, il y eut aussi des groupes, comme ces femmes de la région des Mirdites, dans le Nord de l’Albanie, à propos desquels le linguiste Cyprien Robert (1807-1865) écrivit en 1844 : « Étrangères aux plaisirs qui amollissent, les femmes des Mirdites savent au besoin combattre et braver la mort. ».
Autre exemple, en Union Soviétique, pendant la seconde guerre mondiale, environ 300. 000 femmes furent mobilisées dans des unités anti-aériennes. Certaines furent pilotes de chasse dans les forces aériennes, formant trois escadres de bombardement et se joignant régulièrement à d'autres escadres. Les femmes soviétiques ont également été intégrées aux unités d’infanterie et aux unités blindées. Certaines tireuses d'élite sont d'ailleurs devenues célèbres en tant que snipers.
Tout cela pour récuser ceux qui penseraient que les Mino furent des « sauvages » et des « barbares ». Elles furent d’abord des femmes fières, l’élite de l’armée du royaume du Dahomey. Une seule chose est certaine : qu’elle soit menée par des hommes ou par des femmes, la guerre est une horreur !
REFERENCES :
Outre les articles Wikipédia qui ont largement inspiré ce texte, je signale, sur Internet :
• https://www.nouvelobs.com/histoire/20220928.OBS63803/ces-redoutables-guerrieres-beninoises-qui-inspirent-hollywood.html
• https://www.geo.fr/histoire/les-amazones-du-dahomey-elles-ont-dit-non-a-la-colonisation-francaise-161167
• https://destinationafrique.io/amazones-dahomey-benin-tout-sur-ces-femmes-guerrieres/
À noter aussi l’ouvrage de Sylvia Serbin, « Reines d'Afrique et héroïnes de la diaspora noire », (Sépia, 2004)
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19 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
@ Micky, c'est difficile à dire. Peut-être l'effet d'une plus grande proximité de la nature? Et n'oublions pas que l'Afrique fut le berceau de Sapiens, donc de l'humanité.
Ce focus africain vaut le détour. J'ai toujours pensé que les femmes noires avaient une capacité de jouissance supérieure aux autres. Qu'en pense Olga ?
Merci Bernard pour ce commentaire très pertinent
Une page d'histoire vient encore de nous être comptée, et de la plus belle des manières par Olga!
Personnellement, j'avoue mon inculture sur ce sujet, et t'en suis d'autant plus reconnaissant.
Finalement, on s'aperçoit que quel que soit le continent, les intrigues, complots ou autres sont monnaie courante, avec comme seule variable d'ajustement la culture locale. Bien loin de ce que certains voudraient nous faire croire.
Bernard
Personnellement, j'avoue mon inculture sur ce sujet, et t'en suis d'autant plus reconnaissant.
Finalement, on s'aperçoit que quel que soit le continent, les intrigues, complots ou autres sont monnaie courante, avec comme seule variable d'ajustement la culture locale. Bien loin de ce que certains voudraient nous faire croire.
Bernard
En effet, Maurice!
A lire ton texte, on en conclut que le moindre mal pour un adversaire était de devenir "repos de la guerrière"
Maurice
Maurice
@ Paul, un peu de patience. C'est le prochain texte!
Tout ça est très intéressant. Mais, moi, sans vouloir être un rabat-joie, j'attends la suite du récit de ton escapade romaine
Paul
Paul
Merci Clara pour ces précisions
Pour compléter ce qu'écrit Olga: après la chute de Kadhafi consécutive à la guerre civile de 2011, plusieurs anciennes « amazones » ont déclaré avoir subi des violences sexuelles répétées de la part de Kadhafi lui-même, de ses officiers supérieurs et de son entourage : une partie au moins des « amazones » auraient en outre été recrutées de force et enlevées à leurs familles.
Selon une jeune femme qui, interrogée par Le Monde, dit avoir été l'« esclave sexuelle » de Kadhafi après avoir été arrachée à sa famille à l'âge de quinze ans, les « amazones » étaient séparées en deux catégories, les simples otages sexuels et les vraies militaires entraînées, ces dernières étant distinguées par leurs uniformes bleus et constituant les seules véritables gardes du corps de Kadhafi.
Les « véritables » amazones étaient notamment chargées de surveiller les recrues et de passer à tabac celles qui se défendaient contre les violences sexuelles.
Annick Cojean rapporte également que de nombreuses Amazones « ont été liquidées après la chute de Kadhafi. En Libye, une femme seule n'a pas droit à une existence. Beaucoup n'ont pas vraiment eu d'autre choix que de devenir prostituées.
C'est un véritable drame qu'ont vécu ces malheureuses. L'histoire des Mino est bien différente
Clara
Selon une jeune femme qui, interrogée par Le Monde, dit avoir été l'« esclave sexuelle » de Kadhafi après avoir été arrachée à sa famille à l'âge de quinze ans, les « amazones » étaient séparées en deux catégories, les simples otages sexuels et les vraies militaires entraînées, ces dernières étant distinguées par leurs uniformes bleus et constituant les seules véritables gardes du corps de Kadhafi.
Les « véritables » amazones étaient notamment chargées de surveiller les recrues et de passer à tabac celles qui se défendaient contre les violences sexuelles.
Annick Cojean rapporte également que de nombreuses Amazones « ont été liquidées après la chute de Kadhafi. En Libye, une femme seule n'a pas droit à une existence. Beaucoup n'ont pas vraiment eu d'autre choix que de devenir prostituées.
C'est un véritable drame qu'ont vécu ces malheureuses. L'histoire des Mino est bien différente
Clara
Merci, ma chère D, pour ce commentaire très pertinent
@ Annick, c'est le titre de la série. Mais sur le fond je suis d'accord avec toi
@ Annick, c'est le titre de la série. Mais sur le fond je suis d'accord avec toi
Encore une intéressante publication de Olga qui comble l'une de mes nombreuses lacunes et donne, comme toujours, à réfléchir.
Qui se permettrait de dire que l'Afrique "n'est pas entrée dans l'Histoire"? Les intrigues de cour et les ambitions des souverains n'y avaient rien à envier de celles de l'Europe aux mêmes siècles, me semble-t-il. Et ces Mino, assez proches en miroir des Janissaires, relativisent quelque peu les images d’Épinal - si j'ose dire - de la Femme Africaine. Quant au meilleur et au pire, ils sont les mêmes sous toutes les latitudes, à toutes les époques... La condition humaine, je suppose !
Merci, chère Olga, de ta croisade du savoir.
D.
Qui se permettrait de dire que l'Afrique "n'est pas entrée dans l'Histoire"? Les intrigues de cour et les ambitions des souverains n'y avaient rien à envier de celles de l'Europe aux mêmes siècles, me semble-t-il. Et ces Mino, assez proches en miroir des Janissaires, relativisent quelque peu les images d’Épinal - si j'ose dire - de la Femme Africaine. Quant au meilleur et au pire, ils sont les mêmes sous toutes les latitudes, à toutes les époques... La condition humaine, je suppose !
Merci, chère Olga, de ta croisade du savoir.
D.
Pas vraiment des "libertines". je dirai plutôt des femmes libres
Annick
Annick
@ Daniel, la presse internationale croyait voir là une garde d’élite exclusivement féminine, surentrainées aux arts-martiaux et au maniement des armes. Une poignée d’entre elles correspondaient à cette image mais la plupart n’était en réalité que les objets de plaisir de Kadhafi, déguisés en soldat. Je renvoie au livre d'Annick Cojean "Les Proies : dans le Harem de Kadhafi", publié en 2012.
Plus proches de nous, il y eut les "amazones" de Kadhafi, le dictateur lybien, de sinistre mémoire.
Daniel
Daniel
Merci à Julie et à Luc
@ Didier, je partage et approuve ton analyse. En effet ces "amazones" n'étaient pas des sauvages, mais des combattantes.
@ Didier, je partage et approuve ton analyse. En effet ces "amazones" n'étaient pas des sauvages, mais des combattantes.
Félicitations d'avoir osé sortir du cadre traditionnel, centré sur l'Europe et l'occident. Tu nous avais déjà fait découvrir des personnages en Chine. Pour l'Afrique, c'est le 3ème texte, bravo!
Julie
Julie
Olga,
L’Afrique n’étant pas historiquement parlant mon terrain de prédilection, je te remercie donc d’avoir partagé avec nous tes connaissances sur ce sujet avec cette bien belle chronique historique, très bien documentée.
Je connaissais évidemment les célèbres amazones de l’antiquité, et là j’ai le plaisir grâce à toi d’en découvrir de nouvelles avec les Mino que tu as su parfaitement bien nous décrire avec cet écrit.
Ces dernières, à mon avis aussi ne furent pas plus « sauvages » et « barbares » que ne le furent d’autres guerriers dans d’autres guerres avant ou après elles.
En effet, pour reprendre la citation du stratège prussien Carl Von Clausewitz « la guerre n’est que la continuation de la politique selon d’autres moyens » et nous en avons quotidiennement la preuve actuellement…
Didier
L’Afrique n’étant pas historiquement parlant mon terrain de prédilection, je te remercie donc d’avoir partagé avec nous tes connaissances sur ce sujet avec cette bien belle chronique historique, très bien documentée.
Je connaissais évidemment les célèbres amazones de l’antiquité, et là j’ai le plaisir grâce à toi d’en découvrir de nouvelles avec les Mino que tu as su parfaitement bien nous décrire avec cet écrit.
Ces dernières, à mon avis aussi ne furent pas plus « sauvages » et « barbares » que ne le furent d’autres guerriers dans d’autres guerres avant ou après elles.
En effet, pour reprendre la citation du stratège prussien Carl Von Clausewitz « la guerre n’est que la continuation de la politique selon d’autres moyens » et nous en avons quotidiennement la preuve actuellement…
Didier
Je ne connaissais pas. Très intéressant!
Luc
Luc