La bague de fiançailles et la bonne blague.
Récit érotique écrit par Accent [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 12-05-2014 dans la catégorie Entre-nous, hommes et femmes
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La bague de fiançailles et la bonne blague.
-Mon chéri, écarte-toi un peu, tu t’excites à te frotter ainsi contre moi. Cette nuit ne t’a pas suffi ? Tu es incorrigible. Recule ou je sors de la piste, tu auras bonne mine avec cette déformation anatomique. Oh ! Cesse donc, c’est indécent. Jean tu vas me fâcher. Danse plus décontracté, mon amour. Souris, mieux que ça.
-Mais, que dis-tu, Claire? Je suis tout à fait correct, rien ne justifie ta remarque. Ca ne me fait pas rire.
-Oh ! Que tu es comique ! Dis-moi donc ce qu’est cette bosse à hauteur de ma cuisse. Ce n’est pas une manifestation intempestive de ton amour pour moi ? Mais tu bandes, mon amour, toujours aussi cochon, ça devient gênant. J’aime bien, mais point trop n’en faut. Bientôt les autres couples vont t’applaudir. Allons-nous reposer une minute à notre table, tu te calmeras avant de reprendre la danse. Tu pourrais te fendre d’une bouteille de champagne pour mon anniversaire, hein ?
J’ai beaucoup mieux que ça pour son anniversaire, une surprise de taille. Je me repose, oui, puisqu'elle l’exige. Elle est parfois tyrannique, cela m’a longtemps freiné dans mon désir de l’épouser ; cela ne m’empêche pas de l’aimer. Ainsi cette nuit je me suis régalé à la mettre en pâmoison. Quel beau souvenir à ruminer pendant qu’elle sautille sur la piste avec ce type à l’allure distinguée. Mais n’est-il pas étrange que Claire n’ait pas eu le temps de s’asseoir sur la chaise que je lui présentais ? Un type sorti de je ne sais où s’est incliné devant elle pour l’inviter. Elle m’a regardé comme étonnée, a levé les épaules et ouvert ses mains comme pour signifier qu’elle n’y était pour rien, mais par correction elle a accepté l’invitation. J’ai souri, le fait est fréquent dans les salles de bal. Mieux vaut pour son prestige avoir une compagne séduisante qui attire l’attention qu’un laideron. Son charme se mesure au nombre des invitations dans ce milieu : il y a celles qui ne cessent de danser et celles qui font tapisserie. Je peux me réjouir de l’appartenance de Claire à la première catégorie, malgré sa manie de compter les invitations
Quand même, cette invitation a battu tous les records de rapidité. Le rapace a fendu la foule et a fondu sur sa proie de façon si déterminée au moment précis où Claire m’invitait à un arrêt, que j’en viens à me demander si le passage d’un cavalier à l’autre n’était pas le résultat d’un accord préalable entre cet inconnu et ma chérie. Lui était sûr de lui, certain d’attraper la belle dans ses serres, elle avait choisi l’instant favorable pour être capturée innocemment et sous le prétexte ridicule d’une érection peu convenable. D'autres fois il m’était arrivé de m’émouvoir fortement à son contact, de connaître des expansions gênantes, de changer de volume à ce niveau et de devoir cacher une bosse trop voyante en me serrant encore plus étroitement contre elle. Avec le résultat catastrophique qu’on peut envisager ! Habituellement elle en tirait avantage, était fière de l’effet produit, riait. Son rire secouait son corps, le mien aussi, et aggravait encore mon état.
Mais aujourd'hui mon pénis est sage ou presque. Au cours de la nuit précédente, les manœuvres de Claire lui ont rabaissé le caquet, elle n’a pas pu sentir une verge dressée. Pour se débarrasser de moi, elle a raconté n’importe quoi. Qu’est-ce qui a bien pu lui dicter cette excuse bidon ? Je pose discrètement une main sur ma cuisse droite, rien à signaler, l’autre main sur la cuisse gauche… zut, il y a un objet oblong et dur dans ma poche. Ciel, elle a confondu l’étui original de la bague avec une zigounette en folie. C’est à mourir de rire. J’ai résolu de lui offrir aujourd'hui, au cours de ce bal, une bague de fiançailles. Le joaillier m’a conseillé et vendu cet emballage un peu particulier en apprenant que nous cohabitons maritalement depuis des années. C’est drôle, cocasse et un peu coquin dans la forme et dans la conception. C’est une application aplatie des poupées russes, trois boîtes de plus en plus petites, qu’il faut ouvrir successivement par le milieu pour découvrir enfin la surprise. Cette surprise sera de taille. Claire sautera de joie, je peux commander le champagne. Je bous d’une joie difficile à contenir, mais je ne bande pas ! pourquoi me néglige-t-elle?
Sur la piste ma future est en pleine discussion avec son beau cavalier. Un bel homme certes, elle n’accepte pas toutes les invitations. Il faut lui faire honneur pour être agréé. Elle ne reçoit favorablement qu’un type d’hommes : grand, beau, distingué et habillé avec classe. Une fine moustache est un must. Son danseur actuel réunit tous les critères, voilà pourquoi elle n’a pas hésité à le suivre. « Ollé ! » Ils viennent de passer à proximité. Ni lui ni elle ne m’ont aperçu. Mais je n’ai d’yeux que pour eux. A voir comme leurs jambes tricotent intimement emmêlées, comme leurs hanches se balancent au même rythme, comme leurs ventres restent proches, même collés, je trouve étrange de ne voir dans le regard de Claire aucun signe de réprobation. Elle boit les paroles du type. Ou c’est un castrat ou elle éprouve une jouissance infinie à se frotter contre sa verge en érection. La cache-t-il entre les cuisses de sa danseuse pour que je ne distingue rien au passage suivant ?
Mais alors, pourquoi cette différence, pourquoi ai-je été déposé et pourquoi cet autre a-t-il le droit de lui faire sentir son désir de si près et si intensément ? Qu’a-t-il d’exceptionnel ? Il lui fait l’article et simultanément il l lui fait en mesurer la dureté, la longueur exceptionnelle ou le volume impressionnant ? Ca commence à m’agacer sérieusement. Quand aurai-je l’occasion de lui offrir son cadeau ?
Claire transpire maintenant, l’enlacement, le mouvement de la danse et le ressenti sur son pubis l’enflamment progressivement. Les serres ne lâchent pas prise. Qui est ce type trop beau, trop sûr de lui ? Depuis quand et d’où Claire le connaît-elle ? Et surtout comment ose-t-elle provoquer et se laisser provoquer aussi ostensiblement en public et devant moi ? Madame la pudeur m’a repris sans raison pour aller se lover sans pudeur dans les bras solides du bellâtre. Elle se trémousse, se dandine, se balance, comme gênée par un objet insolite mal placé. Ce type osé n’est-il qu’un pion de plus dans son décompte ? N’est-il pas venu lui souhaiter bon anniversaire lui aussi ? Ce pourrait être un ami qu’elle aurait oublié de me présenter, mais un ami très proche, bien trop proche à cette heure. Leur comportement me relègue au deuxième rang soudain. Est-ce un autre fiancé potentiel ? Le fait d’avoir un an de plus angoisse-t-il ma compagne au point qu’elle veuille brûler la chandelle par les deux bouts ? Je parie que la chandelle qui la chauffe en ce moment ressemble à un cierge pascal. On ferait bien de lui adresser un rappel à la décence.
Ouf, la série s’arrête. Le couple a du mal à se séparer. Je devine leur embarras, le monsieur attend d’être présentable. Ah ! Il ruse, il fait pivoter Claire et se colle dans son dos ; cela ne va guère améliorer sa situation et favoriser sa détumescence, mais Claire pourra dire qu’elle le connaît recto verso. Je lève la bouteille, Claire lève un bras pour signaler qu’elle a compris et qu’elle a soif. Je fais sauter le bouchon, verse dans les deux coupes et j’attends. A l’allure de la « débandade sexuelle » du type ils n’avancent guère, camouflent leurs émotions en se coulant dans le groupe le plus lent. Il serait temps que le wagon se détache de la locomotive et que Claire retrouve son autonomie de mouvement. Les musiciens ont vidé leurs verres. La musique reprend. La marche de Claire est interrompue par un nouveau prétendant, du même acabit que le premier. Ils échangent deux mots. Claire le plante sur place et accourt toute guillerette.
-Le champagne ne sera plus frais, dépêche-toi. A ta santé et bon anniversaire, ma chérie
Elle est essoufflée mais ravie et rayonnante :
-Merci mon amour. Ça va, mon chou ? Tout est en ordre, mon chéri? Tu as un objet trop gros dans la poche, tu vas déformer ton costume, mon doudou d’amour. Qu’est-ce que c’est, mon Jean? … Oh ! Ça fait du bien, tu m’en verses encore un peu, tu es adorable. J’ai eu vraiment chaud. Oh ! La, la. Que ça fait du bien. Merci, oh que je t’aime, toi ! Oh ! Que ça fait du bien, merci.
Elle rote et éclate de rire, me regarde par en dessous. « Amour, chéri, doudou d’amour, adorable » Là elle accumule les mots tendres, il n’en manque qu’un ou deux. Elle a quelque chose sur le cœur, un truc à se faire pardonner.
-Excuse-moi, ça m’a rafraîchie mon coco. Ça fait tellement de bien. Ne fais pas cette tête, Loulou ! Je t’aime, je t’adore, tu es mon tout, mon unique, mon amour adoré.
Oui, le truc en question doit être « gros », elle ne sait comment arriver à confier ce qu'elle a sur la conscience. Voudrait-elle rompre? J’essaie de l’aider :
-Qu’est-ce qui te fait du bien, la bosse du beau gars ou le champagne ?
-Ah ! Tu as remarqué. Ouais ! Il a poussé le bouchon un peu loin. Il y a des types pénibles, mal éduqués.
-Eh ! Oui ! Quel bouchon ! Jusqu’où l’a-t-il poussé, ça t’a fait mal ? Tu m’as traité de cochon, et toi, qu’as-tu fait à ce type pour l’étourdir jusqu’à le pousser à se lâcher en public? Moi tu m’as largué pour beaucoup moins que ça. Il faut croire que son étreinte ne t’a pas déplu. Heureusement que c’est ton anniversaire, je veux fermer les yeux pour une fois. De grâce, ne recommence pas ou j’aurai trop honte pour attendre la fin du bal. Tu rentreras seule.
-Tu ne vas pas me quereller aujourd’hui, mon amour. Chéri, tu exagères toujours, on dirait que tu deviens jaloux. Mais je t’aime, tu le sais. Tu ne t’ennuies pas trop ? Il faut que j’y aille : tu vois le type qui m’attend dans l’allée, pour m’en débarrasser plus vite et venir boire avec toi j’ai dû lui promettre cette danse.
Une pirouette et la poulette sautille vers ce nouvel aigle, grand, beau, élégamment vêtu aux plumes luisantes. Il s’en saisit et la fera grimper sur les cimes de quel plaisir ? C’est mal parti pour notre couple. Elle ne m’a pas laissé le temps de parler, d’approuver ou de protester contre ce nouvel abandon. Je n’ai même pas eu celui de lui présenter l’étui ou de lui dire ce qu’il contient, encore moins ai-je pu lui annoncer mon intention de franchir une étape et de lui demander officiellement et solennellement une main qu’elle m’a imposée depuis si longtemps en secret. Bon, elle avait rudement soif, le peu de liquide qui reste dans la bouteille ne suffira pas à arroser dignement un tel événement… Elle danse. Tiens le nouveau semble moins pressant, garde une distance convenable. J’ai craint une minute de voir défiler une cohorte d’amis intimes venus fêter l’anniversaire de Claire de façon gaillarde, à la hussarde. Me voilà rassuré.
Je peux aller au comptoir, je veux commander un brut à livrer frais quand ma future me rejoindra à ma table. Je lui donnerai l’étui, elle ouvrira les boîtes fébrilement, s’énervera un peu à la deuxième, tapera des pieds à la troisième, hurlera de joie à la vue de la bague et me sautera au cou. Pourvu qu’elle contienne son émotion et ne se livre pas à des gestes débordants d’affection ! Elle va pleurer, verser des larmes de bonheur. J’ai prévu deux mouchoirs. Il y a du monde à servir, l’attente est longue. A mon retour la bouteille a disparu. Tout près, sur la piste, Claire donne le biberon à son danseur, trempe sa chemise de champagne. Il n’apprécie pas, lève une main. C’est un S.O.S. capté aussitôt par une connaissance récente. Le premier cavalier de Claire se lève et va prendre le relais. J’aurais dû réagir plus vite et la tirer de leurs griffes, ils sont de connivence et s’arrangent pour garder la patte sur leur proie. Le changement ne déplaît pas à Claire, elle remet le cadavre au partant et se jette dans les bras de l’arrivant. Elle a jeté un œil dans ma direction avant de cacher sa tête dans l’épaule accueillante. Ils disparaissent dans la foule mouvante.
Je rêvasse, j’attends, je patiente. On a dû passer le mot à tous les mâles célibataires de la salle. Quand une danse s’arrête un successeur bloque la sortie de Claire, lui serre la main, la secoue pour la féliciter et lui fait la bise. Elle n’en revient pas de son succès, plaisante, rit et passe de l’un à l’autre à la reprise. Je décide d’être le prochain, j’irai me poster à proximité quand arrivera la fin du morceau et je récupérerai ma danseuse. Je patiente, j’examine les autres, ceux qui dansent, ceux qui s’attardent au bar, ceux qui se dirigent vers les toilettes ou vers la sortie, ceux et celles qui comme moi, sont assis avec des mines tristes. Eux aussi attendent qui le retour de l’aimé, qui l’invitation à danser.
-Bonjour Jean, vous allez bien ? Vous êtes seul, puis-je vous tenir compagnie ?
-Mais bien sûr, je vous en prie Lise. Vous arrivez. Vous êtes accompagnée ?
-Non. Ah !, j’aperçois Claire. Là-bas, elle se dirige vers la porte au bras d’un beau garçon. Vous le connaissez, c’est un de vos amis. Il paraît très proche de Claire.
Lise, c’est ma secrétaire. Brave fille, célibataire, vingt trois ans, un peu pipelette, mais extrêmement gentille et dévouée. Elle cache ses yeux derrière des culs de bouteille, cela lui donne un visage ingrat. Elle envisage sérieusement de passer aux lentilles, car, paraît-il, on a fait de grands progrès et il se pourrait qu’elle trouve lentilles à ses yeux. Pour le moment elle a mieux vu que moi la sortie de Claire. Cette fois je veux savoir où elle compte aller, je me lève et suit Claire, son cavalier et un petit cortège composé des derniers à l’avoir fait tournoyer. De la porte je vois le petit groupe s’éloigner vers le parking, s’arrêter derrière la dernière rangée de voitures et se refermer autour de la robe bleue à fleurs. Six hommes font cercle, la tête de Claire monte au centre, puis ses épaules, puis elle disparaît. J’entends
-« Ho ! Hisse ! Ho ! Hisse !
Le corps reparaît mais à l’horizontale, pareil à un pantin désarticulé, bras et jambes battent l’air au milieu d’un envol de tissu, avec des éclairs de chair blanche au niveau des cuisses, la tête se perd dans la masse des cheveux blonds dénoués qui flottent au vent. A chaque "Ho ! Hisse !" Répond un cri de frayeur suivi d’un éclat de rire de Claire. Elle monte en désordre et retombe tant bien que mal sur des bras ou des mains qui saisissent la partie qui se présente. Douze mains la cueillent à la descente, prennent un élan et la renvoient en l’air. Douze mains la tripotent et cela la réjouit. Douze mains attrapent le dos, la tête, les bras, les pieds, les genoux, les fesses, enfin ce qu’elles peuvent mais vraisemblablement avec des préférences pour certaines zones plus sensibles d’un corps de femme. Une main se glisse dans la mienne, timide, douce, amicale. Claire redescend sur terre au milieu de ce cercle improvisé d’amis et la voix de Lise me murmure :
-Ecoutez, Jean, ils chantent « Joyeux anniversaire ». C’est aujourd'hui ? Elle est vraiment gaie. Mais pourquoi faites-vous cette tête ? Ah !
Oui, comme moi elle assiste à la suite. Une bouche, deux bouches, trois, quatre, cinq bouches se posent sur les lèvres de Claire. Cinq baisers plus qu’amicaux, très longs à mon goût. Cinq comparses s’éloignent, Claire reste seule avec le sixième homme, le premier rencontré au bal. Il se penche, la pousse contre une carrosserie et à son tour l’embrasse à pleine bouche. Les cinq premiers se retournent et se mettent à compter
-Un, deux…. Trente... . Quarante-et-un…
A soixante le type se relève, les autres crient bravo puis rentrent dans la salle en reluquant Lise. Le baiser a repris. Les mains de l’homme ont quitté le visage de Claire. Les carrosseries dissimulent ce qu’elles peuvent entreprendre plus bas. J’ai compris, Lise aussi. Elle tire ma main, elle me ramène à ma table. Un des cinq vient inviter Lise. Elle décline l’invitation et pour donner le change se penche vers moi, feint d’être ma femme. Le garçon de passage s’y trompe et présente le brut commandé et prépayé, débouche et nous sert. Avec un sourire triste ma compatissante secrétaire trinque avec moi, nous dégustons le champagne. Derrière ses verres épais le regard de Lise se fait pétillant, tendre. A la fin de la bouteille, je lève la main. Le service est rapide, le champagne est léger, fluide, ses fines bulles chatouillent le palais. Il fait chaud mais le liquide frais fait du bien, soulage la peine de cœur.
-Hé, Jean ! Attends-moi me crie dans l’oreille la voix de Claire, je fais une dernière valse avec Serge et je viens trinquer avec toi. Bonjour Lise, vous me le gardez, merci. Tu te souviens, c’est mon anniversaire, à tout de suite mon amour chéri.
-Ah ! C’est toi, Claire ? Je ne te voyais plus, d’où reviens-tu ?
-J’étais sortie prendre l’air, il fait trop lourd dans cette salle. N’oublie pas, j’ai soif.
Claire est revenue. Lise et moi avons descendu une bouteille et demie à deux. Il lui en a fallu du temps à Claire pour ses exercices respiratoires avec l’autre. Le champagne c’est bon, mais ça suffit.
Je hoquette un oui gras à rallonge. Dans ma poche quelque chose me gêne. Je fouille, j’extrais un écrin long aux extrémités arrondies. Ah ! Oui, la bague de fiançailles. C’est dérisoire. J’ai un éclair, une illumination :
Lise, vous avez vu, vous avez entendu ?
-Oui, monsieur Jean. Elle est bizarre ce soir. Laissons-lui la demi-bouteille. Mais les bulles s’évaporent. C’est dommage
-Tant pis pour elle, les absents ont tort, n’est-ce pas Lise. Lise, croyez-vous qu’elle serait une femme fidèle et que je doive l’épouser ? Vous avez-vu derrière les autos, qu’est-ce qu’elle pouvait fabriquer derrière les tas de tôle, hein, Lise ? Certainement rien d’honnête. Vous feriez ça, vous, Lise.
-Non, oui. Enfin, non je ne je ferais pas, oui j’ai un peu vu. Mais moi, ce serait moins grave, je vis toute seule, alors si un homme voulait…m’embrasser comme ça, aussi longtemps, vous comprenez, je ne sais pas. Si j'étais amoureuse de lui, peut-être que...
La pauvre est rouge pivoine. L’aveu lui a coûté le million. Elle vient d’étaler sa solitude. Elle est touchante de naïveté. Adorable, fragile, sincère, douce, sans caprices, prête à consoler son malheureux chef de bureau.
-Lise, prenez ceci et ouvrez, s’il vous plaît, c’est pour vous.
-Qu’est-ce que c’est ? Vous êtes sûr ? Pour moi, mais vous ne saviez pas que je viendrais. J’ouvre vraiment ? Vous le voulez ? C’est à cause du champagne. Jean, vous devriez attendre demain.
-Lise, ouvre s’il te plaît.
-Bien, vos désirs sont des ordres. ..C’est amusant, dans la boîte il y en aune autre… Mais ce n’est pas fini, combien y en a-t-il ? C’est une farce, vous vous moquez de moi.
-Non attention, ne fais pas tomber ce qui vient… Lise veux-tu m’épouser, ceci est une bague de fiançailles. Je te l’offre, veux-tu de moi ?
-Oh ! Jean ! Ce n’est pas vrai, ce n’est pas possible ! Elle est magnifique. Je te regardais tous les jours, je n’aurais jamais osé en rêver. Non, je ne peux pas accepter, c’est par dépit. Moi, je rêve d’amour, d’amour plein, d'amour vrai, d'amour sincère, d’amour de moi, d’amour toujours.
-Lise refuses-tu de passer cette bague à ton doigt ? Lise je sais que je pourrai compter sur toi. Allez, essaie, je t’aimerai toujours. Merci d’avoir été là quand j’ai eu besoin de toi. Oui, à ce doigt. C’est merveilleux, elle est à la bonne taille. Lise embrasse-moi. Embrasse-moi jusqu'à cent.
Bonnes gens, regardez si ça vous plaît. Le baiser a-t-il duré jusqu'à cent ? Je n’en sais rien, mais c’est surement le meilleur que j’aie reçu. Simplement il a été brutalement interrompu par une bousculade et par un cri furieux de Claire :
-Mais Jean, tu es fou. Que fais-tu ? Avec ta secrétaire. Je vais t’en…
-Claire, je te présente Lise, ma fiancée depuis quelques secondes. Lise montre lui ta bague.
-Quoi ? Mais tu as trop bu. Tiens termine ta bouteille.
Claire nous asperge au champagne. Je me lève, je prends la main de ma fiancée, nous partons, les voisins de table applaudissent. Claire court, tire sur ma veste :
-Non, ce n’est pas possible, tu ne peux pas me faire ça. Après tout ce que j’ai fait. …
- ce que tu as fait derrière les autos ?
Claire blêmit. Lise doute, s’inquiète, je l’embrasse et je la soulève.
Et : » Ho ! Hisse ! » Je franchis la sortie avec Lise dans les bras, une main plongée dans la chaleur de ses cuisses tremblantes
J’arrête ma voiture, fais entrer Lise dans ma maison, range ma voiture au garage et me retrouve nez à nez avec Claire sur le trottoir , à l’entrée de mon jardinet. Son taxi redémarre.
-Jean, tu n’es pas sérieux. Cette bague était pour moi ? bien sûr ! Arrête ton cirque. J’avais fouillé dans tes affaires, je savais ce qui était dur dans ta poche. Je t’ai fait marcher, je voulais t’obliger à te déclarer enfin aujourd'hui et j’ai essayé d’exciter ta jalousie avec la complicité de quelques collègues de travail. Ne sois pas idiot. C’était une blague, juste une bonne blague. Renvoie cette binoclarde chez elle, explique lui que c’est moi ta fiancée. Allez, rentrons et mettons les choses au clair tout de suite, ne la laisse pas à ses illusions, ce serait cruel ! Jean…
-Ce serait plus cruel que le spectacle que tu m’as offert le jour de ton anniversaire ? Plus cruel que l’attente, plus cruel que tes tripotages sur piste, que ces frottements de guenon en chaleur contre ton grand singe en chemise et cravate, plus cruel que tes cabrioles avec six hommes qui te tâtaient partout, auxquels tu montrais tes cuisses, ton cul et ton sexe, qui pinçaient tes nichons en sueur, plus cruel que ces longs baisers agrémentés de moustaches. Non, tu ne peux pas être ma fiancée, et pour être clair avec toi, Claire obscène, j’en ai marre de tes ordres, de plier devant tes caprices. Une bonne blague, dis-tu ? Oui, elle est bonne, puisqu’elle est réussie, elle me débarrasse d’une mégère. Je ne te retiens pas.
-Tu ne vas pas me laisser sur le trottoir, ce soir.
-Regarde la lumière qui clignote au loin, c’est l’enseigne d’un hôtel. Maintenant tu peux appeler ce complice qui bandait si fort sur ton ventre. Excuse-moi, ma fiancée m’attend pour célébrer l’événement au lit.
-Salaud, tu me le paieras. Et mon champagne ? J’ai soif. Il y a du champagne à la cave, Jean
-Pour Lise. La bonne blague !
-Mais, que dis-tu, Claire? Je suis tout à fait correct, rien ne justifie ta remarque. Ca ne me fait pas rire.
-Oh ! Que tu es comique ! Dis-moi donc ce qu’est cette bosse à hauteur de ma cuisse. Ce n’est pas une manifestation intempestive de ton amour pour moi ? Mais tu bandes, mon amour, toujours aussi cochon, ça devient gênant. J’aime bien, mais point trop n’en faut. Bientôt les autres couples vont t’applaudir. Allons-nous reposer une minute à notre table, tu te calmeras avant de reprendre la danse. Tu pourrais te fendre d’une bouteille de champagne pour mon anniversaire, hein ?
J’ai beaucoup mieux que ça pour son anniversaire, une surprise de taille. Je me repose, oui, puisqu'elle l’exige. Elle est parfois tyrannique, cela m’a longtemps freiné dans mon désir de l’épouser ; cela ne m’empêche pas de l’aimer. Ainsi cette nuit je me suis régalé à la mettre en pâmoison. Quel beau souvenir à ruminer pendant qu’elle sautille sur la piste avec ce type à l’allure distinguée. Mais n’est-il pas étrange que Claire n’ait pas eu le temps de s’asseoir sur la chaise que je lui présentais ? Un type sorti de je ne sais où s’est incliné devant elle pour l’inviter. Elle m’a regardé comme étonnée, a levé les épaules et ouvert ses mains comme pour signifier qu’elle n’y était pour rien, mais par correction elle a accepté l’invitation. J’ai souri, le fait est fréquent dans les salles de bal. Mieux vaut pour son prestige avoir une compagne séduisante qui attire l’attention qu’un laideron. Son charme se mesure au nombre des invitations dans ce milieu : il y a celles qui ne cessent de danser et celles qui font tapisserie. Je peux me réjouir de l’appartenance de Claire à la première catégorie, malgré sa manie de compter les invitations
Quand même, cette invitation a battu tous les records de rapidité. Le rapace a fendu la foule et a fondu sur sa proie de façon si déterminée au moment précis où Claire m’invitait à un arrêt, que j’en viens à me demander si le passage d’un cavalier à l’autre n’était pas le résultat d’un accord préalable entre cet inconnu et ma chérie. Lui était sûr de lui, certain d’attraper la belle dans ses serres, elle avait choisi l’instant favorable pour être capturée innocemment et sous le prétexte ridicule d’une érection peu convenable. D'autres fois il m’était arrivé de m’émouvoir fortement à son contact, de connaître des expansions gênantes, de changer de volume à ce niveau et de devoir cacher une bosse trop voyante en me serrant encore plus étroitement contre elle. Avec le résultat catastrophique qu’on peut envisager ! Habituellement elle en tirait avantage, était fière de l’effet produit, riait. Son rire secouait son corps, le mien aussi, et aggravait encore mon état.
Mais aujourd'hui mon pénis est sage ou presque. Au cours de la nuit précédente, les manœuvres de Claire lui ont rabaissé le caquet, elle n’a pas pu sentir une verge dressée. Pour se débarrasser de moi, elle a raconté n’importe quoi. Qu’est-ce qui a bien pu lui dicter cette excuse bidon ? Je pose discrètement une main sur ma cuisse droite, rien à signaler, l’autre main sur la cuisse gauche… zut, il y a un objet oblong et dur dans ma poche. Ciel, elle a confondu l’étui original de la bague avec une zigounette en folie. C’est à mourir de rire. J’ai résolu de lui offrir aujourd'hui, au cours de ce bal, une bague de fiançailles. Le joaillier m’a conseillé et vendu cet emballage un peu particulier en apprenant que nous cohabitons maritalement depuis des années. C’est drôle, cocasse et un peu coquin dans la forme et dans la conception. C’est une application aplatie des poupées russes, trois boîtes de plus en plus petites, qu’il faut ouvrir successivement par le milieu pour découvrir enfin la surprise. Cette surprise sera de taille. Claire sautera de joie, je peux commander le champagne. Je bous d’une joie difficile à contenir, mais je ne bande pas ! pourquoi me néglige-t-elle?
Sur la piste ma future est en pleine discussion avec son beau cavalier. Un bel homme certes, elle n’accepte pas toutes les invitations. Il faut lui faire honneur pour être agréé. Elle ne reçoit favorablement qu’un type d’hommes : grand, beau, distingué et habillé avec classe. Une fine moustache est un must. Son danseur actuel réunit tous les critères, voilà pourquoi elle n’a pas hésité à le suivre. « Ollé ! » Ils viennent de passer à proximité. Ni lui ni elle ne m’ont aperçu. Mais je n’ai d’yeux que pour eux. A voir comme leurs jambes tricotent intimement emmêlées, comme leurs hanches se balancent au même rythme, comme leurs ventres restent proches, même collés, je trouve étrange de ne voir dans le regard de Claire aucun signe de réprobation. Elle boit les paroles du type. Ou c’est un castrat ou elle éprouve une jouissance infinie à se frotter contre sa verge en érection. La cache-t-il entre les cuisses de sa danseuse pour que je ne distingue rien au passage suivant ?
Mais alors, pourquoi cette différence, pourquoi ai-je été déposé et pourquoi cet autre a-t-il le droit de lui faire sentir son désir de si près et si intensément ? Qu’a-t-il d’exceptionnel ? Il lui fait l’article et simultanément il l lui fait en mesurer la dureté, la longueur exceptionnelle ou le volume impressionnant ? Ca commence à m’agacer sérieusement. Quand aurai-je l’occasion de lui offrir son cadeau ?
Claire transpire maintenant, l’enlacement, le mouvement de la danse et le ressenti sur son pubis l’enflamment progressivement. Les serres ne lâchent pas prise. Qui est ce type trop beau, trop sûr de lui ? Depuis quand et d’où Claire le connaît-elle ? Et surtout comment ose-t-elle provoquer et se laisser provoquer aussi ostensiblement en public et devant moi ? Madame la pudeur m’a repris sans raison pour aller se lover sans pudeur dans les bras solides du bellâtre. Elle se trémousse, se dandine, se balance, comme gênée par un objet insolite mal placé. Ce type osé n’est-il qu’un pion de plus dans son décompte ? N’est-il pas venu lui souhaiter bon anniversaire lui aussi ? Ce pourrait être un ami qu’elle aurait oublié de me présenter, mais un ami très proche, bien trop proche à cette heure. Leur comportement me relègue au deuxième rang soudain. Est-ce un autre fiancé potentiel ? Le fait d’avoir un an de plus angoisse-t-il ma compagne au point qu’elle veuille brûler la chandelle par les deux bouts ? Je parie que la chandelle qui la chauffe en ce moment ressemble à un cierge pascal. On ferait bien de lui adresser un rappel à la décence.
Ouf, la série s’arrête. Le couple a du mal à se séparer. Je devine leur embarras, le monsieur attend d’être présentable. Ah ! Il ruse, il fait pivoter Claire et se colle dans son dos ; cela ne va guère améliorer sa situation et favoriser sa détumescence, mais Claire pourra dire qu’elle le connaît recto verso. Je lève la bouteille, Claire lève un bras pour signaler qu’elle a compris et qu’elle a soif. Je fais sauter le bouchon, verse dans les deux coupes et j’attends. A l’allure de la « débandade sexuelle » du type ils n’avancent guère, camouflent leurs émotions en se coulant dans le groupe le plus lent. Il serait temps que le wagon se détache de la locomotive et que Claire retrouve son autonomie de mouvement. Les musiciens ont vidé leurs verres. La musique reprend. La marche de Claire est interrompue par un nouveau prétendant, du même acabit que le premier. Ils échangent deux mots. Claire le plante sur place et accourt toute guillerette.
-Le champagne ne sera plus frais, dépêche-toi. A ta santé et bon anniversaire, ma chérie
Elle est essoufflée mais ravie et rayonnante :
-Merci mon amour. Ça va, mon chou ? Tout est en ordre, mon chéri? Tu as un objet trop gros dans la poche, tu vas déformer ton costume, mon doudou d’amour. Qu’est-ce que c’est, mon Jean? … Oh ! Ça fait du bien, tu m’en verses encore un peu, tu es adorable. J’ai eu vraiment chaud. Oh ! La, la. Que ça fait du bien. Merci, oh que je t’aime, toi ! Oh ! Que ça fait du bien, merci.
Elle rote et éclate de rire, me regarde par en dessous. « Amour, chéri, doudou d’amour, adorable » Là elle accumule les mots tendres, il n’en manque qu’un ou deux. Elle a quelque chose sur le cœur, un truc à se faire pardonner.
-Excuse-moi, ça m’a rafraîchie mon coco. Ça fait tellement de bien. Ne fais pas cette tête, Loulou ! Je t’aime, je t’adore, tu es mon tout, mon unique, mon amour adoré.
Oui, le truc en question doit être « gros », elle ne sait comment arriver à confier ce qu'elle a sur la conscience. Voudrait-elle rompre? J’essaie de l’aider :
-Qu’est-ce qui te fait du bien, la bosse du beau gars ou le champagne ?
-Ah ! Tu as remarqué. Ouais ! Il a poussé le bouchon un peu loin. Il y a des types pénibles, mal éduqués.
-Eh ! Oui ! Quel bouchon ! Jusqu’où l’a-t-il poussé, ça t’a fait mal ? Tu m’as traité de cochon, et toi, qu’as-tu fait à ce type pour l’étourdir jusqu’à le pousser à se lâcher en public? Moi tu m’as largué pour beaucoup moins que ça. Il faut croire que son étreinte ne t’a pas déplu. Heureusement que c’est ton anniversaire, je veux fermer les yeux pour une fois. De grâce, ne recommence pas ou j’aurai trop honte pour attendre la fin du bal. Tu rentreras seule.
-Tu ne vas pas me quereller aujourd’hui, mon amour. Chéri, tu exagères toujours, on dirait que tu deviens jaloux. Mais je t’aime, tu le sais. Tu ne t’ennuies pas trop ? Il faut que j’y aille : tu vois le type qui m’attend dans l’allée, pour m’en débarrasser plus vite et venir boire avec toi j’ai dû lui promettre cette danse.
Une pirouette et la poulette sautille vers ce nouvel aigle, grand, beau, élégamment vêtu aux plumes luisantes. Il s’en saisit et la fera grimper sur les cimes de quel plaisir ? C’est mal parti pour notre couple. Elle ne m’a pas laissé le temps de parler, d’approuver ou de protester contre ce nouvel abandon. Je n’ai même pas eu celui de lui présenter l’étui ou de lui dire ce qu’il contient, encore moins ai-je pu lui annoncer mon intention de franchir une étape et de lui demander officiellement et solennellement une main qu’elle m’a imposée depuis si longtemps en secret. Bon, elle avait rudement soif, le peu de liquide qui reste dans la bouteille ne suffira pas à arroser dignement un tel événement… Elle danse. Tiens le nouveau semble moins pressant, garde une distance convenable. J’ai craint une minute de voir défiler une cohorte d’amis intimes venus fêter l’anniversaire de Claire de façon gaillarde, à la hussarde. Me voilà rassuré.
Je peux aller au comptoir, je veux commander un brut à livrer frais quand ma future me rejoindra à ma table. Je lui donnerai l’étui, elle ouvrira les boîtes fébrilement, s’énervera un peu à la deuxième, tapera des pieds à la troisième, hurlera de joie à la vue de la bague et me sautera au cou. Pourvu qu’elle contienne son émotion et ne se livre pas à des gestes débordants d’affection ! Elle va pleurer, verser des larmes de bonheur. J’ai prévu deux mouchoirs. Il y a du monde à servir, l’attente est longue. A mon retour la bouteille a disparu. Tout près, sur la piste, Claire donne le biberon à son danseur, trempe sa chemise de champagne. Il n’apprécie pas, lève une main. C’est un S.O.S. capté aussitôt par une connaissance récente. Le premier cavalier de Claire se lève et va prendre le relais. J’aurais dû réagir plus vite et la tirer de leurs griffes, ils sont de connivence et s’arrangent pour garder la patte sur leur proie. Le changement ne déplaît pas à Claire, elle remet le cadavre au partant et se jette dans les bras de l’arrivant. Elle a jeté un œil dans ma direction avant de cacher sa tête dans l’épaule accueillante. Ils disparaissent dans la foule mouvante.
Je rêvasse, j’attends, je patiente. On a dû passer le mot à tous les mâles célibataires de la salle. Quand une danse s’arrête un successeur bloque la sortie de Claire, lui serre la main, la secoue pour la féliciter et lui fait la bise. Elle n’en revient pas de son succès, plaisante, rit et passe de l’un à l’autre à la reprise. Je décide d’être le prochain, j’irai me poster à proximité quand arrivera la fin du morceau et je récupérerai ma danseuse. Je patiente, j’examine les autres, ceux qui dansent, ceux qui s’attardent au bar, ceux qui se dirigent vers les toilettes ou vers la sortie, ceux et celles qui comme moi, sont assis avec des mines tristes. Eux aussi attendent qui le retour de l’aimé, qui l’invitation à danser.
-Bonjour Jean, vous allez bien ? Vous êtes seul, puis-je vous tenir compagnie ?
-Mais bien sûr, je vous en prie Lise. Vous arrivez. Vous êtes accompagnée ?
-Non. Ah !, j’aperçois Claire. Là-bas, elle se dirige vers la porte au bras d’un beau garçon. Vous le connaissez, c’est un de vos amis. Il paraît très proche de Claire.
Lise, c’est ma secrétaire. Brave fille, célibataire, vingt trois ans, un peu pipelette, mais extrêmement gentille et dévouée. Elle cache ses yeux derrière des culs de bouteille, cela lui donne un visage ingrat. Elle envisage sérieusement de passer aux lentilles, car, paraît-il, on a fait de grands progrès et il se pourrait qu’elle trouve lentilles à ses yeux. Pour le moment elle a mieux vu que moi la sortie de Claire. Cette fois je veux savoir où elle compte aller, je me lève et suit Claire, son cavalier et un petit cortège composé des derniers à l’avoir fait tournoyer. De la porte je vois le petit groupe s’éloigner vers le parking, s’arrêter derrière la dernière rangée de voitures et se refermer autour de la robe bleue à fleurs. Six hommes font cercle, la tête de Claire monte au centre, puis ses épaules, puis elle disparaît. J’entends
-« Ho ! Hisse ! Ho ! Hisse !
Le corps reparaît mais à l’horizontale, pareil à un pantin désarticulé, bras et jambes battent l’air au milieu d’un envol de tissu, avec des éclairs de chair blanche au niveau des cuisses, la tête se perd dans la masse des cheveux blonds dénoués qui flottent au vent. A chaque "Ho ! Hisse !" Répond un cri de frayeur suivi d’un éclat de rire de Claire. Elle monte en désordre et retombe tant bien que mal sur des bras ou des mains qui saisissent la partie qui se présente. Douze mains la cueillent à la descente, prennent un élan et la renvoient en l’air. Douze mains la tripotent et cela la réjouit. Douze mains attrapent le dos, la tête, les bras, les pieds, les genoux, les fesses, enfin ce qu’elles peuvent mais vraisemblablement avec des préférences pour certaines zones plus sensibles d’un corps de femme. Une main se glisse dans la mienne, timide, douce, amicale. Claire redescend sur terre au milieu de ce cercle improvisé d’amis et la voix de Lise me murmure :
-Ecoutez, Jean, ils chantent « Joyeux anniversaire ». C’est aujourd'hui ? Elle est vraiment gaie. Mais pourquoi faites-vous cette tête ? Ah !
Oui, comme moi elle assiste à la suite. Une bouche, deux bouches, trois, quatre, cinq bouches se posent sur les lèvres de Claire. Cinq baisers plus qu’amicaux, très longs à mon goût. Cinq comparses s’éloignent, Claire reste seule avec le sixième homme, le premier rencontré au bal. Il se penche, la pousse contre une carrosserie et à son tour l’embrasse à pleine bouche. Les cinq premiers se retournent et se mettent à compter
-Un, deux…. Trente... . Quarante-et-un…
A soixante le type se relève, les autres crient bravo puis rentrent dans la salle en reluquant Lise. Le baiser a repris. Les mains de l’homme ont quitté le visage de Claire. Les carrosseries dissimulent ce qu’elles peuvent entreprendre plus bas. J’ai compris, Lise aussi. Elle tire ma main, elle me ramène à ma table. Un des cinq vient inviter Lise. Elle décline l’invitation et pour donner le change se penche vers moi, feint d’être ma femme. Le garçon de passage s’y trompe et présente le brut commandé et prépayé, débouche et nous sert. Avec un sourire triste ma compatissante secrétaire trinque avec moi, nous dégustons le champagne. Derrière ses verres épais le regard de Lise se fait pétillant, tendre. A la fin de la bouteille, je lève la main. Le service est rapide, le champagne est léger, fluide, ses fines bulles chatouillent le palais. Il fait chaud mais le liquide frais fait du bien, soulage la peine de cœur.
-Hé, Jean ! Attends-moi me crie dans l’oreille la voix de Claire, je fais une dernière valse avec Serge et je viens trinquer avec toi. Bonjour Lise, vous me le gardez, merci. Tu te souviens, c’est mon anniversaire, à tout de suite mon amour chéri.
-Ah ! C’est toi, Claire ? Je ne te voyais plus, d’où reviens-tu ?
-J’étais sortie prendre l’air, il fait trop lourd dans cette salle. N’oublie pas, j’ai soif.
Claire est revenue. Lise et moi avons descendu une bouteille et demie à deux. Il lui en a fallu du temps à Claire pour ses exercices respiratoires avec l’autre. Le champagne c’est bon, mais ça suffit.
Je hoquette un oui gras à rallonge. Dans ma poche quelque chose me gêne. Je fouille, j’extrais un écrin long aux extrémités arrondies. Ah ! Oui, la bague de fiançailles. C’est dérisoire. J’ai un éclair, une illumination :
Lise, vous avez vu, vous avez entendu ?
-Oui, monsieur Jean. Elle est bizarre ce soir. Laissons-lui la demi-bouteille. Mais les bulles s’évaporent. C’est dommage
-Tant pis pour elle, les absents ont tort, n’est-ce pas Lise. Lise, croyez-vous qu’elle serait une femme fidèle et que je doive l’épouser ? Vous avez-vu derrière les autos, qu’est-ce qu’elle pouvait fabriquer derrière les tas de tôle, hein, Lise ? Certainement rien d’honnête. Vous feriez ça, vous, Lise.
-Non, oui. Enfin, non je ne je ferais pas, oui j’ai un peu vu. Mais moi, ce serait moins grave, je vis toute seule, alors si un homme voulait…m’embrasser comme ça, aussi longtemps, vous comprenez, je ne sais pas. Si j'étais amoureuse de lui, peut-être que...
La pauvre est rouge pivoine. L’aveu lui a coûté le million. Elle vient d’étaler sa solitude. Elle est touchante de naïveté. Adorable, fragile, sincère, douce, sans caprices, prête à consoler son malheureux chef de bureau.
-Lise, prenez ceci et ouvrez, s’il vous plaît, c’est pour vous.
-Qu’est-ce que c’est ? Vous êtes sûr ? Pour moi, mais vous ne saviez pas que je viendrais. J’ouvre vraiment ? Vous le voulez ? C’est à cause du champagne. Jean, vous devriez attendre demain.
-Lise, ouvre s’il te plaît.
-Bien, vos désirs sont des ordres. ..C’est amusant, dans la boîte il y en aune autre… Mais ce n’est pas fini, combien y en a-t-il ? C’est une farce, vous vous moquez de moi.
-Non attention, ne fais pas tomber ce qui vient… Lise veux-tu m’épouser, ceci est une bague de fiançailles. Je te l’offre, veux-tu de moi ?
-Oh ! Jean ! Ce n’est pas vrai, ce n’est pas possible ! Elle est magnifique. Je te regardais tous les jours, je n’aurais jamais osé en rêver. Non, je ne peux pas accepter, c’est par dépit. Moi, je rêve d’amour, d’amour plein, d'amour vrai, d'amour sincère, d’amour de moi, d’amour toujours.
-Lise refuses-tu de passer cette bague à ton doigt ? Lise je sais que je pourrai compter sur toi. Allez, essaie, je t’aimerai toujours. Merci d’avoir été là quand j’ai eu besoin de toi. Oui, à ce doigt. C’est merveilleux, elle est à la bonne taille. Lise embrasse-moi. Embrasse-moi jusqu'à cent.
Bonnes gens, regardez si ça vous plaît. Le baiser a-t-il duré jusqu'à cent ? Je n’en sais rien, mais c’est surement le meilleur que j’aie reçu. Simplement il a été brutalement interrompu par une bousculade et par un cri furieux de Claire :
-Mais Jean, tu es fou. Que fais-tu ? Avec ta secrétaire. Je vais t’en…
-Claire, je te présente Lise, ma fiancée depuis quelques secondes. Lise montre lui ta bague.
-Quoi ? Mais tu as trop bu. Tiens termine ta bouteille.
Claire nous asperge au champagne. Je me lève, je prends la main de ma fiancée, nous partons, les voisins de table applaudissent. Claire court, tire sur ma veste :
-Non, ce n’est pas possible, tu ne peux pas me faire ça. Après tout ce que j’ai fait. …
- ce que tu as fait derrière les autos ?
Claire blêmit. Lise doute, s’inquiète, je l’embrasse et je la soulève.
Et : » Ho ! Hisse ! » Je franchis la sortie avec Lise dans les bras, une main plongée dans la chaleur de ses cuisses tremblantes
J’arrête ma voiture, fais entrer Lise dans ma maison, range ma voiture au garage et me retrouve nez à nez avec Claire sur le trottoir , à l’entrée de mon jardinet. Son taxi redémarre.
-Jean, tu n’es pas sérieux. Cette bague était pour moi ? bien sûr ! Arrête ton cirque. J’avais fouillé dans tes affaires, je savais ce qui était dur dans ta poche. Je t’ai fait marcher, je voulais t’obliger à te déclarer enfin aujourd'hui et j’ai essayé d’exciter ta jalousie avec la complicité de quelques collègues de travail. Ne sois pas idiot. C’était une blague, juste une bonne blague. Renvoie cette binoclarde chez elle, explique lui que c’est moi ta fiancée. Allez, rentrons et mettons les choses au clair tout de suite, ne la laisse pas à ses illusions, ce serait cruel ! Jean…
-Ce serait plus cruel que le spectacle que tu m’as offert le jour de ton anniversaire ? Plus cruel que l’attente, plus cruel que tes tripotages sur piste, que ces frottements de guenon en chaleur contre ton grand singe en chemise et cravate, plus cruel que tes cabrioles avec six hommes qui te tâtaient partout, auxquels tu montrais tes cuisses, ton cul et ton sexe, qui pinçaient tes nichons en sueur, plus cruel que ces longs baisers agrémentés de moustaches. Non, tu ne peux pas être ma fiancée, et pour être clair avec toi, Claire obscène, j’en ai marre de tes ordres, de plier devant tes caprices. Une bonne blague, dis-tu ? Oui, elle est bonne, puisqu’elle est réussie, elle me débarrasse d’une mégère. Je ne te retiens pas.
-Tu ne vas pas me laisser sur le trottoir, ce soir.
-Regarde la lumière qui clignote au loin, c’est l’enseigne d’un hôtel. Maintenant tu peux appeler ce complice qui bandait si fort sur ton ventre. Excuse-moi, ma fiancée m’attend pour célébrer l’événement au lit.
-Salaud, tu me le paieras. Et mon champagne ? J’ai soif. Il y a du champagne à la cave, Jean
-Pour Lise. La bonne blague !
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1 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Merci Accent pour ce récit si bien écrit si je pouvais donner une note, ce serait seulement 9,8/10 car il faut vou laisser l’espoir de vous améliorer encore ! Didier