La dernière touche_5
Récit érotique écrit par Briard [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 16-02-2022 dans la catégorie Entre-nous, hommes et femmes
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La dernière touche_5
Partie 5
Arina tenait la main valide de Frédéric.
Allongé sur son lit d’hôpital, il n’avait toujours pas repris connaissance.
C’est Jérémy qui, affolé par le départ précipité du jeune home, l’avait jointe sur son portable alors qu’elle errait dans le parc jouxtant leur appartement.
Elle marchait sans but, pleurant à chaudes larmes, se repassant sans cesse les paroles de sa belle-mère.
Elle n’avait répondu qu’au troisième appel.
« Laisse-moi Jérémy, je ne veux pas être dérangée. »« Arina, c’est grave. Frédéric est venu tout à l’heure, m’a emprunté les clés de ma voiture et est parti à ta recherche. »« Il n’est pas prêt de me trouver. »« Il m’a dit qu’il allait te chercher, qu’il voulait te dire qu’il t’aime. »« Non, il ne m’aime pas. C’est sa mère qui me l’a dit. »« Et tu as cru ce que cette folle t’a raconté ? »« Elle m’a dit qu’il couchait avec Lina et que c’est elle qu’il aimait mais qu’il ne savait pas comment me le dire. »« Arina, arrête de parler et écoute-moi attentivement. »Elle s’était alors arrêtée de marcher. »« Arina, Frédéric est dingue de toi. Il l’a toujours été. Il n’éprouve rien pour Lina. Il l’apprécie, mais ça s’arrête là. Son grand amour, espèce d’idiote, c’est toi. »« C’est moi ? Tu es sûr ? »« Mais espèce de triple buse, il n’y a que toi pour ne pas en être persuadée ; »« Tu ne me dis pas ça pour me rassurer ? »« Cette vieille chouette d’Ebba crois qu’en agissant de la sorte elle va garder son petit enfant chéri dans ses jupons. Mais elle a perdu d’avance. Il t’aime et ferait n’importe quoi pour toi, il me l’a assez dit et répété. »« Mais alors je ne suis qu’une conne, c’est ça ? »« Non, tu es amoureuse, et c’est normal qu’une manipulatrice comme Ebba t’aie embobinée. »« Quelle idiote j’ai été. J’aurais au moins pu m’expliquer avec lui, essayer de comprendre ce qui le tourmentait… »« S’il y a une chose qui ne le tourmentait pas, c’est bien la certitude des sentiments qu’il a pour toi niquedouille ! »« Tu sais où il est parti ? »« Non, il était complètement fou et est parti comme une balle. J’espère qu’il ne lui est rien arrivé. »« Mon Dieu, oui, faites qu’il ne lui soit rien arrivé. »
Perdue dans ses pensées, elle sentit un léger frémissement des doigts de la main qu’elle tenait.
Elle regarda Frédéric. Il ouvrit les yeux puis les referma aussitôt.
Elle se précipita sur le bouton rouge appelant les infirmières.
Celle qui faisait les soins depuis deux jours entra rapidement et s’approcha du lit.
« Il a ouvert les yeux. Mais il les a refermés aussitôt. »« C’est normal Il va avoir plusieurs phases de réveil qui dureront plus ou moins longtemps. C’est très bon signe. Je vais prévenir le professeur. »
Arina se rassit et reprit la main de Frédéric dans la sienne.
Une demi-heure plus tard, le professeur arriva dans la chambre. Elle se leva pour l’accueillir.
Il se pencha sur Frédéric, lui ouvrit un œil entre deux doigts en écartant les paupières, puis projeta la lumière d’un petit appareil directement dans sa rétine.
Il fit aller de droite à gauche le faisceau lumineux puis lui referma les paupières et se redressa.
« Alors professeur ? »« Il est proche de la phase de réveil. Sa rétine réagit bien à la lumière, il va se réveiller progressivement. »« Cela va prendre combien de temps ? »« Cela dépend de plusieurs facteurs, mais je pense que, d’ici demain, il se sera entièrement éveillé. »« Aura-t-il des séquelles ? »Le professeur fit signe à Arina de le suivre et ils sortirent de la chambre.
« Pour ce qui est d’éventuelles séquelles dues au coma, soyez rassurée, de ce côté-là, à part une grande confusion au réveil, il devrait retrouver la plénitude de ses moyens très rapidement. Enfin de ses moyens intellectuels. »« Pourquoi dites-vous ça ? »« Mademoiselle, son index et son majeur ont été fortement endommagés et les nerfs ont été tranchés net. J’ai réparé les deux doigts, mais il est plus que probable qu’il ne retrouvera jamais, ni leur totale agilité, ni leur souplesse. »« Vous voulez dire qu’il ne pourra plus jouer du piano ? »« Jouer du piano, si, ça ce sera possible. Mais redevenir un grand concertiste, j’ai bien peur que cela ne soit qu’une cruelle chimère. »« Mon Dieu, mais c’est terrible ce que vous me dites-là. C’est une catastrophe ! »« Je le sais, et, pour que son rétablissement se passe dans les meilleures conditions, il est préférable de lui différer l’information. Attendons qu’il soit totalement remis sur pied avant de lui parler de rééducation des doigts et qu’il ait la confirmation de mon diagnostic. Je dois vous laisser, excusez-moi, mais d’autres patients m’attendent. »« Mais bien sûr, merci professeur. »Arina retourna s’asseoir près de Frédéric, les larmes coulant sur ses joues.
Elle lui prit la main, la baisa et resta prostrée, le regard dans le vide.
Le soir vers dix-neuf-heure, Ebba fit irruption dans la chambre.
« Mon Dieu, mais qu’est-ce que vous lui avez fait ? »Elle voulut s’approcher du lit, mais Arina se leva et fit barrage de son corps.
« Qu’est-ce que je lui ai fait ? vous avez l’audace de me demander ça ? »« Oui, vous, la mauvaise fille qui avez abandonné mon fils. »« Sortez de la pièce immédiatement. Frédéric est proche du réveil, il n’a pas besoin d’entendre ce que je vais vous dire. »D’autorité, elle la poussa pour qu’elle sorte de la pièce. Elle l’amena jusque dans le couloir et la poussa dans une pièce contiguë à la chambre après avoir refermé délicatement la porte.
Elle se retourna et saisit sa belle-mère par le col.
« Alors vous espèce de sale mégère, c’est vous la responsable de tout ce qui arrive. »« Mais… »« Taisez-vous. Depuis toujours vous semez le mal autour de vous. »« Mais non… »« Vous avez tellement voulu que votre fils soit un grand virtuose du piano que vous n’avez pas hésité à coucher avec le président du conservatoire et du jury du concours pour le corrompre et qu’il change le règlement en favorisant votre rejeton. »« Ma parole, mais vous êtes folle ? »« Je vous ai vue dans sa voiture au pied de l’immeuble, vous embrasant à pleine bouche et, une fois sortie, lui envoyer un baiser. »« Vous n’êtes qu’une sale menteuse. »Une voix grave s’éleva derrière elles.
« Non, elle n’est pas une menteuse, c’est toi. C’est toi qui ments, encore et encore. »Le président, les yeux exorbités se tenait dans l’embrasure de la porte.
Il entra.
« Sale bonne-femme qui a tout fait pour coucher avec moi et qui ensuite m’a fait chanter en me menaçant de tout révéler à mon épouse si je n’arrivais pas à convaincre le jury de changer le règlement. »« Mais vous divaguez président. »« Ah, tu me vouvoies maintenant ? Comme c’est drôle. »« Moi je confirme que vous êtes une manipulatrice. »Le président s’effaça et le journaliste qui avait fait un scandale le jour de la remise des prix apparut.
« Mais de quoi vous mêlez-vous espèce de fouille merde. »« Je me mêle de ce qui regarde mes lecteurs, figurez-vous. J’ai fait ma petite enquête auprès de tous les membres du jury. Le président a au moins eu l’honnêteté de leur avouer l’odieux chantage auquel il était confronté. Et s’ils ont décidé d’accepter de changer le règlement, c’est parce que le président s’est engagé à démissionner une fois le concours terminé, ce qu’il a fait en début de semaine. Vous voyez vous êtes prise la main dans le sac. »« Vous n’avez aucune preuve, ce ne sont que des allégations, les divagations d’un petit journaleux qui veux se faire mousser. »« Détrompez-vous madame, le président m’a donné copie de tous les mails et autres courriers dans lesquels vous exercez votre chantage. Sans parler des échanges enflammés où vous lui dénigrez votre mari qui ne serait qu’un bon à rien et n’est rien sans votre protection et ne serait, vous ne manquez pas d’air, pas une affaire non plus au lit. »« Comment osez-vous me diffamer de la sorte ? Vous n’allez pas vous en tirer comme ça, croyez-moi. Je vais vous faire un procès dont vous ne vous relèverez jamais. »Une voix tonitruante se fit entendre derrière le journaliste.
« Maintenant ça suffit. Il est temps que la vérité éclate sur tes sales agissements. »Le journaliste s’écarta et le visage de l’époux d’Ebba, Gerhard Liennhoff, apparut.
Il était rouge de colère.
« Mon chéri, ne me dis pas que tu vas croire ce ramassis de… »« Je t’ai dit de te taire. Assez, tes mensonges ont déjà blessé suffisamment de monde. »« Mais, chéri… »« Il n’y a plus de chéri qui tienne. Je demande le divorce. »Il se tourna vers le journaliste.
« Raymond, notez bien tout ce que je vais dire. »« Mais Gerhard. »« Je t’ai dit de te taire. »« N’ayez aucune crainte monsieur Liennhoff, j’enregistre cette conversation depuis le début. »« Alors c’est parfait. »Le mari d’Ebba se tourna vers elle et pointa un doigt menaçant vers son visage. Elle blêmit soudainement et sembla se tasser un peu sur elle-même.
« Trente ans que je subis tes humiliations. Trente ans que je dois supporter tes moindres caprices. Trente ans que je fais tout pour que ta vie ne soit consacrée qu’au chant et pour t’éviter les moindres soucis. Trente ans que tu te prends pour la meilleure chanteuse lyrique de l’histoire. Ce temps est désormais terminé. Je ne suis plus ton agent, je ne suis plus ton producteur et encore moins ton mari. »« Mais… »« Avec ce qui a été dit et avec ce que je vais dire, plus personne ne te fera le moindre contrat. Tu es grillée pour la profession. Personne ne sera assez fou pour engager une personne aussi perverse que toi. »« Mais, tu ne p… »« C’est fini je te dis. Dans la minute qui suivra cette conversation, j’irai consulter mes avocats. Nous romprons tous tes engagements et j’obtiendrai le divorce pour faute, adultère et abus de confiance. »« Mais Gerhard, tu n’as pas le droit… »« J’ai tous les droits. Nous allons rétablir la vérité sur cette triste affaire de corruption et rétablir Arina dans son bon droit. Toi la prétendue grande artiste n’a jamais su voir à quel point elle était tout ce que tu désirais si ardemment pour ton propre fils. Frédéric est certes un bon concertiste, mais il n’a pas, et n’aura jamais son talent. Voilà ce qui le minait ces derniers temps. Mais toi, aveuglée par l’ambition de l’atteinte de tes propres ambitions au travers de ton fils, n’a rien compris au mal être dans lequel ta folie l’a jeté. Oui, il y a bien longtemps qu’il avait compris que, s’il était talentueux, il lui manquait ce don suprême que la femme qu’il aime, elle, a, et depuis qu’ils se connaissent. S’il lui a fallu du temps pour le comprendre et l’admettre, toute ta vie ne t’aurait pas suffi ne serait-ce que pour l’imaginer. »« Mais non, tu as tors… »« Et toi, pauvre folle, croyant encore pouvoir éloigner ton fils de celle qui l’aime, mais, ça tu l’as compris, lui fait de l’ombre, tu es allée inventer une histoire abracadabrantesque de coucherie et autres sentiments amoureux qu’il éprouverait pour cette pauvre Lina qui, elle, n’a rien demandé et se retrouve plongée au centre d’un mélo de la plus basse espèce. Si Frédéric a eu cet accident, c’est qu’il était désespéré qu’Arina l’ait quitté parce que tu lui avais affirmé qu’il en aimait une autre. Fou de douleur, il s’est précipité et n’a pu empêcher cette sortie de route. »« Je croyais bien faire… »« Non, tu mens encore et toujours. Tu n’as pas cru bien faire, tu as monté un plan machiavélique pour te débarrasser d’une double concurrence. Elle te gênait car tu pensais qu’elle te volait l’amour de ton fils qui aurait dû te revenir, et elle parce que tu savais, au fond de toi, qu’Arina était meilleur concertiste que lui. D’où ta coucherie avec Ernest Chamfort et coup double par la même occasion puisqu’il est le président, et du jury et du conservatoire. »« Mais je n’ai pas cou… »« Tais-toi te dis-je, c’en est trop décidément. Tu salis tout ce que tu touches. Tu ferais mieux de nous laisser, et de partir loin de ma vue. Tu me dégoutes au plus haut point et ta seule présence me révulse. »Ebba resta un instant la bouche ouverte, regardant tour à tour chacune des personnes présentes dans la pièce, puis la referma et remonta la fermeture de son manteau.
« Bien, puisque c’est comme ça, je m’en vais. »Elle sortit de la pièce et un lourd silence prit sa place.
Arina s’approcha de Gerhard.
« Monsieur, je vous prie de bien vouloir m’excuser des tors que j’ai pu vous causer. »« Vous n’avez aucun pardon à me demander Arina. Vous n’avez rien fait qui mériterait que je vous en veuille. Vous aimez mon fil, je le sais, alors je n’ai qu’une chose à vous demander. Prenez-soin de lui, je vous en prie. »« Je vous le promets. »Elle se haussa sur la pointe des pieds et déposa un baiser sur sa joue.
Elle sortit à son tour et retourna dans la chambre où elle s’assit et repris la main de l’homme de sa vie.
Frédéric referma le couvercle du clavier. Il leva les yeux vers Lina.
« Voilà, le piano est prêt. »Il se leva, donna un dernier coup de chiffon sur le tabouret, puis se dirigea vers le fond de la scène.
Lina lui emboita le pas.
Ils descendirent le petit escalier menant au couloir des loges et frappèrent à la première porte.
« Entrez. »Ils pénétrèrent dans la pièce et trouvèrent Arina assise à la table de maquillage.
« J’ai fini. Le piano est prêt ? »Frédéric lui prit la main.
« Oui, tout est prêt. Le public a déjà commencé à entrer et la salle est presque complète. »« Lina, tu as pensé à surligner les deux bécarres dont je t’ai parlé ? »« Oui, je l’ai fait pendant que Fred réglait ton siège. »« Merci à vous deux. »On frappa à la porte. Jérémy apparu, tout sourire.
« On est encore complet ce soir. Mes amis c’est la fête, après le concert, champagne. »« Attend que ce soit fini, tu veux bien ? »« Bon allez Arina, il faut y aller. »« Pars devant, je te suis. »Elle s’approcha de Lina, la saisit par les épaules et la pressa contre elle.
« A tout à l’heure ‘’p’tite sœur’’. »« A tout à l’heure ma ‘’grand’soeur’’. »Elle se recula et lui fit un clin d’œil auquel la jeune fille lui répondit par un sourire.
Elle se tourna vers Frédéric qui la prit dans ses bras.
« A tout à l’heure mon cher mari. »« A tout à l’heure ma chère femme. »Ils s’embrassèrent amoureusement.
Elle mit fin au baiser, se recula et les regarda.
« Allez-y vite. »Lina partit la première, suivit par Frédéric qui se retourna à la porte et envoya un baiser à la femme de sa vie.
Arina se regarda une dernière fois dans la glace puis sortit à son tour.
Elle gravit tranquillement les six marches de l’escalier et s’arrêta en haut de ceux-ci.
Elle entendit le public applaudir puis la voix de Jérémy s’éleva.
« Mesdames, messieurs, bonsoir. Aujourd’hui est un jour particulier. Tout d’abord parce que vous allez avoir le privilège d’assister au concert de la plus grande concertiste de piano de notre époque. Parce que vous allez voir une artiste qui revient d’une tournée triomphale dans le monde entier. Parce que vous allez être les premiers à entendre le même soir un récital des œuvres parmi les plus difficiles à interpréter. Parce qu’elle a tenu à fêter ses trente ans avec vous ce soir, dans la salle qui a consacré ses premiers pas dans l’univers du piano. Et enfin parce qu’elle donnera ce soir son dernier concert avant une interruption de quelques mois pour laisser à un heureux événement le temps de venir au monde. Mesdames, messieurs, je vous demande un tonnerre d’applaudissements pour la grande Arina Raffaëlli- Liennhoff.
Arina tenait la main valide de Frédéric.
Allongé sur son lit d’hôpital, il n’avait toujours pas repris connaissance.
C’est Jérémy qui, affolé par le départ précipité du jeune home, l’avait jointe sur son portable alors qu’elle errait dans le parc jouxtant leur appartement.
Elle marchait sans but, pleurant à chaudes larmes, se repassant sans cesse les paroles de sa belle-mère.
Elle n’avait répondu qu’au troisième appel.
« Laisse-moi Jérémy, je ne veux pas être dérangée. »« Arina, c’est grave. Frédéric est venu tout à l’heure, m’a emprunté les clés de ma voiture et est parti à ta recherche. »« Il n’est pas prêt de me trouver. »« Il m’a dit qu’il allait te chercher, qu’il voulait te dire qu’il t’aime. »« Non, il ne m’aime pas. C’est sa mère qui me l’a dit. »« Et tu as cru ce que cette folle t’a raconté ? »« Elle m’a dit qu’il couchait avec Lina et que c’est elle qu’il aimait mais qu’il ne savait pas comment me le dire. »« Arina, arrête de parler et écoute-moi attentivement. »Elle s’était alors arrêtée de marcher. »« Arina, Frédéric est dingue de toi. Il l’a toujours été. Il n’éprouve rien pour Lina. Il l’apprécie, mais ça s’arrête là. Son grand amour, espèce d’idiote, c’est toi. »« C’est moi ? Tu es sûr ? »« Mais espèce de triple buse, il n’y a que toi pour ne pas en être persuadée ; »« Tu ne me dis pas ça pour me rassurer ? »« Cette vieille chouette d’Ebba crois qu’en agissant de la sorte elle va garder son petit enfant chéri dans ses jupons. Mais elle a perdu d’avance. Il t’aime et ferait n’importe quoi pour toi, il me l’a assez dit et répété. »« Mais alors je ne suis qu’une conne, c’est ça ? »« Non, tu es amoureuse, et c’est normal qu’une manipulatrice comme Ebba t’aie embobinée. »« Quelle idiote j’ai été. J’aurais au moins pu m’expliquer avec lui, essayer de comprendre ce qui le tourmentait… »« S’il y a une chose qui ne le tourmentait pas, c’est bien la certitude des sentiments qu’il a pour toi niquedouille ! »« Tu sais où il est parti ? »« Non, il était complètement fou et est parti comme une balle. J’espère qu’il ne lui est rien arrivé. »« Mon Dieu, oui, faites qu’il ne lui soit rien arrivé. »
Perdue dans ses pensées, elle sentit un léger frémissement des doigts de la main qu’elle tenait.
Elle regarda Frédéric. Il ouvrit les yeux puis les referma aussitôt.
Elle se précipita sur le bouton rouge appelant les infirmières.
Celle qui faisait les soins depuis deux jours entra rapidement et s’approcha du lit.
« Il a ouvert les yeux. Mais il les a refermés aussitôt. »« C’est normal Il va avoir plusieurs phases de réveil qui dureront plus ou moins longtemps. C’est très bon signe. Je vais prévenir le professeur. »
Arina se rassit et reprit la main de Frédéric dans la sienne.
Une demi-heure plus tard, le professeur arriva dans la chambre. Elle se leva pour l’accueillir.
Il se pencha sur Frédéric, lui ouvrit un œil entre deux doigts en écartant les paupières, puis projeta la lumière d’un petit appareil directement dans sa rétine.
Il fit aller de droite à gauche le faisceau lumineux puis lui referma les paupières et se redressa.
« Alors professeur ? »« Il est proche de la phase de réveil. Sa rétine réagit bien à la lumière, il va se réveiller progressivement. »« Cela va prendre combien de temps ? »« Cela dépend de plusieurs facteurs, mais je pense que, d’ici demain, il se sera entièrement éveillé. »« Aura-t-il des séquelles ? »Le professeur fit signe à Arina de le suivre et ils sortirent de la chambre.
« Pour ce qui est d’éventuelles séquelles dues au coma, soyez rassurée, de ce côté-là, à part une grande confusion au réveil, il devrait retrouver la plénitude de ses moyens très rapidement. Enfin de ses moyens intellectuels. »« Pourquoi dites-vous ça ? »« Mademoiselle, son index et son majeur ont été fortement endommagés et les nerfs ont été tranchés net. J’ai réparé les deux doigts, mais il est plus que probable qu’il ne retrouvera jamais, ni leur totale agilité, ni leur souplesse. »« Vous voulez dire qu’il ne pourra plus jouer du piano ? »« Jouer du piano, si, ça ce sera possible. Mais redevenir un grand concertiste, j’ai bien peur que cela ne soit qu’une cruelle chimère. »« Mon Dieu, mais c’est terrible ce que vous me dites-là. C’est une catastrophe ! »« Je le sais, et, pour que son rétablissement se passe dans les meilleures conditions, il est préférable de lui différer l’information. Attendons qu’il soit totalement remis sur pied avant de lui parler de rééducation des doigts et qu’il ait la confirmation de mon diagnostic. Je dois vous laisser, excusez-moi, mais d’autres patients m’attendent. »« Mais bien sûr, merci professeur. »Arina retourna s’asseoir près de Frédéric, les larmes coulant sur ses joues.
Elle lui prit la main, la baisa et resta prostrée, le regard dans le vide.
Le soir vers dix-neuf-heure, Ebba fit irruption dans la chambre.
« Mon Dieu, mais qu’est-ce que vous lui avez fait ? »Elle voulut s’approcher du lit, mais Arina se leva et fit barrage de son corps.
« Qu’est-ce que je lui ai fait ? vous avez l’audace de me demander ça ? »« Oui, vous, la mauvaise fille qui avez abandonné mon fils. »« Sortez de la pièce immédiatement. Frédéric est proche du réveil, il n’a pas besoin d’entendre ce que je vais vous dire. »D’autorité, elle la poussa pour qu’elle sorte de la pièce. Elle l’amena jusque dans le couloir et la poussa dans une pièce contiguë à la chambre après avoir refermé délicatement la porte.
Elle se retourna et saisit sa belle-mère par le col.
« Alors vous espèce de sale mégère, c’est vous la responsable de tout ce qui arrive. »« Mais… »« Taisez-vous. Depuis toujours vous semez le mal autour de vous. »« Mais non… »« Vous avez tellement voulu que votre fils soit un grand virtuose du piano que vous n’avez pas hésité à coucher avec le président du conservatoire et du jury du concours pour le corrompre et qu’il change le règlement en favorisant votre rejeton. »« Ma parole, mais vous êtes folle ? »« Je vous ai vue dans sa voiture au pied de l’immeuble, vous embrasant à pleine bouche et, une fois sortie, lui envoyer un baiser. »« Vous n’êtes qu’une sale menteuse. »Une voix grave s’éleva derrière elles.
« Non, elle n’est pas une menteuse, c’est toi. C’est toi qui ments, encore et encore. »Le président, les yeux exorbités se tenait dans l’embrasure de la porte.
Il entra.
« Sale bonne-femme qui a tout fait pour coucher avec moi et qui ensuite m’a fait chanter en me menaçant de tout révéler à mon épouse si je n’arrivais pas à convaincre le jury de changer le règlement. »« Mais vous divaguez président. »« Ah, tu me vouvoies maintenant ? Comme c’est drôle. »« Moi je confirme que vous êtes une manipulatrice. »Le président s’effaça et le journaliste qui avait fait un scandale le jour de la remise des prix apparut.
« Mais de quoi vous mêlez-vous espèce de fouille merde. »« Je me mêle de ce qui regarde mes lecteurs, figurez-vous. J’ai fait ma petite enquête auprès de tous les membres du jury. Le président a au moins eu l’honnêteté de leur avouer l’odieux chantage auquel il était confronté. Et s’ils ont décidé d’accepter de changer le règlement, c’est parce que le président s’est engagé à démissionner une fois le concours terminé, ce qu’il a fait en début de semaine. Vous voyez vous êtes prise la main dans le sac. »« Vous n’avez aucune preuve, ce ne sont que des allégations, les divagations d’un petit journaleux qui veux se faire mousser. »« Détrompez-vous madame, le président m’a donné copie de tous les mails et autres courriers dans lesquels vous exercez votre chantage. Sans parler des échanges enflammés où vous lui dénigrez votre mari qui ne serait qu’un bon à rien et n’est rien sans votre protection et ne serait, vous ne manquez pas d’air, pas une affaire non plus au lit. »« Comment osez-vous me diffamer de la sorte ? Vous n’allez pas vous en tirer comme ça, croyez-moi. Je vais vous faire un procès dont vous ne vous relèverez jamais. »Une voix tonitruante se fit entendre derrière le journaliste.
« Maintenant ça suffit. Il est temps que la vérité éclate sur tes sales agissements. »Le journaliste s’écarta et le visage de l’époux d’Ebba, Gerhard Liennhoff, apparut.
Il était rouge de colère.
« Mon chéri, ne me dis pas que tu vas croire ce ramassis de… »« Je t’ai dit de te taire. Assez, tes mensonges ont déjà blessé suffisamment de monde. »« Mais, chéri… »« Il n’y a plus de chéri qui tienne. Je demande le divorce. »Il se tourna vers le journaliste.
« Raymond, notez bien tout ce que je vais dire. »« Mais Gerhard. »« Je t’ai dit de te taire. »« N’ayez aucune crainte monsieur Liennhoff, j’enregistre cette conversation depuis le début. »« Alors c’est parfait. »Le mari d’Ebba se tourna vers elle et pointa un doigt menaçant vers son visage. Elle blêmit soudainement et sembla se tasser un peu sur elle-même.
« Trente ans que je subis tes humiliations. Trente ans que je dois supporter tes moindres caprices. Trente ans que je fais tout pour que ta vie ne soit consacrée qu’au chant et pour t’éviter les moindres soucis. Trente ans que tu te prends pour la meilleure chanteuse lyrique de l’histoire. Ce temps est désormais terminé. Je ne suis plus ton agent, je ne suis plus ton producteur et encore moins ton mari. »« Mais… »« Avec ce qui a été dit et avec ce que je vais dire, plus personne ne te fera le moindre contrat. Tu es grillée pour la profession. Personne ne sera assez fou pour engager une personne aussi perverse que toi. »« Mais, tu ne p… »« C’est fini je te dis. Dans la minute qui suivra cette conversation, j’irai consulter mes avocats. Nous romprons tous tes engagements et j’obtiendrai le divorce pour faute, adultère et abus de confiance. »« Mais Gerhard, tu n’as pas le droit… »« J’ai tous les droits. Nous allons rétablir la vérité sur cette triste affaire de corruption et rétablir Arina dans son bon droit. Toi la prétendue grande artiste n’a jamais su voir à quel point elle était tout ce que tu désirais si ardemment pour ton propre fils. Frédéric est certes un bon concertiste, mais il n’a pas, et n’aura jamais son talent. Voilà ce qui le minait ces derniers temps. Mais toi, aveuglée par l’ambition de l’atteinte de tes propres ambitions au travers de ton fils, n’a rien compris au mal être dans lequel ta folie l’a jeté. Oui, il y a bien longtemps qu’il avait compris que, s’il était talentueux, il lui manquait ce don suprême que la femme qu’il aime, elle, a, et depuis qu’ils se connaissent. S’il lui a fallu du temps pour le comprendre et l’admettre, toute ta vie ne t’aurait pas suffi ne serait-ce que pour l’imaginer. »« Mais non, tu as tors… »« Et toi, pauvre folle, croyant encore pouvoir éloigner ton fils de celle qui l’aime, mais, ça tu l’as compris, lui fait de l’ombre, tu es allée inventer une histoire abracadabrantesque de coucherie et autres sentiments amoureux qu’il éprouverait pour cette pauvre Lina qui, elle, n’a rien demandé et se retrouve plongée au centre d’un mélo de la plus basse espèce. Si Frédéric a eu cet accident, c’est qu’il était désespéré qu’Arina l’ait quitté parce que tu lui avais affirmé qu’il en aimait une autre. Fou de douleur, il s’est précipité et n’a pu empêcher cette sortie de route. »« Je croyais bien faire… »« Non, tu mens encore et toujours. Tu n’as pas cru bien faire, tu as monté un plan machiavélique pour te débarrasser d’une double concurrence. Elle te gênait car tu pensais qu’elle te volait l’amour de ton fils qui aurait dû te revenir, et elle parce que tu savais, au fond de toi, qu’Arina était meilleur concertiste que lui. D’où ta coucherie avec Ernest Chamfort et coup double par la même occasion puisqu’il est le président, et du jury et du conservatoire. »« Mais je n’ai pas cou… »« Tais-toi te dis-je, c’en est trop décidément. Tu salis tout ce que tu touches. Tu ferais mieux de nous laisser, et de partir loin de ma vue. Tu me dégoutes au plus haut point et ta seule présence me révulse. »Ebba resta un instant la bouche ouverte, regardant tour à tour chacune des personnes présentes dans la pièce, puis la referma et remonta la fermeture de son manteau.
« Bien, puisque c’est comme ça, je m’en vais. »Elle sortit de la pièce et un lourd silence prit sa place.
Arina s’approcha de Gerhard.
« Monsieur, je vous prie de bien vouloir m’excuser des tors que j’ai pu vous causer. »« Vous n’avez aucun pardon à me demander Arina. Vous n’avez rien fait qui mériterait que je vous en veuille. Vous aimez mon fil, je le sais, alors je n’ai qu’une chose à vous demander. Prenez-soin de lui, je vous en prie. »« Je vous le promets. »Elle se haussa sur la pointe des pieds et déposa un baiser sur sa joue.
Elle sortit à son tour et retourna dans la chambre où elle s’assit et repris la main de l’homme de sa vie.
Frédéric referma le couvercle du clavier. Il leva les yeux vers Lina.
« Voilà, le piano est prêt. »Il se leva, donna un dernier coup de chiffon sur le tabouret, puis se dirigea vers le fond de la scène.
Lina lui emboita le pas.
Ils descendirent le petit escalier menant au couloir des loges et frappèrent à la première porte.
« Entrez. »Ils pénétrèrent dans la pièce et trouvèrent Arina assise à la table de maquillage.
« J’ai fini. Le piano est prêt ? »Frédéric lui prit la main.
« Oui, tout est prêt. Le public a déjà commencé à entrer et la salle est presque complète. »« Lina, tu as pensé à surligner les deux bécarres dont je t’ai parlé ? »« Oui, je l’ai fait pendant que Fred réglait ton siège. »« Merci à vous deux. »On frappa à la porte. Jérémy apparu, tout sourire.
« On est encore complet ce soir. Mes amis c’est la fête, après le concert, champagne. »« Attend que ce soit fini, tu veux bien ? »« Bon allez Arina, il faut y aller. »« Pars devant, je te suis. »Elle s’approcha de Lina, la saisit par les épaules et la pressa contre elle.
« A tout à l’heure ‘’p’tite sœur’’. »« A tout à l’heure ma ‘’grand’soeur’’. »Elle se recula et lui fit un clin d’œil auquel la jeune fille lui répondit par un sourire.
Elle se tourna vers Frédéric qui la prit dans ses bras.
« A tout à l’heure mon cher mari. »« A tout à l’heure ma chère femme. »Ils s’embrassèrent amoureusement.
Elle mit fin au baiser, se recula et les regarda.
« Allez-y vite. »Lina partit la première, suivit par Frédéric qui se retourna à la porte et envoya un baiser à la femme de sa vie.
Arina se regarda une dernière fois dans la glace puis sortit à son tour.
Elle gravit tranquillement les six marches de l’escalier et s’arrêta en haut de ceux-ci.
Elle entendit le public applaudir puis la voix de Jérémy s’éleva.
« Mesdames, messieurs, bonsoir. Aujourd’hui est un jour particulier. Tout d’abord parce que vous allez avoir le privilège d’assister au concert de la plus grande concertiste de piano de notre époque. Parce que vous allez voir une artiste qui revient d’une tournée triomphale dans le monde entier. Parce que vous allez être les premiers à entendre le même soir un récital des œuvres parmi les plus difficiles à interpréter. Parce qu’elle a tenu à fêter ses trente ans avec vous ce soir, dans la salle qui a consacré ses premiers pas dans l’univers du piano. Et enfin parce qu’elle donnera ce soir son dernier concert avant une interruption de quelques mois pour laisser à un heureux événement le temps de venir au monde. Mesdames, messieurs, je vous demande un tonnerre d’applaudissements pour la grande Arina Raffaëlli- Liennhoff.
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