Sœurs jumelles
Récit érotique écrit par Ethelrede [→ Accès à sa fiche auteur]
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 08-08-2024 dans la catégorie Entre-nous, les femmes
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Sœurs jumelles
Il parait que c’était en l’an 2000, tout à fait vers la fin. Mon père pense même que c’était le 31 décembre. D’ailleurs, sur mon acte de naissance, il est écrit que je suis née le 1er janvier 2001 à 00 :00 heure.
Mais revenons à l’origine de toute cette histoire. C’était un lundi. Le premier janvier 2001, premier jour du troisième millénaire de l’ère chrétienne, un français parcourait dans sa voiture 4x4 la piste allant de Dabakala à Katiola. Oui, Cela se passait en Côte d’Ivoire. Bien que cela se passât un jour férié, l’homme avait dû quitter son épouse, jeune accouchée de la veille pour aller voir des représentants d’une communauté auprès de laquelle il jouait un rôle de médiateur. Il avait dû échanger la calebasse de sel avec ses voisins, celle de dolo, bière de mil un peu pimentée, du genre à faire venir la sueur sur les tempes et la nuque à la première gorgée… Puis palabrer avec des gens qu’il ne connaissait pas, par le biais de deux interprètes, l’un assurant la partie français - dioula, le second la partie dioula – djimini… Une affaire très simple, donc.
Au bout de quelques heures, il était apparu qu’il n’existait en fait pas de contentieux : il avait pu prendre la route du retour vers sa base, à Korhogo. À une quinzaine de kilomètres de Dabakala, il avait aperçu un petit tas de chiffons sur le bord de la piste. Chiffons rougis par la poussière de latérite. Par souci de propreté, il s’était arrêté pour les ramasser, de manière à pouvoir les apporter à un endroit où on pourrait décider qu’en faire. Dedans, à sa grande surprise, se trouvait un bébé… Il l’avait pris dans ses bras. Avait appelé tout autour, cherché longuement… Puis, de guerre lasse, avait repris sa route.
En arrivant le soir, il avait confié le nourrisson à son épouse :
- Ce bébé n’a sans doute rien mangé depuis au moins deux jours… Crois-tu pouvoir le nourrir, en plus du nôtre ? Demain, j’irai l’apporter aux autorités de police.
L’enfant, une petite fille, s’était mise à téter goulument le sein de cette inespérée nourrice avant de retrouver un peu de calme et de s’endormir.
Les autorités locales tout comme celles de la préfecture de Dabakala n’avaient rien voulu savoir : personne n’avait déclaré avoir perdu un enfant, aucun ne manquait à l’appel : ce jeune ménage n’avait qu’à s’en occuper…
C’est ainsi que je suis devenue la sœur jumelle de Marianne. Comme j’étais son exact opposé : non française, non désirée avant d’être recueillie, noire de peau, venue d’on ne sait où et j’en passe, mes parents adoptifs m’ont donné, en plus de tout leur amour, le nom d’Anne Marie ! De l’amour, vous pouvez me croire, ils m’en ont donné ! Je dois être née sous une bonne étoile.
Un an a passé, maman gardant accrochées à ses seins généreux ses deux filles "jumelles". Jusqu’au jour où, enfin, les papiers officiels d’adoption ont été signés, validés, enregistrés au consulat de France d’Abidjan. Dès lors, mes parents ont organisé leur retour en France, ma sœur et moi y faisions notre première visite ! Notre vie s’y est organisée, heureuse.
Bien d’autres années ont coulé, depuis, ma jumelle et moi entourées de l’amour de nos parents. Ce sont des gens merveilleux et, jusqu’à mon dernier souffle, je n’aurais jamais assez de temps ni d’énergie pour leur rendre grâce de tout cet amour… Nous n’avons jamais manqué de rien Marianne et moi : amour, tendresse, encouragements, engueulades aussi ! Chaque fois que cela s’est avéré nécessaire, voire seulement utile, nous y avons eu droit, sans compter.
Cette attention permanente pleine d’amour et de rectitude a fait nous deux jeunes femmes épanouies, joyeuses, honnêtes et sûres d’elles-mêmes. Mes parents, je ne sais pas si c’est le cas dans tous les ménages, sont de jeunes amoureux ! Après un quart de siècle de vie commune, la cinquantaine atteinte, mon père regarde toujours sa belle avec les mêmes yeux amoureux, étonnés qu’une femme aussi belle, aussi parfaite, l’ait choisi, lui ! Il ne rate jamais une occasion de lui donner, plus ou moins discrètement, de petits baisers langoureux, parfois de gros ! Maman est, pour sa part, un peu moins démonstrative. Elle préfère taire ses émois, garder pour l’intimité l’essentiel comme le reste.
Car, Marianne et moi le savons bien, ils ont toujours eu une intimité des plus actives, même si maman a appris à imposer le silence à ses exultations. En général, leur porte est hermétiquement close lorsqu’ils font l’amour. Pas toujours… Marianne et moi sommes convaincues que ces rares épisodes porte entrouverte étaient destinés à nous éduquer, nous faire sentir qu’il n’y avait rien d’interdit, là-dedans, rien de mal. À nous faire savoir le comment, en attendant que le pourquoi nous arrive.
Le film était pratiquement sans bande son, du fait de la pudeur de maman. C’est tout juste si, parfois, nous parvenaient des chuchotements :
- Non, lèche-moi encore un peu, dis… C’est si bon…
- Mais… tu vas venir sans moi…
- C’est ta faute, tu le fais trop bien ! Et puis, ça ne me fait pas peur de recommencer… juste pour le faire en même temps que toi…
- Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage…
- Exactement, mon petit Boileau… et maintenant, lèche-moi encore… Oh oui…
Ma sœur et moi avons acquis de ce fait une sexualité décomplexée. Bon, je vais tout de même briser maintenant une idée fausse apparente : je dis tout le temps ma sœur, ma jumelle… Je sais bien que c’est faux ! On m’a inculqué quelques bases de génétique lorsque j’ai commencé mes études de médecine ! Je sais bien que, même avec beaucoup de soleil, Marianne ne deviendra jamais noire ni ne perdra sa magnifique crinière blonde au profit de la touffe de velcro noir qui couvre ma tête. Je dois dire, qu’elle est belle à couper le souffle, même si elle, de son côté, dit la même chose de moi. Voilà, nous savons bien que j’ai été adopté. Nous l’avons su tout de suite, dès ma plus tendre enfance ; il n’y a jamais eu d’ambigüité, autant qu’il n’y a jamais eu de différence de traitement entre elle et moi. C’est pour cela que nous nous aimons tant.
Quand nos parents faisaient l’amour, il nous arrivait de nous demander ce que ça faisait, quel effet cela produisait ; nous avons ainsi mené quelques explorations de nos corps ensemble, avec toutefois cette certitude que, le moment venu, ce serait des inconnus qui interviendraient dans nos jeux. Un petit peu nos doigts, un petit peu nos langues nous ont en effet convaincues que si beaucoup de plaisir se trouvait à la clé, le prendre entre nous serait mal venu, nous entrainerait dans une spirale malsaine et non satisfaisante, en fin de compte. Nous nous sommes bornées à échanger nos impressions, après avoir pris notre plaisir, chacune dans son lit, améliorant ainsi notre pratique personnelle avec le temps. C’est tout juste si nous nous aidions manuellement : un geste est toujours plus explicite, plus rapide qu’une longue explication !
Marianne a eu son premier petit copain, moi aussi. Elle a joui dès la première fois, pas moi. Bah, ça ne peut pas marcher à tous les coups, non plus ! Mais ce qui est rigolo, si je puis dire, c’est que ma Marianne chérie, qui a eu du plaisir, est triste pour moi, tandis que de mon côté, je suis heureuse pour elle ! On ne se refait pas… Nous sommes légèrement différentes, il est vrai.
Elle, Marianne, c’est une extraordinairement belle jeune femme. Et je ne dis pas cela parce que c’est ma jumelle ! Elle est longue, un mètre soixante-quinze, fine, élancée. Sa pratique de la natation lui laisse un torse épanoui, avec des épaules larges et musclées. Sa poitrine est menue, comme ça, au premier regard… mais les rares personnes ayant accès à sa nudité savent qu’elle a des seins adorables, qui remplissent aimablement une main, même de belle taille. Des seins hauts perchés, arrogants, avec un téton d’un très joli rose pâle, qui entend se faire respecter, planté au milieu de petites aréoles à la peau granuleuse invitant à la caresse. Sa taille…Ah, sa taille, à rendre jalouse une guêpe ! Surmontant des hanches auxquelles on a envie de s’accrocher, aux rondeurs pulpeuses sans une once de superflu, avec, pour continuité, deux jambes fuselées, galbées, magnifiques, terminées par deux pieds dont n’importe qui devrait, en toute logique, tomber raide amoureux … Belle, très belle femme.
Oui… pour qui, obsédé par le corps, ne prendrait pas le temps de plonger dans son regard après voir admiré la ravageuse beauté de son visage. Plutôt triangulaire en raison d’un front large et d’un petit menton assez pointu, sa face offre deux pommettes encadrant un nez de petite fille, avec de petites narines très pulsatiles, vives à trahir ses émotions. Elle porte ses cheveux d’une blondeur de bois d’érable verni… Elle les laisse encadrer son visage de manière un peu folle, comme s’ils étaient sans aucun entretien ! Mais ses yeux… C’est là que tout se perd. Ils semblent avoir été taillés dans l’anthracite le plus pur tant ils sont noirs ! Insondable regard, véritable trou noir de l’amour dans lequel on ne peut que plonger… Elle est belle, juste ça : belle, je ne trouve pas d’autre mot !
Moi ? Je crois que je suis plutôt jolie, c’est ce que j’entends dire de moi, ici et là… Je suis longue, un mètre soixante-quinze, fine, élancée. Ma pratique de la natation m’a également laissé un torse épanoui, avec des épaules larges et musclées. La comparaison avec ma sœur ne saurait aller beaucoup plus loin car, vous l’avez sans doute compris, ma peau est d’un noir de chocolat à 90% de cacao, au bas mot ! Personne ne dirait que ma poitrine est menue. Ou alors, vraiment menue ! Mes seins remplissent certes une main, pourvu qu’elle ne soit pas trop grande. Leurs tétons sont menus eux aussi, taillés dans le charbon… je dirais plutôt la braise, ou la lave, car il est de fait qu’ils sont d’une réactivité de feu ! Mes aréoles sont bien plus larges que celles de ma sœurette, d’un noir "un peu plus clair"… Un contraste juste suffisant pour laisser voir leur téton inquisiteur, fièrement planté au milieu. J’ai aussi une taille fine et des hanches d’une belle générosité. Quant à mes jambes de nageuse devenue par la suite marathonienne, j’avoue qu’elles ont un peu de muscle en trop pour dégager toute la féminité, la sensualité que je porte dans mon âme. J’aime bien mes pieds qui sont fin, joliment cambrés en une belle voûte, avec des orteils qui attirent le regard de par leur longueur.
Là où ma personne détonne carrément, c’est que, assez haut sur mon visage, sous mon front ébène, se trouvent deux yeux d’un bleu pervenche. Il est vrai que c’est tellement rare que bien des gens se retournent sur mon passage, la plupart convaincue que je porte des lentilles bleues par pure coquetterie ! J’ajouterai que, d’un naturel optimiste, empathique et joyeux, j’arbore en continu un sourire qui laisse éclater la blancheur de mes dents !
Je m’exprime dans un français qui étonne. Dame ! Je n’ai entendu que cette langue depuis le tout début de ma vie, si j’excepte l’anglais que Marianne et moi parlons comme une seconde langue maternelle. Je n’ai donc aucun accent "ethnique" lié à mes origines. C’est l’occasion de belles rigolades lorsque Marianne dit qu’elle attend sa sœur jumelle, ou bien quand on m’entend parler au téléphone, et qu’on me voit arriver peu après… Bien des bras en tombent !
Ça n’a pas toujours été facile à vivre… Oui, il est vrais qu’ici et là, je rencontre des gens qui ne se montrent pas très heureux de voir autant de noirceur dans leur pays. Je peux les comprendre… jusqu’à ce point que… leur pays est aussi le mien, je n’en ai jamais eu d’autre, en fait, depuis mon adoption. Et comme je n’ai pas reçu de culture associée à mes origines évidentes, certains membres de ces communautés me battent un peu froid également, pensant que je les snobe. J’ai dû vivre avec cette double peine, double racisme.
J’ai bien tenté de me teindre les cheveux, les décrêper … rien ne m’a donné satisfaction ni n’a pu améliorer ma situation. J’ai fini par me rallier à la bannière de Léopold Senghor et accepter ma négritude, la revendiquer, en être fière. C’est satisfaisant pour l’esprit. Pas tellement pour la vie de tous les jours.
Bien sûr, ce premier petit copain maladroit ne m’a pas beaucoup aidée à aller de l’avant dans le domaine amoureux. Marianne a eu plusieurs copains successifs, avec des rapports sexuels de plus en plus satisfaisants, si j’en juge par son épanouissement. Plus elle semblait bien dans a peau, plus je me sentais rabougrie dans ma totale déshérence sentimentale. Il m’est vite apparu indispensable de me remuer, de tenter de comprendre comment je devais changer ma façon d’être pour parvenir à entrer dans le jeu de la séduction. En avais-je seulement les moyens ? En fait, je n’attirais que des garçons… qui me ressemblaient, type afro… Alors que mes yeux restaient braqués sur les garçons ressemblant à ma famille, mes parents, ma sœur, type caucasien. Où était le blocage ? Devais-je renoncer à séduire de beaux gars blancs ? Ou devais-je admettre que mon destin ne pouvait être qu’auprès de mâles afros ? Je me voyais prise dans un tourbillon sans fin me conduisant inéluctablement vers une solution qui ne me convenait pas.
Et puis vint Robert. Il avait tout pour plaire ! Il était plutôt beau garçon… Grand, fin, stylé, parlait avec élégance. Sa peau était assez mate, il avait des cheveux très noirs, les yeux assortis. Il portait un fin duvet au dessus de lèvres fines mais charnues, dénotant une pilosité discrète. De même, ses tempes étaient couvertes du même duvet qui se terminait en pointes sur l’angle du maxillaire. Son torse apparaissait puissant, avec de larges épaules et des pectoraux d’athlète, tout en ayant une taille fine qui accentuait son côté triangulaire très sportif. Son visage était souriant, il aimait rendre service et se mettre en avant en tant que tel.
Il terminait sa médecine, lui aussi. C’est étrange, je ne l’avais jamais remarqué avant. Je me suis dit qu’il était sans doute un transfuge d’une autre université. J’ai participé à quelques rencontres, des rédactions de rapports en commun. Jusqu’au jour où il m’a proposé de déjeuner avec lui. Repas agréable, où nous avons pu nous sonder un peu l’âme, l’un de l’autre. Il semblait sensible à mes charmes, ce qui m’émut.
De retour chez moi, le soir, je me suis aperçue que son image était entrée en moi, gravée dans mon cœur : j’ai compris que je tombais amoureuse de lui. Heureuse ? Oui et non. Oui car enfin l’amour frappait à ma porte… Non à cause de la peur que m’inspirait un possible nouvel échec…
Au rendez-vous suivant, Robert s’enhardit un peu : il me prit la main sur la table et, me regardant droit dans les yeux, me fit cet aveu :
- Anne Marie, je voudrais te dire que je t’admire beaucoup, que je te trouve très belle… que je t…
La fin de sa phrase resta coincée dans une gorge trop serrée par l’émotion ; je volai à son secours.
- Robert, je te trouve très séduisant aussi. J’aime ces moments que nous passons ensemble. Quant à ce que tu n’as pas pu dire, je voudrais juste te dire… Moi aussi.
Robert avait eu une moue qui me laissa dubitative : il n’avait pas l’air très heureux de ma tirade.
En quittant l’hôpital, cette fin d’après-midi, je décidai de l’emmener chez moi pour lui faire voir où je vivais, lui offrir un thé et pouvoir parler un peu plus longuement, sans personne pour nous déranger… Et puis, je l’avoue, j’avais envie d’en savoir plus, de découvrir qui était ce beau gars aux manières si douces, si attentionné.
Une fois Robert assis dans mon petit canapé, je me suis assise sur ses genoux, sans façon, et l’ai embrassé. Ce fut notre premier baiser, un baiser sensuel, charnel, passionnel et puissant. Il sonnait dans mon esprit le début que quelque chose de fort et beau, comme l’ouverture de Carmen !
Nous sommes restés un long moment à nous embrasser, laissant nos mains commencer à explorer l’autre mais très vite, je notai que j’étais la seule à prendre des initiatives. Alors, n’y tenant plus, j’ai attrapé ses mains et les ai placées l’une sur mes hanches, l’autre sur une de mes cuisses. Je ne pouvais pas être plus suggestive, faire d’invite plus claire !
Il s’est très légèrement déridé, a commencé timidement à caresser mon flanc, remontant vers mon sein bouillonnant d’impatience. J’aurais bien dû, alors, remarquer des choses qui n’allaient pas… Seulement voilà : l’amour rend aveugle, et l’amour, à ce moment, sournoisement, commençait à faire un nid douillet dans le fond de mon cœur. Alors j’ai doucement laissé la main que j’avais placée derrières sa nuque le temps d’un baiser, glisser vers ses pectoraux, pour éprouver sa belle musculature. Sous son épaisse chemise, j’ai senti une chose inattendue : une bande de tissu, comme un soutien-gorge, en bien plus épais.
J’ai bondi, me remettant sur les pieds. J’ai tâté toute sa poitrine, sur laquelle cette bande se trouvait uniformément présente. Ma pensée s’organisait avec fulgurance dans ma tête. Oui, je n’avais rien senti non plus évoquant du désir, plus bas, entre ses cuisses sur lesquelles j’étais pourtant assise. Je n’ai aps eu besoin d’y porter la main : tout était clair…
- Robert, c’est ton vrai nom ?
Il était rouge, penaud, regardait ses genoux, cherchant péniblement à retrouver son souffle et me dire une chose audible.
- Tu peux m’appeler… Roberta. Je suis Argentine par ma mère.
J’étais là, pétrifiée devant lui… ou plutôt devant elle. Comment avais-je pu me laisser berner de la sorte. Les larmes me vinrent aux yeux : dépit, colère, fatalité : chaque fois que l’amour venait frapper à ma porte, c’était pour mieux se rire de moi… Malédiction…
Je me suis retournée, cachant ma désespérance. Alors Roberta, s’armant de courage me fit cet aveu :
- Lorsque je n’ai pas pu te dire la fin de ma phrase, l’autre jour, tu as interprété, je pense, que je voulais te dire "Je t’aime". C’était d’ailleurs vrai, tu avais raison. La véritable fin restée dans ma gorge, était "Je suis une femme"…
- Tu m’as trompée, Roberta. Tu m’as séduite en homme… que tu n’es pas.
- Je le sais, Anne-Marie. J’en ai honte, terriblement honte, c’est pourquoi je voulais te le dire, avant que notre relation aille plus loin. Mais j’ai échoué. Je t’en demande pardon. Mais je veux que tu le saches : Tout, absolument tout ce que j’ai pu te dire depuis le début est vrai… J’ai bien vu en rejoignant cette nouvelle université que tu étais attirée par les hommes. Et moi, qui suis depuis toujours de la même mouvance, je ne sais pas pourquoi ni comment, je me suis sentie éperdument attirée par toi. Je n’ai pas été fichue d’imaginer un autre moyen pour me rapprocher de toi que cette affreuse supercherie. Pardonne-moi, si tu en es capable.
Roberta s’est levée, a remis sa veste et, sans mot dire, est sortie de chez moi, me laissant éclater en sanglots sur mon lit. Elle a refermé la porte et a disparu.
Dans ces cas-là, mon seul refuge, c’est ma jumelle, c’est toujours auprès d’elle que je parviens à refaire le point. Petit coup de fil, allô sœurette, bobo… Une heure plus tard, on grattait à ma porte et ma belle Marianne entrait. Câlin, bisous, pas un mot : je pleurais trop pour parler ou entendre quoi que ce fut. Elle m’a déshabillée pour ma nuit, mise au lit, s’est allongée près de moi en caressant les joues, mes tempes, mes cheveux. Petits bisous tendres… mots doux, apaisants. J’ai finalement pu lui raconter la malédiction qui, une fois encore me rattrapait. Depuis ma naissance, en somme, je n’ai jamais fait autre-chose que me faire rejeter, abandonner… Marianne a bondi !
- Ça, je ne te le laisserai jamais dire ! Que tu aies été laissée au bord d’une route, c’est un fait. Mais Papa t’a ramassée ! Maman t’a nourrie. Ils t’on donné tout leur amour en même temps qu’une famille, une sœur aussi. Où il est, ton fameux abandon, hein ? Et puis, cette Roberta, t’a-telle abandonnée ? Elle est venue au devant de toi, pleine d’amour et d’espoir. Bon, j’admets qu’elle s’y est mal prise ! Mais si elle est partie, c’est parce que toi, oui, toi, tu lui as fermé tes bras. Oh, je ne dis pas que je t’en blâme ! J’en aurais sûrement fait autant… Mais ôte-toi de la tête l’idée qu’elle t’a abandonnée ! Elle est partie, dans son propre abandon.
La véhémence de ce petit discours me fit l’effet d’un électrochoc ! Je la regardai, interloquée mais en même temps soulagée, un peu, me semblait-il.
- Mais, Marianne, c’est une fille !
- Et alors, c’est un crime ? Rappelle-toi, nos premières explorations corporelles, nous les avons faites ensemble ! Nos premières caresses, nos premiers orgasmes, nous les avons vécus ensemble… Et il me semble que nous sommes des filles !
- C’est pas pareil…
- Bien sûr que si ! Une vérité se fait en moi, Anne-Marie : tu n’as jamais obtenu de réel plaisir avec tes petits copains. T’es-tu demandée pourquoi ? N’existe-t-il pas une petite porte, au fond de ton âme, que tu t’obstines à vouloir garder fermée : celle qui montrerait à tous que tu sois en fait attirée par les filles et que, contre vents et marées, ton désir de normalité te contraigne à rechercher un homme ?
- Je… Je ne sais pas…
- Moi, je sais Anne-Marie ! J’ai eu pas mal de petits copains, et j’ai pris un grand plaisir avec eux tout comme avec celui qui deviendra sans doute mon mari, un jour. Mais j’ai eu des petites amies, aussi, j’ai tout autant eu de plaisir avec elles ! D’ailleurs, même étant en couple avec Cyrille, j’ai encore plusieurs amies de sexe que je vois régulièrement, parfois même avec lui !
- C’est vrai ? Tu es comme ça ?
- Je suis vivante, ma chérie ! Je ne parierais pas que nous ne formerons pas un trouple, pour finir, Cyrille et moi avec l’une d’elles qui est vraiment très amoureuse de nous deux… et que nous aimons bien aussi.
- C’est incroyable… Tu es ma sœur jumelle et je ne me suis jamais aperçue de rien ! Sans doute ai-je des œillères, nous voulais-je rien voir…
- Ne te laisse pas gâcher la vie par des interdits mutilants que tu t’imposes. As-tu aimé embrasser Robert, quand tu t’es sentie amoureuse de lui ?
- Bien sûr, c’était tellement doux, tellement suave… plein d’amour, quoi !
- Alors… si c’était agréable, amoureux, accepte d’avoir eu ce plaisir, mais avec Roberta. Appelle-la, va, c’est sûr que tu vas la faire revivre, elle doit être au bout de sa vie en ce moment.
- Merci Petite sœur, je t’aime !
Un coup de fil… Le temps de passer un T-shirt et une jupe ainsi qu’une paire de baskets, je sortis de chez moi en courant et arrivai chez Roberta un peu avant minuit, essoufflée mais heureuse. Elle m’attendait dans une tenue que je n’aurais jamais pensé lui voir porter un jour : une robe à fleurs assez serrée à la taille, mettant en évidence une poitrine fort enviable, totalement libre. Elle avait de longues jambes dont la robe laissait voir une belle partie, jusqu’à une dizaine de centimètres au-dessus de ses genoux. Je réalisai combien ses mains étaient fines, élancée, belles avec des doigts tellement graciles. Ses épaules demeuraient larges mais donnaient à sa féminité une touche de force, de puissance rassurante. Je la trouvai encore plus belle que ne l’était son personnage de Robert et, maintenant que mon esprit s’était ouvert à cette éventualité que je pouvais être attiré par les filles, je me sentais fondre pour elle. Je me suis approchée et l’ai prise dans mes bras.
- Dis, tu m’en veux, Roberta ? J’ai mal réagi, tout à l’heure. J’ai un peu honte, tu sais. Tu as dû affreusement souffrir… j’ai été égoïste.
- C’est vrai, Anne-Marie, j’ai eu terriblement mal… mais c’est de ma faute. J’aurais dû tenter ma chance en tant que moi-même. Et puis, j’avoue que pour vivre le bonheur que tu me donnes en venant me voir ce soir, je suis prête à vivre mille morts !
- Roberta, quand tu étais encore Robert, tout à l’heure, j’ai… j’ai réalisé que l’amour avait commencé à faire son nid en moi… Le personnage que tu es a su me séduire… et j’ai décidé de l’accepter. C’est difficile, tu sais ! J’ai toujours été persuadée que j’aimais les garçons, mais cela n’a jamais vraiment bien marché, avec eux. Maintenant, j’ai compris que nous n’avions qu’une vie !
- Ce n’est pas tout à fait exact : nous avons deux vies : la seconde commence au moment où nous réalisons que nous n’en avons qu’une.
- C’est beau, ça, Roberta !
- Notre deuxième vie à toi et à moi vient de commencer, ne crois-tu pas ?
- Tu sais, je ne connais pas grand-chose de l’amour entre homme et femme, je suis totalement inexpérimentée. Mais entre femmes, là, je suis vierge !
- Moi aussi ! Nous allons beaucoup nous amuser à tout découvrir…
J’ai pris sa main dans la mienne, admirant et lissant ses longs doigts graciles du bout de l’un des miens, y déposant de petits baisers. J’étais subjuguée par la beauté de ces doigts blancs entrelacés avec mes doigts noirs, dans une si parfaite harmonie. Je l’ai attirée à moi et nous avons repris notre dernier baiser là où il s’était arrêté, lorsque j’avais éventé la supercherie de Robert. Maintenant, le laissai ma main courir sur ses seins, pour de vrai, et elle n’eut plus aucune retenue à venir, de la sienne, caresser les miens, si menus. Nos souffles étaient plus courts, nos tétons gorgés de sang, presque douloureux. Je me penchai pour faire une multitude de petits baisers sur cette poitrine, tout en défaisant les boutons de sa jolie robe. Je pris aussitôt un de ses tétons entre mes lèvres gourmandes. Soupir, hoquet : il était grand temps !
Roberta m’ôta mon T-shirt et ma jupe, appréciant l’urgence qui m’avait fait renoncer aux sous-vêtements. Elle put me rendre la politesse… Je sentais mon désir sourdre au bas de mon ventre…Un chance que je n’aie pas porté de culotte : elle aurait été toute mouillée !
Y a-t-il une logique à cela ? Roberta m’ayant séduite sous la personne d’un homme, elle se comportait un peu comme telle, prenant les devants, les initiatives. Et je la laissais faire, trop heureuse que quelqu’un, enfin, s’intéressât à mon plaisir, mon bonheur. Cette longue main si fine, abandonnant ma poitrine en émoi, descendit le long de mon ventre et s’en vint explorer ma vallée des larmes : larmes de désir, larmes de joie. Soupir, hoquet : il était grand temps ! Ses longs doigts si fins se mirent à caresser la peau si douce de mes cuisses, là, tout près de l’entrée du temple. Quel délicieux supplice ! Ils continuèrent leur chemin, vers le bas, à mon grand désarroi, s’éloignant de l’épicentre du séisme sexuel en préparation. Roberta changea de position et ce sont ses lèvres qui continuèrent l’exploration de mes jambes, laissant ses mains prendre possession des terrains ainsi reconnus, annexés. Elle atteignit mes pieds et, là poussa un petit cri de surprise :
- Ah ! mon Dieu, que tu as de jolis pieds, Anne-Marie : j’en suis folle !
Elle entreprit de me les lécher intégralement, suçant au passage mes fins orteils aux ongles délicatement vernis de laque rouge vif. Elle remonta, doucement, suavement, laissant tout du long de son sensuel cheminement, une piste humide me donnant de nombreux frissons. En arrivant au plus profond de la vallée de mes cuisses, elle les écarta délicatement, mordillant les puissants ligaments, que j’ai si sensibles, de part et d’autre de ma plus intime féminité, avant de placer mes jambes sur ses épaules, mes deux pieds battant doucement ses reins tout au bas de son dos, lorsqu’elle bougeait. Elle demeura immobile un long moment, me regardant fixement depuis ce point d’observation privilégié, noyant son noir regard dans le bleu d’azur du mien. Tout l’amour du monde passait dans ce long moment de tendresse visuelle. Elle tourna ses yeux vers l’orchidée noire offerte devant elle, avec le joli papillon rose posée sur ses pétales, donnant le signal d’un butinage effréné !
Elle posa ses lèvres sur les miennes et les fit aller et venir tout du long, soufflant avec délicatesse son air chaud au plus intime de mon être. Je me tordais dans tous les sens pour tenter d’accentuer sa caresse, sans y parvenir, et poussais des gémissements désespérés : Roberta n’en tenait aucun compte, sachant que plus longue serait la préparation, plus intense serait l’explosion finale !
Elle se décida enfin à sortir le bout de sa langue et à la laisser errer avec légèreté le long de mes nymphes, écartant les pétales de ma fleur d’amour pour aller y recueillir le nectar dans ses tréfonds. Un chant de plaisir sortait déjà en continu de mes lèvres tandis que se formait au centre de mon bas ventre, une boule de lave en fusion, prête à exploser à tout instant.
Jugeant que le jeu était maintenant assez avancé, Roberta remonta de quelques centimètres et, d’une langue habile, fit sortir ma petite perle d’amour toute rouge avant de la gober, la suçant avec délectation tout en la caressant de sa langue, la pressant contre ses dents pour mieux l’exciter des ses délicieux pincement. Deux de ses doigts agiles s’insinuèrent dans mon étroit conduit d’où coulait en abondance la liqueur de désir qui la rendait folle. En quelques légers mouvements de ces deux doigts chéris, elle compléta ce qui devint le tout premier orgasme de ma vie… me laissant tremblante, gémissante, parcourue de vagues d’une intensité destructrice, véritable tsunami sensoriel. Je restai inerte quelques minutes, incapable de dire si j’étais consciente, endormie ou même évanouie.
Explosion de mon cœur, feu dévorant tout mon corps… Quel indicible bonheur ! J’attirai ma partenaire vers moi et l’embrassai de toutes mes forces en lui répétant inlassablement ces mots :
- Je t’aime, je t’aime, je t’aime…
Jamais de ma vie, je n’avais joui avec une telle puissance, même dans mes plaisirs solitaires les plus efficaces… Et Dieu sait qu’il y en avait eu ! Je me devais de donner à mon amante un plaisir aussi beau, aussi sincère. M’allongeant sur le dos, j’invitai ma belle à venir s’agenouiller au-dessus de moi, les fesses au niveau de mes seins, de manière à pouvoir venir aisément placer son joli petit minou au niveau de mes lèvres.
Sitôt en position, où je me sentais en situation de force, je réalisai ses faiblesses. Jamais je n’avais vu son petit minou, moi… Ni son clitounet. Comment cela fonctionnait-il, chez elle ? Une légère angoisse me saisit mais mon salut me vint aussitôt de son propre désir qui, doucement mais inexorablement, coulait sur mon nez, mes lèvres, instillant le bouquet de ses attentes au plus profond de mon âme. Ma langue se mit en mouvement tandis que ma tête commençait à tanguer doucement, faisant alternativement passer sur son sillon sensible mon nez, mes lèvres, langue plus ou moins dardée, mon menton. Puis à rouler, aussi, me permettant, en mordillant les nymphes, de les étirer de gauche à droite avec suavité.
La liqueur de son plaisir m’obligeait à laper continuellement, à déglutir, me donnant un ineffable plaisir. Quel goût ! Ni salée ni sucrée mais laissant l’impression d’un miel qu’aucune abeille n’aura jamais su fabriquer. Une potion d’amour dont il n’est tout simplement pas possible de se repaître tant elle est douce, indispensable dans l’addiction qu’elle génère, qu’on appelle amour.
Autre faiblesse de cette position : il est certes possible de venir introduire des doigts pour enjoliver ces sensations déjà si belles, mais il faut les passer le long du visage, viser avec des angles mal adaptés. Après un essai qui me sembla inopérant, je tentai d’avancer mes doigts en passant par mon menton, entre les merveilleuses fesses de ma belle amante. C’est alors que les doigts rencontrèrent son petit œillet et s’y glissèrent… Provoquant un déluge auquel je n’étais pas préparé ! Mon amour féminin se répandit sur mon visage d’une manière qu’elle-même n’avait jamais vécue, la laissant tout aussi sidérée que moi !
Je me bornai, pour faire face à cette inondation, à laper, canaliser, faire aboutir à ma bouche tous ces ruisseaux de bonheur pour les avaler goulument dans le plus grand des bonheurs.
Roberta, se relevant comme mue par un ressort, se précipita vers sa salle de bain et en revint avec une serviette dont elle épongea mes cheveux, dégoulinants, mon cou, et encore d’autres parties que je ne pouvais pas atteindre de ma langue, avec la meilleure bonne volonté du monde. J’arrêtai sa main sur ma poitrine lui murmurant seulement :
- Amour, s’il te plaît… lèche-les… Tu vas voir, c’est si doux !
Ainsi se passa la toute première fois où nous avons fait l’amour, Roberta et moi. Depuis, nous vivons dans le même appartement et sommes devenues un vrai couple, amoureuses à plein temps. Pourtant, cette libération nous ayant conduites à accepter notre attirance mutuelle et devenir d’authentiques lesbiennes nous avait également ouvert les yeux sur l’origine de nos échecs masculins. C’est ainsi que nous sommes tombées d’accord pour tenter de nouvelles expériences, à cette condition toutefois de ne rien nous cacher.
Roberta a pris un amant qui l’envoya au septième ciel du premier coup, mais sans envie de le refaire ! Et moi-même trouvais un soir, en sortant d’un amphi, un joli interne qui ne demandait pas mieux que de faire découvrir à la lesbienne qu’il savait avoir entre les bras, ce qu’un homme peut apporter à une femme bien disposée. Là aussi, ce fut un magnifique feu d’artifice sensoriel. L’envie de le refaire s’incrusta aussitôt en moi avec force. À la suggestion de Roberta, je l’ai invité à dîner chez nous… Je vous laisse imaginer comment les choses se sont passées, et depuis nous sommes restés tous les trois ensemble, pour notre plus grand bonheur.
Fin
Mais revenons à l’origine de toute cette histoire. C’était un lundi. Le premier janvier 2001, premier jour du troisième millénaire de l’ère chrétienne, un français parcourait dans sa voiture 4x4 la piste allant de Dabakala à Katiola. Oui, Cela se passait en Côte d’Ivoire. Bien que cela se passât un jour férié, l’homme avait dû quitter son épouse, jeune accouchée de la veille pour aller voir des représentants d’une communauté auprès de laquelle il jouait un rôle de médiateur. Il avait dû échanger la calebasse de sel avec ses voisins, celle de dolo, bière de mil un peu pimentée, du genre à faire venir la sueur sur les tempes et la nuque à la première gorgée… Puis palabrer avec des gens qu’il ne connaissait pas, par le biais de deux interprètes, l’un assurant la partie français - dioula, le second la partie dioula – djimini… Une affaire très simple, donc.
Au bout de quelques heures, il était apparu qu’il n’existait en fait pas de contentieux : il avait pu prendre la route du retour vers sa base, à Korhogo. À une quinzaine de kilomètres de Dabakala, il avait aperçu un petit tas de chiffons sur le bord de la piste. Chiffons rougis par la poussière de latérite. Par souci de propreté, il s’était arrêté pour les ramasser, de manière à pouvoir les apporter à un endroit où on pourrait décider qu’en faire. Dedans, à sa grande surprise, se trouvait un bébé… Il l’avait pris dans ses bras. Avait appelé tout autour, cherché longuement… Puis, de guerre lasse, avait repris sa route.
En arrivant le soir, il avait confié le nourrisson à son épouse :
- Ce bébé n’a sans doute rien mangé depuis au moins deux jours… Crois-tu pouvoir le nourrir, en plus du nôtre ? Demain, j’irai l’apporter aux autorités de police.
L’enfant, une petite fille, s’était mise à téter goulument le sein de cette inespérée nourrice avant de retrouver un peu de calme et de s’endormir.
Les autorités locales tout comme celles de la préfecture de Dabakala n’avaient rien voulu savoir : personne n’avait déclaré avoir perdu un enfant, aucun ne manquait à l’appel : ce jeune ménage n’avait qu’à s’en occuper…
C’est ainsi que je suis devenue la sœur jumelle de Marianne. Comme j’étais son exact opposé : non française, non désirée avant d’être recueillie, noire de peau, venue d’on ne sait où et j’en passe, mes parents adoptifs m’ont donné, en plus de tout leur amour, le nom d’Anne Marie ! De l’amour, vous pouvez me croire, ils m’en ont donné ! Je dois être née sous une bonne étoile.
Un an a passé, maman gardant accrochées à ses seins généreux ses deux filles "jumelles". Jusqu’au jour où, enfin, les papiers officiels d’adoption ont été signés, validés, enregistrés au consulat de France d’Abidjan. Dès lors, mes parents ont organisé leur retour en France, ma sœur et moi y faisions notre première visite ! Notre vie s’y est organisée, heureuse.
Bien d’autres années ont coulé, depuis, ma jumelle et moi entourées de l’amour de nos parents. Ce sont des gens merveilleux et, jusqu’à mon dernier souffle, je n’aurais jamais assez de temps ni d’énergie pour leur rendre grâce de tout cet amour… Nous n’avons jamais manqué de rien Marianne et moi : amour, tendresse, encouragements, engueulades aussi ! Chaque fois que cela s’est avéré nécessaire, voire seulement utile, nous y avons eu droit, sans compter.
Cette attention permanente pleine d’amour et de rectitude a fait nous deux jeunes femmes épanouies, joyeuses, honnêtes et sûres d’elles-mêmes. Mes parents, je ne sais pas si c’est le cas dans tous les ménages, sont de jeunes amoureux ! Après un quart de siècle de vie commune, la cinquantaine atteinte, mon père regarde toujours sa belle avec les mêmes yeux amoureux, étonnés qu’une femme aussi belle, aussi parfaite, l’ait choisi, lui ! Il ne rate jamais une occasion de lui donner, plus ou moins discrètement, de petits baisers langoureux, parfois de gros ! Maman est, pour sa part, un peu moins démonstrative. Elle préfère taire ses émois, garder pour l’intimité l’essentiel comme le reste.
Car, Marianne et moi le savons bien, ils ont toujours eu une intimité des plus actives, même si maman a appris à imposer le silence à ses exultations. En général, leur porte est hermétiquement close lorsqu’ils font l’amour. Pas toujours… Marianne et moi sommes convaincues que ces rares épisodes porte entrouverte étaient destinés à nous éduquer, nous faire sentir qu’il n’y avait rien d’interdit, là-dedans, rien de mal. À nous faire savoir le comment, en attendant que le pourquoi nous arrive.
Le film était pratiquement sans bande son, du fait de la pudeur de maman. C’est tout juste si, parfois, nous parvenaient des chuchotements :
- Non, lèche-moi encore un peu, dis… C’est si bon…
- Mais… tu vas venir sans moi…
- C’est ta faute, tu le fais trop bien ! Et puis, ça ne me fait pas peur de recommencer… juste pour le faire en même temps que toi…
- Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage…
- Exactement, mon petit Boileau… et maintenant, lèche-moi encore… Oh oui…
Ma sœur et moi avons acquis de ce fait une sexualité décomplexée. Bon, je vais tout de même briser maintenant une idée fausse apparente : je dis tout le temps ma sœur, ma jumelle… Je sais bien que c’est faux ! On m’a inculqué quelques bases de génétique lorsque j’ai commencé mes études de médecine ! Je sais bien que, même avec beaucoup de soleil, Marianne ne deviendra jamais noire ni ne perdra sa magnifique crinière blonde au profit de la touffe de velcro noir qui couvre ma tête. Je dois dire, qu’elle est belle à couper le souffle, même si elle, de son côté, dit la même chose de moi. Voilà, nous savons bien que j’ai été adopté. Nous l’avons su tout de suite, dès ma plus tendre enfance ; il n’y a jamais eu d’ambigüité, autant qu’il n’y a jamais eu de différence de traitement entre elle et moi. C’est pour cela que nous nous aimons tant.
Quand nos parents faisaient l’amour, il nous arrivait de nous demander ce que ça faisait, quel effet cela produisait ; nous avons ainsi mené quelques explorations de nos corps ensemble, avec toutefois cette certitude que, le moment venu, ce serait des inconnus qui interviendraient dans nos jeux. Un petit peu nos doigts, un petit peu nos langues nous ont en effet convaincues que si beaucoup de plaisir se trouvait à la clé, le prendre entre nous serait mal venu, nous entrainerait dans une spirale malsaine et non satisfaisante, en fin de compte. Nous nous sommes bornées à échanger nos impressions, après avoir pris notre plaisir, chacune dans son lit, améliorant ainsi notre pratique personnelle avec le temps. C’est tout juste si nous nous aidions manuellement : un geste est toujours plus explicite, plus rapide qu’une longue explication !
Marianne a eu son premier petit copain, moi aussi. Elle a joui dès la première fois, pas moi. Bah, ça ne peut pas marcher à tous les coups, non plus ! Mais ce qui est rigolo, si je puis dire, c’est que ma Marianne chérie, qui a eu du plaisir, est triste pour moi, tandis que de mon côté, je suis heureuse pour elle ! On ne se refait pas… Nous sommes légèrement différentes, il est vrai.
Elle, Marianne, c’est une extraordinairement belle jeune femme. Et je ne dis pas cela parce que c’est ma jumelle ! Elle est longue, un mètre soixante-quinze, fine, élancée. Sa pratique de la natation lui laisse un torse épanoui, avec des épaules larges et musclées. Sa poitrine est menue, comme ça, au premier regard… mais les rares personnes ayant accès à sa nudité savent qu’elle a des seins adorables, qui remplissent aimablement une main, même de belle taille. Des seins hauts perchés, arrogants, avec un téton d’un très joli rose pâle, qui entend se faire respecter, planté au milieu de petites aréoles à la peau granuleuse invitant à la caresse. Sa taille…Ah, sa taille, à rendre jalouse une guêpe ! Surmontant des hanches auxquelles on a envie de s’accrocher, aux rondeurs pulpeuses sans une once de superflu, avec, pour continuité, deux jambes fuselées, galbées, magnifiques, terminées par deux pieds dont n’importe qui devrait, en toute logique, tomber raide amoureux … Belle, très belle femme.
Oui… pour qui, obsédé par le corps, ne prendrait pas le temps de plonger dans son regard après voir admiré la ravageuse beauté de son visage. Plutôt triangulaire en raison d’un front large et d’un petit menton assez pointu, sa face offre deux pommettes encadrant un nez de petite fille, avec de petites narines très pulsatiles, vives à trahir ses émotions. Elle porte ses cheveux d’une blondeur de bois d’érable verni… Elle les laisse encadrer son visage de manière un peu folle, comme s’ils étaient sans aucun entretien ! Mais ses yeux… C’est là que tout se perd. Ils semblent avoir été taillés dans l’anthracite le plus pur tant ils sont noirs ! Insondable regard, véritable trou noir de l’amour dans lequel on ne peut que plonger… Elle est belle, juste ça : belle, je ne trouve pas d’autre mot !
Moi ? Je crois que je suis plutôt jolie, c’est ce que j’entends dire de moi, ici et là… Je suis longue, un mètre soixante-quinze, fine, élancée. Ma pratique de la natation m’a également laissé un torse épanoui, avec des épaules larges et musclées. La comparaison avec ma sœur ne saurait aller beaucoup plus loin car, vous l’avez sans doute compris, ma peau est d’un noir de chocolat à 90% de cacao, au bas mot ! Personne ne dirait que ma poitrine est menue. Ou alors, vraiment menue ! Mes seins remplissent certes une main, pourvu qu’elle ne soit pas trop grande. Leurs tétons sont menus eux aussi, taillés dans le charbon… je dirais plutôt la braise, ou la lave, car il est de fait qu’ils sont d’une réactivité de feu ! Mes aréoles sont bien plus larges que celles de ma sœurette, d’un noir "un peu plus clair"… Un contraste juste suffisant pour laisser voir leur téton inquisiteur, fièrement planté au milieu. J’ai aussi une taille fine et des hanches d’une belle générosité. Quant à mes jambes de nageuse devenue par la suite marathonienne, j’avoue qu’elles ont un peu de muscle en trop pour dégager toute la féminité, la sensualité que je porte dans mon âme. J’aime bien mes pieds qui sont fin, joliment cambrés en une belle voûte, avec des orteils qui attirent le regard de par leur longueur.
Là où ma personne détonne carrément, c’est que, assez haut sur mon visage, sous mon front ébène, se trouvent deux yeux d’un bleu pervenche. Il est vrai que c’est tellement rare que bien des gens se retournent sur mon passage, la plupart convaincue que je porte des lentilles bleues par pure coquetterie ! J’ajouterai que, d’un naturel optimiste, empathique et joyeux, j’arbore en continu un sourire qui laisse éclater la blancheur de mes dents !
Je m’exprime dans un français qui étonne. Dame ! Je n’ai entendu que cette langue depuis le tout début de ma vie, si j’excepte l’anglais que Marianne et moi parlons comme une seconde langue maternelle. Je n’ai donc aucun accent "ethnique" lié à mes origines. C’est l’occasion de belles rigolades lorsque Marianne dit qu’elle attend sa sœur jumelle, ou bien quand on m’entend parler au téléphone, et qu’on me voit arriver peu après… Bien des bras en tombent !
Ça n’a pas toujours été facile à vivre… Oui, il est vrais qu’ici et là, je rencontre des gens qui ne se montrent pas très heureux de voir autant de noirceur dans leur pays. Je peux les comprendre… jusqu’à ce point que… leur pays est aussi le mien, je n’en ai jamais eu d’autre, en fait, depuis mon adoption. Et comme je n’ai pas reçu de culture associée à mes origines évidentes, certains membres de ces communautés me battent un peu froid également, pensant que je les snobe. J’ai dû vivre avec cette double peine, double racisme.
J’ai bien tenté de me teindre les cheveux, les décrêper … rien ne m’a donné satisfaction ni n’a pu améliorer ma situation. J’ai fini par me rallier à la bannière de Léopold Senghor et accepter ma négritude, la revendiquer, en être fière. C’est satisfaisant pour l’esprit. Pas tellement pour la vie de tous les jours.
Bien sûr, ce premier petit copain maladroit ne m’a pas beaucoup aidée à aller de l’avant dans le domaine amoureux. Marianne a eu plusieurs copains successifs, avec des rapports sexuels de plus en plus satisfaisants, si j’en juge par son épanouissement. Plus elle semblait bien dans a peau, plus je me sentais rabougrie dans ma totale déshérence sentimentale. Il m’est vite apparu indispensable de me remuer, de tenter de comprendre comment je devais changer ma façon d’être pour parvenir à entrer dans le jeu de la séduction. En avais-je seulement les moyens ? En fait, je n’attirais que des garçons… qui me ressemblaient, type afro… Alors que mes yeux restaient braqués sur les garçons ressemblant à ma famille, mes parents, ma sœur, type caucasien. Où était le blocage ? Devais-je renoncer à séduire de beaux gars blancs ? Ou devais-je admettre que mon destin ne pouvait être qu’auprès de mâles afros ? Je me voyais prise dans un tourbillon sans fin me conduisant inéluctablement vers une solution qui ne me convenait pas.
Et puis vint Robert. Il avait tout pour plaire ! Il était plutôt beau garçon… Grand, fin, stylé, parlait avec élégance. Sa peau était assez mate, il avait des cheveux très noirs, les yeux assortis. Il portait un fin duvet au dessus de lèvres fines mais charnues, dénotant une pilosité discrète. De même, ses tempes étaient couvertes du même duvet qui se terminait en pointes sur l’angle du maxillaire. Son torse apparaissait puissant, avec de larges épaules et des pectoraux d’athlète, tout en ayant une taille fine qui accentuait son côté triangulaire très sportif. Son visage était souriant, il aimait rendre service et se mettre en avant en tant que tel.
Il terminait sa médecine, lui aussi. C’est étrange, je ne l’avais jamais remarqué avant. Je me suis dit qu’il était sans doute un transfuge d’une autre université. J’ai participé à quelques rencontres, des rédactions de rapports en commun. Jusqu’au jour où il m’a proposé de déjeuner avec lui. Repas agréable, où nous avons pu nous sonder un peu l’âme, l’un de l’autre. Il semblait sensible à mes charmes, ce qui m’émut.
De retour chez moi, le soir, je me suis aperçue que son image était entrée en moi, gravée dans mon cœur : j’ai compris que je tombais amoureuse de lui. Heureuse ? Oui et non. Oui car enfin l’amour frappait à ma porte… Non à cause de la peur que m’inspirait un possible nouvel échec…
Au rendez-vous suivant, Robert s’enhardit un peu : il me prit la main sur la table et, me regardant droit dans les yeux, me fit cet aveu :
- Anne Marie, je voudrais te dire que je t’admire beaucoup, que je te trouve très belle… que je t…
La fin de sa phrase resta coincée dans une gorge trop serrée par l’émotion ; je volai à son secours.
- Robert, je te trouve très séduisant aussi. J’aime ces moments que nous passons ensemble. Quant à ce que tu n’as pas pu dire, je voudrais juste te dire… Moi aussi.
Robert avait eu une moue qui me laissa dubitative : il n’avait pas l’air très heureux de ma tirade.
En quittant l’hôpital, cette fin d’après-midi, je décidai de l’emmener chez moi pour lui faire voir où je vivais, lui offrir un thé et pouvoir parler un peu plus longuement, sans personne pour nous déranger… Et puis, je l’avoue, j’avais envie d’en savoir plus, de découvrir qui était ce beau gars aux manières si douces, si attentionné.
Une fois Robert assis dans mon petit canapé, je me suis assise sur ses genoux, sans façon, et l’ai embrassé. Ce fut notre premier baiser, un baiser sensuel, charnel, passionnel et puissant. Il sonnait dans mon esprit le début que quelque chose de fort et beau, comme l’ouverture de Carmen !
Nous sommes restés un long moment à nous embrasser, laissant nos mains commencer à explorer l’autre mais très vite, je notai que j’étais la seule à prendre des initiatives. Alors, n’y tenant plus, j’ai attrapé ses mains et les ai placées l’une sur mes hanches, l’autre sur une de mes cuisses. Je ne pouvais pas être plus suggestive, faire d’invite plus claire !
Il s’est très légèrement déridé, a commencé timidement à caresser mon flanc, remontant vers mon sein bouillonnant d’impatience. J’aurais bien dû, alors, remarquer des choses qui n’allaient pas… Seulement voilà : l’amour rend aveugle, et l’amour, à ce moment, sournoisement, commençait à faire un nid douillet dans le fond de mon cœur. Alors j’ai doucement laissé la main que j’avais placée derrières sa nuque le temps d’un baiser, glisser vers ses pectoraux, pour éprouver sa belle musculature. Sous son épaisse chemise, j’ai senti une chose inattendue : une bande de tissu, comme un soutien-gorge, en bien plus épais.
J’ai bondi, me remettant sur les pieds. J’ai tâté toute sa poitrine, sur laquelle cette bande se trouvait uniformément présente. Ma pensée s’organisait avec fulgurance dans ma tête. Oui, je n’avais rien senti non plus évoquant du désir, plus bas, entre ses cuisses sur lesquelles j’étais pourtant assise. Je n’ai aps eu besoin d’y porter la main : tout était clair…
- Robert, c’est ton vrai nom ?
Il était rouge, penaud, regardait ses genoux, cherchant péniblement à retrouver son souffle et me dire une chose audible.
- Tu peux m’appeler… Roberta. Je suis Argentine par ma mère.
J’étais là, pétrifiée devant lui… ou plutôt devant elle. Comment avais-je pu me laisser berner de la sorte. Les larmes me vinrent aux yeux : dépit, colère, fatalité : chaque fois que l’amour venait frapper à ma porte, c’était pour mieux se rire de moi… Malédiction…
Je me suis retournée, cachant ma désespérance. Alors Roberta, s’armant de courage me fit cet aveu :
- Lorsque je n’ai pas pu te dire la fin de ma phrase, l’autre jour, tu as interprété, je pense, que je voulais te dire "Je t’aime". C’était d’ailleurs vrai, tu avais raison. La véritable fin restée dans ma gorge, était "Je suis une femme"…
- Tu m’as trompée, Roberta. Tu m’as séduite en homme… que tu n’es pas.
- Je le sais, Anne-Marie. J’en ai honte, terriblement honte, c’est pourquoi je voulais te le dire, avant que notre relation aille plus loin. Mais j’ai échoué. Je t’en demande pardon. Mais je veux que tu le saches : Tout, absolument tout ce que j’ai pu te dire depuis le début est vrai… J’ai bien vu en rejoignant cette nouvelle université que tu étais attirée par les hommes. Et moi, qui suis depuis toujours de la même mouvance, je ne sais pas pourquoi ni comment, je me suis sentie éperdument attirée par toi. Je n’ai pas été fichue d’imaginer un autre moyen pour me rapprocher de toi que cette affreuse supercherie. Pardonne-moi, si tu en es capable.
Roberta s’est levée, a remis sa veste et, sans mot dire, est sortie de chez moi, me laissant éclater en sanglots sur mon lit. Elle a refermé la porte et a disparu.
Dans ces cas-là, mon seul refuge, c’est ma jumelle, c’est toujours auprès d’elle que je parviens à refaire le point. Petit coup de fil, allô sœurette, bobo… Une heure plus tard, on grattait à ma porte et ma belle Marianne entrait. Câlin, bisous, pas un mot : je pleurais trop pour parler ou entendre quoi que ce fut. Elle m’a déshabillée pour ma nuit, mise au lit, s’est allongée près de moi en caressant les joues, mes tempes, mes cheveux. Petits bisous tendres… mots doux, apaisants. J’ai finalement pu lui raconter la malédiction qui, une fois encore me rattrapait. Depuis ma naissance, en somme, je n’ai jamais fait autre-chose que me faire rejeter, abandonner… Marianne a bondi !
- Ça, je ne te le laisserai jamais dire ! Que tu aies été laissée au bord d’une route, c’est un fait. Mais Papa t’a ramassée ! Maman t’a nourrie. Ils t’on donné tout leur amour en même temps qu’une famille, une sœur aussi. Où il est, ton fameux abandon, hein ? Et puis, cette Roberta, t’a-telle abandonnée ? Elle est venue au devant de toi, pleine d’amour et d’espoir. Bon, j’admets qu’elle s’y est mal prise ! Mais si elle est partie, c’est parce que toi, oui, toi, tu lui as fermé tes bras. Oh, je ne dis pas que je t’en blâme ! J’en aurais sûrement fait autant… Mais ôte-toi de la tête l’idée qu’elle t’a abandonnée ! Elle est partie, dans son propre abandon.
La véhémence de ce petit discours me fit l’effet d’un électrochoc ! Je la regardai, interloquée mais en même temps soulagée, un peu, me semblait-il.
- Mais, Marianne, c’est une fille !
- Et alors, c’est un crime ? Rappelle-toi, nos premières explorations corporelles, nous les avons faites ensemble ! Nos premières caresses, nos premiers orgasmes, nous les avons vécus ensemble… Et il me semble que nous sommes des filles !
- C’est pas pareil…
- Bien sûr que si ! Une vérité se fait en moi, Anne-Marie : tu n’as jamais obtenu de réel plaisir avec tes petits copains. T’es-tu demandée pourquoi ? N’existe-t-il pas une petite porte, au fond de ton âme, que tu t’obstines à vouloir garder fermée : celle qui montrerait à tous que tu sois en fait attirée par les filles et que, contre vents et marées, ton désir de normalité te contraigne à rechercher un homme ?
- Je… Je ne sais pas…
- Moi, je sais Anne-Marie ! J’ai eu pas mal de petits copains, et j’ai pris un grand plaisir avec eux tout comme avec celui qui deviendra sans doute mon mari, un jour. Mais j’ai eu des petites amies, aussi, j’ai tout autant eu de plaisir avec elles ! D’ailleurs, même étant en couple avec Cyrille, j’ai encore plusieurs amies de sexe que je vois régulièrement, parfois même avec lui !
- C’est vrai ? Tu es comme ça ?
- Je suis vivante, ma chérie ! Je ne parierais pas que nous ne formerons pas un trouple, pour finir, Cyrille et moi avec l’une d’elles qui est vraiment très amoureuse de nous deux… et que nous aimons bien aussi.
- C’est incroyable… Tu es ma sœur jumelle et je ne me suis jamais aperçue de rien ! Sans doute ai-je des œillères, nous voulais-je rien voir…
- Ne te laisse pas gâcher la vie par des interdits mutilants que tu t’imposes. As-tu aimé embrasser Robert, quand tu t’es sentie amoureuse de lui ?
- Bien sûr, c’était tellement doux, tellement suave… plein d’amour, quoi !
- Alors… si c’était agréable, amoureux, accepte d’avoir eu ce plaisir, mais avec Roberta. Appelle-la, va, c’est sûr que tu vas la faire revivre, elle doit être au bout de sa vie en ce moment.
- Merci Petite sœur, je t’aime !
Un coup de fil… Le temps de passer un T-shirt et une jupe ainsi qu’une paire de baskets, je sortis de chez moi en courant et arrivai chez Roberta un peu avant minuit, essoufflée mais heureuse. Elle m’attendait dans une tenue que je n’aurais jamais pensé lui voir porter un jour : une robe à fleurs assez serrée à la taille, mettant en évidence une poitrine fort enviable, totalement libre. Elle avait de longues jambes dont la robe laissait voir une belle partie, jusqu’à une dizaine de centimètres au-dessus de ses genoux. Je réalisai combien ses mains étaient fines, élancée, belles avec des doigts tellement graciles. Ses épaules demeuraient larges mais donnaient à sa féminité une touche de force, de puissance rassurante. Je la trouvai encore plus belle que ne l’était son personnage de Robert et, maintenant que mon esprit s’était ouvert à cette éventualité que je pouvais être attiré par les filles, je me sentais fondre pour elle. Je me suis approchée et l’ai prise dans mes bras.
- Dis, tu m’en veux, Roberta ? J’ai mal réagi, tout à l’heure. J’ai un peu honte, tu sais. Tu as dû affreusement souffrir… j’ai été égoïste.
- C’est vrai, Anne-Marie, j’ai eu terriblement mal… mais c’est de ma faute. J’aurais dû tenter ma chance en tant que moi-même. Et puis, j’avoue que pour vivre le bonheur que tu me donnes en venant me voir ce soir, je suis prête à vivre mille morts !
- Roberta, quand tu étais encore Robert, tout à l’heure, j’ai… j’ai réalisé que l’amour avait commencé à faire son nid en moi… Le personnage que tu es a su me séduire… et j’ai décidé de l’accepter. C’est difficile, tu sais ! J’ai toujours été persuadée que j’aimais les garçons, mais cela n’a jamais vraiment bien marché, avec eux. Maintenant, j’ai compris que nous n’avions qu’une vie !
- Ce n’est pas tout à fait exact : nous avons deux vies : la seconde commence au moment où nous réalisons que nous n’en avons qu’une.
- C’est beau, ça, Roberta !
- Notre deuxième vie à toi et à moi vient de commencer, ne crois-tu pas ?
- Tu sais, je ne connais pas grand-chose de l’amour entre homme et femme, je suis totalement inexpérimentée. Mais entre femmes, là, je suis vierge !
- Moi aussi ! Nous allons beaucoup nous amuser à tout découvrir…
J’ai pris sa main dans la mienne, admirant et lissant ses longs doigts graciles du bout de l’un des miens, y déposant de petits baisers. J’étais subjuguée par la beauté de ces doigts blancs entrelacés avec mes doigts noirs, dans une si parfaite harmonie. Je l’ai attirée à moi et nous avons repris notre dernier baiser là où il s’était arrêté, lorsque j’avais éventé la supercherie de Robert. Maintenant, le laissai ma main courir sur ses seins, pour de vrai, et elle n’eut plus aucune retenue à venir, de la sienne, caresser les miens, si menus. Nos souffles étaient plus courts, nos tétons gorgés de sang, presque douloureux. Je me penchai pour faire une multitude de petits baisers sur cette poitrine, tout en défaisant les boutons de sa jolie robe. Je pris aussitôt un de ses tétons entre mes lèvres gourmandes. Soupir, hoquet : il était grand temps !
Roberta m’ôta mon T-shirt et ma jupe, appréciant l’urgence qui m’avait fait renoncer aux sous-vêtements. Elle put me rendre la politesse… Je sentais mon désir sourdre au bas de mon ventre…Un chance que je n’aie pas porté de culotte : elle aurait été toute mouillée !
Y a-t-il une logique à cela ? Roberta m’ayant séduite sous la personne d’un homme, elle se comportait un peu comme telle, prenant les devants, les initiatives. Et je la laissais faire, trop heureuse que quelqu’un, enfin, s’intéressât à mon plaisir, mon bonheur. Cette longue main si fine, abandonnant ma poitrine en émoi, descendit le long de mon ventre et s’en vint explorer ma vallée des larmes : larmes de désir, larmes de joie. Soupir, hoquet : il était grand temps ! Ses longs doigts si fins se mirent à caresser la peau si douce de mes cuisses, là, tout près de l’entrée du temple. Quel délicieux supplice ! Ils continuèrent leur chemin, vers le bas, à mon grand désarroi, s’éloignant de l’épicentre du séisme sexuel en préparation. Roberta changea de position et ce sont ses lèvres qui continuèrent l’exploration de mes jambes, laissant ses mains prendre possession des terrains ainsi reconnus, annexés. Elle atteignit mes pieds et, là poussa un petit cri de surprise :
- Ah ! mon Dieu, que tu as de jolis pieds, Anne-Marie : j’en suis folle !
Elle entreprit de me les lécher intégralement, suçant au passage mes fins orteils aux ongles délicatement vernis de laque rouge vif. Elle remonta, doucement, suavement, laissant tout du long de son sensuel cheminement, une piste humide me donnant de nombreux frissons. En arrivant au plus profond de la vallée de mes cuisses, elle les écarta délicatement, mordillant les puissants ligaments, que j’ai si sensibles, de part et d’autre de ma plus intime féminité, avant de placer mes jambes sur ses épaules, mes deux pieds battant doucement ses reins tout au bas de son dos, lorsqu’elle bougeait. Elle demeura immobile un long moment, me regardant fixement depuis ce point d’observation privilégié, noyant son noir regard dans le bleu d’azur du mien. Tout l’amour du monde passait dans ce long moment de tendresse visuelle. Elle tourna ses yeux vers l’orchidée noire offerte devant elle, avec le joli papillon rose posée sur ses pétales, donnant le signal d’un butinage effréné !
Elle posa ses lèvres sur les miennes et les fit aller et venir tout du long, soufflant avec délicatesse son air chaud au plus intime de mon être. Je me tordais dans tous les sens pour tenter d’accentuer sa caresse, sans y parvenir, et poussais des gémissements désespérés : Roberta n’en tenait aucun compte, sachant que plus longue serait la préparation, plus intense serait l’explosion finale !
Elle se décida enfin à sortir le bout de sa langue et à la laisser errer avec légèreté le long de mes nymphes, écartant les pétales de ma fleur d’amour pour aller y recueillir le nectar dans ses tréfonds. Un chant de plaisir sortait déjà en continu de mes lèvres tandis que se formait au centre de mon bas ventre, une boule de lave en fusion, prête à exploser à tout instant.
Jugeant que le jeu était maintenant assez avancé, Roberta remonta de quelques centimètres et, d’une langue habile, fit sortir ma petite perle d’amour toute rouge avant de la gober, la suçant avec délectation tout en la caressant de sa langue, la pressant contre ses dents pour mieux l’exciter des ses délicieux pincement. Deux de ses doigts agiles s’insinuèrent dans mon étroit conduit d’où coulait en abondance la liqueur de désir qui la rendait folle. En quelques légers mouvements de ces deux doigts chéris, elle compléta ce qui devint le tout premier orgasme de ma vie… me laissant tremblante, gémissante, parcourue de vagues d’une intensité destructrice, véritable tsunami sensoriel. Je restai inerte quelques minutes, incapable de dire si j’étais consciente, endormie ou même évanouie.
Explosion de mon cœur, feu dévorant tout mon corps… Quel indicible bonheur ! J’attirai ma partenaire vers moi et l’embrassai de toutes mes forces en lui répétant inlassablement ces mots :
- Je t’aime, je t’aime, je t’aime…
Jamais de ma vie, je n’avais joui avec une telle puissance, même dans mes plaisirs solitaires les plus efficaces… Et Dieu sait qu’il y en avait eu ! Je me devais de donner à mon amante un plaisir aussi beau, aussi sincère. M’allongeant sur le dos, j’invitai ma belle à venir s’agenouiller au-dessus de moi, les fesses au niveau de mes seins, de manière à pouvoir venir aisément placer son joli petit minou au niveau de mes lèvres.
Sitôt en position, où je me sentais en situation de force, je réalisai ses faiblesses. Jamais je n’avais vu son petit minou, moi… Ni son clitounet. Comment cela fonctionnait-il, chez elle ? Une légère angoisse me saisit mais mon salut me vint aussitôt de son propre désir qui, doucement mais inexorablement, coulait sur mon nez, mes lèvres, instillant le bouquet de ses attentes au plus profond de mon âme. Ma langue se mit en mouvement tandis que ma tête commençait à tanguer doucement, faisant alternativement passer sur son sillon sensible mon nez, mes lèvres, langue plus ou moins dardée, mon menton. Puis à rouler, aussi, me permettant, en mordillant les nymphes, de les étirer de gauche à droite avec suavité.
La liqueur de son plaisir m’obligeait à laper continuellement, à déglutir, me donnant un ineffable plaisir. Quel goût ! Ni salée ni sucrée mais laissant l’impression d’un miel qu’aucune abeille n’aura jamais su fabriquer. Une potion d’amour dont il n’est tout simplement pas possible de se repaître tant elle est douce, indispensable dans l’addiction qu’elle génère, qu’on appelle amour.
Autre faiblesse de cette position : il est certes possible de venir introduire des doigts pour enjoliver ces sensations déjà si belles, mais il faut les passer le long du visage, viser avec des angles mal adaptés. Après un essai qui me sembla inopérant, je tentai d’avancer mes doigts en passant par mon menton, entre les merveilleuses fesses de ma belle amante. C’est alors que les doigts rencontrèrent son petit œillet et s’y glissèrent… Provoquant un déluge auquel je n’étais pas préparé ! Mon amour féminin se répandit sur mon visage d’une manière qu’elle-même n’avait jamais vécue, la laissant tout aussi sidérée que moi !
Je me bornai, pour faire face à cette inondation, à laper, canaliser, faire aboutir à ma bouche tous ces ruisseaux de bonheur pour les avaler goulument dans le plus grand des bonheurs.
Roberta, se relevant comme mue par un ressort, se précipita vers sa salle de bain et en revint avec une serviette dont elle épongea mes cheveux, dégoulinants, mon cou, et encore d’autres parties que je ne pouvais pas atteindre de ma langue, avec la meilleure bonne volonté du monde. J’arrêtai sa main sur ma poitrine lui murmurant seulement :
- Amour, s’il te plaît… lèche-les… Tu vas voir, c’est si doux !
Ainsi se passa la toute première fois où nous avons fait l’amour, Roberta et moi. Depuis, nous vivons dans le même appartement et sommes devenues un vrai couple, amoureuses à plein temps. Pourtant, cette libération nous ayant conduites à accepter notre attirance mutuelle et devenir d’authentiques lesbiennes nous avait également ouvert les yeux sur l’origine de nos échecs masculins. C’est ainsi que nous sommes tombées d’accord pour tenter de nouvelles expériences, à cette condition toutefois de ne rien nous cacher.
Roberta a pris un amant qui l’envoya au septième ciel du premier coup, mais sans envie de le refaire ! Et moi-même trouvais un soir, en sortant d’un amphi, un joli interne qui ne demandait pas mieux que de faire découvrir à la lesbienne qu’il savait avoir entre les bras, ce qu’un homme peut apporter à une femme bien disposée. Là aussi, ce fut un magnifique feu d’artifice sensoriel. L’envie de le refaire s’incrusta aussitôt en moi avec force. À la suggestion de Roberta, je l’ai invité à dîner chez nous… Je vous laisse imaginer comment les choses se sont passées, et depuis nous sommes restés tous les trois ensemble, pour notre plus grand bonheur.
Fin
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1 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Très belle histoire, la partie "sexuelle" est un véritable ode à l'amour et toute empreinte d'une magnifique poésie.
Bravo à l'auteur, ou autrice.
J'aimerais beaucoup lire de tels oeuvres!
Alain
Bravo à l'auteur, ou autrice.
J'aimerais beaucoup lire de tels oeuvres!
Alain