t'as vu ? Sans les mains (12) - histoire érotique

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Maman, il y a 3 jours

- Vous arrivez demain soir ou samedi ? J’espère qu’ils ne seront pas du même modèle que l’abruti de l’autre fois…
- Je travaille samedi matin, ce sera en fin d’après-midi. Je dois encore la persuader, elle, mais… Et non, maman, rien à voir, Lucrezia et Nicolas sont dans mon cursus, et même parmi les meilleurs de la promo.
- Comme toi, alors ?
- Encore meilleurs ! Arrête de m’idéaliser, steuplé…
- Ils sont en couple ? Et toi ?
- Ils… ont une relation un peu spéciale, voilà. Et moi, il me semblait que je ne devais pas y penser avant la fin de mon master, non ?
- Ne sois pas impertinent, Jérémie ! J’ai été jeune, et papa et moi…
- Je sais cela, maman, je ne promets juste pas d’avoir le même… genre de relation que vous, ai-je dit.

J’ai souri un peu hypocritement au sous-entendu qui lui échappera encore un temps, j’espère.

- Puis Gianfranco rentre aussi ce week-end avec Aurélie, ai-je ajouté ‘’on pourrait manger ensemble dimanche midi, ce serait cool, non ?’’
- J’aime beaucoup Aurélie, j’en ai parlé Sarah et Edoardo il y a quelques jours, ils ont fini par admettre qu’elle lui fait du bien, elle le… Comment avaient-ils dit ? Ah oui, elle le pose. Il était un petit garçon tellement sauvage.

J’ai directement pensé que Gian et Aurélie se font mutuellement du bien, et qu’ils se posent surtout sur un matelas, puis que Gian et moi ne sommes plus des petits garçons depuis bien longtemps…

- Mais où dormiront-ils, tes amis ?
- Je prendrai le canapé et je leur laisserai ma chambre, c’est bon.
- Avec les maquettes d’avions qui pendent partout… Je n’ai jamais trop compris que tu y passes tant de temps au lieu de courir la campagne, en fait… Mais soit, tu avais l’air heureux, donc moi aussi.
- Hmmm… Oh ! Un petit service à te demander… Manu, le voisin, il bosse au département de la nature et des forêts ou je sais pas trop le titre, tu pourrais lui demander un truc, steuplé ? Demain soir, s’il est libre ? Voilà, l’histoire, c’est que…

(***)

Nicolas et Lucrezia, il y a 3 jours

- Wéris, Lucrezia, t’as qu’à googler, il y a un dolmen et des menhirs mondialement connus… Dressés par mes ancêtres les Gaulois qui ont fièrement combattu les tiens, si tu vois.
- Genre, tu ne connais même pas l’histoire de ton village du bout du monde oublié de Toutatis, les dolmens c’est le néolithique, déjà. Puis vu ton nom imprononçable, tes ancêtres ne sont pas que gaulois, hein… Après, pour les Romains, les germains, gaulois, lusitaniens, toussa… c’était juste des barbares à grosse bite… Mais que les Romaines semblaient apprécier, elles, a-t-elle ajouté, prenant un air faussement rêveur ‘’Tu confirmes, Nico ?’’

Il a légèrement rougi, j’ai entrepris de le sauver.

- C’est juste un week-end loin du bruit des voitures, Lucrezia ! Puis on a un peu besoin de la tienne pour y aller, c’est même pas une heure de route, sinon c’est le double en train. Puis Nicolas voudrait vraiment venir… Une meilleure amie saurait où est son devoir, je dis ça, je dis rien, hein…
- Hey ! Mais euuuh… La manipulation, c’est mon truc ! Comment tu as appris ça, toi ? J’ai créé un monstre… Bon, il y aura qui ?
- Samedi soir, j’ai prévu un truc, mais c’est un secret. Et dimanche midi, mon meilleur et sa copine…
- Oh ! La fille qui a dressé ton macho de best et en a fait un caniche ? Cool, j’ai plein de trucs à apprendre d’elle…

(***)

Maman, hier

- Difficile d’imaginer leur relation, il est aussi timoré qu’elle est franche, un chaton et une tigresse, a murmuré maman après cinq minutes, avant d’ajouter à voix normale ‘’Ah oui, j’ai demandé à Manu, il est d’accord pour ce soir.

Le temps de poser les sacs, Lucrezia m’a demandé, étonnamment discrète ‘’C’est qui, Manu ? Encore un Gaulois gaulé ? Un troll des forêts qui sodomise des elfes ?’’

- Je crois pas, non… Contrairement à ce que tu penses peut-être, je ne me suis pas tapé tout le village.
- Je pense ce que je veux, du peu que Nico m’a dit, tu as l’air d’avoir de l’expérience, je m’attends à tout… Il va faire quoi, le mec ?
- Il va faire plaisir à Nicolas, mais pas de la manière que tu imagines.
- Tu sais même pas ce que j’imagine.
- Parfois, je préfère pas… Par contre, ce que j’adore, c’est comment tu es avec Nicolas… Il a de la chance d’avoir une amie comme toi, sincèrement, ai-je dit.
- Oh ! Ben, ouais… Bon, merci, je suppose… Juste… Sois bien avec Nico, et tu aurais une amie comme moi. Sinon, ce mec, Manu… ?
- Vers vingt et une heure… Il sera probablement en uniforme…
- En… ? Tu lui as trouvé un strip-teaser en costume de flic ou de pompier ? Pas sûre que ça fasse rire ta mère, ça…

A vingt et une heures dix, Manu-le-gentil-voisin s’est pointé, dans son uniforme de garde forestier et m’a soufflé ‘’Avant que j’oublie, Kyrill va revenir en juillet, il se réjouit de te revoir … puis de nous présenter son… copain, t’aurais pu imaginer, toi ? Il a bien changé en cinq ans, notre petit Kyrill. Il te fait la bise’’. Le clin d’œil, et le sous-entendu, qui ne lui ont clairement pas échappé, m’ont mis légèrement mal à l’aise devant Nicolas…

- Sinon, ben, ta requête m’a un peu étonné, il y en a dans les bois du campus…
- Chut ! Garde l’effet de surprise… Bah, c’est juste que Nicolas et Lucrezia logent en ville, eux.
- Les pauvres citadins, s’est-il gentiment moqué ‘’Mais il y en a en zone urbaine, tu sais’’.
- Lucrezia écume les bars vraiment trop bruyants, et Nicolas évite de zoner dans les parcs la nuit, alors… Enfin bon, merci, pour ce soir…
- Ça me fait plaisir, Jérémie, je promets… Marianne, tu nous accompagnes ?

Maman a sobrement décliné l’invitation, et nous a dit de nous habiller chaudement ‘’Les nuits de mi-décembre sont mortelles pour les étudiants sous-alimentés’’.

- En avant, mauvaise troupe, a dit Manu, en se dirigeant vers sa Land Rover.
- C’est étrangement excitant… a dit Lucrezia qui est spontanément montée à l’avant, nous laissant la banquette arrière.
- On va où ? a murmuré Nicolas.

Je lui ai répondu d’un clin d’œil et d’un sourire. Puis j’ai serré sa main.

(…)

Nicolas et Lucrezia, hier

- Diminue la luminosité de ton écran’’, a dit Manu, ‘’Ils sont craintifs’’. Lucrezia s’est exécutée, et m’a soufflé à l’oreille ‘’Ses désirs sont des ordres… Il est marié, lui ?’’
- Trèèès. Et sa femme est jalouse…
- Chuuut, les voilà, a dit le garde-chasse, en me filant ses jumelles de vision nocturne.
- Merci mais ce soir, c’est pour Nicolas, ai-je soufflé en les lui tendant ‘’Regarde, ils sont à côté du stère de bois’’
- Oooh ! Elle a trois petits, c’est trop mignon ! Ils chassent déjà ?
- Ils sont trop jeunes, a expliqué Manu à voix basse, la mère leur apprend encore… Leur alimentation, c’est essentiellement des mulots et autres rongeurs, elle mâche les proies et les régurgite, leur estomac ne produit pas encore en quantité suffisante les enzymes qui permettent la digestion… Dans ce cas, la portée est arrivée vraiment beaucoup trop tard dans la saison, peut-être un dérèglement hormonal lié aux pesticides, en temps normal, ils n’auraient jamais survécu, c’est pourquoi je dispose de la nourriture, comme je l’ai fait ce soir, juste avant de passer vous chercher… Et pour être sûr que nous les voyions.

Cachés par la mécanique optique suisse, je ne pouvais qu’imaginer les yeux probablement écarquillés et brillants de Nicolas, je devrais me contenter de son sourire ouvert sur une rangée de petites perles blanches.

***** 24 *****
- Je. Prends. Le. Canapé ! Et vous dormez ensemble, puis vous traînez au pieu demain, et surtout, tu laisses ostensiblement traîner le matelas pneumatique bien roulé sur le palier, ça fait partie du plan, a claqué Lucrezia.
- Quel plan ?
- Ton coming-out !
- Quoi ?
- Tu as vingt et un ans et ta mère ne soupçonne même pas que tu kiffes les mecs, t’es une petite bite ! Puis Nico mérite de la reconnaissance. Alors, dernière vérification… tes sentiments pour lui ?
- Je le… vraiment beaucoup.
- Tu peux dire le mot, hein ! Je lui ai tiré les vers du nez, il fait plus que te kiffer, lui, il me l’a avoué. Tu pourrais te fendre le cul de le lui dire, tu crois pas qu’il serait temps de passer quelques niveaux ? Ta mère est juste le boss final mais tu as suffisamment de crédits d’armement et de potions, là.
- Mouais…
- Après, je te dis pas de niquer cette nuit, juste à côté de sa chambre, hein ! Au fait, il est bruyant, Nico, avec ta petite frite dans le cul ?
- Je ne répondrai pas à cette provocation, déjà pour ne pas encourager plus encore ta grossièreté.
- Après le petit, t’es le gay le plus coincé que je connaisse.
- Comme si tu en connaissais tant…
- Tu serais étonné… Je te rappelle que depuis que je connais Nico, c’est moi qui monte les dossiers et qui fais passer les screenings des mecs qui… potentiellement…
- Hmmm, OK, on ne serait toujours pas très loin, tous les deux, si tu n’avais pas deviné que j’étais… potentiellement…
- Deviné ? T’étais au fond d’un auditoire à mater deux mecs qui s’enculent sur ton ordi, il y avait anguille sous roche… Et même baleine sous gravillons, Jérémie. On finit toujours par se dévoiler, ça devait t’arriver tôt ou tard, il n’y a pas de hasard, juste le destin, cruel et inéluctable…

Plus tard, en sortant de la salle de bain, en boxer, j’ai réfléchi aux derniers mots de Lucrezia, sur sa théorie un peu fumeuse... Je n’aime pas trop l’idée d’un destin prédéterminé, d’ailleurs par qui - ou quoi - le serait-il ? Ça obligerait à admettre, selon les différentes philosophies, l’existence d’une divinité, d’un grand architecte de l’univers, ou simplement d’un ‘principe’ qui régirait les destinées… La trajectoire des planètes ou les éruptions d’un geyser sont prévisibles, car ce sont des événements simplement mécaniques, mais ajoutez un élément aussi déraisonnable que l’humain dans l’équation et elle devient caduque.

Non, décidément, j’étais bien plus à l’aise avec la notion de hasard, justement, puis de conjonction de circonstances. Si Nicolas n’avait pas connu Lucrezia, il aurait été sagement assis aux premiers rangs de l’auditoire. Si mon ordi n’avait été qu’un 14’’ et si je n’avais pas poussé l’image en full screen… Si l’imagination délirante de Marc n’avait pas – par le jeu du montage – permis ce qui semble être un fantasme pour pas mal de gays… Et même si la curiosité les aurait peut-être fait tout de même franchir les quelques mètres qui nous séparaient, une bête vidéo porn n’aurait pas spécialement capté l’attention du blondinet, ni par ricochet, provoqué notre improbable rencontre du troisième type… Nous ne serions pas ici, et je n’aurais pas la main posée sur la poignée de cette porte qui va s’ouvrir, je le sais, du moins je l’espère très fort, sur le sourire de Nicolas.

(…)

J’aurais aimé plus que ses lèvres aux coins légèrement relevés sur lesquelles j’ai déposé un baiser léger, j’aurais voulu dévorer son corps, qu’il m’aime ou que je l’aime, peu aurait importé… Sauf que voilà, autant Nicolas est aussi discret que concentré lorsqu’il me possède, autant je ne peux retenir mes gémissements pas toujours élégants. Et dans la configuration inverse, même si je ne lui ai encore fait plaisir que de la bouche et du doigt, les petits bruits qui lui avaient échappé, et que j’avais trouvés diablement excitants… Donc, pour cette nuit, juste collés… Oui, ce sera déjà ça.

Il a murmuré "Merci, je ne m’y attendais pas du tout… Que tu aies arrangé ça pour moi, c’était… juste… merveilleux ! Je veux dire, c'est merveilleux... Tout, quoi... Je suis bien ici, pas d'angoisses... C'est juste parfait"

- Je ferais plein de trucs pour toi, tu sais. Juste pour te mettre un sourire chaque jour, déjà.
- Tu me mets bien plus qu’un… Il s’est interrompu, réalisant son lapsus ‘’Je veux dire, tu fais déjà beaucoup…’’
- Ah ? Je te mets bien plus ?
- Roooh, c’est pas ce que je… a-t-il chouiné en rougissant ‘’Sinon, c’est qui, Kyrill ?’’
- Hmmm… Manu est trop bavard. C’est juste l’un de mes nooombreux ex et… Nan, je rigole ! C’était juste un garçon de Kiev, quand on avait… huit ans, par là… même trente ans après Tchernobyl, il avait dû venir suivre un traitement pour la thyroïde au CHU, puis un mois en famille d’accueil chez Manu et Rachel. Ensuite, il est revenu chaque année jusqu’il y a cinq ans passer le mois de juillet… pour l’air pur de nos Ardennes, évidemment. Manu lui a fait découvrir la faune locale, puis Kyrill a continué ses observations seul, en se focalisant sur une espèce en particulier.
- Les renards ? a-t-il demandé avec un sourire enfantin.
- N…ooon, les… humains.
- Oh ! Et là, il va revenir avec son copain, alors ? Il était comment, physiquement ? Il était déjà gay il y a cinq ans ?
- Mince, même fluet, ai-je soufflé en posant la main sur son torse, ‘’puis blond’’, j’ai passé les doigts dans ses mèches claires, ‘’des iris d’un bleu que je n’avais jamais vu avant’’, j’ai fait glisser mon index sous son œil droit, ‘’une couleur que je n’ai retrouvée qu’il y a quinze jours, et qui semble ne rien devoir à la radioactivité, finalement… Puis gay, on en a conscience bien avant ça, je me dis… La sixième année, un matin, je me séchais après ma douche et j’ai vu un grand sourire à la fenêtre, puis une paire d’yeux calés sur… Euh… Tu savais qu’en ukrainien, pénis se prononce… pénis ?
- Vous n’avez pas échangé que du vocabulaire, j’imagine.
- Principalement, oui… Le reste, ça n’a jamais vraiment trop dépassé le… touche-pipi assez innocent, au final.
- Jamais… vraiment… trop… dépassé…
- Nicolaaas, je dois quand même pas me justifier de quelques pipes maladroites que j’ai faites il y a huit ans, c’est un peu embarrassant, là.
- Je peux bien t’aider à dissiper ta gêne, a-t-il murmuré avec un sourire faussement lubrique, avant de me pousser sur mon lit et de grimper sur moi à quatre pattes. ‘’Il t’a fait ça, Kyrill’’ a-t-il soufflé dans mon cou avant d’y déposer un chapelet de petits bisous… ‘’Et ça ?’’ Sa langue qui glisse sur mon sternum et descend jusqu’à mon nombril où il l’a écrasée... ‘’Puis ça ?’’ Ses doigts qui font glisser mon boxer… ‘’Et enfin ça ?’’…
- Maieuuuh ! Qui êtes-vous, et qu’avez-vous fait de Nicolas ?
- H’est houjours hoi, hurement l’air hur he hos Arhennes…